Troubles affectifs, antipsychotiques et thymorégulateurs : innovations thérapeutiques S191
Durée du traitement médicamenteux
Le trouble bipolaire est par dénition à risque élevé de
rechutes et justie un traitement au long cours. Une prise
en charge thérapeutique prolongée généralement, et une
prise en charge au long cours, s’avèrent nécessaires pour
minimiser le risque de rechutes, améliorer la qualité de vie
et le fonctionnement social et interpersonnel.
Selon la HAS, après un premier épisode de trouble bipo-
laire, le traitement doit être maintenu au moins 2 ans. Il
est souhaitable que ce traitement soit maintenu jusqu’à
5 ans si le patient présente des risques de rechutes élevés
tels qu’un épisode psychotique sévère, un abus ou une
dépendance à l’alcool et aux substances psychoactives illi-
cites (cannabis, stimulants, opiacés), des événements
ayant un retentissement sur le fonctionnement du patient,
un isolement social, une précarité. La durée du traitement,
les facteurs de risque de récidive, doivent être discutés
avec le patient et doivent être réévalués régulièrement. Si
le patient malgré tout souhaite arrêter prématurément son
traitement, il doit être encouragé à en discuter avec son
médecin.
La prise en charge des épisodes aigus maniaques
et hypomaniaques
Selon l’HAS, le traitement des troubles bipolaires lors des
épisodes aigus maniaques ou mixtes, hypomaniaques, repose
en première intention sur le thymorégulateur (le lithium),
les anticonvulsivants (le divalproate de sodium), les antipsy-
chotiques atypiques (l’olanzapine, la rispéridone, l’aripipra-
zole). La prescription repose sur le principe visant à
privilégier une monothérapie le plus souvent possible.
Pour les patients recevant déjà un traitement psycho-
trope, en cas d’échec thérapeutique, après avoir vérié
l’observance du patient, l’HAS recommande d’effectuer les
dosages plasmatiques du médicament et, le cas échéant,
de stupéants, et éventuellement d’augmenter la posolo-
gie des médicaments. Une récente revue de la littérature
scientique sur l’intérêt du dosage de la dépakinémie dans
le trouble bipolaire a conclu qu’il n’y avait pas d’arguments
en faveur du dosage de la dépakinémie en routine à l’ex-
ception de situations impliquant un métabolisme inhabituel
du valproate, une polythérapie entraînant des interactions
médicamenteuses cliniquement patentes ou la vérication
de la prise du traitement [26]. En l’absence d’effet de
cette augmentation de posologie ou dans l’impossibilité de
l’augmenter, l’HAS propose, soit de changer de traitement
thymorégulateur, soit de prescrire une association de trai-
tements. En effet, seulement 50 % des patients maniaques
répondent à une monothérapie et 75 % à une bithérapie
[32]. La littérature scientique recommande les associa-
tions telles que le lithium ou le divalproate avec un antip-
sychotique atypique [37, 38]. Si un antipsychotique n’est
pas déjà utilisé, les guidelines recommandent l’adjonction
d’un antipsychotique quand la symptomatologie du patient
comprend des signes psychotiques [39].
La HAS précise que d’autres traitements peuvent être
envisagés en deuxième intention pour les épisodes aigus,
maniaques ou mixtes, hypomaniaques : les anticonvulsi-
vants tels que la carbamazépine, le valpromide, l’oxcar-
bazépine (hors AMM), les neuroleptiques conventionnels
(hors AMM), d’autres antipsychotiques atypiques tels que
l’amisulpride, la clozapine (hors AMM). La prescription de
clozapine requiert des mesures de précaution obligatoires
(surveillance régulière de la numération formule leucocy-
taire et du nombre absolu de polynucléaires neutrophiles
(PNN) et doit être réalisées conformément aux recom-
mandations du résumé des caractéristiques du produit
(RCP)).
La prise en charge des épisodes dépressifs aigus
Pour les patients traités pour un trouble bipolaire, l’HAS
recommande de vérier si la dose du traitement est appro-
priée et de l’augmenter le cas échéant. Si nécessaire, un
antidépresseur est prescrit en association au traitement du
trouble bipolaire. L’HAS rappelle que les antidépresseurs
qui sont prescrits hors AMM sont à utiliser avec précaution
et sous étroite surveillance, en raison du risque accru de
comportement suicidaire et en raison du risque de virage
maniaque (auquel cas le traitement devra être arrêté).
Pour les patients non traités, l’HAS précise que si un
antidépresseur doit être prescrit, il doit l’être en associa-
tion avec un traitement thymorégulateur : le lithium, le
divalproate de sodium, la carbamazépine. La littérature
scientique suggère de prescrire, en première intention,
du lithium, du divalproate de sodium, de la lamotrigine, de
la quetiapine [32]. La quetiapine est un antipsychotique
atypique qui n’a pas encore obtenu l’AMM en France. Il faut
souligner que le lithium est le seul traitement à posséder
des propriétés anti-suicidaires [11, 31].
Selon la HAS, en association avec un antidépresseur,
pour certains patients non contrôlés par un traitement thy-
morégulateur, d’autres traitements du trouble bipolaire
peuvent être prescrits (hors AMM) : l’olanzapine, la rispéri-
done, l’aripiprazole, la lamotrigine. La littérature scienti-
que recommande, en première intention, les associations
suivantes pour traiter une dépression bipolaire : l’olanza-
pine avec la uoxétine [40] et le lithium associé au dival-
proate de sodium ou à la lamotrigine [41, 45].
La HAS conseille de prescrire en première intention un
inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS)
sous couvert d’un thymorégulateur. D’autres classes d’anti-
dépresseurs peuvent être également envisagées mais tou-
jours en association à un thymorégulateur : les inhibiteurs
de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, la
tianeptine, la miansérine, la mirtazapine, les IMAO, les
antidépresseurs tricycliques (les antidépresseurs tricycli-
ques ne sont pas recommandés en première intention dans
le traitement des épisodes aigus dépressifs en raison de la
fréquence des virages maniaques entraînés par ces traite-
ments). La HAS recommande de débuter l’antidépresseur à
une posologie efcace la plus basse possible, et d’augmen-
ter celle-ci progressivement si nécessaire. Si nécessaire,
les benzodiazépines et les hypnotiques peuvent être utili-
sés en tant que traitements adjuvants des épisodes dépres-
sifs. En cas de résistance de l’épisode dépressif à un
traitement, il est recommandé de vérier l’observance du