Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010
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Revue de presse
Coordination : Philippe Beuzeboc et Stéphane Oudard (Paris)
PROSTATE
Détermination d’un sous-groupe
d’hommes qui pourraient bénéficier
d’un traitement préventif du cancer
de la prostate par finastéride
Malgré l’étude de J.M. Thompson et al.(1), qui avait
montré une diminution du risque absolu de cancer
de la prostate de 25 % avec le nastéride –un inhi-
biteur de la 5-alpha-réductase–, celui-ci nest que
peu utilisé dans cette indication. La faible mortalité
générale du cancer de la prostate (moins de 3 %) et
ses eets indésirables (une diminution légère de la
libido) en constituent les raisons principales. De plus,
une utilisation large du nastéride ne serait pas éco-
nomiquement défendable.
En se fondant sur les données du Prostate Cancer
Prevention Trial, A.J.Vickers et al.(2) ont essayé de
déterminer des sous-groupes de malades à plus haut
risque de développer un cancer de la prostate, et chez
qui l’utilisation du nastéride pourrait se justier.
Dans le Prostate Cancer Prevention Trial, 9 058patients
âgés de plus de 55ans, ayant un taux de PSA inférieur
ou égal à 3 ng/ ml et un toucher rectal (TR) normal ont
été randomisés dans un bras recevant du nastéride
5 mg/ j (n=4 371) ou dans un bras placebo (n=4 687).
Tous ont eu un contrôle annuel du PSA et du TR. En cas
de taux de PSA au-delà de 4 ng/ ml ou de TR suspect,
une biopsie prostatique, en cours de protocole”, selon
la terminologie, était réalisée. À la n de l’étude, après
7ans de suivi, tous les malades qui navaient pas rempli
ces conditions subissaient une biopsie prostatique dite
de n d’étude”.
L’hypothèse était une réduction du nombre de biopsies
en cours de protocole et de cancers détectés à la biopsie
en n d’étude dans le groupe des malades traités par
nastéride.
Avec un suivi de 7ans, le diagnostic de cancer de la
prostate a été posé chez 1 957 des 9 058sujets (21,6 %) :
chez 798 des 4 371sujets sous nastéride (18,3 %) et
chez 1 159 des 4 687sujets sous placebo (24,7 %).
Environ la moitié de ces tumeurs (n=968, 10,7 %) ont
été découvertes à loccasion d’une biopsie en cours
de protocole : chez 418sujets dans le groupe nasté-
ride (9,6 %) et chez 550sujets dans le groupe placebo
(11,7 %). Lautre moitié des tumeurs (n=989, 10,9 %) ont
été diagnostiquées par une biopsie de n d’étude, donc
chez des sujets avec un PSA et un TR normaux : chez
475sujets sous nastéride (10,9 %) et chez 524sujets
sous placebo (11,2 %).
L’utilisation de nastéride permet donc d’obtenir une
diminution du risque relatif de cancer de la prostate de
6,4 % pour tous les cancers (de 24,7 % à 18,3 %), et de
2,1 % pour les tumeurs détectables à l’occasion d’une
biopsie indiquée par un taux de PSA au-dede 4 ng/ ml
et/ ou un TR suspect (de 11,7 % à 9,6 %).
Les auteurs ont ensuite réalisé une analyse stratiée
selon le taux de PSA an de déterminer les sous-groupes
à risque plus élevé chez qui les inconvénients de l’uti-
lisation du nastéride seraient acceptables au vu du
bénéce. Ils ont réalisé cette analyse statistique dans
deux cas de gure :
diminution du nombre des cancers de la prostate
découverts à l’occasion d’une biopsie indiquée par un
taux de PSA augmenté et/ ou un TR suspect ;
diminution du nombre de cancers de la prostate
découverts à l’occasion de la biopsie de n d’étude. Le
bénéce dépend à chaque fois du nombre de sujets
que le clinicien est disposé à traiter an de prévenir un
seul cas de cancer de la prostate.
Dans le premier cas de gure, les auteurs proposent
deux seuils de PSA pour l’instauration d’un traitement
par nastéride. Si le clinicien estime que traiter 30 à
50sujets pour prévenir un seul cancer de la prostate
est intéressant, la meilleure stratégie consiste à prendre
un seuil de PSA de 1,3 ng/ ml : il mettra alors 38 % de
ces patients sous nastéride et diminuera le taux de
découverte de cancers de la prostate de 1,8 % (donc de
11,7 % sous placebo versus 9,9 %). Si le clinicien estime
que traiter 15 à 20sujets pour prévenir un seul cancer
de la prostate est intéressant, le meilleur seuil de PSA
est de 2ng/ ml : il va traiter 17 % de ses patients par
nastéride pour obtenir une diminution du taux de
cancer de 1,1 % (donc de 11,7 % sous placebo versus
10,6 %).
Dans la deuxième analyse, les auteurs nont pu déter-
miner de seuil de PSA optimal. La stratégie statistique-
ment optimale consisterait à mettre tous les sujets sous
nastéride, même ceux avec un taux de PSA inférieur à
0,6 ng/ ml. Cependant, cette stratégie n’est sans doute
pas cliniquement optimale : chez de nombreux sujets, le
traitement par nastéride ne servirait qu’à éviter l’appa-
rition de tumeurs qui, même sans nastéride, n’auraient
jamais eu d’impact clinique.
B. Beuselinck, Paris
1. Thompson IM, Goodman PJ, Tangen CM et al. The influence of finas-
teride on the development of prostate cancer. N Engl J Med 2003;349(3):
215-24.
2. Vickers AJ, Savage CJ, Lilja H. Finasteride to prevent prostate cancer:
should all men or only a high-risk subgroup be treated? J Clin Oncol
2010;28(7):1112-6.
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Revue de presse
Tableau.
PSA > 20 ng/ml
uniquement + Stade cT > 2 + Gleason
biopsique > 7 + Stade cT > 2
et Gleason biopsique > 7
Stade pT > 2 (%) 66,7 89 90,4 95,5
N+ (%) 14,5 28,2 32,7 50
Marge positive (%) 44,3 59 67,3 79,5
Résultats de l’étude REDUCE de
prévention avec le dutastéride
chez des hommes à risque (PSA
élevé avec biopsies négatives)
Létude REDUCE (Reduction by
Dutasteride of Prostate Cancer Events) fait
pendant à l’essai précédent qui utilisait le
nastéride, avec la particularité de s’adresser
à une population bien sélectionnée. Le dutas-
téride, à l’inverse du nastéride, inhibe les
2isoformes de la 5α-réductase.
Cette étude multicentrique, randomisée,
en double aveugle et réalisée en groupes
parallèles a comparé le dutastéride à la dose
de 0,5 mg/ j à un placebo chez des patients
âgés de50 à 75ans ayant un taux de PSA
entre2,5 et 10 ng/ ml et ayant une série de 6
à12biopsies négatives dans les 6mois pré-
cédant l’inclusion. La biopsie était guidée par
échographie transrectale.
Parmi les 6 729hommes ayant eu une biopsie
ou une chirurgie prostatique, un cancer a
é détec chez659 des 3 305hommes
du groupe dutastéride et chez 858 des
3 424hommes du groupe placebo, ce qui
représente une réduction du risque relatif
de 22,8 % (IC
95
: 15,2-29,8) sur une période
de 4ans (p<0,001).
Durant les années1 à4, 220patients sur
3 299ont présenté une tumeur (score de
Gleason7-10) dans le bras dutastéride
versus233 sur3 407 dans le groupe placebo
(p=0,81). Durant les années3 à4, les auteurs
ont rele12tumeurs (score de Gleason8-10)
dans le bras dutastéride versus 1seule dans
le bras placebo (p=0,003).
Le dutastéride diminue également le risque
de tention aig d’urines (1,6 % versus 6,7 %,
soit une réduction du risque relatif de77,3 %).
Le taux d’eets indésirables était comparable
dans les 2groupes, sauf pour ce qui est de
l’insuffisance cardiaque, plus élevée dans
le groupe dutastéride : 0,7 % (30hommes)
versus 0,4 % (16hommes) [p=0,03].
Commentaire. Les auteurs concluent à la double
prévention par le dutastéride sur 4ans du risque
de cancer et de complications de l’hyper plasie
bénigne de la prostate.
P.Beuzeboc, Paris
Andriole GL, Bostwick DG, Brawley OW et al. Effect of
dutasteride on the risk of prostate cancer. N Engl J Med
2010;362:1192-202.
Faut-il une classification spécifique
pour les cancers de la prostate
à haut risque ?
Une valeur du PSA préthérapeutique supé-
rieure à20 ng/ ml a érapportée comme
étant le facteur pronostique le plus péjoratif
dans la classication de D’Amico. Cette étude
de cohorte rétrospective, multicentrique et
européenne s’est intéressée aux patients
ayant un cancer de la prostate localisé à haut
risque selon la classication de D’Amico sur
le critère d’un PSA préthérapeutique supé-
rieur à20 ng/ ml. Lobjectif était de déter-
miner dans quelle mesure les facteurs
pronostiques de haut risque de la classi-
cation de D’Amico ont une valeur indé-
pendante pour prédire le stade et le grade
anatomopathologique dénitifs, la survie
sans progression biologique et clinique,
la survie spécifique liée au cancer de la
prostate et la survie globale. Les données
relatives de 712patients traités par prosta-
tectomie totale avec curage ganglionnaire
entre 1987 et 2005 ont été étudiées avec un
suivi médian de 77mois. Des traitements
adjuvants/ néo-adjuvants ont été adminis-
trés de façon variable, en fonction du centre
où les patients ont été opérés.
Cette étude a montré que, en cas de PSA
préthérapeutique supérieur à20 ng/ ml, la
coexistence d’autres facteurs pronostiques
est corrélée à des données anatomopatho-
logiques péjoratives : stadesT plus élevés,
extensions ganglionnaires et marges posi-
tives plus fréquentes (tableau).
La valeur du PSA a été corrélée à la survie
sans progression biologique et clinique, mais
pas à la survie spécique liée au cancer de la
prostate ni à la survie globale. En revanche,
dans cette population au PSA préthéra-
peutique supérieur à20 ng/ ml, le score de
Gleason supérieur à7 et le stade clinique
cT supérieur à2 sont corrélés de manière
indépendante à l’ensemble des événements
considérés.
Commentaire. Cette étude confirme qu’un tiers
des cancers de la prostate classés à haut risque
selon la classification de D’Amico, uniquement
sur le critère d’un PSA préthérapeutique supé-
rieur à20 ng/ ml, sont localisés à la glande et donc
potentiellement curables par la chirurgie seule.
Les taux de survie sans progression, de survie
spécifique et de survie globale rapportés dans
cette étude corroborent le fait qu’il y a un intérêt
à sous-classifier les patients à haut risque, comme
l’ont proposé M.J. Zelefsky et al.
Par le nombre de cas étudiés, ce travail permet
d’apporter des informations dans le cadre spéci-
fique de cette sous-population de sujets à haut
risque. Les auteurs proposent donc une adap-
tation de la prise en charge thérapeutique en
fonction du nombre de facteurs pronostiques
simultanément présents. Cette étude n’a qu’un
niveau de preuve de IV C selon Sackett, ce qui
est trop faible pour formuler de quelconques
recommandations. L’absence d’homogénéité des
traitements adjuvants/ néo-adjuvants constitue
notamment un biais substantiel. Néanmoins,
l’information rapportée par cet article est impor-
tante et devrait être prise en considération dans
les futures études prospectives concernant les
thérapeutiques du cancer de la prostate à haut
risque.
Y.Neuzillet, Suresnes
Spahn M, Joniau S, Gontero P et al. Outcome predictors
of radical prostatectomy in patients with prostate-specific
antigen greater than 20 ng/ ml: a European multi-institu-
tional study of 712 patients. Eur Urol 2010 (sous presse).
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Revue de presse
et syndrome de retrait. Mais surtout, associer à
un stade avancé ces AAS avec un agoniste de la
LH-RH expose à un risque accru de 3 % de mor-
talité par rapport à la castration seule (Lukka et
al. Curr Oncol 2006), notamment du fait de la
morbidité cardio-vasculaire.
G. Roubaud, Bordeaux
Irani J, Salomon J, Oba R et al. Efficacy of venlafaxine,
medroxyprogesterone acetate, and cyproterone acetate for
the treatment of vasomotor hot flushes in men taking gona-
dotropin-releasing hormone analogues for prostate cancer:
a double-blind, randomized trial. Lancet 2010;11:147-54.
Quel schéma d’administration
pour le tamoxifène
dans la prévention des effets
indésirables liés au bicalutamide ?
Le bicalutamide, anti-androgène non
stéroïdien, peut provoquer une gyné-
comastie plus ou moins douloureuse et
des dysfonctions sexuelles. Un essai rando-
misé de phaseIII a comparé deux schémas
d’administration du tamoxifène dans la
prévention des effets indésirables liés au
bicalutamide, chez des patients traités en
monothérapie à un stade localisé ou locale-
ment évolué de cancer de la prostate. Cette
étude de non-infériorité avait pour objectif
de réduire l’exposition des patients à cet anti-
œstrogène. Quatre-vingts patients traités par
150 mg/ j de bicalutamide ont éinclus entre
décembre2003 et février2006 : 41 recevaient
20 mg/ j de tamoxifène et 39 en recevaient
20 mg/ sem. après 8semaines d’administration
quotidienne (20 mg/ j). Le suivi médian est de
24,2mois et la gynécomastie a été mesurée
par échographie, tandis qu’un questionnaire
évaluait les mastalgies et la fonction sexuelle.
Lessai a montré un net avantage du schéma
quotidien sur l’inci dence (p<0,0001) et la
sévérité (p=0,001) de la gynécomastie et sur
l’incidence de la mastalgie (p=0,001). Aucune
diérence n’a en revanche été observée sur
la fonction sexuelle et les autres eets indési-
rables. Aucune diérence sur le taux de PSA
n’a été rapportée entre les deux schémas,
aussi bien dans le groupe de patients ayant
une décroissance supérieure à50 % du PSA
(p=0,1) que dans le groupe de patients en
progression (p=0,5).
Faut-il poursuivre
la prostatectomie totale en cas
de curage ganglionnaire positif ?
Lors d’une prostatectomie totale (PT), la mise
en évidence d’un envahissement ganglion-
naire (N+) par le cancer de la prostate conduit
à interrompre lintervention. Cette étude
allemande rétrospective et multi centrique
a étudié la survie globale et la survie relative
(comme approximation de la survie spéci-
fique) chez 938patients N+ confirmé par
curage ganglionnaire selon que la PT a été
réalisée (n=688) ou non (n=250), avec un
suivi médian de 5,6ans.
Les survies globales à 5 et 10ans ont été de
84 % et 64 % respectivement dans le groupe
ayant eu la PT, versus 60 % et 28 % dans le
groupe sans PT. Les survies relatives ont, quant
à elles, été de 95 % et 86 % versus 70 % et 40 %
respectivement. En analyse multivariée, la PT
était un facteur pronostique indépendant,
avec un hazard-ratio de2,04.
Les auteurs concluent que l’abandon de la PT
en cas de curage ganglionnaire N+ pourrait
ne pas être justié.
Commentaire. Le rationnel de cette étude
réside dans deux hypothèses : la première est
que la PT permet d’éliminer les cellules cancé-
reuses contenues dans la prostate et qui peuvent
être à l’origine des métastases ; la seconde est
que les cellules cancéreuses contenues dans les
métastases ne sont pas à l’origine de nouvelles
métastases. Il y a plus de 10ans, R. Ghavamian
et al. avaient montré que la survie globale des
patients N+ traités par PT et hormonothérapie
était supérieure à celle des patients traités par
hormonothérapie seule. Létude de J.Engel et al.
est d’un niveau de preuve inférieur, car elle n’est
pas randomisée. Sa principale limite est liée aux
différences qui existaient entre les deux groupes
étudiés. Les patients traités par PT avaient des
valeurs de PSA pthérapeutiques plus faibles, des
stades cliniques moins avancés et un nombre de
ganglions envahis inférieur. Même en admettant
l’hypothèse que le nombre de ganglions envahis
soit davantage le marqueur du potentiel méta-
statique de la tumeur primitive qu’une source de
métastases, force est de constater que les patients
qui n’ont pas eu de PT avaient globalement des
cancers plus agressifs et plus avancés. Par consé-
quent, les résultats de cette étude, qui ne devraient
pas manquer d’être fréquemment cités en réfé-
rence, doivent être interprétés avec prudence.
Y.Neuzillet, Suresnes
Engel J, Bastian PJ, Baur H et al. Survival benefit of radical
prostatectomy in lymph node-positive patients with prostate
cancer. Eur Urol 2010;57:754-61.
Lacétate
de médroxyprogestérone :
un standard dans le traitement
des bouffées de chaleur ?
Un essai français multicentrique, randomisé
en double aveugle, s’est intéressé au traite-
ment des bouées de chaleur ressenties par
les patients sous privation androgénique,
par la leuproréline (agoniste de la LH-RH).
Entre avril2004 et avril2007, 919patients
ont été inclus dont 311randomisés, après
6mois de privation androgénique, dans l’un
des 3bras de traitement : 102 ont reçu de
la venlafaxine 75 mg/ j, 101 de lacétate de
cyprotérone 100 mg/ j et 108 de l’acétate de
médroxyprogestérone 20 mg/ j. Une évalua-
tion a été eectuée à l’inclusion, au moment
de la randomisation, puis 4, 8 et 12semaines
après la randomisation. Lobjectif principal
était la diminution de la médiane du nombre
de bouées de chaleur quotidiennes 1mois
après la randomisation. Cet objectif est atteint
pour les 3groupes, mais avec une supériorité
pour les groupes acétate de cyprotérone et
médroxyprogestérone comparativement au
bras venlafaxine (p<0,0001), après ajuste-
ment des données. Le taux d’observance est
de 96 %. Il n’y a pas de diérence signicative
entre la cyprotérone et la médroxyproges-
rone (p>0,2), sous réserve d’une plus grande
population pour la médroxyprogestérone.
Cette dernière pourrait constituer le nouveau
standard de traitement (préférée à la cypro-
térone, qui peut interférer avec la stratégie
de traitement antihormonal).
Commentaire. Les 2 molécules les plus efficaces
sont des anti-androgènes stéroïdiens (AAS), ce qui
pose le problème de l’interférence entre traitement
spécifique et symptomatique (essentiellement
pour la cyprotérone) : stratégie de traitement
Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010
11
Revue de presse
Commentaire. Cette étude confirme l’efficacité
du tamoxifène dans la prévention de la gyné-
comastie causée par le bicalutamide. Un essai
randomisé avait montré une efficacité dose-
dépendante du tamoxifène dans cette indication
(Fradet et al. Eur Urol 2007). Si cette molécule est
bien tolérée, son interférence avec l’hormonothé-
rapie sur le PSA reste une question méritant un
suivi, d’autant plus que cet essai n’autorise pas à
diminuer l’exposition au tamoxifène.
G. Roubaud, Bordeaux
Bedognetti D, Rubagotti A, Conti G et al. An open, rando-
mized, multicentre phase III trial comparing the efficacy
of two tamoxifen schedules in preventing gynaecomastia
induced by bicalutamide monotherapy in prostate cancer
patients. Eur Urol 2010;57:238-45.
Abiratérone : une nouvelle
hormono thérapie à suivre
dans le cancer de la prostate
Le cancer de la prostate est le cancer
le plus fréquent chez l’homme et la
seconde cause de décès par cancer chez
les hommes en Europe, et en particulier en
France. Le décès est directement lié au déve-
loppement progressif d’une résistance à la
castration (cancer réfractaire à la castration
[CRPC]). Depuis l’identication de la privation
hormonale (castration) par Charles Huggins
en 1941 et jusqu’à ce jour, seul le docétaxel
a montré une augmentation modeste de
la survie des patients. De nouvelles classes
thérapeutiques inhibant la voie des récep-
teurs aux androgènes sont en cours de déve-
loppement. L’abiratérone est un inhibiteur
oral, irréversible, sélectif de l’enzymeCYP17,
qui inhibe la synthèse des androgènes.
G.Attard et al. avaient démontré, dans une
étude de phaseI-II, que l’abiratérone a une
activité antitumorale importante chez les
patients CRPC (67 % des patients ont pré-
senté une diminution d’au moins 50 % du
PSA)[1].
De plus, C.J.Ryan et al. ont montré que
l’effica cité de l’abiratérone semble iden-
tique chez les patients auparavant traités ou
non par kétoconazole (64 % versus 47 %)[2].
D’autre part, les auteurs ont bien conrmé
que la dose d’abiratérone est très clairement
augmentée (>4fois) après un repas, et que
échappement hormonal dans 5centres amé-
ricains avec une escalade de dose allant de
30 mg/ j à 600mg/ j. Un eet antitumoral a
été noté quelle que soit la dose, avec une
diminution supérieure ou égale à50 % du PSA
chez 56 % des patients, un taux de réponse
objective sur des lésions évaluables de 22 %
(13/ 59) et une conversion de la présence
de cellules circulantes à 12semaines d’un
compte défavorable à favorable dans 56 %
des cas (61/109). À12semaines, la proportion
de patients présentant une réponse biolo-
gique de plus de 50 % sur le PSA était signi-
cativement plus importante avant qu’après
chimiothérapie (57 % [IC95 : 44-69 %] versus
36 % [IC95 : 25-48 %], p=0,02). Le temps
médian jusqu’à progression pour les lésions
radiologiques était de 47semaines. La dose
maximale tolée pour un traitement continu
(>28jours) était de 240 mg/ j.
Commentaire. La demi-vie est d’environ une
semaine, non modifiée par la dose. Les concen-
trations plasmatiques atteignent un taux stable
aps 1mois de traitement. Leffet indésirable le plus
fréquent est la fatigue. Des crises convulsives sont
survenues chez 2patients à des doses de 600 mg/ j
et 360 mg/ j, sans que l’imputabilité soit montrée.
Létude internationale AFFIRM de phaseIII du
MDV3100 à la dose de 160 mg/ j versus placebo
(randomisation2:1) après1 ou 2lignes de chimio-
thérapie est actuellement activée pour confirmer
ces résultats impressionnants.
P.Beuzeboc, Paris
Scher HI, Beer TM, Higano CS et al.; the Prostate Cancer
Foundation/department of Defense Prostate Cancer Clinical
Trials Consortium. Antitumour activity of MDV3100 in cas-
tration-resistant prostate cancer: a phase 1-2 study. Lancet
2010;375(9724):1437-46.
REIN
Carcinome papillaire du rein :
une taille inférieure à4cm
constitue un élément pronostique
significatif
E.L.Herrmann et al.(1) ont évalla pertinence
de la classication UICC TNM 2002 des tumeurs
du rein sur une large série rétrospective et
multicentrique (10centres) de 675cas de
la recommandation actuelle est de prendre
l’abiratérone à jeun.
Enn, A.H.Reid et al.(3) ont mont que l’abira-
térone a une activité antitumorale prometteuse
chez les patients CRPC ptrais par dotaxel
(51 % des patients ont présenté une diminution
d’au moins 50 % du PSA) ; l’étude de Danila et
al. est venue conrmer ces résultats (4).
Commentaire. Ces données encourageantes
des études de phasesI-II doivent être mainte-
nant validées par des phasesIII randomisées. Il
est à rappeler que l’étude de phaseIII comparant
l’abira térone plus stéroïde versus placebo plus sté-
roïde après docétaxel est terminée depuis 1an et
que les résultats sont attendus pour cette année.
De plus, l’étude de phaseIII évaluant l’abiratérone
chez des patients CRPC asymptomatiques avant
docétaxel est en cours. Espérons que ces études
confirmeront l’efficacité de l’abiratérone et qu’un
nouveau traitement sera bientôt disponible.
C.Massard, Villejuif
1. Attard G, Reid AH, Yap TA et al. Phase I clinical trial of a
selective inhibitor of CYP17, abiraterone acetate, confirms
that castration-resistant prostate cancer commonly remains
hormone driven. J Clin Oncol 2008;26:4563-71.
2. Ryan CJ, Smith MR, Fong L et al. Phase I clinical trial of
the CYP17 inhibitor abiraterone acetate demonstrating
clinical activity in patients with castration-resistant prostate
cancer who received prior ketoconazole therapy. J Clin Oncol
2010;28:1481-8.
3. Reid AH, Attard G, Danila DC et al. Significant and sustai-
ned antitumor activity in post-docetaxel, castration-resistant
prostate cancer with the CYP17 inhibitor abiraterone acetate.
J Clin Oncol 2010;28:1489-95.
4. Danila DC, Morris MJ, de Bono JS et al. Phase II multicenter
study of abiraterone acetate plus prednisone therapy in
patients with docetaxel-treated castration resistant prostate
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Attard G, Reid AH, A’Hern R et al. Selective inhibition of
CYP17 with abiraterone acetate is highly active in the treat-
ment of castration-resistant prostate cancer. J Clin Oncol
2009;27:3742-8.
MDV3100
Le MDV3100 est un antagoniste du
récepteur aux androgènes (RA) qui
bloque la xation des androgènes sur le
RA, empêche la translocation nucléaire du
complexe androgène/ RA et le recrutement
de coactivateurs. Son anité pour le RA est
très supérieure à celle du bicalutamide. Il n’a
pas deet agoniste, au contraire des anti-
androgènes habituels. Le Prostate Cancer
Clinical Trials Consortium a conduit un essai
de phaseI/II en recrutant 140patients qui
présentaient un cancer de la prostate en
DIAPOSITIVES
COMMENTÉES EN LIGNE
Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010
12
Revue de presse
3. Delahunt B. Advances and controversies in grading and
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current UICC/AJCC TNM staging for renal cell carcinoma.
Eur Urol 2009;56:636-43.
Néphrectomie partielle
et marges positives : quelle est
la valeur pronostique réelle ?
Dans leur série rétrospective et multi-
centrique, K.A. Bensalah et al.(1) ont
analysé la valeur pronostique des marges
chirurgicales positives (MCP) sur pièces de
néphrectomies partielles (NP) pour cancer
du rein (CR), et les facteurs prédictifs de
récidive ou de décès chez 111patients souf-
frant d’un CR non métastatique et traités
par NP. Tous ces patients présentaient des
MCP conrmées après relecture anatomo-
pathologique (cellules tumorales au contact
des marges encrées). L’âge moyen était de
61±12,5ans. Lindication de NP était for-
melle chez 43patients (38,7 %) [rein unique,
tumeurs bilatérales, insusance rénale]. La
taille moyenne du CR était de 3,5±2cm,
93 (83,8 %) étaient pT1. Dix-huit patients
(16,2 %) ont bénécié d’une chirurgie com-
plémentaire pour laquelle un reliquat tumoral
a été identié dans 7cas (6,3 %). Après un
suivi moyen de 37mois, 11CR (10 %) ont
récidivé et 12sujets (11 %) sont décédés,
dont6 (5,4 %) de progression tumorale. Dix
des onze récidives (91 %) et 10 des 12décès
(83,3, %) sont survenus chez des patients pour
lesquels l’indi cation de NP était formelle. En
comparant avec une rie non appariée de NP
marges chirurgicales négatives (MCN), seul
le taux de récidive apparaît signicativement
supérieur (10,1 % versus 2,2 % [p<0,0001])
dans le groupe avec MCP, sans incidence sur
les survies globale (SG) et spécique (SS).
Cette différence demeure en comparant
avec une série appariée (indication chirur-
gicale, taille et grade tumoraux) de CR MCN
(p=0,03). En analyse multivariée, seules l’indi-
cation chirurgicale et la localisation tumorale
(médio-rénale) apparaissent comme des fac-
teurs prédictifs de récidive tumorale. Aucun
des facteurs étudiés, y compris la présence
de MCP, n’inuence la SS.
carcinomes papillaires rénaux (CPR). La valeur
des paramètres classiques (âge, stade TNM,
grade de Fuhrman [GF]) sur les survies globale
(SG) et spécique (SS) à 5 et 10ans et sur la
survenance de métastases a été évaluée.
L’âge moyen des patients était de
62,8±11,7ans. Les sions étaient intrarénales
(pT1-2) dans 74,1 % des cas (pT1a : 229cas
[34,1 %], pT1b : 141cas [21 %], pT2 : 128cas
[19 %], pT3 dans 164cas [24,4 %] et pT4 dans
10cas [1,5 %]) ; 19patients (2,9 %) étaient N1,
37 (5,7 %) étaient N2 ; 127patients (19,9 %)
ont présenté des métastases viscérales. Le
GF était G1 dans 139cas (20,8 %), G2 dans
412cas (61,7 %) et G3-4 dans 113cas (16,9 %).
Le suivi moyen a été de 58,1mois.
Les SS et SG à5 et 10ans étaient de 82,8 % et
80,9 % et de 74,4 % et 61,5 % respectivement.
En analyse univariée, la SS était corrélée au
stade et au GF. Les auteurs ont observé une
diérence signicative de SS entre les tumeurs
pT1a et pT1b (98,2 % versus 90 % [p=0,027]),
mais non pas entre les pT1b et les pT2. Des
métastases étaient observées dans 50,6 %
des cas pT3, avec une forte incidence sur la
SS à 5ans (7,2 %) [SS moyenne de 11,4mois].
De même, en présence de localisations gan-
glionnaires, la SS moyenne était de 35mois
et la SS à 5ans, de 17,3 %. Enn, l’âge était
signicativement corrélé à la survie dans le
groupe des patients pT3 ou plus.
Commentaire. Ce travail confirme le bon pronostic
des CPR localisés pT1a(2). Il confirme également que
le seul critère de taille de la classi cation UICC TNM
2002, modifiée en 2009, nest pas pertinent au-de
de 4cm alors que le GF garde son intérêt dans le type
histologique CPR. Enfin, l’existence de localisations
tastatiques ganglionnaires ou viscérales est un
élément majeur du pronostic. Dans ces conditions,
un traitement pcoce des tumeurs de petites tailles
associé à un curage ganglionnaire en cas de loca-
lisation ganglionnaire unique est recommandé.
Devant les nouveaux moyens trapeutiques dispo-
nibles, la mise en place de systèmes de classification
plus pertinents s’impose cependant(3,4).
P.Camparo, Suresnes
1. Herrmann EL, Trojan F, Becker C et al. Prognostic factors of
papillary renal cell carcinoma: results from a multi-institu-
tional series after pathological review. J Urol 2010;183:460-6.
2. Teloken PE, Thompson RH, Tickoo SK et al. Prognostic
impact of histological subtype on surgically treated localized
renal cell carcinoma. J Urol 2009;182:2132-6.
Commentaire. Cette étude confirme le faible
risque de récidives et de progressions à court
terme des NP MCP(2). Ainsi, les foyers résiduels
de petite taille peuvent ne jamais progresser (des-
truction induite par le geste chirurgical). La faible
taille moyenne des CR (3,5cm) et le suivi relative-
ment court (3ans) ne permettent pas d’apprécier
l’impact des MCP à long terme. Enfin, l’analyse his-
tologique des marges présente les mêmes limites
que pour d’autres patho logies(3). Cependant,
cette étude suggère que seul un faible pourcen-
tage de NP MCP évoluera à court terme vers une
récidive locale, incitant à suivre ces patients de
façon précoce et attentive, plutôt que de proposer
un geste chirurgical complémentaire immédiat.
P.C.
1. Bensalah KA, Pantuck AJ, Rioux-Leclercq N et al. Positive
surgical margin appears to have negligible impact on sur-
vival of renal cell carcinomas treated by nephron-sparing
surgery. Eur Urol 2010;57:466-71.
2. Yossepowitch O, Thompson RH, Leibovich BC et al. Positive
surgical margins at partial nephrectomy: predictors and
oncological outcomes. J Urol 2008;179:2158-63.
3. Evans AJ, Henry PC, Van der Kwast TH et al. Interobserver
variability between expert urologic pathologists for extra-
prostatic extension and surgical margin status in radical
prostatectomy specimens. Am J Surg Pathol 2008;32:1503-12.
Tumeurs urothéliales
des voies excrétrices supérieures :
la présence d’emboles vasculaires
est corrélée à une diminution
de la survie sans récidive
et de la survie spécifique
La présence d’emboles vasculaires (EV)
constitue un élément pronostique d’agressi-
vité des tumeurs urothéliales des voies excré-
trices supérieures (TU VES). An de valider
cette armation, G.Novara et al. ont réalisé
une étude rétrospective, multi centrique
et internationale, portant sur 762patients
opérés dans 9centres, sans relecture centra-
lisée des données histologiques. La présence
d’EV a été corrélée à la survie globale (SG), la
survie sans récidive (SSR) et la survie spéci-
que (SS) ainsi qu’à la présence de ganglions
métastatiques (N+).
Cent quarante-huit des 762patients pré-
sentaient des EV (19,4 %). La présence
d’EV était corrélée au grade (p<0,0001),
au stade (p<0,001) et à la présence de N+
(p<0,0001). Le suivi moyen était de 34mois.
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