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l’appropriation de cette même valeur par ses parties prenantes. Il est moins courant
de parler de modèle économique pour une Nation ou un ensemble de Nations.
Pourtant c’est le modèle économique et social qui est au centre de la compétitivité
d’un pays ou d’un ensemble de pays. En ces temps où l’Allemagne assoit son
leadership en Europe il est de mise de faire référence au modèle allemand. (La
compétitivité, enjeu d’un nouveau modèle de développement, rapport présenté par
Isabelle de Kerviler, CES, octobre 2011).
L’industrie Allemande est caractérisée par une très forte spécialisation. Les
entreprises allemandes détiennent – grâce à leur savoir-faire et leur innovation
permanente – des parts importantes de marchés de très haute qualité (optique et
machine-outil par exemple). Cette spécialisation est caractéristique pour
l’automobile dont la production est orientée vers le haut de gamme à forte marge,
qui tire les exportations. L’Allemagne occupe ainsi soit le premier, soit le second
rang dans de nombreux secteurs industriels européens : des équipements
mécaniques à l’optique, de la production des métaux à celle du matériel de
transport. En second lieu, le modèle économique allemand s’appuie sur un réseau
de moyennes entreprises particulièrement innovatrices et performantes à
l’exportation « champions cachés » de l’économie d’outre-Rhin, gérées par un capital
familial stable et adossées à un système bancaire local et diversifié. Enfin,
l’Allemagne bénéficie d’un climat social où la négociation entre partenaires sociaux
est la règle, d’où l’expression d’économie sociale de marché.Au cours des dix
dernières années, l’Allemagne a opté pour un modèle low-cost /haute qualité en
faisant peser sur sa population une politique d’abaissement forcené du coût du
travail, difficilement acceptable en France ?
En face y a-t-il un modèle économique et social français ? Certes, la France
bénéficie de points forts rappelés dans tous les rapports officiels, des champions
industriels mondiaux, un réseau d’infrastructure une position géographique
avantageuse, une agriculture forte, un système de santé solide et de sécurité sociale
fortement mis en cause par les forces conservatrices. En revanche la France ne
dispose pas de ce réseau de moyennes entreprises exportatrices qui fait la force de
l’Allemagne, son climat social est d’avantage à l’affrontement qu’au dialogue, et
surtout le pouvoir actuel inspiré par certaines idées ultralibérales, n’a pas mis en
place une véritable stratégie de réindustrialisation et de repositionnement
débouchant sur un véritable modèle économique et social durable.
Le pouvoir progressiste qui sortira, nous l’espérons, des urnes en 2012 aura à la
fois à gérer cet héritage et à prendre des positions de court terme dans un contexte
qui pourrait être dramatique et dans le même temps à mettre en place un nouveau
modèle dont la mise en application ne pourra faire sentir ses effets que sur le long
terme. S'il convient de retenir certains avantages du modèle Allemand, la simple
copie par le bas que préconise le pouvoir actuel ne saurait dispenser de la
recherche d’un modèle de croissance adapté à notre pays en coordination avec une
Europe qui devra trouver son propre modèle économique, ne pouvant se confondre
avec le modèle allemand. La tâche est donc immense et demandera une très large
participation de toutes les forces vives, elle comporte une condition impérieuse de
succès : la conjugaison d’une justice dans les efforts consentis et d’une vision claire
du but à atteindre.