
Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 3 - octobre-novembre-décembre 2010
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Revue de presse
VESSIE
pénis sur le site de piercings génitaux ont
été rapportés (3). Dans le premier cas, le
patient était âgé de 60 ans, porteur du VIH
et de l’ hépatite C ; son piercing datait de 4 ans.
Neuf mois après la pose, il présentait un écou-
lement urinaire autour du site du piercing
et souffrait de douleurs lors des rapports
sexuels ; il avait par la suite retiré son piercing.
Les symptômes cliniques n’ayant pas disparu,
il avait fini par consulter. À l’examen clinique,
la présence d’une fistule urétro-cutanée avec
un tissu de granulation au site du piercing
était constatée. Le diagnostic de carcinome
épidermoïde moyennement différencié était
posé sur la pièce de pénectomie partielle
(pT2N0M0). Un second patient âgé de 56 ans,
également porteur du VIH, avec un “prince
Albert” depuis près de 15 ans, présentait lui
aussi des problèmes urinaires liés au piercing
ainsi qu’une lésion cutanée nécrotique au
niveau du gland. Le patient était diagnos-
tiqué comme souffrant d’un carcinome épi-
dermoïde peu différencié invasif, nécessitant
là aussi une pénectomie partielle (pT3N0M0).
Commentaire. Il s’agit des 2premiers cas décrits
de cancer lié à un piercing génital. La littérature
médicale relate quelques cas très anecdotiques
de cancer de la peau sur piercing du nez et du
lobe de l’oreille, dont la véritable cause reste
cependant hautement hypothétique. On sait
que des carcinomes cutanés peuvent parfois
survenir sur des sites de traumatisme chronique,
d’inflammation chronique ou sur des cicatrices
(brûlures,etc.). Les auteurs postulent ainsi que le
piercing pourrait avoir contribué à cette inflam-
mation chronique via les traumatismes répétés
sur le pénis et l’urètre (où passe également le
piercing). Ils présument que ces carcinomes sont
d’origine urétrale.
Cependant, il convient de relativiser ces 2observa-
tions. Tout d’abord, les auteurs restent assez flous
aussi bien sur l’anamnèse que sur la chronologie
et l’évolution clinique avant la consultation. De
plus, il n’a pas été démontré, pour le moment,
de lien entre cancer cutané et piercings à partir
de larges séries d’individus “percés”. Enfin et
surtout, les 2patients étaient infectés par le
VIH et très probablement porteurs du virus HPV,
bien qu’aucun antécédent de condylome n’ait
été retrouvé. Il est très fortement probable que
ces 2cas de cancer du pénis soient liés au virus
HPV. Le rôle du piercing dans la survenue de ces
cancers reste donc difficile à confirmer.
À ce jour, en cas de piercing génital et surtout
d’infection par le VIH ou d’autres causes
d’immunodépression, le conseil le plus sage reste
de consulter en cas de lésion apparaissant près
du site du piercing, ou sur le site même.
N. Kluger, Montpellier
1. Skegg K, Nada-Raja S, Paul C et al. Body piercing, persona-
lity, and sexual behavior. Arch Sex Behav 2007;36(1):47-54.
2. Kluger N, Guillot B. Complications des piercings. Ann
Dermatol Venereol 2010;137(2):153-8.
3. Edin RS, Aaronson DS, Wu AK et al. Squamous cell car-
cinoma at the site of a prince Albert’s piercing. J Sex Med
2010;7:2280-3.
Le sunitinib et les tumeurs
urothéliales vont-ils faire équipe ?
À partir du rationnel d’une sur expres-
sion du VEGF dans un sous-groupe
agressif de tumeurs urothéliales (1), un
essai de phase II a cherché à tester l’efficacité
et la tolérance du sunitinib dans le traitement
des tumeurs urothéliales de stade avancé
après échec d’un traitement cytotoxique
(métastatique ou péri-opératoire) [2]. Entre
septembre 2006 et janvier 2009, 77 patients
ont été inclus, et ont reçu la molécule selon
2 schémas d’admi nistration : 45 patients dans
la cohorte A (50 mg/ j 4 semaines sur 6) et
32 patients dans la cohorte B (37,5 mg/ j
en continu). L’étude a mis en évidence
4 réponses partielles dans les 2 cohortes
(3 dans la cohorte A), une durée de réponse
médiane de 5,1 et 3,1 mois respectivement
pour les cohortes A et B, et aucune diffé-
rence en termes de survie sans progression
(p = 0,4) et de survie globale (p = 0,4) entre
les 2 schémas. Sur le plan de la tolérance,
74 % des patients ont présenté une toxicité
de grade 3-4, comparable dans les 2 schémas,
avec 1 décès toxique. Cette étude n’a pas
atteint son objectif principal (décroissance
tumorale > 20 % chez au moins 8 patients).
Comparée aux autres essais de deuxième
ligne avec le sunitinib, cette étude pré-
sente un taux de réponse inférieur (5,1 %
versus 6-32 % dans les autres études) et des
médianes de survie sans progression et de
survie globale comparables (7,1 mois dans la
cohorte A et 6 mois dans la cohorte B versus
4,5 à 11,5 mois dans les autres études). Les
auteurs ont mis en avant le bénéfice clinique
(défini comme une réponse partielle ou une
maladie stable durant plus de 3 mois) de ce
traitement malgré une tolérance médiocre, et
ont rappelé la faible corrélation existant entre
réponse objective (RECIST) et allongement
de la survie (sans progression et/ ou globale),
posant la question du choix du critère d’éva-
luation d’un traitement antiangiogénique
dans une étude de phase II.
Commentaire. Si ces données de phaseII ont
pu apparaître encourageantes aux auteurs pour
un traitement de deuxième ligne, la tolérance
s’est avérée très médiocre (3patients sur4
présentant une toxicité de grade3-4). L’étude
française VESSU, de phaseII, également en
deuxième ligne, a dû être interrompue pour
toxicité. Récemment, 2essais de phaseII ont testé
l’efficacité du sunitinib en première ligne pour
des tumeurs urothéliales avancées. Le premier,
concernant des patients unfit(3), a montré une
certaine efficacité du sunitinib en monothérapie,
avec une médiane de survie sans progression de
5,9mois. La deuxième étude(4), évaluant une
association de gemcitabine, cisplatine et sunitinib,
a été suspendue pour cause de toxicité majeure.
Cette étude reposait sur le rationnel d’une synergie
démontrée entre cisplatine et sunitinib sur des
xénogreffes de tumeurs de la vessie(5). Ainsi, la
place des antiangiogéniques (et, plus généra-
lement, des traitements ciblés) reste à définir dans
les tumeurs urothéliales, qui demeurent un des
parents pauvres du développement des nouvelles
molécules.
G. Roubaud, Bordeaux
1. Theodoropoulos VE, Lazaris AC, Kastriotis I et al. Evaluation
of hypoxia-inducible factor 1alpha overexpression as a pre-
dictor of tumour recurrence and progression in superficial
urothelial bladder carcinoma. BJU Int 2005;95(3):425-31.
2. Gallagher DJ, Milowsky MI, Gerst SR et al. Phase II study
of sunitinib in patients with metastatic urothelial cancer.
J Clin Oncol 2010;28(8):1373-9.
3. Bellmunt J, Gonzalez-Larriba JL, Maroto JP et al. First-
line treatment with sunitinib monotherapy in patients with
advanced urothelial cancer ineligible for cisplatin-based che-
motherapy: pretreatment levels of IL-8 and Hounsfield units
as predictors of clinical benefit. Proc ASCO 2010, abstr. 4540.
4. Galsky MD, Sonpavde G, Hellerstedt BA et al. Phase II
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with advanced urothelial carcinoma. ASCO 2010, abstr. 4573.
5. Sonpavde G, Jian W, Liu H et al. Sunitinib malate is active
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activity of cisplatin in a preclinical model. Urol Oncol
2009;27(4):391-9.