Un moment de valse dans une
salle d’attente « Quand je dirai
à mon mari que j’ai dansé à
l’hôpital, avec un jeune en plus,
il va halluciner ! »
Une dame assise attend son
tour : « caressez mon genou, il
me fait mal ! ».
Une autre, bien apprêtée, glisse
un œil dubitatif sur les deux ar-
tistes installés dans des
positions renversantes, tour-
billonnant entre les chaises. Ses
yeux ne suivent pas les mouve-
ments quelque peu déplacés en
ces lieux… cependant quelques
instants plus tard « Il est passé
le Docteur ? je ne l’ai pas vu…
Si si il est déjà passé 2 fois de-
vant vous ! ».
Heureusement l’affichette qui
annonce l’intervention dansée
rassure, recadre, soulage :
Ah ce ne sont donc pas deux
patients qui ont « pété un
câble » !
Un jeune garçon s’élance avec
un beau naturel dans les pas de
la danseuse qui l’invite le long
des couloirs, rythme électro et
sourires se propagent…
Parfois juste une douce danse
au violon, ensemble du bout
des bras… une plume offerte du
bout du souffle.
Quand la salle est invitée à
fermer les yeux pour écou-
ter le son du Udu de Ma-
thieu, le marchand de
sable, Anne-Cécile Chane-
Tune dépose quelques
plumes sur le sommet des
crânes, glisse une légère ca-
resse, un contact amical…
quand les yeux se rouvrent, un
cercle insolite de patients en
consultation se révèle sous les
plumes rouges et blanches, le
regard rêveur. Une émotion
palpable aussi en ces lieux
d’inquiétude.
Dans le grand hall en bas 8
danseurs et danseuses ont
préparé avec Lise Casazza
des séquences marchées et
dansées. La musique com-
mence et ils se lèvent aux qua-
tre coins, déposent leurs
chaussures, marchent, s’élan-
cent, croisent et recroisent les
gens qui attendent ou passent,
entrent, sortent de l’hôpital, un
curieux sourire aux lèvres.
Chassés-croisés de jambes, de
bras et de regards, le hall se co-
lore d’une vie corporelle nou-
velle, un élan de permissivité !
Il y a ceux qui regardent ailleurs
avec concentration, ceux qui
applaudissent, « Excellent ! »
« Trop bien ! ». Et même un
tour dehors pour tous ceux qui
prennent le frais soleil du jour.
L’idée même de cette invasion
de vie dansée et de musique
surprend et réjouit, tout en dé-
routant un peu l’itinéraire habi-
tuel.