ÉDITORIAL
COP21 : une occasion de parler
desanté respiratoire
COP21: an opportunity to talk about
respiratory health
Isabella
Annesi-Maesano
Équipe d’épidémiologie
des maladies allergiques et
respiratoires, Institut Pierre-Louis
d’épidémiologie et de santé
publique, Sorbonne Universités,
UPMC Universités Paris 06, Inserm,
faculté de médecine Saint-Antoine,
Paris.
Marc Humbert
Université Paris-Sud, université
Paris-Saclay, Inserm, UMR S999 ;
service de pneumologie,
hôpital Bicêtre, Assistance
publique- Hôpitaux de Paris,
Le Kremlin- Bicêtre.
Même s’il faut accueillir favorablement l’accord
de la COP21(21stConference of Parties) que 194 États
et la Commission européenne viennent de signer à Paris
afi n de maintenir, d’ici 2100, le réchauff ement mondial à un seuil maximal
de 1,5°C par rapport aux niveaux préindustriels, on est en droit
de regretter que, dans le document écrit faisant référence, le mot “santé”
ne soit mentionné que 3fois et que l’adjectif respiratoire ne lui soit
jamais associé.
Pourtant, le poumon est l’organe le plus exposé aux agressions
environnementales en rapport avec le changement climatique.
Ce changement agit de façon directe ou indirecte sur la santé
respiratoire(1). Lextrême froid provoque des infections respiratoires,
lacanicule un excès de décès cardiorespiratoires, l’humidité
l’aggravation de l’asthme, et l’augmentation de la pression barométrique
peut être responsable de l’apparition d’un pneumothorax.
La majorité des eff ets respiratoires résultent de l’action du climat sur
les facteurs de risque des pathologies respiratoires en augmentant
signifi cativement l’exposition à ces facteurs. Lechangement
climatique peut aff ecter la qualité de l’air, tout comme la qualité de
l’air peut contribuer au changement climatique, car de nombreux
polluants atmosphériques sont des gaz à eff et de serre. On s’attend à
des concentrations plus élevées de gaz et de particules en raison de
l’augmentation des activités humaines et du trafi c dans les grandes
villes, où, à long terme, une large majorité de la population mondiale
sera contrainte de vivre en raison du changement climatique.
Unsurcroît de lumière du soleil et des températures plus élevées
allongent les épisodes de pics d’ozone. La concentration des particules
augmente aussi à la suite de la désertifi cation et des incendies.
La pollution atmosphérique est à l’origine de l’aggravation et
du développement de l’asthme, de la bronchopneumopathie chronique
obstructive et de la pneumonie. Des données plus récentes ont
également fait le lien entre cette exposition à la pollution atmosphérique
et le cancer du poumon ainsi que la fi brose pulmonaire idiopathique(2).
Le changement climatique agit aussi sur les biocontaminants, les pollens
et les moisissures, causes établies d’asthme et d’allergies.
Depuis unsiècle, on observe une modifi cation de la distribution
ographique de certaines plantes, un début plus précoce ainsi
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qu’unallongement de la période de pollinisation, et une production
plus importante d’allergènes pour une même plante du fait de l’effet
de latempérature ou de la pollution atmosphérique sur celle-ci(3).
Toujours en lien avec des événements climatiques extrêmes plus
fréquents, les tempêtes de vent transportent les pollens en quantité et
sur de longues distances, et les orages rompent la membrane externe
des pollens, provoquant la libération des allergènes submicroniques.
Pour ce qui est des moisissures, leur prolifération est favorisée à
lafois par les inondations fréquentes et par l’humidité associée.
Touscesphénomènes augmentent le risque de maladies respiratoires.
Quoi qu’il en soit, en dépit du document de référence, la COP21 aura
eu des répercussions utiles pour la santé des individus. Elle a permis
à plusieurs parties prenantes de faire le point sur les conséquences
sanitaires à court et à long terme du changement climatique ainsi que
sur les mesures d’adaptation et d’atténuation nécessaires. De particulière
importance dans ce contexte, on peut souligner l’introduction par
l’Organisation mondiale de la santé de la distinction entre les polluants
à courte et à longue durée de vie. Pour réduire les risques pour la santé
mondiale, il faut commencer par limiter les expositions aux polluants
atmosphériques à courte durée de vie (noir de carbone, ozone et
méthane).
Maintenant, c’est aux professionnels de santé de s’approprier
etderépercuter les connaissances acquises afin de mettre en œuvre
lasurveillance et la prévention des phénomènes de santé en lien
aveclechangement climatique.
Et aux premières loges de ce processus doivent se trouver
les pneumologues !
Les auteurs déclarent ne pas
avoir de liens d’intérêts.
1. Ayres JG, Forsberg B,
Annesi-Maesano I et al.;
Environment and Health
Committee of the European
Respiratory Society. Climate
change and respiratory disease:
European Respiratory Society
position statement. Eur Respir J
2009;34(2):295-302.
2. Annesi-Maesano I, Heinrich J,
Ayres JG, Forastiere F. Why
an ERJ series on air pollution?
Eur Respir J 2012;40(1):12-3.
3. D’Amato G, Cecchi L,
Bonini S et al. Allergenic pollen
and pollen allergy in Europe.
Allergy 2007;62(9):976-90.
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