Numéro best of biblio Mycologie Diagnostic précoce de mucormycoses : mise au point d’une PCR quantitative permettant un diagnostic sérique chez les patients immunodéprimés André Paugam (Service de parasitologie-­ mycologie, hôpital Cochin, Paris) Contexte Les mucormycoses sont des infections émergentes dues à des champignons filamenteux appartenant aux genres Lichtheimia (synonyme Absidia), Rhizopus, Mucor et Rhizomucor. Anciennement, la forme typique était l’infection rhinocérébrale du patient diabétique, mais, ces dernières années, les cas survenus chez les patients immunodéprimés, et particulièrement chez ceux souffrant d’hémopathies, sont devenus de plus en plus fréquents, avec des localisations essentiellement pulmonaires. Méthode Le diagnostic de certitude de mucormycose repose sur l’anatomopathologie et la culture, mais les biopsies sont difficiles à obtenir chez ces malades ; aussi, la perspective d’un diagnostic sérique peut être considérée comme une avancée majeure pour le diagnostic de cette pathologie (diapositive 1). Ceci d’autant plus que la symptomatologie et l’imagerie (scanner pulmonaire) des atteintes pulmonaires ne permettent pas de distinguer une mucormycose d’une aspergillose invasive, alors que la prise en charge thérapeutique est radicalement différente : voriconazole pour l’aspergillose invasive (inefficace sur les mucormycoses) versus amphotéricine B liposomale, voire posaconazole (non disponible i.v.) pour la mucormycose. Dans cette étude, les auteurs ont rétrospectivement évalué les performances d’une combinaison de 3 PCR quantitatives, permettant la détection de l’ensemble des genres à l’origine de mucormycoses. Pour ce faire, ils ont utilisé les sérums de 10 patients pour lesquels une mucormycose prouvée avait été diagnostiquée à l’hôpital de Besançon, entre janvier 2004 et juin 2012 (histologie et/ou culture ou biologie moléculaire de la biopsie). Comme témoins, ils ont inclus 51 patients [diapositive 2]. Commentaire Pour conclure (diapositive 4), ce nouveau test non invasif pourrait permettre une amélioration de la prise en charge de cette pathologie émergente, par dépistage précoce des patients d’hématologie les plus à risque. Les auteurs ont d’ailleurs commencé une étude prospective avec une détection 2 fois par semaine chez les patients à risque (leucémie aiguë, lymphome nécessitant une chimiothérapie intensive, aplasie et allogreffés de J0 à J35). Référence bibliographique Résultats Pour les 10 patients avec une mucormycose prouvée, les facteurs favorisants, les formes cliniques des infections et les résultats des PCR sont résumés sur la diapositive 3. On peut remarquer, bien qu’il s’agisse d’un petit effectif, que le facteur de risque le plus fréquent (7/10) est une hémopathie, comme on pouvait s’y attendre. Dans 9 cas sur 10, les PCR ont permis le diagnostic et, pour les formes disséminées, toujours avant l’histologie, de −3 à −49 jours. Cela montre non seulement que la PCR du sérum est très performante pour le diagnostic, mais qu’elle peut permettre d’établir précocement le diagnostic, ce qui est essentiel au pronostic, car, compte tenu du caractère angio-invasif de cette pathologie, un geste chirurgical associé au traitement antifongique, lorsqu’il est possible, est capital pour assurer un pronostic favorable. Pour les 51 témoins, les PCR ont toujours été négatives (100 % de spécificité). Les auteurs ont, par ailleurs, vérifié l’absence de réaction croisée avec l’ADN de champignons responsables d’infections fongiques invasives comme Aspergillus, Fusarium et Candida. C’est important car il a été estimé que, pour 1/3 des mucormycoses, une infection mixte était possible. II 30 | La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIX - n° 1 - janvier-février 2014 Millon L, Larosa F, Lepiller Q et al. Quantitative polymerase chain reaction detection of circulating DNA in serum for early diagnosis of mucormycosis in immunocompromised patients. Clin Infect Dis 2013;56(10):e95-101. Numéro best of biblio À retrouver sur le site www.edimark.fr Diagnostic précoce de mucormycoses : mise au point d’une PCR quantitative permettant un diagnostic sérique chez les patients immunodéprimés Diapositive 2. Diapositive 1. Diapositive 4. Diapositive 3. L’auteur déclare avoir des liens d’intérêts avec MSD, Astellas, Pfizer et Gilead. La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXIX - n° 1 - janvier-février 2014 | 31