L la vie après un cancer du sein : contraception et ménopause

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DOSSIER THÉMATIQUE
Penser sa féminité après un cancer du sein
la vie après un cancer du sein :
contraception et ménopause
Life after breast cancer: contraception and menopause
S. Brugère*
L
’incidence du cancer du sein a considérablement
augmenté ces dernières années pour atteindre
presque 50 000 nouveaux cas par an.
Le cancer du sein reste la première cause de mortalité
par cancer chez la femme, mais les progrès notables
des traitements permettent à un nombre croissant de
patientes une survie sans rechute. Dix pour cent des
cancers touchent des femmes de moins de 40 ans. Après
un certain délai post-rémission du cancer, la grossesse
peut maintenant être envisagée ; de ce fait, la recherche
d’une contraception réversible, fiable et adaptée est
une situation clinique fréquente.
La contraception non hormonale aura toujours la préférence du clinicien, mais, dans certains cas très ciblés, la
contraception progestative pourra rendre des services.
De nombreuses femmes subissent des séquelles thérapeutiques, dont la ménopause induite par la chimiothérapie est l’une des plus pénible.
Quant aux femmes déjà ménopausées au moment
du diagnostic, elles recevaient parfois un traitement
hormonal de la ménopause (THM) pour pallier leurs
symptômes gênants.
Trouver des solutions alternatives pour s’opposer aux
effets de la carence hormonale à court terme (bouffées
vasomotrices, etc.) et à long terme, particulièrement à
l’ostéoporose majorée par certains traitements (antiaromatases) est un enjeu majeur de la qualité de la
survie de ces patientes.
Prise en charge de la demande
contraceptive
* Gynécologue-endocrinologue,
ancien chef de clinique assistant du
CHU de Bordeaux, 35, rue Turenne,
33000 Bordeaux.
En France, environ 25 % des nouveaux cas de cancers du
sein se déclarent avant 50 ans. Environ 10 % de ces cas
concerneront des femmes de moins de 40 ans.
Pour elles, la fonction ovarienne sera souvent préservée.
L’insuffisance ovarienne induite par la chimiothérapie
dépend du type d’agent cytotoxique, de la dose utilisée
et de l’âge des patientes (1).
14 | La Lettre du Sénologue • n° 47 - janvier-février-mars 2010
Plus la femme est jeune, moins l’insuffisance ovarienne
sera sévère et plus elle sera réversible. Les protocoles
comportant de fortes doses de cyclophosphamide induisent en général une insuffisance ovarienne sévère, en
particulier si la patiente a 40 ans ou plus. Les protocoles
à bases d’anthracyclines sont moins ovariotoxiques.
Les données sur les conséquences des nouvelles molécules (taxanes) et sur l’adjonction d’anticorps monoclonaux (trastuzumab) sont contradictoires ou non
connues. Le traitement par tamoxifène n’induit pas
d’altération de la fertilité, mais le caractère tératogène
de cette molécule chez l’animal impose des mesures
contraceptives pendant son administration.
Dans certains cas, la patiente ou son compagnon vont
souhaiter avoir recours à une méthode de stérilisation
définitive. Cependant, comme l’âge moyen des femmes
au moment de la première grossesse (30 ans actuellement) avance, de plus en plus de femmes et de couples
vont souhaiter conserver leur potentiel de procréation.
Et en dehors de toute pathologie, les femmes de plus de
35 ans constituent globalement 20 % des utilisatrices
de contraception en France (2).
La grossesse après un cancer du sein était interdite
jusqu’aux années 1970 ; actuellement, elle n’est plus
contre-indiquée, mais elle doit être programmée “au
bon moment” : ni trop tôt par rapport au traitement
du cancer et à l’évaluation du risque de rechute, ni
trop tard pour ne pas compromettre les chances de
grossesse par l’effet du temps qui passe et qui altère
les capacités de reproduction.
La contraception doit donc être fiable, au maximum
dénuée d’effets indésirables, et surtout ne pas ajouter
de facteur aggravant pour le risque de rechute du cancer.
L’OMS distingue quatre catégories de situation en
fonction de l’état de la patiente comprenant ses
caractéristiques individuelles ou une pathologie
préexistante connue :
– catégorie 1 : état où l’utilisation de la méthode n’appelle aucune restriction ;
– catégorie 2 : état où les avantages de la méthode
Résumé
Mots-clés
Les avancées thérapeutiques en matière de cancer du sein permettent une survie sans rechute à de nombreuses
patientes atteintes de cette pathologie très fréquente.
La qualité de cette survie sera d’autant plus satisfaisante que les problèmes de contraception et de prise
en charge des symptômes de la ménopause trouveront une solution adéquate, l’enjeu étant que le confort
acquis ne vienne bien entendu pas menacer l’évolution de la pathologie cancéreuse.
Traitements du cancer
du sein
Contraception
Troubles de la
ménopause
contraceptive l’emportent généralement sur les risques
théoriques ou avérés ;
– catégorie 3 : état où les risques théoriques ou avérés
l’emportent généralement sur les avantages procurés
par l’utilisation de la méthode ;
– catégorie 4 : état équivalent à un risque inacceptable pour la santé en cas d’utilisation de la méthode
contraceptive.
En cas de cancer du sein traité, la première méthode
envisagée sera une contraception non hormonale. La
contraception dite “barrière” est considérée comme
insuffisante du point de vue de l’efficacité. L’efficacité
d’une contraception est habituellement mesurée par
l’indice de Pearl (rapport du nombre de grossesses sur
le nombre total de cycles observés pour l’ensemble
des femmes étudiées rapporté à 1 an, soit nombre de
grossesses x 1 200/nombre de mois de l’étude) ; plus ce
chiffre est proche de 0, plus la contraception est efficace.
Pour les préservatifs, l’indice de Pearl est à 3 en utilisation optimale et à 14 en pratique courante. Quant
aux spermicides, cet indice de 6 en utilisation optimale
s’élève à 20 en pratique courante. L’efficacité optimale
est celle obtenue lors des essais thérapeutiques, par
opposition à ce qui est réellement observé en clinique.
Ces faibles taux d’efficacité sont peu satisfaisants
et la contraception de barrière est fréquemment
mal acceptée au long cours, créant des contraintes
supplémentaires pour une sexualité déjà mise à mal
par l’épreuve de la maladie et de ses traitements.
Certains couples préféreront une méthode dite “naturelle” fondée sur l’étude de la courbe thermique et de la
glaire cervicale, mais l’indice de Pearl est défavorable : 1
à 9 en utilisation optimale et 20 en pratique courante.
Le stérilet au cuivre est souvent le recours choisi,
grâce à son efficacité satisfaisante (indice de Pearl
entre 0,6 et 0,8).
Les restrictions d’utilisation concernant les nullipares
étaient fondées sur les risques infectieux supposés ; il
semble en fait que les complications infectieuses soient
rares : le moment de la pose est une période critique et
la présence du stérilet augmente la gravité des infections
sexuellement transmises, mais dans des proportions
moindres que ce que l’on craignait.
Les stérilets de petite taille, dont le dispositif d’insertion
est plus fin et plus souple, rendent la pose plus facile
chez la patiente qui n’a jamais été enceinte.
La pose peut cependant être encore mal vécue, doulou-
reuse, voire avec un malaise vagal atteignant 3,5 % des
cas chez les nullipares, nécessitant parfois le recours à
une anesthésie locale, voire générale.
Le stérilet au cuivre chez la nullipare est classé en catégorie 2 par l’OMS, ce qui signifie que cette méthode est
utilisable de manière générale, les bénéfices l’emportant
la plupart du temps sur les risques théoriques ou avérés.
Une fois posé, le stérilet au cuivre est parfois mal
toléré du fait de douleurs ou de ménorragies qui sont
responsables d’une anémie, facteur supplémentaire
de fatigue chez une patiente déjà bousculée et affaiblie par la maladie et les traitements, obligeant alors
à retirer le stérilet. Une contraception hormonale
pourrait être utile dans ce cas.
La pilule contraceptive estroprogestative est contreindiquée formellement du fait du rôle clairement admis
des estrogènes dans la carcinogenèse mammaire.
Compte tenu de ce présupposé, aucune étude directe ne
montre que l’association éthynilestradiol et progestatif
soit délétère. Les arguments justifiant cette contreindication sont indirects (3).
Les études portent sur le risque de survenue ducancer
du sein en fonction du type de contraception utilisée
dans la population générale, ou sur le risque de cancer
du sein dans les populations à risque porteuses d’une
mutation BRCA1 ou BRCA2, ou sur l’effet de l’administration d’une contraception à une femme dont la mère
ou la sœur a eu un cancer du sein. Tous ces arguments
vont dans le sens d’une discrète augmentation du risque
relatif (RR : 1,07 à 1,11) selon la dose d’éthynilestradiol
utilisé et la durée de prise. Cela n’incite évidemment
pas à administrer des estroprogestatifs à une femme
déjà traitée pour un cancer du sein.
Certains arguments pourraient en revanche nous faire
réviser l’interdit de toute contraception hormonale chez
une femme traitée pour un cancer du sein, en autorisant
l’utilisation des progestatifs sous certaines formes et
dans des circonstances particulières, sous réserve d’une
décision collégiale et d’un consentement éclairé de la
patiente. Sur un plan théorique, les données in vitro
montrent que l’hormone de croissance et le facteur de
croissance insulinomimétique de type 1 (IGF1) favorisent
la prolifération du tissu mammaire (4).
Une étude a montré que la progestérone pouvait
entraîner la sécrétion de ces facteurs de croissance à
partir d’explants de cancer du sein in vitro, et ce même
en l’absence de récepteurs à la progestérone.
Keywords
Breast cancer
Contraception
Menopause
La Lettre du Sénologue • n° 47 - janvier-février-mars 2010 | 15
DOSSIER THÉMATIQUE
Penser sa féminité après un cancer du sein
En revanche, les progestatifs synthétiques ont exercé
des effets variables sur ces facteurs de croissance et
selon le type de récepteurs hormonaux portés par les
lignées cellulaires. Ces effets sont donc complexes
et la compréhension de ces phénomènes est incomplète, ce qui explique l’absence de consensus à ce
sujet ; les études réalisées chez l’animal renforcent
cette impression.
En pratique clinique générale, on emploie les microprogestatifs (noréthistérone, lévonorgestrel et
désogestrel), le stérilet au lévonorgestrel DIU LNG,
l’implant sous-cutané, les macroprogestatifs à doses
antigonadotropes ou encore l’acétate de médroxyprogestérone retard par voie injectable.
Les microprogestatifs en utilisation quotidienne
restent peu utilisés dans la population générale, seules
5 à 15 % des femmes rapportant une utilisation au
cours de leur vie en Europe du Nord. Cela est vraisemblablement dû à une tolérance assez médiocre. De ce
fait, peu d’études ont analysé leur impact potentiel
sur le risque de cancer du sein.
La méta-analyse d’Oxford, une étude norvégienne
(NOWAC) [5] et une étude suédoise et norvégienne
(The Swedish Women’s Lifestyle and Health Cohort Study)
montrent des risques comparables à ceux observés avec
les pilules classiques estroprogestatives. L’interprétation
de ces résultats doit être prudente compte tenu des
faibles effectifs étudiés. Cependant, ces conclusions
paraissent logiques car l’absence d’effet antigonadotrope des doses utilisées explique que ces patientes
présentent souvent des taux d’estradiol plasmatique
supraphysiologiques. Cela est corroboré par la constatation clinique ou échographique de dystrophies
ovariennes avec follicules persistants qui produisent
de l’estradiol. Leur utilisation après un cancer du sein
sera donc déconseillée.
La contraception progestative peut également être
proposée sous forme d’implant sous-cutané.
En France, l’implant commercialisé contient de l’étonogestrel (métabolite actif du désogestrel). Aucune étude
épidémiologique n’a analysé le risque de cancer du sein
lors de l’exposition à ce produit.Les études concernant
l’implant au lévonorgestrel commercialisé dans les pays
anglo-saxons étant de très faible puissance statistique
et se révélant contradictoires, elles doivent conduire à
la plus grande prudence vis-à-vis de l’utilisation de ce
type de contraception chez les femmes antérieurement
traitées pour un cancer du sein.
L’utilisation d’un stérilet au lévonorgestrel DIU LNG
est longuement discutée depuis plusieurs années chez
les femmes avec un antécédent de cancer du sein (6).
L’OMS classe l’utilisation du DIU LNG en catégorie 4
chez les femmes ayant un cancer du sein en évolution
16 | La Lettre du Sénologue • n° 47 - janvier-février-mars 2010
ou en cours de traitement, et en catégorie 3 chez les
femmes n’ayant plus de cancer depuis plus de 5 ans.
Les recommandations françaises parues en 2004 sous
l’égide de l’Afssaps vont également dans ce sens.
Le DIU LNG libère de faibles quantités de progestatif (20
µg de lévonorgestrel par jour) ; les taux plasmatiques
observés varient selon les individus et décroissent avec
le temps, mais ils ne sont pas très différents de ceux
observés avec la micropilule au lévonorgestrel.
Vingt pour cent des patientes sous DIU LNG sont
porteuses de kystes fonctionnels susceptibles de
sécréter de l’estradiol pouvant réactiver l’évolution
d’un cancer du sein hormonodépendant. Les réserves
vis-à-vis du DIU LNG sont donc semblables à celles
émises envers la contraception microprogestative.
Cependant, une étude publiée dans Fertility and Sterility
en septembre 2008 ne montre pas d’augmentation
des récidives de cancer du sein lorsqu’il y a utilisation
d’un DIU LNG (7).
Seul un sous-groupe de patientes utilisant le DIU LNG
au moment du diagnostic et continuant à l’utiliser
ensuite présente une discrète augmentation du risque,
à la limite de la significativité sur le plan statistique,
par rapport à l’autre sous-groupe qui n’a commencé à
utiliser le DIU LNG qu’après le traitement du cancer. Le
premier groupe présente cependant un envahissement
ganglionnaire au moment du diagnostic plus fréquent
que le second, ce qui peut constituer un biais. Cette
étude porte sur un assez faible nombre de cas (79 cas
étudiés par rapport à 120 témoins) et les auteurs précisent clairement que d’autres études sont nécessaires
pour confirmer ou infirmer ces résultats.
L’enjeu est d’importance car, alors que la contraception microprogestative est peu utilisée du fait de sa
fréquente mauvaise tolérance, le DIU LNG est un vrai
progrès pour les femmes qui apprécient la diminution
du volume des règles, voire leur disparition complète
avec ce mode de contraception peu contraignant
par ailleurs. De plus, de nombreux auteurs se sont
demandés si l’effet local du lévonorgestrel libéré par
ce DIU ne pourrait pas contre-balancer les effets délétères du tamoxifène sur l’endomètre.
Un seul essai randomisé, portant sur un petit nombre de
patientes étudiées sur un an seulement, a montré que
le DIU LNG peut s’opposer aux modifications bénignes
de l’endomètre ; mais aucune étude ne prouve de façon
validée que le DIU au LNG puisse contre-balancer les
effets carcinogènes du tamoxifène sur l’endomètre.
De nombreuses incertitudes persistent sur l’impact
systémique du passage plasmatique du LNG, et l’utilisation du DIU LNG par les patientes ayant présenté
un cancer du sein semble devoir être réservée à celles
qui ne tolèrent réellement pas un DIU au cuivre bien
DOSSIER THÉMATIQUE
adapté à la cavité utérine, toujours après concertation
multidisciplinaire et avis éclairé de la patiente.
L’utilisation de progestatifs par voie orale à dose antigonadotrope en contraception est une spécialité bien
française. Cette contraception, souvent bien mieux
tolérée que les microprogestatifs, en fait une alternative intéressante dans la population générale lors des
contre-indications, en particulier métaboliques, des
estroprogestatifs. De plus, s’il existe une mastopathie
bénigne, la correction d’un déséquilibre hormonal –
insuffisance en progestérone et hyperestrogénie relative
– impliqué dans la genèse de cette pathologie du sein
peut également avoir un intérêt certain.
Dans les années 1970, il était fréquent d’utiliser les
progestatifs, en particulier les dérivés de la nortestostérone en prévention du risque de cancer du sein.
Une étude de cohorte, initiée à la fin des années 1970
à partir des consultations de sénologie de deux centres
(hôpital Necker et institut Gustave-Roussy), a inclus
1 150 femmes présentant des mastopathies bénignes
ou des mastodynies essentielles (8). Dix ans plus tard,
les premiers résultats montraient que l’utilisation de
dérivés de la nortestostérone à doses antigonadotropes
était associée à une diminution du risque de cancer du
sein. L’emploi d’autres progestatifs dans les mêmes
conditions n’entraîne pas de modification du risque.
Ce suivi se poursuit à 20 ans et l’analyse des premiers
résultats confirme cette tendance.
Il s’agit bien entendu d’une étude épidémiologique d’observation dont les résultats gagneraient à être confirmés
par des essais randomisés, extrêmement difficiles à
réaliser sur d’aussi longues périodes, pourtant nécessaires du fait du délai de la carcinogenèse mammaire.
Les résultats de l’étude E3N (9) sont en apparente
contradiction avec les résultats précédents. Pendant
9 ans, 73 664 femmes âgées de 40 à 50 ans ont répondu
à des autoquestionnaires sur l’utilisation des thérapeutiques hormonales et les pathologies associées.
Globalement, l’usage de progestatifs n’est pas associé au
risque de cancer du sein, mais plus la durée d’utilisation
est longue, plus le risque augmente pour atteindre 1,13
pour une durée d’utilisation supérieure à 4,5 ans (p =
tendance 0,012).
Pour les femmes déjà sous progestatif au moment
du diagnostic, le risque de cancer du sein est de 1,44
(IC95 : 1,03-2,00) pour le sous-groupe dont le traitement
progestatif dure plus de 4,5 ans.
Ces deux études sont difficilement comparables, car
les doses et les durées d’utilisation de progestatifs par
cycles ne sont pas connues dans l’essai E3N (pas de
notion d’effet antigonadotrope ou non). De plus, le
niveau de risque de base des deux populations n’est
pas identique et l’histoire antérieure des patientes de
l’étude E3N n’est pas connue, pas plus que l’indication
du traitement progestatif, ce qui peut induire un biais
de sélection.
Les hypothèses actuellement discutées pour expliquer
ces différences portent sur les susceptibilités individuelles au cancer du sein (polymorphismes) ou la détermination génétique de la structure des récepteurs aux
androgènes.
En l’absence d’études randomisées, les progestatifs per
os à dose antigonadotrope ne peuvent cependant pas
être acceptés comme contraception en cas d’antécédent
de cancer du sein.
Paradoxalement, le produit le plus étudié est le MPA
retard, un acétate de médroxyprogestérone administré
à dose antigonadotrope par voie intramusculaire, le
produit le moins prescrit.
Sur quatre études réalisées, trois études (méta-analyse
d’Oxford, étude de Shapiro portant sur des femmes
sud-africaines, importantes utilisatrices de ce type de
contraception mais à faible risque de cancer du sein, et
étude Care, portant sur des femmes américaines), n’ont
montré aucune augmentation du risque de cancer du
sein avec ce type de contraception, cependant assez
peu utilisée et indiquée surtout chez des femmes ne
pouvant pas s’astreindre à la prise quotidienne d’un
comprimé, du fait d’une tolérance plutôt médiocre.
Seule la 4 Corners Study, une étude cas-témoins
récente, a montré une discrète augmentation du risque
dans un seul sous-groupe de femmes utilisant ce type
de contraception pour la première fois après l’âge de
35 ans (OR : 1,98 ; IC95 : 1,12-3,52), ce risque disparaissant 5 ans après la dernière prise.
Par ailleurs, il semble que le MPA retard entraîne une
diminution de la densité mammographique ; cela peut
être intéressant, car la hausse de densité mammographique complique le dépistage en augmentant le taux
de faux négatifs mais est aussi associée à une prolifération mammaire accrue qui peut refléter une hausse
du risque de cancer du sein.
Dans certains cas, les effets du MPA retard pourraient
peut-être lui conférer des avantages qui l’emporteraient
sur les risques potentiels.
En résumé, dans la mesure du possible, une contraception non hormonale doit être préférée chez la femme
qui a été traitée pour un cancer du sein, le stérilet au
cuivre restant la méthode de choix.
Si cette solution est vraiment mal tolérée, un contraceptif hormonal peut être envisagé, avec une grande
prudence. Les estroprogestatifs restent totalement
contre-indiqués.
En ce qui concerne les progestatifs, les formes orales
ne paraissent pas très intéressantes, encore qu’il faille
distinguer les microprogestatifs, mal tolérés et sans
La Lettre du Sénologue • n° 47 - janvier-février-mars 2010 | 17
DOSSIER THÉMATIQUE
Penser sa féminité après un cancer du sein
réels bénéfices cliniques, et les progestatifs donnés à
dose antigonadotrope, auxquels manquent de toute
évidence des essais randomisés pour qu’ils puissent
avoir une place dans cette indication.
L’implant sous-cutané ne bénéficie d’aucune étude
permettant d’affirmer son innocuité.
Le DIU au LNG, pour l’instant contre-indiqué de principe sauf cas exceptionnels, a de tels avantages en
termes de tolérance clinique et peut-être de bénéfice
thérapeutique (action sur l’endomètre en cas de prise
de tamoxifène) que les discussions méritent d’être
largement poursuivies afin de savoir si ces indications
ne peuvent pas être élargies.
Le MPA retard, quant à lui, semble procurer un bénéfice
clinique sur la densité mammaire, sa tolérance clinique
est aléatoire mais il pourrait être utilisé ponctuellement
chez les patientes ne pouvant tolérer aucun type de
stérilet, après décision collégiale et information éclairée
de la patiente. Les débats sont loin d’être clos.
Prise en charge des symptômes
résultant de l’insuffisance
ovarienne définitive
Comme nous l’avons vu en abordant le problème de la
prise en charge de la contraception, un certain nombre
de femmes jeunes traitées pour un cancer du sein vont
se trouver confrontées à une ménopause précoce
induite par le traitement chimiothérapique, d’autant
plus ovariotoxique qu’il contient des dérivés alkylants,
que les doses sont fortes et que la femme est plus âgée
au moment du diagnostic.
De plus, le cancer du sein touche majoritairement des
femmes de plus de 50 ans, dont certaines étaient traitées pour les symptômes gênants dus à leur ménopause
et à la privation estrogénique qui en résulte.
La plupart du temps, il s’agissait d’un traitement
hormonal comprenant des estrogènes et des progestatifs (THS) qui va être interrompu, de même qu’il est
exclu de donner ce type de traitement à une femme
précocement ménopausée du fait du traitement de
son cancer du sein.
Avant même que les grandes études internationales
WHI, MWS et E3N ne viennent jeter le discrédit sur
les prescriptions de THS dans la population générale,
montrant que ce type de traitement augmente le risque
de voir apparaître un cancer du sein en dehors de tout
antécédent personnel, sa prescription était bannie de
principe chez les femmes ayant été traitées pour un
cancer du sein. Le dictionnaire Vidal contre-indique
également cette prescription en cas d’antécédent
personnel de cancer hormonodépendant.
18 | La Lettre du Sénologue • n° 47 - janvier-février-mars 2010
La tibolone a suscité quelques espoirs, mais plusieurs
études ont prouvé de façon claire qu’elle ne devait
pas être utilisée chez les patientes traitées pour un
cancer du sein (10).
Des solutions alternatives vont devoir être trouvées
pour ces femmes.
L’expérience de l’insuffisance ovarienne définitive est
d’autant plus mal vécue qu’elle est souvent d’instauration brutale, qu’elle se surajoute aux autres effets secondaires des traitements anticancéreux qui en accentuent
parfois les symptômes (tamoxifène, antiaromatases)
et qu’elle est ressentie comme une agression supplémentaire au schéma corporel et à la féminité.
Il a été démontré que les patientes suivies pour un
cancer du sein et en rémission ont une probabilité 5,3
fois supérieure à celle d’une population contrôle de
ressentir des symptômes ménopausiques et utilisent
7,4 fois plus de traitements alternatifs. Cela semble
d’autant plus vrai que la femme est jeune (11).
Il paraît important d’aborder cet aspect des conséquences des traitements assez tôt dans la prise en
charge pour permettre à la patiente d’anticiper et
éventuellement de mettre en place des stratégies
de remplacement.
Il est par ailleurs essentiel de surveiller l’apparition
de la ménopause, toute aménorrhée prolongée ne
correspondant pas forcément à une insuffisance
ovarienne définitive.
Le monitorage des profils hormonaux peut être intéressant, surtout si le risque de ménopause définitive est
faible car la normalisation des taux hormonaux peut
précéder de quelques mois la réapparition de cycles
menstruels.
Lorsque la ménopause est installée, il existe schématiquement deux types de symptômes, à court terme
(bouffées vasomotrices [BVM], troubles du sommeil
et de l’humeur, sécheresse vaginale et troubles de la
sexualité…) et à long terme (ostéoporose, problèmes
cardio-vasculaires, troubles neurocognitifs…).
Les BVM constituent la plainte la plus régulièrement
exprimée ; elle est majorée par l’hormonothérapie
adjuvante.
L’incidence des BVM est de l’ordre de 55 à 70 %, le retentissement sur la qualité de vie est important : inconfort
majeur, interférence avec la vie sociale, troubles de l’humeur, insomnies. Ce dernier symptôme augmente l’état
de fatigue majeur dont se plaignent déjà très souvent
les femmes traitées pour un cancer du sein.
Le mécanisme des BVM est incertain ; on suppose
que les modifications hormonales (diminution du
taux d’estrogènes) et neuroendocrines (par le biais de
la sérotonine et de la norépinéphrine) au niveau de
l’hypothalamus entraînent une baisse de la régulation
DOSSIER THÉMATIQUE
thermique, responsable d’une vasodilatation périphérique avec sueurs profuses et impression de chaleur.
Tout en sachant que les traitements hormonaux sont
contre-indiqués, nous ne pouvons manquer de faire
remarquer qu’ils sont les plus efficaces dans le traitement des BVM, les estrogènes entraînant 80 % de
diminution des BVM. Les progestatifs sont également
efficaces puisque l’acétate de mégestrol et l’acétate
de médroxyprogestérone réduisent également les
BVM de 80 % environ.
Cette contre-indication en cas de cancer du sein traité
a conduit à orienter les recherches vers des traitements
non hormonaux en comparant leur efficacité à celle d’un
placebo qui fait diminuer les BVM de 15 % environ (12).
La clonidine a une efficacité de 40 %, mais ses effets
indésirables sont nombreux (sécheresse de la bouche,
céphalées…) [13].
Les nouveaux antidépresseurs, inhibiteurs sélectifs de
la recapture de la sérotonine et de la norépinéphrine
représentent la classe de médicaments la plus étudiée
dans cette indication.
Une étude contrôlée en double aveugle contre placebo
a montré que la venlafaxine à la dose de 75 mg/j fait
diminuer les BVM de 60 %, contre 27 % avec le placebo.
D’autres études montrent une diminution de 60 % des
BVM avec des doses allant de 10 à 25 mg/j de paroxétine. La fluoxétine à la dose de 20 mg/j fait aussi diminuer les BVM mais dans de moindres proportions.
Il semblerait que de faibles doses de citalopram et de
desvenlafaxine fassent également diminuer les BVM
dans les mêmes proportions que la venlafaxine ; en
revanche, la sertraline n’est pas aussi efficace.
Deux essais cliniques ont semé le doute quant à l’efficacité de ces médicaments. Il semble cependant
qu’elles aient été effectuées sans période d’observation
préalable des BVM avant traitement.
Une étude contre placebo de quatre semaines publiée
en 2008 et respectant cette période d’observation
a montré une diminution des BVM de 25 % avec le
placebo, de 33 % avec la venlafaxine, de 13 à 41 %
avec la paroxétine, de 13 % avec la fluoxétine et de
9 à 18 % avec la sertraline (14).
Cependant, certains de ces antidépresseurs inhibent
le cytochrome P450, une enzyme utilisée par le
tamoxifène pour être transformée en endoxifène, son
métabolite actif sur le cancer du sein. C’est le cas de la
paroxétine, de la fluoxétine et de la sertraline, qui ne
doivent donc pas être utilisées si la patiente est sous
tamoxifène. La venlafaxine, en revanche, n’inhibe pas
cette enzyme et peut donc être utilisée.
La gabapentine (anticomitial utilisé également dans
la prise en charge des douleurs post-zostériennes) a
été testée dans cette indication avec succès : 900 mg
de gabapentine font diminuer les BVM de 50 %. Des
doses supérieures sont plus efficaces, et cette efficacité
se maintient dans le temps (14).
D’autres médicaments non hormonaux ont été
essayés, sans certitude d’une efficacité supérieure
à celle d’un placebo. Nous citerons la vitamine E, la
bêta-alanine, le bellergal ou le cohosh noir. Le véralipride a été retiré du marché.
Les phytoestrogènes, bien que d’une efficacité non
supérieure à celle d’un placebo, restent très populaires car ressentis comme naturels et inoffensifs.
L’innocuité de cette prise, du moins au long cours,
reste discutée, en l’absence d’étude contrôlée sur
ces produits en vente libre, dans le contexte d’un
cancer du sein traité.
Les méthodes non pharmacologiques doivent être
encouragées.
L’hypnose a fait l’objet d’études contrôlées qui rapportent 60 à 70 % d’efficacité (15). L’apprentissage de la
respiration abdominale serait également bénéfique. Les
thérapies utilisant la relaxation musculaire sont utilisées.
Des études sont en cours pour évaluer leur efficacité. Un
blocage du ganglion stellaire pourrait aussi rendre des
services dans cette indication (16).De plus, des conseils
simples concernant la manière de s’habiller (vêtements
aérés), la température des pièces, la nourriture (éviter
les aliments trop épicés), les boissons (ni trop chaudes,
ni trop alcoolisées) doivent être délivrés.
Les problèmes sexuels (17) affectent 90 % des femmes
traités pour un cancer. Les plus touchées sont celles
atteintes d’un cancer gynécologique, mais celles qui
ont un cancer du sein sont également très affectées.
Ces dysfonctionnements sont multifactoriels ; ils
proviennent d’une altération de l’image corporelle, de
la réaction du partenaire face à la maladie et d’atteintes
propres à la fonction sexuelle incluant la sécheresse
vaginale et la diminution de la libido.
La chirurgie et les traitements médicamenteux altèrent
l’image corporelle du fait des changements physiques
(mastectomie, curage axillaire, etc.), de la perte des
cheveux et de différences au niveau des sensations
ressenties à travers différents organes (dyspareunie
due à la sécheresse vaginale…).
Il est possible d’atténuer ces effets en prévenant la
patiente et en lui permettant de s’y préparer.
La sécheresse vaginale provient de la carence estrogénique ; contrairement aux BVM qui s’atténuent généralement avec le temps, elle a tendance à persister.
Les lubrifiants non hormonaux sont soit à base d’eau
(modérément efficaces sur les symptômes de la sécheresse vaginale) soit à base de polycarbophil (un peu plus
actifs sur la dyspareunie).
L’administration de topiques locaux (crème ou ovules) à
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Penser sa féminité après un cancer du sein
base d’estrogènes semble plus efficace. On choisira un
produit réputé ne pas passer dans la circulation générale
comme le promestriène.
En corrélation avec ce qui est utilisé dans les syndromes
de Gougerot-Sjögren, d’autres produits tels la pilocarpine ont été testés ; un essai randomisé en double
aveugle est en cours (18).
Les troubles sexuels du désir peuvent provenir du traumatisme engendré par l’expérience même du cancer,
mais l’état dépressif est aussi favorisé par les faibles
concentrations hormonales recherchées par les traitements.
L’utilisation de testostérone en patch, qui est souvent
décrite comme l’hormone du désir, a été étudiée, mais
l’augmentation de la libido constatée n’est pas significative et il existe beaucoup trop d’incertitudes quant à
l’effet éventuel de la testostérone sur le développement
du cancer du sein pour permettre son utilisation dans
ce type d’indication (19).
Les thérapeutiques cognitivo-comportementales
peuvent aussi avoir une place de choix chez ces
patientes.
La pratique de l’exercice physique sera fortement recommandée pour son effet positif sur la fatigue générale
mais aussi pour son action sur la régulation immunitaire
de l’organisme. On conseillera 30 minutes d’exercice
physique 3 fois par semaine au minimum.
L’ostéoporose constitue un effet secondaire majeur de
la ménopause prématurée, aggravée éventuellement
par la prise d’antiaromatases.
La méthode d’évaluation de choix du risque d’ostéoporose et du monitoring de son traitement est l’ostéodensitométrie par rayons X à double énergie.
Les nombreuses alternatives au THS pour prévenir
et traiter l’ostéoporose dans la population générale
pourront être utilisées chez la femme traitée pour un
cancer du sein.
En ce qui concerne les thérapeutiques hormonales adjuvantes, le tamoxifène permet de maintenir la masse
osseuse chez la femme ménopausée, alors qu’il induit
une perte osseuse chez la femme non ménopausée en
s’opposant à l’action des estrogènes circulants sur l’os.
Les antiaromatases, en revanche, aggravent la perte
osseuse. L’utilisation des bisphosphonates avec ces traitements ne sera pas systématique ; ils seront prescrits
en fonction de la masse osseuse qui sera, elle, mesurée
de façon systématique.
Le traitement de l’ostéopénie et de l’ostéoporose avérée
est ensuite le même que dans la population générale,
en tenant compte des facteurs de risque individuels, au
rang desquels figure le cancer du sein (20).
Dans le cadre de cette prévention, l’exercice physique
sera vivement encouragé, avec une prédominance des
20 | La Lettre du Sénologue • n° 47 - janvier-février-mars 2010
exercices en appui. Des recommandations alimentaires
concernant les apports calciques seront données, des
complémentations en calcium et en vitamine D seront
facilement délivrées.
Les maladies cardio-vasculaires (dont la fréquence va
augmenter du fait de la carence estrogénique précoce)
seront prévenues, en tenant compte de l’évaluation du
risque individuel de chaque patiente et en intégrant
les risques particuliers liés au type de traitement reçu
(chimiothérapie par anthracyclines, irradiation des aires
ganglionnaires internes). Les prescriptions diététiques
visant à éviter l’excès de poids et les incitations à l’exercice physique seront délivrées largement.
Des altérations neurocognitives (21) sont décrites chez
les patientes traitées pour cancer du sein. Ces atteintes
sont plus fréquentes en cas de chimiothérapie, mais
sont également dues au vécu traumatique du cancer
lui-même et aux traitements hormonaux adjuvants
par le biais de la carence estrogénique recherchée. Il
n’existe actuellement aucune solution pharmacologique
à ces problèmes, mais les stratégies de réassurance, les
programmes d’exercices visant à stimuler la mémoire
et l’incitation à l’exercice physique ont largement leur
place dans la prise en charge de ces symptômes.
Il est fondamental de reconnaître l’importance et le
retentissement des symptômes de la ménopause sur la
santé globale des patientes, en particulier à long terme.
Il est important également de prévenir la patiente de
la possible survenue d’une ménopause précoce induite
par le traitement dès les consultations initiales de prise
en charge, afin de lui permettre d’anticiper et, éventuellement, d’entreprendre des traitements alternatifs
précoces.
Enfin, bon nombre de symptômes trouvent maintenant une réponse non hormonale qui, si elle n’est pas
tout à fait aussi efficace que le THS, n’en est pas moins
satisfaisante.
Conclusion
La prise en charge globale de la patiente passe par
l’écoute attentive des demandes et des plaintes pour
tout ce qui concerne la contraception et les symptômes
de la ménopause. Le médecin fournira les réponses
possibles, pharmacologiques ou non, et les conseils
diététiques visant à maintenir la masse corporelle,
incitera à l’exercice physique et mettra en place éventuellement une thérapie de soutien dès que le besoin
apparaîtra. Cette patiente, peut-être encore plus qu’une
autre, a besoin d’être comprise en tant que femme avec
ses besoins spécifiques, pour parvenir à une bonne
qualité de survie.
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