
S68 M. Sokolowsky et al.
entre eux pour produire le phénotype selon un modèle
multi local avec épistasie. Au moins 3-4 gènes prédisposant
seraient impliqués [7], avec près de 15 loci [8]. Le polymor-
phisme et l’hétérogénéité clinique des TSA est un refl et du
polymorphisme génétique.
D’autres facteurs comme le sexe et l’environnement
infl uencent l’expression phénotypique. L’intervention de
mécanismes épigénétiques comme les défauts de méthyla-
tion de l’ADN sont probables [9,10].
Si les TSA sont hautement héritables, l’identifi cation des
gènes de susceptibilité reste vaine. En raison de la probable
hétérogénéité génétique, mais aussi de notre ignorance de la
physiopathologie des TSA, ce qui ne permet pas la recherche
de gènes candidats.
Les études de linkage sur la totalité du génome des TSA
et de leurs apparentés ont produit de maigres résultats, en
regard de la complexité et du coût de telles études. Ces
résultats constituent cependant une première étape vers
l’identifi cation des locus de susceptibilité. Une douzaine
d’études a été publiée ces dix dernières années dans le
cadre « Autism Project Consortium 2007 ». L’intérêt se centre
autour de quelques régions [11] :
• Chr 7q région AUTs 1 ;
• Chr 2q, Lamb 2005 ;
• 17q ;
• 11q12-13.
Reste à préciser le rôle de ces locus ; ce qui s’annonce
bien diffi cile. Les études de linkage ont surtout mis en lumière
l’absence de reproduction des résultats entre les différentes
études. Ce qui souligne l’extension de l’hétérogénéité du
déterminisme génétique des TSA.
Le phénotype TSA, comme tout phénotype, exprime la
coopération de son génotype avec l’environnement. Les
modèles de troubles complexes génétiquement déterminés
sont un ballet interactivement chorégraphié impliquant
génotype, environnement et facteurs épigénétiques d’où
émerge le phénotype particulier.
La psychiatrie rencontre peu de succès dans l’identifi ca-
tion de gènes ou de locus « coupables » du développement
de catégories de troubles mentaux tels que référencés dans
les classifi cations.
Les raisons en sont multiples. Ces catégories de trouble
sont souvent hétérogènes et recouvrent probablement des
dimensions de pathologies distinctes. Le déterminisme de
ces pathologies est multifactoriel et, lorsqu’un déterminisme
génétique est impliqué, il est au moins polygénique, du moins
au niveau des gènes candidats. Enfi n le cerveau est le plus
complexe de tous les organes. C’est même l’objet le plus
complexe de l’univers.
Comment rechercher les gènes candidats
au phénotype TSA ?
En recherchant des altérations comportementales ou des
anomalies cérébrales, morphologiques ou fonctionnelles,
avec une connexion génétique. C’est l’objectif du concept
d’endophénotype en psychiatrie, utilisé dans les schizoph-
rénies et les troubles bipolaires.
Pour qu’un marqueur soit considéré comme un endophé-
notype, il doit répondre à 5 critères :
• 1. Le marqueur est associé avec la pathologie dans la
population ;
• 2. Le marqueur est héritable ;
• 3. La présence du marqueur est constante que la pathologie
soit active ou inactive ;
• 4. Dans la famille le marqueur et la pathologie sont liés ;
• 5. Le marqueur retrouvé chez les membres affectés de la
famille doit être retrouvé chez les membres non affectés
à un taux plus élevé que dans la population générale.
Mais la tâche est complexe. Les TSA ne forment pas une
catégorie de troubles, mais une dimension de troubles dont
le spectre d’expression clinique va du plus dense au plus
ténu voire à l’indécelable. Les TSA présentent une grande
hétérogénéité clinique et, semble t-il, génétique. Nous
savons mesurer l’intensité des 3 syndromes constitutifs du
trouble : altération qualitative des interactions sociales,
altération qualitative de la communication et activités
restreintes et stéréotypées. Sur le plan para clinique
l’imagerie cérébrale a permis d’établir un catalogue
d’anomalies cérébrales morphologiques et fonctionnelles
dont aucune n’est spécifi que, mais retrouvées chez les
apparentés indemnes de TSA. Si la corrélation statistique de
ces anomalies cérébrales avec le phénotype TSA est établie,
nous ne savons pas faire le lien physiopathologique entre ces
anomalies cérébrales et les syndromes comportementaux
du phénotype TSA.
Symptômes cliniques
La recherche s’est orientée vers le niveau symptomatique
avec l’évitement du regard. Nacewicz et Dalton [12], ont
retenu ce symptôme majeur de TSA et l’ont recherché dans
la fratrie indemne d’enfants TSA. Pour retrouver le même
taux d’évitement du regard dans la fratrie indemne que
chez les enfants TSA. La comparaison des IRM cérébrales
des deux groupes retrouve une identique hypotrophie de
l’amygdale cérébrale. L’amygdale cérébrale est impliquée
dans la poursuite oculaire et la reconnaissance faciale. Or il
semble que les enfants victimes de TSA soient en diffi culté
pour reconnaitre les émotions traduites par les expressions
faciales. Leurs frères indemnes de TSA sont eux capables de
reconnaissance des émotions sur les visages.
Hypothèse, les frères indemnes pourraient avoir déve-
loppé des systèmes palliatifs aux fonctions défaillantes de
l’amygdale hypotrophiée.
Hypothèse qui ouvre une cascade d’hypothèses
conséquentes.
Sur le plan pathogénique, si l’altération phénotypale
au niveau de l’amygdale est la même, des facteurs envi-
ronnementaux sont-ils impliqués dans le développement
ou le non développement de circuits de suppléance ? Si des
circuits de suppléance se sont développés sous l’action de
l’environnement chez les frères indemnes, ne pourrait-on
pas modifi er l’environnement des TSA pour permettre le
développement de ces suppléances ? La modifi cation de
l’environnement des enfants victimes de TSA est à la base
de toutes les stratégies de soin actuellement validées.
Mais ces modifi cations sont, pour l’heure, totalement
empiriques.
Nacewicz et Dalton utilisent ensuite l’IRM fonctionnelle
pour examiner l’activité cérébrale entrante et sortante de
l’amygdale lorsque les TSA regardent des images de visages
exprimant différentes émotions. Pour constater un défi cit des
connections de l’amygdale avec le cortex préfrontal et une
hypertrophie des connections de l’amygdale avec des struc-
tures cérébrales archaïques, impliquées dans le traitement