L’Encéphale (2011) 37, 180—190
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP
CLINIQUE
Le trouble déficitaire de l’attention, avec ou sans
hyperactivité (TDA/H) : une approche
pluridisciplinaire longitudinale croisée de
36 enfants
Attention deficit disorder: Multidisciplinary observational
study over 1 year
J. Chambrya, C. Billardb,, M. Guinardc, E. Lacazeb, M.-E. Idiartb,
F. Delteil-Pintonb, A. Cohen de Larac
aInserm U669, fondation Vallée, CHU de Bicêtre, université Paris VII et Paris XI, 94275 Le-Kremlin-Bicêtre, France
bCentre de référence sur les troubles des apprentissages, hôpital Bicêtre, 28, rue du Général-Leclerc,
94275 Le-Kremlin-Bicêtre, France
cLaboratoire de psychologie clinique et de psychopathologie, université Paris—Descartes, 92100 Paris, France
Rec¸u le 28 janvier 2010 ; accepté le 22 novembre 2010
Disponible sur Internet le 5 mars 2011
MOTS CLÉS
TDAH ;
Psychanalyse ;
Neuropsychologie ;
Traitement ;
Méthylphenidate
Résumé Le trouble déficitaire de l’attention (TDA/H) reste en France controversé entre
l’approche neurobiologique et l’approche psychanalytique. En conséquence, la conduite thé-
rapeutique n’est pas consensuelle, le méthylphénidate (MPH) est peu utilisé et il n’y a pas
de référentiel sur la prise en charge psychothérapeutique. Une évaluation croisée pluridisci-
plinaire (neuropédiatrique, psychiatrique, neuropsychologique et projective) a été proposée
à 36 enfants avec les critères DSMIV du TDA/H. Un traitement combinant MPH et psycho-
thérapie d’orientation analytique a été proposé selon les résultats et 31 des 36 enfants ont
été revus à 1 an. Lors de l’évaluation initiale, tous les questionnaires parentaux produisaient
des scores au-delà des seuils cliniques. Les tests neuropsychologiques ont montré les déficits
habituels des fonctions attentionnelles et exécutives avec une large variabilité individuelle.
L’entretien pédopsychiatrique a révélé une comorbidité fréquente selon l’axe 1 du DSM IV (57 %
de troubles anxieux, 23 % de troubles oppositionnels et 3 % des conduites) ainsi qu’une fragi-
lité narcissique chez 46 % selon la CFTMEA. Une organisation limite de la personnalité a été
retenue chez 30 % des enfants par le pédopsychiatre et 58 % selon les tests projectifs. Seule la
Cette étude a été réalisée grâce à la Société d’études et de soins pour les enfants polymalformés (SESEP) et à l’Association pour la
recherche sur les troubles des apprentissages (ARTA).
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (C. Billard).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2011.
doi:10.1016/j.encep.2011.01.012
Approche pluridisciplinaire des troubles déficitaires de l’attention 181
variabilité des temps de réaction différait selon le type d’organisation psychopathologique aux
dépends des enfants avec une organisation limite aux projectifs. À un an, 11 enfants n’étaient
pas traités par le MPH du fait d’un refus parental ou d’une situation psychopathologique par-
ticulière. La psychothérapie, proposée à 28 enfants, n’a été effectuée que chez 19. Les scores
attentionnels n’ont été améliorés que dans le groupe traité par le MPH et les scores d’anxiété
dans le groupe non traité. Cette étude originale, tout comme les résultats à huit ans de la
cohorte Multimodal treatment study of ADHD (MTA) ne montrant pas d’effet du MPH à long
terme, souligne l’importance de la perspective pluridisciplinaire. Les tests neuropsychologiques
précisent la variabilité interindividuelle du profil des déficits attentionnels et objectivent leur
évolution. Les tests projectifs affinent l’entretien pédopsychiatrique et l’organisation de la
personnalité est limite chez la moitié des enfants. Le rôle du MPH est confirmé sur les déficits
attentionnels et non sur la comorbidité anxieuse. Ce résultat ainsi que l’absence de corréla-
tion entre la plupart des scores attentionnels et les données pédopsychiatriques et projectives,
renforcent la nécessité d’une analyse sans a priori du déficit attentionnel et des facteurs psycho-
pathologiques pour réfléchir au projet thérapeutique individuel. Le dialogue entre psychanalyse
et science cognitive est possible au bénéfice des enfants.
© L’Encéphale, Paris, 2011.
KEYWORDS
ADHD;
Psychoanalysis;
Neuropsychological
tests;
Methylphenidate
Summary
Introduction. — In France, attention deficit disorder (ADHD) has traditionally met with two
opposing approaches (biological and psychoanalytic). This conflict led us to conduct a mul-
tidisciplinary observational study, on a group of 36children over a period of 1 year.
Methods. — Thirty-six children with ADHD diagnostic (DSM IV), not treated by MPH were inclu-
ded. Initial ‘‘multi-field’’ evaluation (T0) consisted of: neuro-paediatric consultation (Conners
questionnaire, Child Behaviour Checklist, reading and writing scores by French tests); semi-
structured child psychiatric interview (DSM-IV axis I), structural hypothesis (CFTMEA), existence
of narcissistic fragility, parents/child interactions; neuropsychological standardized evaluation
(attention and executive functions); psychodynamic interview and projective tests (Rorscharch,
CAT or TAT). A therapeutic project is proposed combining MPH and psychotherapy according to
the results. A new evaluation 1 year later (T1) included a consultation and a neuropsychological
evaluation.
Results T0. — All parental questionnaires appreciating attention deficit and hyperacti-
vity/impulsivity were significantly pathological. The neuropsychological evaluation showed
usual characteristics of ADHD with individual differences. The psychiatric evaluation revea-
led the frequency of comorbidity in axis I (23% of children with more than two diagnoses, 57%
with anxiety disorder, 23 and 3% with oppositional and conduct disorder).
Follow up (T1). Thirty-one children were re-examined (20 treated by MPH and 11 not treated
because of parental refusal or particular psychopathological situations). Psychoanalytical psy-
chotherapy, proposed to 28 children, was undertaken with only 19. An improvement in scores
for attention and executive tests was registered only in the treated group.
Discussion. — The tests confirm deficits of attention and executive functions without correlation
with the scores of questionnaires, underlining the need for a neuropsychological evaluation to
objectify attention disorders. Projective tests refine and enrich psychiatric evaluation and sho-
wed that half of the children had borderline organization. However, structural hypotheses were
heterogeneous, suggesting the need for specific therapeutic projects to be devised according
to each child. The treated children were the only ones to improve attention deficit. On the
other hand, the scores of anxiety are not improved by MPH, emphasizing the indications of
psychotherapy if comorbidity is present. Psychotherapeutic care was carried out only among
part of the population, because of parental reservations, exacerbated by differences of opinion
among professionals and lack of access.
Conclusion. — This study is innovative, providing precise data on ADHD from a multidisciplinary
perspective. Psychopathological comorbidity is high in this population, so the concept of ADHD
cannot be limited to a cognitive point of view. These elements and doubts regarding the efficacy
of behavioural therapies suggest the need for a rigorous evaluation of analytical psychotherapies
independent of MPH to treat attention deficit.
© L’Encéphale, Paris, 2011.
182 J. Chambry et al.
En dépit de la littérature internationale, il existe encore
de nombreuses questions concernant la prise en charge du
trouble déficitaire de l’attention (TDA/H). Les conceptions
sont encore hétérogènes en Europe et opposent diffé-
rentes approches. L’approche neurologique, basée sur les
données en neurosciences, rattache les symptômes à des
mécanismes neurobiologiques et rejoint les recommanda-
tions anglosaxonnes. À l’opposé l’approche psychanalytique
considère essentiellement les mécanismes psychodyna-
miques à l’origine de la symptomatologie. L’utilisation du
méthylphenidate (MPH) est consensuelle dans la littérature
internationale du fait de la démonstration de ses effets
bénéfiques dans toutes les études randomisées en double
insu. Cependant, les résultats récemment publiés à huit ans
de la grande étude pilote Multimodal treatment study of
ADHD (MTA) viennent de remettre en question la persis-
tance à long terme du bénéfice du MPH et interrogent sur
la nécessité de prendre en compte d’autres facteurs. Les
approches thérapeutiques, en France, divergent en fonction
des conceptions et l’utilisation du MPH reste très controver-
sée. Aucune étude prospective croisée neuropsychologique
et psychodynamique n’argumente les divergences.
État de la question
Le trouble déficitaire de l’attention, avec ou sans hyperacti-
vité (TDA/H), décrit en référence aux critères diagnostiques
des classifications internationales (DSM-IV [2]), est très lar-
gement reconnu dans la littérature scientifique [21,28,36].
En l’absence d’étude épidémiologique franc¸aise, une pré-
valence de 3 à 6 % est proposée [6,22]. Divers troubles
sont associés au TDA/H : troubles des apprentissages [40],
troubles émotionnels, en particulier, anxieux [34], troubles
des conduites et/ou oppositionnels [11]. Les données des
neurosciences ont précisé les différents systèmes atten-
tionnels, les zones cérébrales impliquées, en particulier,
préfrontales et striatales [13] et les facteurs génétiques
à l’origine des déficits en neurotransmetteurs dopaminer-
giques [31]. Ces origines biologiques rejoignent les effets
positifs du MPH, aussi bien sur les aspects comportemen-
taux [24], que sur les aspects en imagerie fonctionnelle [7].
Tout récemment, ces hypothèses neurobiologiques ont été
remises en cause au profit d’une pathogénie plus complexe
faisant également intervenir de nombreux facteurs environ-
nementaux [18].
La prise en charge précoce a pour objectif de pallier
le risque à l’âge adulte de pathologie psychiatrique, de
conduite à risque [5] ou addictives [14] et d’améliorer le
pronostic scolaire [3].
Les recommandations anglosaxonnes s’appuient sur les
résultats de la large cohorte MTA portant sur 579 enfants
TDA/H [24—26]. L’analyse des résultats pendant la phase
en double insu de 14 mois des quatre groupes randomisés
(médicament seul, médicament et thérapie comporte-
mentale combinés, thérapie comportementale seule et
contrôle), confirme la supériorité du MPH à court terme
comme à deux ans, particulièrement en association avec la
thérapie comportementale.
Le suivi en ouvert à trois, six et huit ans de ces quatre
groupes nuance les résultats [26,37]. Si le bénéfice observé
par rapport au baseline persiste, le pronostic à long terme
étudié par 21 variables comportementales, sociales et sco-
laires montre la persistance de symptômes ainsi que leur
retentissement, quelque soit le groupe de randomisation
[26].
Un consensus international propose qu’un spécialiste
de la santé mentale de l’enfant établisse le diagnostic à
l’aide des critères du DSM IV. Il propose un traitement basé
en première ligne sur les médicaments psychostimulants
comme le MPH associés aux interventions psychosociales,
compte tenu de l’amélioration comportementale [24,25]
et des fonctions attentionnelles [30] reconnue par toutes
les études randomisées en double insu. Néanmoins, plu-
sieurs auteurs soulignent une plus grande complexité du
problème, comme la fréquente discordance des question-
naires, l’absence de consensus sur l’évaluation des fonctions
attentionnelles ou exécutives [29],etde«gold standard »
pour confirmer ce diagnostic [36]. Les interventions psy-
chosociales préconisées [21,36], y compris par certaines
équipes franc¸aises [6,22], ainsi que leurs effets, sont moins
clairement décrites. La persistance à huit ans de troubles
comportementaux, sociaux et scolaires chez les adolescents
TDA/H, met en relief l’insuffisance de ce traitement de pre-
mière ligne [26].
Les conceptions et les pratiques en France sont hété-
rogènes. Certaines équipes suivent les recommandations
internationales [6,22], mais cela est très discuté et le
MPH est moins utilisé en France qu’en Europe et Amérique
du Nord [20]. Dans la classification franc¸aise des troubles
mentaux de l’enfant et l’adolescent (CFTMEA [23]) encore
utilisée, le concept de TDA/H est limité à l’hyperkinésie,
les troubles attentionnels étant relégués au second plan.
Les thérapies psychodynamiques correspondant à une tra-
dition franc¸aise, ne sont pas évaluées et sont utilisées
chez les enfants agités «hyperkinétiques »et non spécifi-
quement atteints de troubles attentionnels [9,15,38].La
prise en charge des enfants est loin d’être consensuelle.
Les liens entre les données attentionnelles et les aspects
psychopathologiques, n’ont jamais été précisés avec une
méthodologie prospective et une double évaluation des
mesures neuropsychologiques et projectives.
Cette étude observationnelle prospective multidiscipli-
naire et croisée, sans a priori, d’une cohorte de 36 enfants
porteurs d’un TDA/H suivis sur un an, propose d’explorer
plus précisément les liens entre les scores attentionnels
et l’hypothèse d’organisation psychopathologique structu-
relle.
Méthodologie
Population
Trente-six enfants d’âge primaire ont été inclus, parmi les
400 nouveaux enfants de cette tranche d’âge référés au
centre de référence sur les troubles des apprentissages en
2005. La file active de ce centre est constituée d’enfants
porteurs de troubles des apprentissages sévères ou
complexes, habitant en «Île-de-France Sud », à la demande
de leurs professionnels, après constitution d’un dossier.
Les 36 enfants sont tous ceux répondant aux critères
suivants :
Approche pluridisciplinaire des troubles déficitaires de l’attention 183
une plainte prédominante concernant l’attention et/ou
l’hyperactivité et un diagnostic de TDA/H évoqué selon les
critères du DSM IV, jamais traité par le MPH ;
dont les parents acceptaient le protocole d’évaluation
pluridisciplinaire ;
sans les critères d’exclusion suivants : déficience men-
tale (Quotient Intellectuel Verbal [QIV] et Performance [QIP]
inférieur à 80 à l’échelle de Weschler1), trouble envahissant
du développement, pathologie neurologique.
Méthodes
L’évaluation pluridisciplinaire initiale (T0) propose en
moins de deux mois
L’évaluation pluridisciplinaire initiale (T0) propose en moins
de deux mois :
une consultation initiale neuropédiatrique. Elle vérifie les
critères d’inclusion et d’exclusion. Elle précise la plainte
(inattention/hyperactivité/impulsivité) à l’aide de ques-
tionnaires (Conners parents et enseignants [10], Child
Behaviour Checklist [CBCL2]) et évalue les troubles des
apprentissages ;
un entretien semistructuré réalisé par un seul psychiatre,
en présence des deux parents. Il précise la comorbi-
dité psychiatrique selon l’axe I du DSM-IV à partir de la
recherche systématique des critères diagnostiques lors de
l’entretien avec les parents : troubles anxieux, dépres-
sifs, alimentaires, sphinctériens, tics ou troubles des
conduites et oppositionnels. Selon une approche psycho-
dynamique basée sur les critères de la CFTMEA [23],il
propose une hypothèse psychopathologique structurelle
(névrotique ou limite) et recherche l’existence d’une fra-
gilité narcissique (représentation de soi inacceptable) à
partir de l’observation de l’enfant. Il apprécie succincte-
ment la qualité des interactions parents/enfants : bonnes
si les parents sont adaptés ; faibles s’ils sont capables
d’empathie mais débordés ; mauvaises si le lien est clai-
rement pathologique ;
une évaluation neuropsychologique. Elle quantifie les
déficits des différentes fonctions attentionnelles (sélec-
tive et soutenue, auditive et visuelle) et exécutives
(impulsivité, planification, inhibition). L’attention soute-
nue est évaluée par le score composite des temps de
réaction simples auditifs et visuels du Fe-Psy3et les
indices d’attention soutenue, d’omissions et de variabi-
lité du «Continuous Performance Test »4(CPT-2). L’indice
de vigilance et l’index TDA/H du CPT-2 complètent ces
données attentionnelles. Les fonctions exécutives sont
appréciées par l’indice d’impulsivité du CPT-2, la préci-
1Weschler D. Weschler Intelligence Scale for Children. Version
franc¸aise ECPA, Paris, 1996 2005.
2Achenbach TM, Rescorla L. Child Behavior Checklist (CBCL).
Manual for the ASEBA school-age forms and profiles. Burlington, VT:
University of Vermont, Research Center for Children, Youth, and
Families, 2001.
3Alpherts W, Leeuwen KV, Schutte GJ, Sukamto R. FEPSY, the iron
psyche, manual. Software. 1988—1995.
4Conners CK. Continuous Performance Test. Toronto: Multi-Health
Systems; 2004.
sion visuomotrice de la NEPSY5, la planification (Tour de
la NEPSY) et le contrôle de l’inhibition (réponses asso-
ciées de la NEPSY). Les valeurs sont traitées en notes
standards (NS), sauf le score composite du Fe-Psy traité
en écart-type des normes et les indices du CPT-2 traités
en t-scores conformément à la description du manuel4et
à la littérature [17,27] ;
une évaluation psychodynamique réalisée par une seule
psychologue. Elle s’intéresse à l’organisation psychopa-
thologique structurelle à l’aide de la passation de tests
projectifs [8,32] : Rorscharch6; CAT ou TAT selon l’âge
inférieur ou supérieur à neuf ans7. Une hypothèse fon-
dée sur la nosographie de la CFTMEA est proposée à partir
d’une analyse des protocoles prenant en compte trois
registres : les fondements de l’identité, l’élaboration de
la position dépressive et le traitement de la conflictualité
œdipienne. Ces hypothèses, du fait de l’âge des enfants,
ne traduisent que les modalités actuelles de fonctionne-
ment susceptibles de réaménagement.
Chaque intervenant donne sa conclusion indépendam-
ment, puis une synthèse restitue les données aux parents
et à l’enfant et propose le projet thérapeutique le plus
adéquate associant :
la prescription de MPH (Ritaline LP®ou Concerta®);
la proposition d’une prise en charge psychothérapeu-
tique en fonction de la comorbidité pédopsychiatrique,
de l’organisation psychopathologique structurelle de
l’enfant et de la dynamique familiale. La psychothérapie
proposée était d’orientation psychanalytique en tenant
compte des possibilités d’accès aux soins proches du
domicile de l’enfant.
Le suivi de l’enfant dans l’étude
Le suivi de l’enfant dans l’étude comporte, une consultation
à trois mois afin d’apprécier l’efficacité et les effets secon-
daires du MPH. Une nouvelle évaluation à un an apprécie
la mise en œuvre du projet thérapeutique ; l’évolution qua-
litative selon l’interview des parents et de l’enfant (très
favorable — douteuse — non favorable) et les scores des
questionnaires ; l’évolution quantifiée des troubles atten-
tionnels et des fonctions exécutives à partir du même
protocole qu’à T0.
Résultats
L’objet de ce travail est la synthèse des principales données
des évaluations et de leurs intrications.
5Korkman M, Kirk U, Kemp S. NEPSY, a developmental neuropsy-
chological assessment. Paris: ECPA; 2003.
6Rausch de Traubenberg N, Boizou MF. Le Rorschach en clinique
infantile, le réel et l’imaginaire chez l’enfant. Paris: Dunod; 1977.
7Boekholt M. Épreuves thématiques en clinique infantile,
approche psychanalytique. Paris: Dunod; 1993.
184 J. Chambry et al.
Résultats de l’évaluation initiale T0
Descriptif de la population
Les 36 enfants, cinq filles et 31 garc¸ons, adressés pour une
plainte primaire portant sur l’attention et/ou l’agitation,
avaient eu un parcours de soins antérieur (psychothérapie
chez 24 d’entre eux, rééducation orthophonique et/ou psy-
chomotrice chez 31). Ils étaient âgés de huit ans cinq mois
en moyenne et scolarisés en primaire avec un retard scolaire
d’un an pour 16 d’entre eux. Des antécédents familiaux de
troubles de l’attention étaient notés dans cinq familles. Pen-
dant la grossesse ou la période périnatale, un traumatisme
(hospitalisation, perte d’un proche, difficultés familiales)
était rapporté par 27 familles.
Questionnaires et évaluation neuropsychologique
Les résultats sont détaillés dans le Tableau 1.
Les moyennes des scores des questionnaires paren-
taux appréciant l’inattention et l’hyperactivité/impulsivité,
étaient significativement pathologiques en comparaison à
la moyenne théorique (p0,01 à 0,000 Student-t). Néan-
moins, les scores variaient d’un enfant à l’autre. Le score
d’inattention du DSM IV était pathologique chez tous les
enfants sans corrélation avec celui du CBCL, patholo-
gique chez seulement 58 % des enfants. L’hyperactivité
était pathologique au questionnaire de Conners chez 58 %
des enfants alors que l’impulsivité l’était chez une mino-
rité (36 %). Tous les scores d’hyperactivité et d’impulsivité
étaient corrélés entre eux et aux scores d’inattention
(coefficient rde Pearson entre 0,44 et 0,84 ; p< 0,001).
Le questionnaire de Conners rempli par les enseignants,
pathologique chez 53 % des enfants, n’était pas corrélé aux
questionnaires parentaux.
Le QIV moyen était significativement supérieur à la
moyenne théorique et au QIP. La moyenne de tous les tests
attentionnels et des fonctions exécutives était significative-
ment inférieure à la moyenne théorique (p0,01 à 0,000) à
l’exclusion de la planification (Tour de la Nepsy). Le déficit
en attention soutenue s’exprimait par des temps de réac-
tion au Fe-Psy allongés, fluctuants, émaillés d’omissions ;
des indices d’attention soutenue, de variabilité, d’omissions
et un index de ressemblance à un profil de TDA/H élevés au
CPT-2. L’impulsivité au CPT-2 et à la précision visuomotrice
ainsi que le contrôle insuffisant de l’inhibition à la NEPSY
témoignait du déficit des fonctions exécutives. Il existait,
néanmoins, une très grande diversité des déficits observés et
de leur association chez chaque enfant. Soixante-douze pour
cent des enfants avaient des scores d’attention soutenue
pathologiques au Fe-Psy et 52 % au CPT-2.
L’impulsivité motrice était pathologique chez 75 % des
enfants et le contrôle de l’inhibition chez 53 %. Deux enfants
seulement n’avaient aucun score pathologique à l’ensemble
des tests attentionnels et exécutifs, tous les autres avaient
un ensemble très divers de scores déficitaires. Les scores
de mémoire des chiffres étaient corrélés au QIV (r0,6 ;
p< 0,000), évoquant le profil classique des enfants avec
troubles du langage. Les scores d’impulsivité étaient corré-
lés au QIP (r0,4 ; p< 0,05). Les différents indices d’attention
soutenue et d’impulsivité du CPT-2 étaient dans l’ensemble
corrélés entre eux (rentre 0,4 et 0,8 ; p< 0,005), mais pas
à l’impulsivité motrice ou à la planification. Les scores des
questionnaires et les valeurs attentionnelles n’étaient cor-
rélés que ponctuellement.
La comorbidité et l’hypothèse d’organisation
psychopathologique structurelle
Les caractéristiques de ces données sont détaillées dans les
Tableaux 2 et 3.
La majorité des enfants avait au moins une comorbidité
selon l’axe I du DSM-IV. Les troubles anxieux représentaient
la comorbidité la plus fréquente, touchant 57 % des enfants,
avec 40 % d’anxiété de séparation, 29 % de manifestations
de trouble phobique, 3 % de trouble obsessionnel compulsif.
Trois enfants avaient un trouble dépressif. Dans cette popu-
lation, les troubles oppositionnels et de conduites étaient
moins fréquents (respectivement 23 et 3 % des enfants).
L’hypothèse de l’organisation psychopathologique structu-
relle proposée par le pédopsychiatre selon les critères de
la CFTMEA [23], était névrotique chez 70 % des enfants
et limite chez 30 %. Une fragilité narcissique était mani-
feste chez 46 % de la population. Les interactions parentales
étaient considérées comme adaptées seulement chez 23 %.
Dans 35 % des cas, la mère présentait un syndrome dépressif
ou un trouble anxieux avéré. L’hypothèse de l’organisation
psychopathologique structurelle selon les tests projectifs,
était en cours d’organisation névrotique chez 42 % des
enfants et traduisant un fonctionnement limite chez 58 %.
L’organisation de la personnalité, selon l’entretien pédopsy-
chiatrique et l’évaluation projective, était cohérente chez
19 enfants, discordante chez les 17 autres, le plus souvent
dans le sens d’une organisation jugée limite aux projectifs
non retrouvée à l’entretien pédopsychiatrique.
La comparaison des scores des questionnaires, selon
la comorbidité psychiatrique et l’organisation psychopa-
thologique structurelle, ne montrait que des différences
ponctuelles. Les enfants, chez qui le pédopsychiatre avait
diagnostiqué un TOP ou de TCD, avaient au CBCL un score
plus élevé de difficultés de socialisation, trouble de pen-
sée, comportement délictueux et agressif (comparaison de
moyenne des t-scores, p< 0,01). Les enfants pour lesquels
le pédopsychiatre proposait une organisation de personna-
lité limite présentaient des scores plus élevés d’anxiété au
Conners (p< 0,01), non confirmés par le CBCL et plus élevés
de comportement agressif (p< 0,05). Les enfants dont les
projectifs suggéraient une organisation névrotique avaient
un indice de somatisation plus élevé (p< 0,05).
Relations entre les scores attentionnels et les données
psychiatriques et projectives
Elles sont détaillées dans le Tableau 2.
Il n’y avait aucune différence dans les scores atten-
tionnels selon l’existence ou non d’une comorbidité ou
l’hypothèse d’organisation psychopathologique structurelle
à l’entretien pédopsychiatrique.
En comparaison avec les enfants en cours d’organisation
névrotique, les enfants dont l’évaluation projective propo-
sait un fonctionnement limite présentait un QIP plus faible
(95 vs 104, p< 0,05), des scores de variabilité au CPT-2 plus
pathologiques (indices 59 vs 53, p< 0,05) et l’index TDA/H
tendait à être plus élevé (62 vs 54, p: 0,08). Aucun autre
score d’attention ou exécutifs ne différait.
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