Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume V, n° 5, septembre-octobre 2001
Dysthyroïdies infracliniques
Troubles métaboliques et affections de la
thyroïde représentent les motifs de consultation
les plus fréquents auprès du spécialiste en
endocrinologie et maladies métaboliques.
Depuis leur démocratisation et leur robotisation
technique, les mesures du taux de TSH et/ou
des hormones thyroïdiennes libres plasma-
tiques font partie des déterminations souvent
effectuées à titre de “bilan” justifié par un
plausible problème thyroïdien, ou comme
paramètre(s) de “dépistage”, devant un ou
plusieurs symptômes susceptibles de s'inscrire
dans le cadre protéiforme des dysthyroïdies.
La mesure de ces paramètres, parfois réalisée
“pour voir”, offre bien souvent des surprises
en ce sens qu'ils peuvent se révéler anormaux
alors que peu d'éléments cliniques l'auraient
laissé supposer, voire même aucun. On parle
alors d'hyper- ou d'hypothyroïdie infracli-
nique et toute la question devient celle de la
pertinence ou non de l'introduction d'une thé-
rapeutique spécifiquement thyroïdienne. Est-
il en effet raisonnable de traiter un chiffre ?
Deux articles récents du New England
Journal of Medicine tentent de répondre à
cette question.
Le dépistage systématique de l'hypothyroïdie
infraclinique, reposant sur la mesure de la
TSH plasmatique, est débattu en raison de
son coût et de la réalité de ses retombées en
termes de traitement. Il paraît néanmoins lici-
te dans certains groupes à risque (1). Il s'agit
avant tout de la femme âgée de plus de 65 ans
et de la femme enceinte au cours de la
première visite de surveillance. Compte tenu de
la forte prévalence féminine de l'hypothyroïdie
primaire, est également conseillée la réalisation
d'un “screening” une fois tous les cinq ans
chez la femme âgée de plus de 35 ans. Un
taux de TSH >10 mU/l conduira, après un
contrôle de son inflation au-dessus de ce
seuil, à l'instauration d'un traitement substitu-
tif par T4. Le constat à deux reprises d'une
valeur trop élevée de TSH mais < 10 mU/l
rend légitime la même attitude thérapeutique
dans l'une ou l'autre des situations suivantes :
existence de symptômes susceptibles de s'ex-
pliquer par une hypothyroïdie, goitre, infertilité
inexpliquée, élévation du taux de LDL-cho-
lestérol ou femme enceinte. Les bénéfices
attendus de ce traitement peu onéreux sont
triples : prévention de la progression vers une
hypothyroïdie cliniquement patente, disparition
des symptômes “infracliniques” – touchant en
particulier la sthénie – et enfin, amélioration
du profil lipidique. Dans les autres cas, et
surtout si la recherche de la présence d'anti-
corps antithyroperoxydase se révèle négati-
ve, une surveillance annuelle est préconisée,
sans instauration de traitement substitutif.
Il est proposé que le dépistage de l'hyperthy-
roïdie infraclinique ait une cible très voisine
(2). Outre les situations évoquées pour la
détection de l'hypothyroïdie infraclinique, la
mesure du taux de TSH est justifiée lorsqu'il
existe un goitre (surtout s'il est nodulaire), un
trouble supraventriculaire du rythme
cardiaque, alors qu'il paraît beaucoup plus
discutable et discuté devant une ostéoporose
qui n'a pas reçu d'autre explication. Dans
l'hypothèse où le taux de TSH mesuré est
inférieur à la limite basse de la normale, la
réalisation d'un examen isotopique thyroïdien
est logique s'il existe des signes cliniques
s'inscrivant dans le cadre de l'hyperthyroïdie.
Dans la situation inverse (TSH basse sans
signe clinique de maladie thyroïdienne), il est
conseillé de revérifier les paramètres hormonaux
thyroïdiens huit semaines plus tard. Cette
démarche permet d'écarter l'impact thyroïdien
d'une affection aiguë non thyroïdienne (non
thyroidal illness des Anglo-Saxons) ou une
phase évolutive précoce d'une thyroïdite. Si
l'hyperthyroïdie infraclinique est confirmée
par cette deuxième mesure, l'attitude pratique
se discute. En l'absence de tout symptôme :
simple surveillance (TSH + T4 et/ou T3) à
rythme biannuel, réduction de la posologie
d'un traitement par T4 s'il y en avait un qui
était préalablement suivi. En présence de
symptôme rattachable à cette hyperthyroïdie
infraclinique (notamment goitre nodulaire
et/ou fibrillation auriculaire) : soit adminis-
tration thérapeutique d'iode 131 après
repérage isotopique, soit prescription d'une
dose modérée d'antithyroïdiens de synthèse,
éventuellement en préparation d'un traitement
isotopique. Les bénéfices du traitement seront
alors évidents.
Les bases décisionnelles proposées par les
auteurs paraissent raisonnables, à la fois sur
le plan médical et sur celui de l'économie
de la santé. Ils sont adoptables en France
et adaptés à ce problème de sémiologie
biologique thyroïdienne auquel le praticien
est souvent confronté.
J.M. Kuhn,
Service d’endocrinologie et
maladies métaboliques,
hôpital de Bois-Guillaume,
CHU de Rouen.
Le CLA (Conjugated Linoleic Acid)
réduit le tissu adipeux abdominal
chez les hommes ayant un syndrome
métabolique
Les isomères conjugués de l'acide linoléique, ou
CLA, qui correspondent à un ensemble d'isomères
géométriques et d'isomères de position de
l'acide linoléique, font parler d'eux. Ils sont présents
naturellement dans les graisses des ruminants,
produits par biohydrogénation bactérienne
dans l'estomac de ces animaux, d'où le nom
de leur principal représentant, l'“acide rumé-
nique”. Chez l'animal, tel que le rat Zucker,
des études ont montré des effets bénéfiques
des CLA sur certaines composantes du syndrome
métabolique. Cette étude a analysé, à court terme, les
effets d'une supplémentation de 4,2 g/jour de CLA
chez des hommes obèses ayant une surcharge
abdominale (rapport taille/hanche 1,05 ± 0,05),
en double aveugle. Après quatre semaines, le
diamètre abdominal sagittal a diminué signifi-
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brèves…
Brèves…
1. Cooper DS. Subclinical hypothyroïdism.
N Engl J Med 2001 ; 345 : 260.
2. Toit AD. Subclinical hyperthyroïdism.
N Engl J Med 2001 ; 345 : 512.