Approches substitutive et diététique du trouble autistique de l’enfant 499
récurrents ou un ralentissement du transit intestinal sont
observés chez 40 à 60 % des enfants autistes et la mala-
die cœliaque, ou intolérance au gluten, a été l’un des
troubles somatiques suspecté d’être associé à l’autisme.
Certains auteurs ont objectivé une augmentation de la
perméabilité digestive, grâce à un test d’absorption au
mannitol et au lactulose réalisé chez des enfants autistes
et pour D’Eufémia et al., 43 % des enfants autistes âgés de
quatre à 16 ans ne présentant pas de maladie cœliaque
ont une perméabilité intestinale accrue [3]. Il semble tou-
tefois que cette association soit remise en question et
comme le souligne une revue de la littérature de Robel et
al.,l’étude de Pavone et al. n’a retrouvé aucun symp-
tôme autistique chez 120 enfants atteints de maladie
cœliaque, qu’ils bénéficient ou non d’un régime sans glu-
ten et sans caséine (SGSC) [19,22,26]. C’est néanmoins à
partir de cette hypothèse qu’il a été suggéré qu’un régime
pauvre en protéines, SGSC, améliorerait les différents
symptômes autistiques en diminuant l’effet toxique des
petits peptides sur le système nerveux central [11,21] ;
•l’autre anomalie suspectée est celle d’un trouble de la
digestion des protéines du fait d’un déficit enzymatique
qui favoriserait la production de ces petits peptides. Ce
déficit serait compensé par l’apport de peptidases issues
d’extraits pancréatiques ou par la stimulation du pancréas
par la sécrétine par exemple. Cela a fait l’objet d’essais
thérapeutiques contrôlés n’ayant pas mis en évidence
l’intérêt de son utilisation dans l’autisme et la sécrétine
n’est autorisée ni par la food and drug administration ni
en Europe. Des effets secondaires sérieux ont même été
décrits chez les enfants : état aggravé chez5à10%des
enfants avec une recrudescence de l’hyperactivité et de
l’agressivité [5] ;
•la dernière anomalie évoquée responsable d’un trouble de
l’absorption digestive concerne l’hypothèse d’une aller-
gie alimentaire mais certains auteurs considèrent que
l’excès d’Ig A serait la conséquence du trouble de la
perméabilité digestive et non pas sa cause et que les anti-
corps en excès ne seraient finalement que les marqueurs
de ce trouble.
Les troubles des acides aminés
Nous l’avons déjà vu, la première description d’une amino-
acidopathie primaire chez les autistes, la phénylcétonurie,
a été faite par Friedman en 1969, mais Jackson et Garrod
en 1978 [9] n’ont pas retrouvé de taux anormaux d’autres
acides aminés au sein d’un groupe de 20 sujets autistes.
En 1979, un cas d’histidinémie associé à un trouble autis-
tique a été décrit par Kotsopoulos et Kutty [13]. Perry et
al. n’ont pas non plus retrouvé d’aminoacidopathie au sein
d’un groupe de 34 patients avec psychose infantile mais
ont rapporté une élévation significative de la concentration
d’éthanolamine dans le liquide céphalorachidien d’enfants
autistes [9,13,20]. En 1994, une étude contrôlée de Visconti
et al. a porté sur 37 sujets autistes (en référence aux critères
diagnostiques du DSM-III, 1980), âgés en moyenne de sept
ans, et sur un groupe de 19 sujets, âgés en moyenne de huit
ans, indemnes de trouble psychiatrique ou neurologique. Les
auteurs ont rapporté une augmentation significative du taux
de tyrosine plasmatique et des taux de cystine urinaire plus
bas chez les enfants autistes comparés au groupe témoin.
Les auteurs écartent l’hypothèse d’une aminoacidopathie
primaire et suggèrent que cette augmentation de la tyro-
sine soit le reflet d’un trouble du transport membranaire.
Sans tirer de conclusions fermes, ils suggèrent l’intérêt de
la poursuite des études métaboliques [28].
Une diminution du taux plasmatique d’acide glutamique
et d’acide aspartique serait relevée et environ 60 % des
enfants autistes auraient un déficit d’au moins un acide
aminé [27]. Perry et al. ont eux rapporté une baisse signi-
ficative de la méthionine, de la leucine et de l’isoleucine
chez des enfants présentant un trouble du développement
comparés à un groupe témoin [20].
En fait, l’ensemble des auteurs s’accorde pour attribuer
la majorité de ces déficits en acide aminé à la sélectivité
alimentaire des enfants autistes et non pas à un trouble
métabolique primaire.
Les troubles du système immunitaire
Un certain nombre de parents d’enfants autistes décrivent
une intolérance de leur enfant à des aliments spéci-
fiques. Les aliments le plus fréquemment incriminés seraient
le bœuf, le porc, le riz, les pommes de terre, les
œufs, les tomates, les aubergines, le poivre rouge, le
soja et le maïs. L’incrimination de l’allergie alimentaire
comme facteur étiologique de l’autisme est également
issue de l’observation d’un taux beaucoup plus élevé
d’immunoglobulines chez les autistes que dans des groupes
témoins, mais sans qu’il s’agisse d’une élévation des IgE
comme l’on aurait pu s’y attendre en cas d’allergie [16].
Certaines études ont même suggéré que les autistes pré-
sentant une réaction positive aux IgG auraient, grâce à
un régime, une meilleure évolution que les sujets sans
réaction aux IgG alimentaires [11]. Selon Lucarelli et al.
[16], l’augmentation des IgA, IgG et IgM observée chez ces
sujets serait en faveur d’une stimulation excessive du sys-
tème immunitaire par une exposition à un taux inhabituel
d’antigènes chez ces patients. L’excès d’antigènes, supposé
à l’origine des troubles observés, ne serait pas seulement
secondaire à une absorption intestinale mal régulée des
protéines mais serait aussi secondaire à une exposition
excessive à d’autres antigènes qui restent à déterminer.
Les perturbations mitochondriales et les troubles du
catabolisme des sucres
Issus du catabolisme des glucides, les corps cétoniques
sont des molécules toxiques pour les cellules neuronales
et peuvent être à l’origine de troubles de la conscience
pouvant aller jusqu’au coma. Ces corps cétoniques ont été
incriminés dans la genèse de crises comitiales et des régimes
pauvres en produits producteurs d’acétone ont montré leur
intérêt pour diminuer la fréquence des crises chez les
patients épileptiques. Ainsi, dans une étude sur 30 enfants,
âgés en moyenne de sept ans et présentant des comporte-
ments autistiques, il a été retrouvé des taux anormalement
élevés de corps cétoniques dans le sang de ces sujets, ce
qui a été attribué à un trouble du catabolisme du glucose au
niveau mitochondrial. C’est l’effet de ces corps cétoniques
sur le système nerveux central qui serait ainsi à l’origine des
troubles du comportement et la comitialité observée chez
les autistes pourrait être due à ces corps cétoniques [6].