MISE AU POINT Progrès en Urologie (1998), 8, 590-592 Recommandations pour le diagnostic, le traitement et le suivi du cancer de vessie Bernard LOBEL France, Claude-Clément ABBOU France, M.A. BRAUSI Italie, R.C. FLANIGAN USA, S. KAMEYAMA Japon, H.I. SCHER USA, J.M. CAFFREY USA, M. TACHIBANA Japon RECOMMANDATIONS : POURQUOI ET COMMENT? - tumeur de risque intermédiaire : TaG2, Ta multifocale, Ta 3 à 5 cm. The Clinical Practice Guidelines (CPG) sont habituellement définis comme «des principes reconnus développés systématiquement pour aider le praticien et le patient dans sa prise de décision pour des soins appropriés dans des circonstances spécifiques». Ces recommandations doivent être innovantes dans le but de stimuler l’amélioration des soins dans leur qualité et dans leur réalité économique. Les facteurs de risque pour la récidive et la progression incluent : le grade tumoral, le stade de la tumeur, la taille de la tumeur (> à 5 cm), la multifocalité et l’intervalle entre les récidives. INTRODUCTION L’incidence du cancer de la vessie est en augmentation dans les pays industrialisés et notamment en Europe de l’ouest. En 1996, 53.000 patients ont été traités pour une tumeur de vessie aux USA, 9.000 en France, 2.000 en Suède. Approximativement, 75 à 80% des patients présentent une maladie limitée à la muqueuse (stade Ta Tis) ou la sous-muqueuse (stade T1). Les autres 15 à 25% ont une infiltration musculaire ou des ganglions envahis (stade D2-T4 N+) au moment du diagnostic. STADE - GRADE ET CLASSIFICATION DES TUMEURS DE VESSIE La classification TNM 1997 est publiée et diffère de celle de 1992 : le stade T2 comprend maintenant toute l’infiltration musculaire (T2a superficiel, T2b profond). La classification histologique des tumeurs de vessie recommandée par le HO est toujours utilisée. Les tumeurs de vessie sont considérées comme superficielles (Tis - Ta - T1) ou infiltrantes (T2 - T3 - T4) après l’examen clinique, l’imagerie, la résection transuréthrale de vessie (RTUV) et l’histopathologie. Pour l’urologue, discuter les coupes histologiques avec son pathologiste est hautement recommandé pour améliorer la pertinence du traitement. RECOMMANDATIONS CONCERNANT LE DIAGNOSTIC PRECOCE ET LE DEPISTAGE DES TUMEURS DE VESSIE Le diagnostic précoce d’une tumeur vésicale est une clé pour un meilleur pronostic. Un programme d’information pour la population et les praticiens de ville a été mis en place en Grande-Bretagne et en Suède pour améliorer la prise en charge des hématuries en réduisant leur temps d’exploration. Tous les patients avec une hématurie macroscopique, comme ceux associant une hématurie microscopique et des troubles mictionnels doivent être examinés en urgence et adressés à un urologue pour le diagnostic de leur affection. L’attitude devant une hématurie microscopique isolée est moins claire, sauf chez les patients de plus de 50 ans chez lesquels une hématurie microscopique évidente et récente doit être explorée comme une hématurie macroscopique. Le dépistage de masse pour les hématuries microscopiques asymptomatiques n’est pas recommandé. Cependant, ce dépistage se justifie dans les populations exposées aux carcinogènes vésicaux incluant les grands fumeurs. RECOMMANDATIONS POUR LE DIAGNOSTIC INITIAL Examens nécessaires Examen clinique (incluant le toucher rectal et le palper abdominal). Les tumeurs superficielles de vessie sont classées selon leur risque de récidive et de progression en : Fifth International Consensus Meeting in Bladder Cancer, 6-8 novembre 1997, Tokyo, Japan. (EORTC Genito-Urinary Group, The Japanese Urological Association, Society of Urologic Oncology - USA). - tumeur de bas risque : TaG1 unifocale; Reçu : juillet 1998, accepté : août 1998. - tumeur de haut risque : T1G3, T1 multifocale ou récidivante, CIS tumeur de plus de 5 cm; Adresse pour correspondance : Pr. B. Lobel, Service d’Urologie, CHRU de Rennes, rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex. 590 B. Lobel et coll., Progrès en Urologie (1998), 8, 590-592 Urographie intraveineuse ou/et échographie des reins et de la vessie. - dans les cas rares où les tumeurs de vessie sont symptomatiques, douloureuses, diffuses et non réséquables. Cystoscopie avec description de la tumeur : site, taille, apparence (un schéma de la vessie peut être inclus). Tumeurs infiltrantes (T2-T4) Cytologie urinaire. T1-T4a Examens optionnels - la cystectomie est le traitement curatif standard si la tumeur est limitée à la paroi musculaire de la vessie ou son voisinage; Biopsie randomisée de la vessie. Scanner ou IRM (abdomen et pelvis) si la tumeur est de stade T1 ou infiltrante. Cytométrie de flux. - le curage ganglionnaire ou le prélèvement de ganglions peut être raisonnablement combiné à la cystectomie. Il permet une stadification appropriée. Si les ganglions sont envahis, un traitement chimiothérapique adjuvant peut être proposé; Les marqueurs tumoraux comme le BTA test, NMP 22, P53, Ki67, etc. sont toujours en évaluation. - les options de reconstruction vésicale de dérivation urinaire continente et l’intervention de Bricker seront proposées et discutées avec le patient; Quand la tumeur vésicale infiltre le muscle et que la chirurgie est indiquée, il importe de réaliser : - la radiothérapie seule, bien que considérée moins efficace que la cystectomie, est un traitement possible pour certains patients incluant ceux qui ne sont pas candidats à la chirurgie; - radio pulmonaire; - urographie intraveineuse et/ou scanner abdomino pelvien. Dans ce cas, une échographie du foie et un scanner osseux, s’il existe des symptômes ou des phosphatases élevées, sont licites. RECOMMANDATIONS POUR LE TRAITEMENT Ces recommandations diffèrent selon que la tumeur est superficielle ou infiltrante. - d’autres traitements comme la radiothérapie associée à la cystectomie, la chimiothérapie avec résection de la tumeur ou la chimiothérapie combinée à la radiothérapie (technique conservatrice) sont en cours d’évaluation. Ces traitements seront proposés seulement dans le cadre d’essais thérapeutiques. T4b Tumeur superficielle de vessie (Ta-1-Tis) Dérivation urinaire, radiothérapie palliative et chimiothérapie seule ou en combinaison avec une cystectomie de sauvetage sont proposées. Le traitement est conservateur Métastases - Tumeur de bas risque : résection transuréthrale complète de la tumeur avec ou sans une instillation unique de chimiothérapie. Chimiothérapie palliative systémique ou radiothérapie locale est utilisée. - Tumeur de haut risque : résection transuréthrale complète et instillation de BCG avec traitement d’entretien (la chimiothérapie intravésicale peut être utile chez certains patients : mitomycine C - Rubicine...). - Tumeur de risque intermédiaire : résection transuréthrale complète et thérapie intravésicale adjuvante basée sur les facteurs pronostiques de la tumeur. Pour tous les patients, l’exposition aux toxiques et spécialement à la cigarette doit être découragée. Le traitement radical pour les tumeurs de vessie superficielles s’impose si : - la récidive survient rapidement après le traitement par BCG (ou chimiothérapie) (< à 1 an) ou lorsqu’elle survient sous la forme d’une tumeur à haut risque (T1 G3) ou en cas de carcinome in situ résistant. Tumeurs rares La cystectomie sera utilisée dans les tumeurs de type squameux et dans les adénocarcinomes, mais la radiothérapie ou la chimiothérapie systémique peut être aussi proposée. Le rhabdomyosarcome de l’enfant sera traité dans des unités pédiatriques spécialisées. RECOMMANDATIONS POUR LE SUIVI Le suivi sera différent selon que la tumeur est superficielle et la vessie en place ou que la tumeur est infiltrante (et qu’une cystectomie a été réalisée avec remplacement ou dérivation urinaire). Tumeur superficielle Les moyens du suivi comprennent la cytoscopie, 591 B. Lobel et coll., Progrès en Urologie (1998), 8, 590-592 l’échographie, l’urographie intraveineuse et la cytologie urinaire. Les tests biologiques comme le BTA test, la DNA cytométrie, le NMP22, l’analyse d’images en fluorescence et les anticorps monoclonaux sont en cours d’évaluation. Tumeur de risque intermédiaire La cystoscopie sera réalisée tous les 3 mois la première année, tous les 6 mois les 3 ans suivants et annuellement pour 10 ans. Le haut appareil urinaire sera évalué en cas de récidive dans la vessie. Le suivi doit être adapté au risque de récidive et de progression et doit pouvoir anticiper la progression. Tumeur infiltrante Après cystectomie et remplacement de vessie ou dérivation urinaire, une évaluation régulière du haut appareil urinaire doit être réalisée pour apprécier la récidive du cancer, la fonction rénale et éviter toute obstruction. Le remplacement vésical est exploré en cas de symptômes. Les patients doivent être informés des risques de pyélonéphrite, de lithiase et de dilatation du haut appareil urinaire. Tumeur de bas risque Une surveillance cyst oscopique régulière est recommandée à 3 mois et tous les 6 à 12 mois pour 3 ans. Après une période de 3 ans sans récidive, le suivi par cystoscopie, cytologie urinaire et/ ou échographie est recommandé chaque année pour 10 ans. Tumeur de haut risque La possibilité d’une progression ou de métastases hors de l’appareil urinaire doit être appréciée. L’examen clinique, l’urographie intraveineuse, l’échographie, l’ECBU, les examens sanguins incluant la créatinine et les radios pulmonaires seront réalisés 2 - 3 mois après la cystectomie. Un suivi est planifié tous les 6 mois pour 2 ans, puis tous les ans pour 10 ans, utilisant périodiquement l’imagerie. Le traitement i ntravésical (immuno ou chimi othérapie) a démontré son efficacité. La cystoscopie est réalisée après 3 mois et à 3 mois d’i ntervalle pour un minimum d’1 année, à 6 mois d’intervalle pour 5 ans et tous les ans pour le reste de la vie du patient. Les tumeurs du haut appareil uri naire seront recherchées p é r i o d i q u e m e n t . U ne urographi e intraveineuse annuelle est habituell e pour ces pati ents à haut risque. Cystoscopie, cytologie et lavage uréthral peuvent être utilisés pour apprécier l’urèthre et la dérivation urinaire. ____________________ 592