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L’Encéphale, 2007 ; 33 : Octobre, cahier 2
Discussion
B. ÉTAIN (1)
Cette situation illustre parfaitement un cas fréquent
en pratique clinique, celui d’un patient qui présente,
malgré un doublement de posologie du traitement an-
tidépresseur, des symptômes résiduels, et qui, malgré
la persistance de ces symptômes résiduels, interrompt
son traitement, sans en prévenir son médecin référent
ni son psychiatre, avant le délai minimal de six mois
que l’on recommande pour le traitement d’un épisode
dépressif majeur (1).
La persistance des symptômes résiduels est fré-
quente dans le cadre des épisodes dépressifs ma-
jeurs, puisqu’on estime qu’un tiers des patients qui
présentent une réponse positive au traitement antidé-
presseur vont présenter des symptômes résiduels de
manière persistante (1). La persistance de ces symp-
tômes résiduels dépressifs est d’autant plus fréquente
que le patient présente, lors de l’évaluation initiale, une
symptomatologie associée, anxieuse par exemple : à
l’arrêt du traitement médicamenteux, la persistance de
symptômes résiduels augmente le risque de rechute
ou de récidive chez le patient concerné (1).
Il est donc important, au cours des différentes
consultations, de faire une évaluation de manière pré-
cise pour déterminer les symptômes qui ont répondu
complètement au traitement antidépresseur, et ceux
au contraire pour lesquels la réponse n’est que par-
tielle. En effet, ce sont ces symptômes résiduels qui
déterminent une partie du pronostic de l’épisode dé-
pressif majeur (1).
Par ailleurs, on retrouve dans ce cas clinique la si-
tuation fréquente d’un patient qui interrompt de ma-
nière précoce son traitement, sans en référer à ses
médecins : en effet, 44 % interrompent leur traitement
médicamenteux dans les trois premiers mois de traite-
ment, et la quasi-totalité des patients qui interrompent
leur traitement médicamenteux dans ces trois premiers
mois de traitement le font sans accord médical préa-
lable (2) - les recommandations de l’Afssaps pour la
durée d’un traitement d’un épisode dépressif majeur
étant de quatre à neuf mois (1).
Pour éviter une mauvaise observance des patients
à leur traitement médicamenteux, il faut, en pratique
quotidienne, obtenir leur adhésion au diagnostic for-
mulé : un patient ne prendra pas un traitement anti-
dépresseur s’il n’est pas persuadé que le diagnostic
de dépression posé est celui qui correspond à sa si-
tuation clinique. Il faut aussi lui permettre d’exprimer
librement ses craintes vis-à-vis d’un traitement antidé-
presseur. La plupart des patients craignent des risques
de dépendance, des risques de modifi cation de leur
personnalité, des effets secondaires gênants voire in-
tolérables ; la discussion préalable de ces craintes est
un facteur qui renforce l’observance.
Il faut informer le patient de la durée minimum de
traitement, ce qui est diffi cile, les patients acceptant
mal d’emblée la perspective d’un traitement au long
court, de plusieurs mois. Il faut les informer égale-
ment de la nécessité, une fois l’amélioration obtenue,
de poursuivre le traitement médicamenteux jusqu’à
ce que cette amélioration soit consolidée pendant la
période requise. Ces aspects psycho-éducatifs font,
pour une grande partie, avec la tolérance au traitement
médicamenteux, le lit de l’observance que le patient
présentera au traitement proposé. Enfi n, il faut que la
communication et la collaboration entre le médecin
psychiatre et le médecin généraliste soient de bonne
qualité, pour améliorer la stratégie psycho éducative
faite auprès du patient : ceci constitue des facteurs de
bons pronostics pour éviter qu’un patient n’interrompe
trop tôt son traitement médicamenteux et ne rechute.
(1) Praticien hospitalier, Pôle de Psychiatrie du Pr Leboyer, hôpital Albert-Chenevier, 40, rue de Mesly, 94000 Créteil.
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Références
1. AFSSAPS octobre 2006, Bon usage des médicaments antidé-
presseurs dans le traitement des troubles dépressifs et des trou-
bles anxieux de l’adulte
http://agmed.sante.gouv.fr/htm/5/rbp/indrbp.htm
2. Prakash et Mesand. Tolerability and adhérence issues in antide-
pressant therapy. Clinical Therapeutics ; 2003 : 25(8).
B. Etain L’Encéphale, 2007 ; 33 : pages, cahier 2
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