Fiche Prévention - D3 F 05 15 Les équipages mobiles de hourdis sur tabliers mixtes bipoutres Pour les portées moyennes, les ponts à tablier mixtes en acier béton sont très répandus. Parmi ceux-ci, les structures bipoutres en acier avec hourdis en béton sont majoritaires. Le hourdis en béton peut être préfabriqué, mais il est courant qu’il soit coulé en place à l’aide d’équipages mobiles. Ces équipements permettent de réaliser le hourdis par plots successifs de 8 à 15 mètres de long. Cette fiche décrit les risques et les mesures de prévention applicables à cette activité. Description et conception de l’équipage Description d’ensemble Les équipages mobiles sont constitués de fermes prenant appui sur les poutres du pont. Ces fermes sont au nombre de deux ou trois suivant les cas (Fig. 2 et 3). Le cintre par le dessus, constitué par les fermes, sert à suspendre les panneaux destinés à coffrer le hourdis. Il y a trois zones distinctes de coffrage : la partie centrale située entre les poutres du pont et les deux encorbellements (zones en porte-à-faux). Sur les deux encorbellements, les fermes sont prolongées par des parties en C sur lesquelles peuvent reposer les panneaux lors du décoffrage. Dans certains cas, le coffrage central est remplacé par des prédalles qui peuvent être étayées par des suspentes. Les équipages mobiles sont fréquemment motorisés pour faciliter le coffrage et le déplacement de l’équipage. Fig. 1 Schéma de principe et nomenclature d’un équipage mobile Équipage en cours de bétonnage Équipage en cours de tranfert Ferme Tabouret ou pied rétractable Béton durci Ski de glissement Béton frais Sabots à rouleaux Pied de ferme Ski de glissement Panneaux coffrants Illustration réalisée par TooMuch Suspente Ski de glissement Fig. 2 Équipage mobile à 2 fermes. Fig. 3 Équipage mobile à 3 fermes. Fig. 4 La partie centrale est assemblée, prête à recevoir les deux encorbellements. Fig. 5 Le montage du coffrage des encorbellements s’effectue à l’aide d’une grue mobile et d’une plateforme élévatrice de personnes (PEMP). Conception suivant la directive machine Dès l’instant qu’il y a motorisation et hydraulique sur un équipage, il convient d’appliquer la directive machine. Ce processus d’autocertification (contrôle interne de fabrication) entraîne une déclaration de conformité CE, un dossier technique comprenant une analyse de risque, un marquage CE, une notice de montage/démontage et une notice d’utilisation. Les notices d’instructions idéales doivent être suffisamment imagées pour servir de support de formation aux équipes. Le processus idéal est celui qui, au-delà des exigences de sécurité de la directive, intégrerait l’ergonomie au poste de travail. Montage et démontage Mode opératoire Le montage et le démontage de l’équipage sont des phases délicates dont les modes opératoires n’ont rien à voir avec l’utilisation courante. La partie centrale est tout d’abord assemblée et posée sur le pont en position de travail. On vient ensuite y rajouter les deux parties en encorbellement (Fig. 4). Le montage faisant appel à du travail en hauteur, la prévention du risque de chute est effectuée par l’utilisation d’une PEMP (Fig. 5). Les pièces à monter doivent être équipées d’anneaux de levage clairement identifiés afin d’éviter un accrochage à l’aide d’estropes. En effet, un élingage anarchique peut conduire à une présentation des pièces dans une position non conforme à un assemblage correct, source de risque. Le démontage s’effectue dans l’ordre inverse du montage avec l’utilisation des mêmes moyens. La procédure et les moyens nécessaires au montage/démontage doivent être clairement décrits dans une notice fournie par le concepteur de l’équipage mobile. Les monteurs sur chantier doivent respecter strictement ces procédures de montage. Accès et circulations Accès aux postes de travail et déplacements L’accès aux postes de travail sur le tablier se fait généralement au niveau des culées du pont (Fig. 6). La hauteur à franchir correspond au minimum à l’épaisseur du tablier. On 2 Fiche Prévention - D3 F 05 15 - © oppbtp 2015 doit souvent franchir le dénivelé constitué par les talus au niveau des culées. Cela nécessite des équipements du type escaliers adaptés à chaque situation. Le déplacement sur l’armature du hourdis est générateur d’entorses. C’est pourquoi les zones de circulation sont délimitées ; un treillis soudé à fine maille est également disposé sur l’armature pour faciliter les déplacements du personnel. Fig. 8 Appui sur poutres à l’aide de pieds rétractables Fig. 6 Escalier d’accès au niveau d’une culée de pont. Utilisation Pied rétractable manœuvré par vérin. Des rouleaux ou des sabots graissés facilitent le déplacement de l’équipage sur l’armature ou sur le béton par l’intermédiaire de ses skis. Suspension des panneaux coffrants Appuis du coffrage sur les poutres Les fermes prennent appui sur les poutres du pont à travers le ferraillage du hourdis par l’intermédiaire de chaises d’appuis (ou tabourets), ou bien à l’aide de pieds rétractables sur l’équipage, manœuvrés par des vérins hydrauliques. Dans le premier cas, les tabourets sont installés préalablement en appui sur les poutres du pont et le cintre est amené dessus par glissement. Ils sont retirés après bétonnage lors du nouveau déplacement du cintre pour être réinstallés plus loin afin de lui servir d’appui (Fig. 7). Dans le deuxième cas, le cintre est amené par glissement sur des sabots graissés ou des rouleurs simplement posés sur l’armature ou le béton. Une fois l’équipage correctement positionné, les pieds rétractables sont déployés au contact des poutres du pont. Contrairement au cas précédent, les vérins hydrauliques permettent un réglage précis de l’assise du coffrage sur les poutres (Fig. 8). Deux types de suspension existent : la suspension avec une simple tige filetée, ou bien celle avec vérin et tige filetée (Fig. 9). Le rajout d’un vérin permet de limiter l’effort du personnel lors des phases de coffrage ou de décoffrage. L’effort du vérin peut être volontairement limité pour éviter d’endommager le coffrage. Le réglage fin est alors réalisé manuellement. Mais il faut parfois exercer un effort important pour redresser le ferraillage. Une clef à œil installée à demeure sur les écrous permet d’éviter les blessures occasionnées par une clef plate qui s’échappe de l’écrou. Lorsque des vérins sont présents sur les pieds rétractables de l’équipage, il y a possibilité de réglage à la fois sur les appuis et sur les suspentes. Sur les parties en porte-à-faux, il est possible de s’affranchir complètement des suspentes par la mise en place d’une poutre treillis en dessous du coffrage permettant de reporter la charge directement sur les fermes (Fig. 10). La suppression des suspentes permet de gagner du temps sur le coffrage ainsi que sur le rebouchage des réservations de suspentes. Ces manœuvres évitées éliminent les risques associés à ces tâches. Fig. 7 Appui sur poutres à l’aide de tabourets Fig. 9 Il existe deux types de suspension : à tige filetée simple ; à tige filetée avec vérin. Les tabourets sont posés dans l’armature. L’équipage est supporté par les tabourets. >>> 3 Fiche Prévention - D3 F 05 15 - © oppbtp 2015 >>> Photo Coffrage &quipage Fig. 10 Équipage mobile doté d’une poutre treillis en sous-face des parties en porteà-faux permettant d’éliminer les suspentes dans cette zone. Fig. 12 Les skis Déplacement de l’équipage mobile Après décoffrage de l’équipage (c’est-à-dire enlèvement des tiges de suspension), on peut réaliser son transfert vers un autre plot. Les plots dont le bétonnage se suit sont parfois distants l’un de l’autre car ils correspondent au plan de mise en charge de l’ouvrage dont le but est de limiter et d’équilibrer les efforts dans les poutres. Cela nécessite parfois des déplacements importants de l’équipage le long de l’ouvrage. La table centrale se déplace séparément du reste du coffrage. Dans le cas où des entretoises sont conçues pour laisser le passage de la table coffrante centrale, des sabots à rouleaux sont placés sur les entretoises et permettent son déplacement. Des skis solidaires de la table viennent glisser sur les sabots (Fig. 11). Dans le cas d’une ossature à pièces de pont ne laissant pas le passage de la table, celle-ci roule sur la semelle inférieure des poutres principales. Le cintre et les tables coffrantes des porte-à-faux se déplacent en un seul bloc. Le déplacement est assuré, dans certains cas, par le glissement de skis sur des tabourets reposant sur les poutres principales à travers le hourdis. Dans d’autres cas, le glissement des skis s’effectue sur des sabots simples ou à rouleaux après que l’on a replié les pieds rétractables de l’équipage (Fig. 12). Les treuils utilisés pour le déplacement peuvent être hydrauliques ou électriques. Ils peuvent être solidaires ou séparés des skis de déplacement. Dans ce dernier cas, le ski est équipé d’un simple anneau de traction qui permet de transmettre à l’équipage l’effort procuré par un treuil indépendant. Fig. 11 Les skis de la table centrale glissent sur des sabots à rouleaux disposés sur les entretoises. On remarque le treuil électrique utilisé pour le déplacement. de l’équipage mobile équipés d’un treuil hydraulique et les sabots simplement graissés. Plates-formes de travail et garde-corps Des plates-formes de travail sont souvent présentes latéralement, aux extrémités des parties en porte-à-faux, de part et d’autre du tablier. Elles sont équipées de garde-corps, qu’il convient de raccorder à ceux du tablier. Ce raccordement s’effectue souvent par simple recouvrement, mais on peut avoir parfois des pièces de jonction (Fig. 13). À partir de la plate-forme de travail latérale, une trappe dans le plancher permet d’accéder à l’aide d’une échelle aux plates-formes situées en sous-face des parties en porte-à-faux. Les trappes sont conçues en matériau composite ou en aluminium, plutôt qu’en acier, pour être plus légères. Une amélioration récente des équipages mobiles consiste à les doter de passerelles hautes (Fig. 14). Cela permet d’accéder en tout point du système, y compris les flexibles hydrauliques d’alimentation des vérins, ce qui facilite la maintenance. D’autre part, le poste de pilotage peut être placé sur une passerelle haute assurant ainsi la vue sur l’ensemble des vérins commandés. En outre, l’accès à ces passerelles hautes peut être facilité par des escaliers d’accès ou, à défaut, par des échelles à crinoline, dès l’instant où le dénivelé dépasse 2 mètres. Fig. 13 Pièce de jonction entre gardecorps de l’équipage et du pont 4 Fiche Prévention - D3 F 05 15 - © oppbtp 2015 Les risques d’accidents du travail et de maladies professionnelles sont identifiés comme suit : Fig. 14 Passerelles hautes On peut observer ci-contre les passerelles hautes. Un escalier permet d’y accéder. • Coincement par les vérins hydrauliques. Prévention : une seule personne habilitée à la manœuvre des vérins, le plus souvent, le chef de chantier. Le poste de conduite doit être situé en hauteur. Cela permet à l’opérateur de surveiller les zones d’évolution de l’équipage et les zones environnantes des vérins. Il ne doit pas les faire mouvoir en cas de présence de personnel à proximité. • Blessure lors de l’utilisation de clefs plates pour visser les écrous. Prévention : des clefs à œil installées à demeure sur les écrous. • Heurt ou coincement lors du déplacement de l’équipage mobile (treuil). Prévention : une seule personne habilitée à la manœuvre des treuils. • Chutes de plain-pied lors du déplacement sur les armatures du hourdis. Prévention : mise en place d’un treillis soudé fine maille sur l’armature et marquage des zones de déplacement. Photo Coffrage &quipage Photo Coffrage &quipage Accidents du travail • Chute de hauteur depuis les plates-formes ou lors du montage. Prévention : garde-corps sur les plates-formes, utilisation d’une PEMP lors du montage. Le poste de commande situé sur la passerelle haute permet de voir l’ensemble des vérins pilotés. • Risque électrique dû à l’alimentation du groupe hydraulique ou des treuils. Prévention : vérification de l’installation électrique et présence d’un disjoncteur différentiel haute sensibilité. Maladies professionnelles Présentation du cycle de travail, des risques et de la prévention Analyse de risque et prévention Afin d’analyser le risque, il faut tout d’abord identifier les différentes étapes d’un cycle de production (mode opératoire) : • Décoffrage par action sur les vérins ou sur les tiges filetées de suspente. • Dépose des panneaux coffrants sur la partie centrale et les encorbellements. • Nettoyage et graissage des panneaux coffrants. • Pose des tabourets ou des sabots de glissement (rétractation des pieds le cas échéant). • Déplacement de l’équipage mobile. • Déplacement des panneaux coffrants de la partie centrale. • Mise en place des tiges de suspente. • Mise en place des panneaux coffrants par action sur les tiges filetées ou les vérins. • Bétonnage. (La plupart du temps, l’armature aura été posée avant sur le bipoutre.) • Troubles musculo-squelettiques lors de la manutention et la mise en place des tabourets et des peignes lors du bétonnage, du coffrage. Prévention : remplacement des tabourets (plus lourds) par des sabots simples (plus légers), ajout de pieds rétractables sur l’équipage. • Troubles musculo-squelettiques lors de la manœuvre des écrous des tiges filetées. Prévention : mise en place de vérins pour la manœuvre des suspentes. • Brûlures occasionnées par le contact avec le ciment gâché, galle du ciment. Prévention : port de gants et de vêtements de travail protégeant la peau, port de bottes de sécurité étanches, utilisation de bétons autoplaçants. • Bruit occasionné par le vibrage du béton. Prévention : utilisation de bétons autoplaçants, port de protections individuelles auditives. • Troubles occasionnés par les huiles minérales. Prévention : utilisation d’huiles végétales, port de protection respiratoire, de gants et de vêtements de travail protégeant la peau. >>> 5 Fiche Prévention - D3 F 05 15 - © oppbtp 2015 >>> Mesures d’organisation spécifiques Le fascicule 65 du Cahier des clauses techniques générales (CCTG) prévoit certaines dispositions. Les équipages mobiles sont des ouvrages provisoires tels que décrits au chapitre 5. Un chargé des ouvrages provisoires (COP) est désigné par l’entrepreneur et est soumis à l’acceptation du maître d’œuvre. Les équipages mobiles sont des ouvrages provisoires de première catégorie soumis à un plan qualité. Celui-ci a pour objet de décrire les dispositions pour la maîtrise de la conformité et de la sécurité des ouvrages provisoires. Pour la sécurité, le plan qualité est complété par le PGCSPS (plan général de coordination rédigé par le coordonnateur) et le PPSPS (plan particulier de sécurité et de protection de la santé rédigé par l’entrepreneur). Un projet des ouvrages provisoires est à la charge de l’entrepreneur, il comprend : • des dessins d’exécution ; • des notices et consignes ; • des justifications (notamment par des calculs). Un jeu complet de ces documents visé par le chargé d’ouvrage provisoire (COP) est tenu à disposition sur le chantier jusqu’à réception de l’ouvrage définitif. La notice d’instructions doit être un document pédagogique illustré permettant de décrire les différentes étapes d’utilisation et leurs détails techniques. Elle servira à la formation du personnel réalisant les tâches de montage et démontage, de coffrage et de déplacement de l’équipage. Un seul opérateur est en charge de la manœuvre des équipements hydrauliques. Il s’agit généralement du chef de chantier ou d’un chef d’équipe. Cela permet de réduire les risques pour le personnel ou l’endommagement du coffrage. Bibliographie •Ponts mixtes – Recommandations pour maîtriser la fissuration des dalles – Guide technique. Mémoar – Mémento pour la mise en œuvre sur ouvrages d’art, Sétra, septembre 1995 (référence Sétra : F9536). •Exécution des ouvrages en béton armé ou précontraint. Fascicule 65 du Cahier des clauses techniques générales des marchés publics de travaux (CCTG), 2008. OPPBTP 25, avenue du Général Leclerc - 92660 Boulogne-Billancourt Cedex - 01 46 09 27 00 - www.preventionbtp.fr Conforme à la réglementation en vigueur à la date de parution. 6 Fiche Prévention - D3 F 05 15 - © oppbtp 2015 - Edition : avril 2015