B. TRAVAIL, SALAIRE ET EMPLOI L`emploi, et plus précisément la

B. TRAVAIL, SALAIRE ET EMPLOI
L’emploi, et plus précisément la pénurie d’emplois est une question centrale de nos sociétés. En effet, le
problème du chômage constitue un enjeu majeur de société, et recouvre trois aspects :
? Sur le plan économique, le chômage se traduit par une réduction voire une perte de revenu
?Sur le plan social, le chômage entraîne une profonde remise en cause du statut des individus
? Et enfin, la résorption du chômage reste un objectif prioritaire des gouvernements successifs.
1°) Le fonctionnement du marché du travail
a- Le modèle théorique du marché du travail et sa contestation
§1. Le modèle néoclassique du marché du travail
Le marché du travail est le lieu abstrait de la confrontation entre l’offre et la demande de travail
Attention : il convient de ne pas confondre le travail et l’emploi !
En effet, les entreprises offrent des emplois et demandent du travail, tandis que les actifs offrent leur force de
travail demandent des emplois.
Ainsi, l’offre de travail, qui équivaut à la demande d’emploi, émane des actifs, tandis que l’offre d’emploi
correspond à la demande de travail des employeurs.
? L’offre de travail émane de la population active
? La demande de travail émane principalement des entreprises et des administrations
Dans cette optique, le travail est considéré comme une simple marchandise, dont le prix est le salaire réel.
On rappelle que :
Salaire réel = [Salaire nominal / Indice des prix] * 100
Plus précisément,
? L’offre de travail est fonction croissante du prix du travail, en l’occurrence le salaire réel.
(à la limite, si le salaire réel était nul, l’offre de travail serait nulle également)
Dans l’arbitrage travail - loisir, le salaire représente le coût du loisir, et toute augmentation du salaire renchérit
le loisir et donc sa consommation, au profit du travail.
? La demande de travail est fonction décroissante du salaire réel
(à la limite, si les salaires réels étaient nuls, la demande de travail serait infinie et au-delà d’un certain niveau
de salaire, l’embauche d’un salarié n’est plus rentable).
En effet, un employeur n’acceptera d’embaucher un travailleur supplémentaire dans la mesure où celui-ci lui
rapporte plus qu’il ne lui coûte.
Ainsi, lorsque le salaire s’accroît, cela réduit mécaniquement le nombre d’embauches rentables.
De plus, les entrepreneurs déterminent leur choix de combinaison productive en fonction du coût des facteurs
de production.
On sait que le salaire représente le prix du travail tandis que le taux d’intérêt représente le coût du capital.
Ainsi, lorsque le prix relatif du travail (w / r) s’accroît, les entreprise vont privilégier les combinaisons
productives capitalistiques, au détriment du facteur travail.
De la confrontation de l’offre et la demande de travail résulte un salaire d’équilibre (w*) et une quantité de
travail d’équilibre (Q*). Ainsi, le salaire d’équilibre est celui qui permet d’égaliser l’offre et la demande de
travail.
Salaires
O
w *
D
Q* (Qo = Qd) Quantité de travail
On note
Qo : Quantité de travail offerte
Qd : Quantité de travail demandée
Il est possible de distinguer deux configurations de déséquilibre :
Si le salaire du marché (w1) est supérieur au salaire d’équilibre :
Salaires
w1
w *
Qd Q* Qo Quantité de travail
? Si w1 > w* : Qo > Qd, donc Qo - Qd > 0 Excès de travail offert (chômage)
Si le salaire du marché (w2) est inférieur au salaire d’équilibre :
Salaires
w *
w2
Qo Q* Qd Quantité de travail
? Si w2 < w* : Qo < Qd, dc Qd - Qo > 0 Pénurie de travailleurs
Q. Que se passe-t-il suite à un choc positif sur l’offre de travail ?
Salaires
w *
w* ’
Q* Q* ’ Quantité de travail
Si l’offre de travail augmente (accroissement des taux d’activité, solde migratoire positif...), la courbe d’offre se
déplace vers la droite.
? Phase 1 : à salaire constant, déséquilibre entre l’offre et la demande de travail (en l’occurrence excès d’offre
de travail par rapport à la demande)
? Phase 2 : réduction des salaires, ce qui réduit l’offre et accroît la demande de travail, jusqu’au salaire
d’équilibre (noté w* ’ ).
Q. Que se passe-t-il suite à un choc positif sur la demande de travail ?
Salaires
w* ’’
w *
Q* Q*’’ Quantité de travail
Si la demande de travail augmente (croissance économique, création de nouvelles entreprises, de nouveaux
secteurs d’activité (TICE...), RTT...), graphiquement, la courbe de demande se déplace vers la droite.
? Phase 1 : à salaire constant, déséquilibre entre l’offre et la demande de travail (en l’occurrence insuffisance
de l’offre de travail par rapport à la demande)
? Phase 2 : augmentation des salaires, ce qui accroît l’offre de travail et réduit la demande de travail, jusqu’au
salaire d’équilibre (noté w* ’’ ).
Ainsi, l’analyse néoclassique considère que le chômage, à savoir en l’excès d’offre de travail par rapport à la
demande) résulte de la rigidité à la baisse des salaires, du fait de l’existence d’un salaire minimum (en
France : le SMIC). Pour résorber le chômage, il suffirait donc de supprimer le salaire plancher, qui bloque le
retour à l’équilibre.
Suite à un choc sur l’offre ou la demande, le libre jeu des forces du marché est censé permettre le retour
spontané à l’équilibre. Ainsi, dans l’optique néoclassique, le chômage est impossible. S’il existe, il s’agit
simplement de chômage volontaire. Autrement dit, les chômeurs ne sont pas des individus ne pouvant
travailler, mais des individus qui ne veulent pas travailler.
§2. Les limites de ce modèle
- La distinction coût du travail - salaire
Le coût du travail représente ce que coûte réellement le salarié à l’employeur, il s’agit de la somme
effectivement versée par l’employeur.
Coût du travail = Salaire brut + Cotisations sociales patronales - Aides à l’emploi versées par l’Etat
C’est le coût du travail qui détermine l’embauche ou le licenciement d’un salarié.
Le salaire brut équivaut au coût du travail net des cotisations sociales patronales
Salaire brut = Coût du travail - Cotisations sociales patronales
Le salaire net correspond à la somme réellement perçue par le salarié
Salaire net = Salaire brut - cotisations sociales salariales
C’est le salaire net qui détermine l’entrée ou la sortie du marché du travail, c’est à dire l’offre de travail.
Ainsi, des cotisations sociales trop importantes, constituent :
?Pour les employeurs : un frein à l’embauche
? Pour les salariés : un frein à la consommation
Au sein de l’Union Européenne (UE), c’est en France que l’écart entre le coût du travail et le salaire net est le
plus fort.
Ainsi, l’offre de travail est fonction (croissante) du salaire net, tandis que la demande de travail est fonction
(décroissante) du coût du travail. Il n’y a donc pas un prix unique sur le marché du travail.
- La critique keynésienne
J.M. Keynes considère que le modèle néoclassique reste très théorique et donc peu réaliste, c’est à dire qu’il ne
représente pas « le monde tel qu’il est ».
En fait, selon J.M. Keynes, les entrepreneurs déterminent le niveau de la demande de travail en fonction, non
pas du salaire réel, mais de leurs anticipations concernant la demande, qualifiée « d’effective ».
Plus précisément, si les entrepreneurs anticipent une hausse de la demande, ils décideront de recruter le
personnel permettant d’y faire face.
Approche comparative
? Selon l’optique néoclassique: Le salaire réel détermine la demande de travail des entreprises
Plus précisément :
Salaire réels Demande de travail Chômage
? Selon l’optique keynésienne : La demande de travail des entreprises dépend de la demande anticipée des
ménages qui dépend elle même des salaires des actifs occupés.
Plus précisément :
Salaires réels Demande des ménages Demande de travail Chômage
Ces divergences radicales de vues s’expliquent par l’ambivalence de la notion de salaire. En effet, l’analyse
néoclassique considère le salaire comme un coût de production à minimiser, tandis que l’analyse keynésienne
appréhende le salaire en tant que revenu à maximiser.
- La segmentation du marché du travail
Les statistiques montrent qu’un chômage important est tout à fait compatible avec des pénuries de main
d’œuvre dans des secteurs bien spécifiques. Ainsi, il n’existe pas de marché du travail unique.
Dans son analyse du dualisme du marché du travail, M.J. PIORE, distingue deux compartiments étanches sur le
marché du travail, qui regroupent des types d’emploi spécifiques en fonction du niveau de salaire et des
conditions de travail.
Plus précisément :
? Le marché primaire, qui regroupe les emplois les mieux rémunérés et bénéficiant de bonnes conditions de
travail (sécurité, perspectives de carrière...) Il s’agit là d’emplois « privilégiés, protégés » (cadres de la fonction
publique par exemple)
? Le marché secondaire qui concernent des emplois faiblement rémunérés, pénibles, peu attrayants, instables.
Il s’agit là d’emplois défavorisés, exposés (ouvriers intérimaires peu qualifiés par exemple)
Attention, il convient de ne pas confondre les secteurs au sens de J.M PIORE avec les secteurs d’activité au
sens de CLARK !
b- L’analyse empirique du marché du travail
§1. Les déterminants de l’offre de travail
L’offre de travail émane de la population active (PA), qui se décompose entre actifs occupés (PAo) et non
occupés (PAno), c’est à dire les chômeurs.
PA = PAo + PAno
De même, on rappelle que :
Taux de chômage = [PAno / PA] * 100
Taux d’emploi = [PAo / PAT] * 100
Taux d’Activité Global (TAG) = [PA / PAT] * 100
(PAT : Population en Age de Travailler)
Plus généralement, le niveau de la population active dépend de 2 paramètres :
? La population en âge de travailler (> 16 ans) (PAT)
?Le taux d’activité global (TAG)
En effet,
PA = [PAT * TAG] * 100
La population en âge de travailler dépend elle même de plusieurs facteurs :
? Les facteurs démographiques
- Le solde migratoire : s’il est positif (flux entrants > flux sortants) et concerne une immigration économique,
il permet d’accroître le nombre d’actifs d’une population.
- L’accroissement naturel : s’il est positif (naissances > décès), il entraîne l’augmentation de la population
active, une vingtaine d’année plus tard.
Le niveau de la population en âge de travailler est aussi influencé par :
?L’âge d’entrée sur le marché du travail Entrée de plus en plus tardive du fait de la prolongation des
études)
? L’âge de sortie du marché du travail Sortie de plus en plus précoce du fait de l’abaissement de l’âge
de la retraite, des préretraites, des CPA (Cessation Progressive d’Activité ...))
Ces deux effets conjugués aboutissent au raccourcissement de la vie active, ayant pour conséquence de réduire
mécaniquement la population active.
Le taux d’activité global, qui représente la propension à l’activité d’une population dépend lui même de
nombreux facteurs :
? Le taux d’activité global est influencé par la conjoncture économique
Plus précisément :
- si la conjoncture s'améliore, des chômeurs anciennement découragés (comptés comme inactifs) vont chercher
à exercer une activité, et compter parmi les actifs.
Ainsi, lorsque la conjoncture s'améliore (toutes choses égales par ailleurs), le taux d’activité global s’accroît.
Par exemple, en France, certains étudiants peuvent souhaiter interrompre leurs études pour bénéficier des
« emplois jeunes ».
- inversement, si la conjoncture se détériore, certains actifs non occupés vont renoncer à chercher une activité,
il s’agit des chômeurs découragés, comptés parmi les inactifs. De même certains étudiants vont prolonger leurs
études plutôt qu’entrer sur le marché du travail.
Ainsi, lorsque la conjoncture se dégrade (toutes choses égales par ailleurs), le taux d’activité global diminue.
Ce phénomène porte le nom « d’effet de flexion des taux d’activité », qui joue d’ailleurs un rôle
d’amortisseur sur le taux de chômage. En effet, il tend à freiner la baisse du chômage en cas d’amélioration de
la conjoncture, tandis qu’il tend à ralentir l’augmentation du chômage si la conjoncture se détériore.
Ainsi, les économistes estiment que pour réduire le chômage de 100 personnes, il est nécessaire de créer
environ 140 emplois.
? Des éléments sociologiques influencent également les taux d’activité d’une population
Ainsi, l’augmentation du taux d’activité féminin depuis la fin des années soixante s’explique notamment par la
volonté des femmes d’accéder à un statut social plus valorisant que celui de « mère au foyer ».
§2. Les déterminants la demande de travail
J. FOURASTIE a montré que la demande de travail dépend de l’évolution différentielle des paramètres
suivants : la production, la productivité et la durée du travail.
En effet, on sait que :
Productivité du travail = Production / Effectifs employés
c’est à dire
Effectifs employés = Production / Productivité du travail
En termes de variations (?) :
? Effectifs employés = ? Production / ? Productivité du travail
On peut en déduire la formule approximée suivante :
? de l’emploi = ? de la production - ? de la productivité
Si la production augmente plus vite que la productivité, des emplois seront créés.
Inversement, si le rythme d’augmentation de la productivité est supérieur au rythme d’augmentation de la
production, des emplois seront détruits.
Il est d’ailleurs possible d’affiner la formule en intégrant la durée du travail :
? de l’emploi = ? de la production - (? du temps de travail + ? de la productivité)
Ainsi, la réduction du temps de travail (RTT), toutes choses égales par ailleurs, tend mécaniquement à créer
des emplois.
(cf TD sur les 35h00)
2°) Les dysfonctionnements du marché du travail
a- Le chômage : définitions et mesures
§1. La montée du chômage
Même si le chômage nous semble aujourd’hui un problème majeur, celui-ci n’a pas toujours existé. En effet,
l’apparition du chômage est un phénomène historiquement daté, qui coïncide avec la montée du salariat. En
effet, un chômeur est un salarié (potentiel) qui ne parvient pas à vendre sa force de travail. Par contre, les
travailleurs indépendants ne connaissent pas véritablement le chômage, mais plutôt une baisse de leur activité
et de leur revenu. On rappelle qu’aujourd’hui, près de 90% de la population active française est salariée !
Sur la période 1963 - 1993, le taux de chômage est à la hausse dans les pays de l’OCDE, hormis pour les Etats-
Unis où celui-ci est en baisse depuis 1975.
A partir de 1975, on note une forte augmentation du taux de chômage dans les pays de l’OCDE, hormis pour le
Japon où celui-ci reste faible (autour de 2-3%).
La France est particulièrement touchée par le chômage, notamment par rapport à l’Allemagne, aux Etats-Unis
et au Japon.
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