Cahier d’Éducation & Devenir - Numéro 20 - Décembre 2013

Cahier d’Éducation & Devenir - Numéro 20 - Décembre 2013
Journée d’étude - PARIS 24 mai 2013
Education & Devenir
N° SIRET 38010107100047
Code APE/NAF 913E
Siège social :
35 rue du Puits Fouquet - 76113
SAHURS
Présidente :
Marie-Claude Cortial
presidente.e[email protected]
Secrétariat général :
Sylvain Ladent
Lycée des Remparts
1 rue du Rempart
13007 Marseille
secretaire[email protected]m
Trésorier :
Jean-François Delporte
Lycée Les Bruyères
76300 Sotteville Lès Rouen
Site : http://
www.educationetdevenir.fr
Coordonnateur des Cahiers :
Bruno Siour
Responsable du Cahier N° 20
Bureau E&D
Mise en page et graphisme :
José Fouque
Problématique : Marie Claude Cortial, ..................................................................... p.03
Emancipation, sécularisation, laïcité. Joël ROMAN ............................... p. 05
Lenseignement d’éthique et culture religieuse au Québec
Mireille Estivalèzes ........................................................................................................................ p. 10
Introduction de la morale laïque à l’école, Pierre Tournemire ... p. 17
Eléments de bibliographie, Monique Rollin ..................................................... p. 25
Les Cahiers d’Éducation & Devenir - Numéro 20 Décembre 2013
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Problématique
Marie-Claude CORTIAL Présidente d’Education et devenir
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E
ducation & Devenir et la ligue de l’enseignement ont privilégié ce thème, car il est
l’un des axes forts du projet de loi et au moment où aura lieu cette journée, le rap-
port demandé par Vincent Peillon sur l’enseignement de la morale laïque à l’école
aura été rendu public.
Par ailleurs, il nous semble opportun d’interroger des termes très utilisés au regard de l’évolu-
tion de notre société et de son école.
Il nous faut d’abord nous questionner sur les trois termes retenus : morale, éthique et laïcité.
Comme chacun le sait, morale et éthique sont similaires (l’un est d’origine latine, l’autre grec-
que). Mais on n’utilise pas l’un pour l’autre : lorsqu’on parle de morale on songe à l’ensemble
des principes inconditionnels qui justifient une action pour elle-même. On parlera plutôt d’éthi-
que lorsqu’on évoque des règles pratiques d’action, en fonction d’un certain nombre de princi-
pes moraux (éthique médicale par exemple …), elle peut d’ailleurs varier selon les groupes
concernés. Dans nos sociétés actuelles, le terme de morale est délaissé, alors que celui d’éthique
a pris une place considérable.
Quant à la laïcité, quelle confusion dans les esprits ! L’introduction de la laïcité dans la Républi-
que française a correspondu à un moment particulier de son histoire. Elle a pacifié les esprits et
permis la constitution de la citoyenneté française, mais dans les moments de tensions, elle est
très souvent instrumentalisée (loi sur le voile …) par les uns et les autres. Il n’empêche que cette
notion est fondamentale en France et doit garantir la neutralité des principes d’action et de ju-
gement.
Qu’en est-il pour l’Ecole ?
Avec la transmission des connaissances qui s’effectue avec un effort de rationalisation et de mise
à distance pour les élèves, l’Ecole a pour mission première de développer la sociabilité et donc
de faire partager aux enfants et aux jeunes les valeurs de la République : celles de la citoyenneté
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démocratique. C’est une mission essentielle pour l’intégration sociale, culturelle et civique de
toutes et tous et pour le vivre ensemble. Il s’agit donc de trouver un cadre qui facilite la recher-
che du « commun » dans un contexte sociétal tout à fait nouveau (transformation des familles,
repères moraux pour les enfants puisés dans leur sphère familiale, population très diverse, mon-
tée du fait religieux, surdétermination du territoire pour la constitution des valeurs …). Autre-
ment dit, il s’agit de trouver l’équilibre entre individu et « commun », faire émerger de la diversi-
une culture commune et faire en sorte que les principes de la République fassent lien avec les
valeurs personnelles.
La première exigence est que l’Ecole soit un lieu démocratique pour tous, adultes et enfants et
que les règles qui le gèrent soient élaborées dans la transparence. C’est à cette condition-là que
la réflexion sur le questionnement de cette journée de réflexion pourra être suivie d’effet.
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Emancipation, sécularisation, laïcité
Joël ROMAN, Philosophe
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otre conception de la laïcité prend appui sur un arrière fond de considérations philosophi-
ques et de transformations sociales, politiques et historiques qui ont vu progressivement
le religieux cesser d’être le cadre de référence principal de la vie humaine. On peut qualifier de
sécularisation l’ensemble de ces transformations (1) . La notion de sécularisation évoque un ho-
rizon d’immanence des concepts politiques et moraux. Pour l’essentiel, le mot comporte deux
significations principales : a) un effacement progressif du religieux et b) une origine religieuse
(chrétienne) de concepts et d’une vision du monde qui a progressivement rompu les amarres
avec cette conception. C’est en ce sens qu’on a pu parler de « désenchantement du monde ». La
laïcité serait la traduction de cette conception dans l’ordre politico-social.
Il y a donc un rapport étroit entre la laïcité, concept juridico-philosophique et la sécularisa-
tion, au sens historico-sociologique du terme. Les deux choses offrent un cadre de pensée simi-
laire, qui faut prendre au sérieux. Toutes deux présupposent un idéal qui est celui du rationalis-
me moderne, lequel dessine le portrait d’un individu libre comme étant un individu gouverné
par sa seule raison, qui s’oriente sur des idées ayant une portée universelle. De ce fait, la voie
privilégiée de l’émancipation passe par l’instruction, condition d’une émancipation intellectuelle
et culturelle, mais aussi d’une émancipation matérielle (qui suppose une certaine égalité), et
d’une émancipation des rôles traditionnels (par exemple des rôles traditionnels de sexe, d’où la
place que tient dans cette argumentation l’émancipation des femmes). La culture politique fran-
çaise a particulièrement développé des différents points, quoique de manière inégale (2).
Or cette conception se heurte à plusieurs difficultés, qui, sans remettre en cause la philo-
sophie d’ensemble, conduisent à la nuancer fortement, sur trois points principaux au moins.
1. Elle suppose un individu générique abstrait (le citoyen de la conception française), uni-
versel et interchangeable. C’est le problème théorique de cette position, où le sujet est indiscer-
nable des autres sujets, ce qui rend impossible de penser le pluralisme. Idéalement la société
n’est pas composée de plusieurs individus, qui différent par le sexe, l’âge, la couleur de peau, la
condition sociale ou les convictions religieuses, mais d’un même individu générique dupliqué
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