B. Claustrat L’Encéphale, 2006 ;
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lisation nécessite préalablement d’optimiser la pharmaco-
cinétique. Plusieurs mécanismes physiopathologiques
qui ne sont pas exclusifs peuvent être envisagés dans les
céphalées : déficit sympathique régional, hypersensibilité
de la voie rétinohypothalamique, trouble fonctionnel au
niveau des NSC (5, 19, 33). Considérant le rôle potentiel
de la glande pinéale dans le maintien de l’équilibre
homéostatique, un déficit de sécrétion de mélatonine
pourrait renforcer la vulnérabilité de l’organisation rythmi-
que du système nerveux central et faciliter la cascade
d’événements en rapport avec l’inflammation périvascu-
laire impliquant le système trigéminovasculaire dont une
branche assure le contrôle sensoriel de l’épiphyse.
Pathologies infectieuses
Dans l’insomnie fatale familiale, la dégradation progres-
sive du profil de mélatonine suggère un rôle modulateur
du thalamus dans le contrôle de sa sécrétion (24). Dans
la trypanosomiase africaine, selon la gravité, le sommeil
peut s’organiser en profil quasi ultradien, alors que le
rythme circadien de température persiste et que le rythme
de mélatonine présente une avance de phase, peut-être
en rapport avec un déficit de la projection sérotoninergique
du raphé vers les NSC (4). La perturbation dissociée des
3 rythmes précités suggère une anomalie entre l’horloge
circadienne et les structures impliquées dans la régulation
du cycle veille-sommeil.
Maladies neurodégénératives
Les perturbations des rythmes chez le parkinsonien, en
particulier du rythme de mélatonine, ont été envisagées
dans l’article de B. Bruguerolle. Concernant la maladie
d’Alzheimer, la fragmentation du rythme veille-sommeil
est plus prononcée que celle survenant chez les sujets
âgés. Les patients présentent une agitation diurne, en par-
ticulier en fin de journée
(sun downing)
. Plusieurs études
ont montré que les concentrations nocturnes de mélato-
nine sont sélectivement diminuées et les concentrations
diurnes augmentées dans l’Alzheimer (30). La disparition
de sécrétion nocturne de mélatonine est corrélée avec les
troubles circadiens. La concentration de mélatonine est
aussi fortement diminuée dans le LCR prélevé en post-
mortem ainsi que dans la glande pinéale. Cette baisse est
renforcée chez les patients possédant l’APOE 4/4, com-
paré aux patients exprimant le type APOE 3/4 (17).
Mentionnons pour terminer cette revue que le rythme
de mélatonine est aboli dans le syndrome de Wernicke-
Korsakoff, alors que le cycle du cortisol persiste avec un
profil normal (29). L’imagerie par IRM montrait une atro-
phie des corps mamillaires, qui constitue un caractère
relativement spécifique de l’encéphalopathie de Wer-
nicke, alors qu’aucune anomalie macroscopique de la
pinéale ou de l’hypothalamus n’était révélée.
CONCLUSION
Certaines atteintes neurologiques s’accompagnent de
troubles des rythmes circadiens, du cycle veille-sommeil
en particulier, qui peuvent contribuer au processus mor-
bide. L’identification de véritables symptômes chronobio-
logiques a orienté vers une chronothérapie : administra-
tion de mélatonine en présence d’un déficit de sécrétion
de cette hormone, associé à un sommeil instable ou un
rythme veille-sommeil dégradé. À l’action chronobiotique
de la mélatonine peuvent se surajouter ses effets sopori-
fiques et antioxydants, potentiellement favorables dans
les maladies neurodégénératives. Par ailleurs, la photo-
thérapie s’est révélée efficace sur certains symptômes de
la maladie d’Alzheimer (28). Des essais contrôlés sont
nécessaires pour confirmer ces ouvertures thérapeuti-
ques.
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