Lorsqu'on observe ce qu'il se passe, on constate que le mouvement étudiant
fraye fortement avec l'anarchie, la désobéissance civile et la violence.
Publié le 09 mai 2012 à 06h00 | Mis à jour le 09 mai 2012 à 06h00
De la mauvaise foi
Luc Tremblay
Père de trois filles qui portent le carré rouge, l'auteur
s'adresse à celle qui est élève au Cégep du Vieux-Montréal.
La Presse
Ta mère et moi sommes très inquiets de la direction que prend le
débat sur les droits de scolarité, qui laissera des traces profondes
dans la société québécoise.
Peu importe les parties, force est de constater que le seul qui a fait
des propositions concrètes, c'est le gouvernement. Les gains
enregistrés sont réels, alors qu'y a-t-il à comprendre? Le statu quo
sur le gel n'est pas une position de négociation, c'est un cul-de-sac,
c'est de l'irresponsabilité envers la majorité de la société civile et la
population étudiante qui accepte le dégel.
De plus, la sortie des leaders étudiants qui censurent leur propre
signature, moins de 48 heures après avoir signé une entente,
démontre vraiment leur mauvaise foi crasse. Ils signent une entente
qu'ils se refusent à recommander et à crédibiliser devant leurs
membres. C'est vraiment le monde à l'envers. Où sont passées
l'intégrité, la transparence et la crédibilité dont se réclament les
leaders étudiants? Quels sont les intérêts qu'ils servent vraiment?
Sous leur leadership, la situation est maintenant totalement hors contrôle.
Si une signature faite de bonne foi, par tous les intervenants, sous les conseils et l'appui des syndicats qui soutiennent votre mouvement n'est pas
respectée, il ne faut pas se surprendre que la majorité de la population ne vous suive plus et ne vous appuie pas.
Le respect élémentaire des normes, des lois, des injonctions, de la libre circulation, le respect du droit individuel d'accéder à son travail ou à ses
cours, sont des éléments fondamentaux de toute société démocratique. Lorsqu'on observe ce qu'il se passe, on constate que le mouvement
étudiant fraye fortement avec l'anarchie, la désobéissance civile et la violence, tout le contraire des valeurs que nous avons transmises à toi et tes
soeurs.
Depuis le début, vos leaders se justifient de leurs actions en clamant l'indignation, le mépris, l'insulte qu'ils perçoivent dans le propos de l'autre. Et
maintenant, après avoir signé une entente préliminaire à une sortie de crise, ils se disent floués. C'est du show-business! Qui sont-ils ces
bien-pensants qui nous font des leçons de démocratie, alors qu'ils usurpent eux-mêmes de façon quotidienne les droits de leurs membres qui
veulent être étudiant avant tout? Qui sont-ils ceux qui manipulent le vote avec les mêmes règles archaïques (règle des deux tiers) qui prévalaient il y
a 40 ans lorsque j'étais étudiant au cégep?
Comme tu le sais, ta soeur aînée a cumulé une dette de plus de 40 000$ pour ses études universitaires à York et ton autre soeur s'apprête à
investir plus de 30 000$ par année pour étudier en Angleterre, à la University of Arts London. Vous travaillez très fort pour économiser et réaliser
vos rêves. Par vos actions, vous démontrez que l'éducation a une valeur et que c'est en y investissant que l'on augmente ses chances de réussir.
N'est-ce pas là paradoxal avec ce qui se passe ici au Québec et le mouvement que vous appuyez?
Ce qui m'inquiète le plus, c'est que l'on est en train de déifier des leaders qui ne respectent aucun système, à moins de répondre, à leur conception
exclusive et monolithique de leur vision de la démocratie. Quels sont les intérêts qu'ils servent réellement? Ceux de leurs membres, je commence à
en douter sérieusement...
- Ton papa qui t'aime
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