
28 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 24 - n° 1 - janvier-février-mars 2010
Résumé
La mise à disposition des biothérapies dans le psoriasis depuis 2004 a permis de proposer aux patients
atteints de psoriasis modéré à sévère une alternative aux traitements systémiques habituels de cette
maladie (photothérapie, méthotrexate, acitrétine ou ciclosporine). Les biothérapies ciblent les éléments
moléculaires impliqués dans la formation de la plaque de psoriasis. Elles permettent un contrôle au long
cours du psoriasis cutané et des atteintes articulaires chez la majorité des patients résistants ou intolérants
aux traitements habituels, et améliorent significativement la qualité de vie. L’ustékinumab et les anti-TNFα
possèdent des cibles moléculaires différentes et enrichissent l’arsenal thérapeutique développé contre le
psoriasis. La tolérance au long cours des biothérapies dans le psoriasis reste a évaluer mais leurs effets
indésirables peuvent être minimisés par une surveillance standardisée.
Mots-clés
Psoriasis
Ustékinumab
Comorbités
Stratégie de
traitement
Abstract
Since 2004 in Europe, biological
agents have been marketed
for the treatment of moderate
to severe psoriasis allowing
patients to obtain alternative
treatment options. Biological
agents in Europe are approved
for use in patients intolerant or
resistant to traditional systemic
therapies, methotrexate,
phototherapy and ciclosporin.
Biological agents target the
molecular mechanisms asso-
ciated with the production of
the psoriasis plaque. The possi-
bility of a long term control of
moderate to severe psoriasis
is becoming more realistic.
Agents inhibiting TNF-alpha
and ustekinumab have different
molecular targets and complete
the therapeutic armentarium in
a degree that no patient with
moderate to severe psoriasis
should be left untreated. The
risk of infections can be mini-
mized by careful screening and
follow-up of patients for latent
tuberculosis.
Keywords
Psoriasis
Ustekinumab
Comorbidities
Treatment strategy
À côté des scores de sévérité, qui sont utiles pour
documenter la sévérité et la réponse clinique par
le thérapeute, il est fondamental de prendre en
compte l’intensité et la pénibilité des symptômes
pour le patient, comme le prurit, l’importance des
squames. Les symptômes peuvent en effet consti-
tuer une nuisance importante pour les patients ou
pour l’entourage, qui les ressentent comme des
“souillures”, ainsi que les saignements et les exsu-
dats qui tachent le linge (figure,◆p.◆27). Enfin, le
retentissement du psoriasis sur la vie quotidienne,
la vie affective, le travail et les loisirs est important
à envisager lors de l’entretien. Le psoriasis est une
maladie qui peut altérer de manière profonde la
qualité de vie des patients, entraînant repli sur soi,
tristesse de l’humeur, isolement social et conduites
addictives. L’évaluation du retentissement psycho-
logique et social du psoriasis fait appel à des échelles
de qualité de vie, comme le DLQI (Dermatology
Life Quality Index), facilement utilisées en pratique
quotidienne.
Quelles sont les comorbidités à
prendre en compte ?
Les études épidémiologiques réalisées en majorité
dans des bases de données de santé publique ont
montré une association significative entre le psoriasis
et un risque cardiovasculaire accru, particulièrement
un risque de maladie coronarienne. Les patients
atteints de psoriasis sévère ont un risque relatif d’in-
farctus myocardique multiplié par 3 à 4 par rapport à
la population générale (1). Ce risque cardiovasculaire
majoré rend probablement compte du risque de
mortalité accru au cours du psoriasis sévère (2). La
raison de cette association entre psoriasis et mala-
dies cardiovasculaires n’est pas totalement élucidée.
Les rôles respectifs de l’inflammation chronique et
des comorbidités associées au psoriasis, comme le
syndrome métabolique, l’obésité, la consomma-
tion de tabac et d’alcool, ont été suspectés. La prise
en compte des comorbidités du psoriasis dans le
choix du traitement permet d’optimiser le rapport
bénéfice-risque (3). Par exemple, le méthotrexate
chez un patient obèse et ayant une consommation
d’alcool importante n’est pas un choix thérapeutique
pertinent, car il l’expose à un risque plus important
de toxicité hépatique (4). De même, en cas de pres-
cription d’un traitement anti-TNFα chez un patient
obèse, il est licite d’associer une prise en charge
diététique, ce traitement étant lié à un risque de
prise de poids associé (5).
Quels sont les objectifs
thérapeutiques avec les
traitements par biothérapies
et comment les atteindre ?
Le psoriasis modéré à sévère est une maladie chro-
nique dont l’évolution est continue chez la majorité
des patients. Les objectifs thérapeutiques peuvent
être divisés de manière schématique, en objectifs
thérapeutiques à court terme et objectifs thérapeu-
tiques à long terme.
Objectifs thérapeutiques à court terme
À court terme, après 10 à 16 semaines de traitement,
l’objectif thérapeutique est d’obtenir une réduc-
tion majeure de la sévérité des lésions chiffrée à
au moins 75 % d’amélioration du score de sévérité
PASI. On attend également une disparition du prurit,
des squames, des douleurs, et une amélioration
des éventuelles lésions unguéales. Une réduction
significative du DLQI doit être obtenue, attestant
de la normalisation des différentes dimensions de
la qualité de vie des patients.
◆◆Efficacité◆des◆agents◆ciblant◆le◆TNFα◆
Trois agents anti-TNFα sont disponibles en 2010
pour le traitement du psoriasis. Ils possèdent une
efficacité sur les atteintes cutanées et articulaires du
psoriasis. Ces agents sont utilisés suivant la procé-
dure du médicament d’exception, et leur prescription
est réservée au spécialiste. Deux de ces agents sont
des anticorps monoclonaux : l’infliximab et l’adali-
mumab. L’infliximab est un anticorps chimérique
produit par une fusion de segments d’anticorps
humains et murins, comme en témoigne le suffixe
“ximab”. Les segments anticorps murins peuvent