Effets vasculaires et rénaux des médicaments anti

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RECOMMANDATION
Effets vasculaires et re
´naux des me
´dicaments
anti-angioge
´niques : recommandations franc¸aises
pour la pratique (SN, SFHTA, APNET, FFCD)
§,§§
Vascular and renal effects of anti-angiogenic
therapy
Jean-Michel Halimi
a,
*, Michel Azizi
b
, Guillaume Bobrie
c
, Olivier Bouche
´
d
,
Gilbert Deray
e
, Gaetan des Guetz
f
, Thierry Lecomte
a
, Bernard Levy
g
,
Jean-Jacques Mourad
f
, Dominique Nochy
c
, Ste
´phane Oudard
c
,
Philippe Rieu
d
, Dil Sahali
h
a
Universite
´Franc¸ois-Rabelais, CHU Tours, Tours, France
b
CIC Inserm, hoˆpital europe
´en Georges-Pompidou, AP—HP, Paris, France
c
Hoˆpital europe
´en Georges-Pompidou, AP—HP, Paris, France
d
CHU de Reims, Reims, France
e
Hoˆpital La Pitie
´-Salpeˆtrie
`re, AP—HP, Paris, France
f
Universite
´Paris-XIII, hoˆpital Avicenne, AP—HP, Bobigny, France
g
Inserm, hoˆpital Lariboisie
`re, AP—HP, Paris, France
h
Inserm, hoˆpital Henri-Mondor, AP—HP, Cre
´teil, France
Rec¸u le 3 octobre 2008 ; accepte´ le 3 octobre 2008
Ne
´phrologie & The´rapeutique (2008) 4, 602—615
MOTS CLE
´S
Me
´dicaments
anti-angioge
´niques ;
Hypertension ;
Prote
´inurie ;
Re
´sume
´Les me
´dicaments anti-angioge
´niques (me
´dicaments anti-Vascular Endothelial Growth
Factor (VEGF) sur le marche
´:be
´vacizumab [Avastin
1
], sunitinib [Sutent
1
], sorafe
´nib [Ne
´xe-
var
1
]) sont de plus en plus utilise
´s dans le traitement de certains cancers (coˆlon, sein, poumon,
foie et rein). Leurs effets secondaires sont mal connus des me
´decins. L’hypertension arte
´rielle
(HTA) est l’effet inde
´sirable le plus fre
´quent. Son incidence de
´pend de la de
´finition de l’HTA
utilise
´e, de la mole
´cule et la dose. Elle est ge
´ne
´ralement controˆlable par les traitements
§
Socie
´te
´de ne
´phrologie, Socie
´te
´franc¸aise d’hypertension arte
´rielle, Association pe
´dagogique nationale des enseignants de the
´rapeutique et
Fe
´de
´ration francophone de cance
´rologie digestive.
§§
Recommandations franc¸aises pour la pratique des Socie
´te
´de ne
´phrologie (SN), Socie
´te
´franc¸aise d’hypertension arte
´rielle (SFHTA),
Association pe
´dagogique nationale des enseignants de the
´rapeutique (APNET) et Fe
´de´ration francophone de cance
´rologie digestive (FCD).
* Auteur correspondant. Service de ne
´phrologie-immunologie clinique, 2, boulevard Tonnelle
´, 37044 Tours cedex, France.
Adresse e-mail : [email protected] (J.-M. Halimi).
1769-7255/$ — see front matter #2008 Elsevier Masson SAS et Association Socie
´te
´de Ne
´phrologie. Tous droits re´serve´s.
doi:10.1016/j.nephro.2008.10.002
Author's personal copy
Utilisation des me
´dicaments anti-
angioge
´niques en oncologie
Ge
´ne
´ralite
´s
L’arsenal the
´rapeutique des cancers les plus communs (can-
cers du coˆlon, du sein, du poumon, du foie et du rein) s’est
re
´cemment enrichi d’une nouvelle classe the
´rapeutique dite
des « anti-angioge
´niques ». Celle-ci est l’aboutissement
d’une meilleure connaissance de la croissance tumorale
qui requiert le de
´veloppement d’un re
´seau de ne
´ovaisseaux.
La ne
´oangiogene
`se tumorale est un processus complexe
impliquant un de
´se
´quilibre entre les facteurs proangioge
´-
niques (vascular endothelial growth factor [VEGF] et basic
fibroblast growth factor [bFGF] principalement) et les fac-
teurs anti-angioge
´niques (angiostatine, endostatine et
thrombospondine) a
`la faveur des premiers [1,2]. Le facteur
Iatroge
´nie ;
The
´rapeutique ;
Cancer ;
Vaisseaux ;
VEGF ;
Rein
antihypertenseurs et compromet rarement la poursuite du traitement. Plus rarement, elle peut
avoir des conse
´quences graves (HTA maligne, leucoence
´phalopathie poste
´rieure re
´versible,
accident vasculaire ce
´re
´bral...). Des atteintes re
´nales sont moins fre
´quentes : prote
´inurie
mode
´re
´e le plus souvent, re
´versible, et plus rarement, syndrome ne
´phrotique, insuffisance
re
´nale aigue
¨, glome
´rulopathie prolife
´rative, ne
´phrite interstitielle et microangiopathie throm-
botique. Allongement de l’espace QT et insuffisance cardiaque ont e
´te
´observe
´s avec des tinibs.
Sur le plan the
´rapeutique : (1) Avant l’administration d’une premie
`re dose d’un traitement anti-
angioge
´nique, il ne faut pas retarder l’administration d’une premie
`re dose ou administrer un
traitement anti hypertenseur en raison d’une pression arte
´rielle (PA) e
´leve
´e ; (2) Le bilan initial
comporte une mesure de la PA re
´alise
´e avec un appareil de mesure valide
´soit par le me
´decin
traitant, soit au mieux en automesure tensionnelle (« Re
`gle des 3 », HAS HTA 2005 http://
www.has-sante.fr), soit en mesure ambulatoire de la PA, (appareil de mesure hume
´ral valide
´
(liste : http://afssaps.sante.fr/) ; ide
´alement, ces appareils d’auto mesure tensionnelle et le
carnet de suivi devraient eˆtre fournis par le laboratoire pharmaceutique qui met en vente le
me
´dicament anti-angioge
´nique ; (3) La bandelette urinaire (et le cas e
´che
´ant, quantification de
la prote
´inurie), l’estimation de la fonction re
´nale (formule de MDRD simplifie
´e plutoˆt que
Cockcroft et Gault) doit eˆtre effectue
´e avant traitement et au cours du suivi ; (4) La prise en
charge the
´rapeutique se fait conforme
´ment aux recommandations (HAS HTA 2005 : http://
www.has-sante.fr/) ; (5) La surveillance et la prise en charge the
´rapeutique se feront au mieux
dans le cadre d’un travail en re
´seau comprenant me
´decin ge
´ne
´raliste, oncologue, cardiologue et
ne
´phrologue.
#2008 Elsevier Masson SAS et Association Socie
´te
´de Ne
´phrologie. Tous droits re´serve´s.
KEYWORDS
Anti-angiogenic drugs;
Hypertension;
Proteinuria;
Side-effects;
Treatments;
Cancer;
Vessels;
VEGF;
Safety;
Kidney
Summary Angiogenesis inhibitor drugs (bevacizumab, sunitinib, sorafe
´nib...) are now widely
used for treatment of cancers, including colorectal, advanced renal cell and hepatocellular
carcinomas, breast cancer). Vascular and renal side-effects of these drugs are not well known.
Hypertension is one of the most common side effects. Incidence of hypertension may be different
among angiogenis inhibitors and seems dose-depend. Arterial pressure can usually be controlled
with anti-hypertensive medications, and treatment with angiogenesis inhibitors can be con-
tinued in most cases; however, serious hypertension-induced side effects were reported included
malignant hypertension, stroke and reversible posterior leucoencephalopathy. Renal damage is
infrequently reported: usually reversible mild or moderate proteinuria and in some rare cases
nephritic syndrome, acute renal dysfunction, proliferative or collapsing glomerulonephritis,
interstitial nephritis and thrombotic microangiopathy. Prolongation of the QT interval, conges-
tive heart failure and left ventricular dysfunction have been reported in patients using tinibs. In
the present guidelines, we recommend: (1) before the first administration of angiogenesis
inhibitors: acute IV or oral antihypertensive medications should not be administered in a patient
regardless of arterial pressure levels with postponing the administration because of hypertension
is not recommended; (2) initial work-up should include ambulatory measurement of arterial
pressure (by the general practitioner or by the patient using home blood pressure (three times in
the morning and in the evening during three consecutive days) with a validated (cf: http://
afssaps.sante.fr/) upper arm device: ideally, this device should be financed and provided by the
pharmaceutical companies marketing the angiogenesis inhibitor drugs. Using 24-hour ambulatory
blood pressure measurement is optional; (3) urine dipstick (and quantification if positive) and
estimated glomerular filtration rate (using abbreviated MDRD rather than Cockcroft-Gault
formula) must be performed before treatment and regularly during follow-up; (4) therapeutic
management must be done in accordance with national or international guidelines (in France:
http://www.has-sante.fr/); (5) optimal care is best achieved within a network of professionals
including general practitioners, oncologists, cardiologists and nephrologists.
#2008 Elsevier Masson SAS et Association Socie
´te
´de Ne
´phrologie. Tous droits re´serve´s.
Effets vasculaires et re
´naux des me
´dicaments anti-angioge
´niques 603
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de croissance VEGF et ses re
´cepteurs (VEGFR-1, VEGFR-2 et
VEGFR-3) sont des facteurs de survie des cellules endothe
´-
liales indispensables a
`la ne
´oangiogene
`se tumorale [3].
Les me
´dicaments anti-angioge
´niques actuellement dispo-
nibles sur le marche
´sont le bevacizumab (Avastin
1
), le
sunitinib (Sutent
1
) et le sorafe
´nib (Nexavar
1
). Le me
´canisme
d’action anti-angioge
´nique principal de ces trois me
´dicaments
est une inhibition pharmacologique de la voie du VEGF, utilise
´a
`
pre
´sent chez les patients atteints d’un cancer avance
´du coˆlon,
du rein, du foie, du sein ou du poumon [4—10].
En France, en 2000, le nombre cumule
´de nouveaux cas de
cancer du coˆlon, du rectum, du foie, du sein, du poumon et
du rein e
´tait estime
´pour les deux sexes a
`environ 121 000,
soit environ 40 % de l’ensemble des cancers [11].A
`titre
d’exemple, pour le cancer colorectal avance
´en France, la
population cible du bevacizumab dans le cadre de l’AMM
actuelle est d’environ 18 000 nouveaux patients par an.
Le profil de tole
´rance des anti-angioge
´niques pre
´sente
comme caracte
´ristique commune une toxicite
´vasculaire et
re
´nale (cf. infra).
La voie du VEGF
Le VEGF (de
´nomination courante du VEGF-A) appartient a
`
une famille de facteurs de croissances angioge
´niques [12,13].
Le signal induit par le VEGF a un roˆle important dans la
physiologie de l’angiogene
`se de meˆme que dans la ne
´oan-
giogene
`se associe
´ea
`la croissance tumorale car il est indis-
pensable a
`la survie, a
`la migration et a
`la croissance des
cellules endothe
´liales. Au cours de la ne
´oangiogene
`se tumo-
rale, le VEGF est produit essentiellement par les cellules
tumorales mais e
´galement par le stroma pe
´ritumoral [14].
Quatre principales isoformes de 121, 165, 189 et 206 acides
amine
´s du VEGF, produites par e
´pissage alternatif des huit
exons du ge
`ne VEGF, ont e
´te
´identifie
´es [15,16]. L’isoforme
« native » pre
´dominante VEGF165 est surexprime
´e dans la
plupart des tumeurs solides [12]. Elle existe sous forme
soluble ou fixe
´ea
`la matrice extracellulaire [17]. Toutes
les isoformes du VEGF interagissent avec deux types de
re
´cepteurs transmembranaires (VEGFR-1 et VEGFR-2) et cer-
taines isoformes du VEGF avec une famille de core
´cepteurs
(les neuropilines : NRP1 et NRP2) [3,12,13]. Les re
´cepteurs
VEGFR-1 et -2 sont pre
´sents a
`la surface des cellules endothe
´-
liales ainsi qu’a
`la surface des pre
´curseurs he
´matopoı¨e
´tiques
des cellules endothe
´liales. L’activation des cascades de
transduction est initie
´e par la liaison du VEGF a
`son re
´cep-
teur, ce qui induit un phe
´nome
`ne de dime
´risation du re
´cep-
teur suivie d’une autophosphorylation activatrice de
l’activite
´catalytique tyrosine kinase. VEGFR-2 est exprime
´
de fac¸on ubiquitaire dans toutes les cellules endothe
´liales,
alors que l’expression de VEGFR-1 dans les cellules endothe
´-
liales varie en fonction du type de lit vasculaire. Le VEGFR-3
est spe
´cifique des cellules endothe
´liales lymphatiques. Les
re
´cepteurs du VEGF sont e
´galement exprime
´s dans les cel-
lules tumorales formant ainsi un syste
`me de boucle autocrine
VEGF/VEGFR [12]. Active
´es par le VEGF, les cellules endothe
´-
liales synthe
´tisent plusieurs types d’enzymes et de prote
´ines
qui de
´gradent la matrice extracellulaire, facilitant ainsi la
migration et l’invasion des cellules endothe
´liales vers les
tissus cibles. Le VEGF est par ailleurs un puissant facteur
d’augmentation de la perme
´abilite
´vasculaire agissant prin-
cipalement au niveau de la microvascularisation. Il influe
aussi sur l’expression des mole
´cules d’adhe
´sion associe
´es a
`
l’endothe
´lium et stimule fortement la NO synthase.
Inhibiteurs pharmacologiques de la voie du
VEGF
Les deux approches pharmacologiques actuellement pre
´-
sentes sur le marche
´pour inhiber la voie du VEGF sont,
d’une part, un anticorps monclonal humanise
´dirige
´contre
le VEGF-A, le bevacizumab, et d’autre part, des petites
mole
´cules inhibitrices de la fonction tyrosine kinase des
re
´cepteurs du VEGF (ITK) telles que le sunitinib et le sora-
fe
´nib [10]. Les anticorps monoclonaux sont tre
`s spe
´cifiques
d’un e
´pitope pre
´sent sur la cible et interagissent uniquement
avec des cibles extracellulaires alors que les petites mole
´-
cules interagissent avec plusieurs cibles intracellulaires de
fac¸on moins se
´lective. De nombreux ITK anti-angioge
´niques
(AZD2171, axitinib...) sont e
´galement en de
´veloppement,
dont certaines a
`des stades avance
´s[18].
D’autres biome
´dicaments anti-VEGF sont actuellement en
de
´veloppement tels que le VEGF-TRAP qui est prote
´ine de
fusion comprenant deux fragments Fab anti-VEGF et les mole
´-
cules aptame
`res (oligonucle
´otides capable de se lier au VEGF
et se comporter comme des anticorps non-immunoge
`nes)[10].
Le bevacizumab
Le bevacizumab est un anticorps monoclonal humanise
´anti-
VEGF de type IgG1 qui se lie se
´lectivement au VEGF humain et
en neutralise l’activite
´biologique [19]. Il a une forte affinite
´
pour un e
´pitope pre
´sent sur toutes les isoformes du VEGF,
chevauchant partiellement les sites de liaison aux re
´cepteurs
VEGFR-1 et VEGFR-2, avec pour conse
´quence une inhibition
de la liaison du VEGF a
`ces re
´cepteurs a
`la surface des cellules
endothe
´liales [20]. L’inhibition de la prolife
´ration endothe
´-
liale par le bevacizumab bloque le phe
´nome
`ne de ne
´ovascu-
larisation ne
´cessaire a
`la croissance et a
`la disse
´mination
tumorale. Le bevacizumab a un effet additif, voire synergi-
que, avec les me
´dicaments cytotoxiques « classiques » [21].
D’un point de vue pharmacocine
´tique, la demi-vie sanguine
du bevacizumab est de l’ordre de 17 a
`21 jours et il existe une
variabilite
´inter individuelle de l’exposition des patients au
bevacizumab.
Dans le traitement de premie
`re et seconde ligne du
cancer colorectal me
´tastatique
Un be
´ne
´fice est apporte
´par l’adjonction de bevacizumab a
`un
sche
´ma de chimiothe
´rapie cytotoxique de re
´fe
´rence (5-FU
seul, associations 5-FU/irinote
´can et 5-FU/oxaliplatine)
[4,22].Le
´tude pivot dans cette indication est une e
´tudede
phase III randomise
´e, controˆle
´e en double insu qui a compare
´
le sche
´ma de chimiothe
´rapie IFL (irinote
´can + 5-FU en bolus +
acide folinique) associe
´au bevacizumab versus IFL seul en
premie
`re ligne de traitement du cancer colorectal me
´tasta-
tique [4].Lame
´diane de survie globale e
´tait significativement
meilleure dans le bras avec le bevacizumab (20,3 mois versus
15,6 mois) de meˆme que le taux de re
´ponse objective (44,8 %
versus 34,8 %) et la me
´diane de survie sans progression
(10,6 mois versus 6,2 mois). La FDA a approuve
´le bevacizumab
en association avec une chimiothe
´rapie a
`base de fluoropy-
rimidine dans le traitement de premie
`re intention du cancer
604 J.-M. Halimi et al.
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colorectal me
´tastatique. En France, l’utilisation du bevacizu-
mab semble be
´ne
´fique en traitement de premie
`re ou de
seconde ligne chez les patients atteints de cancer colorectal
me
´tastatique en association a
`diffe
´rentes chimiothe
´rapies (en
premie
`re ligne : 5-fluorouracile/acide folinique avec ou sans
irinote
´can) ; en seconde ligne : folfox (5-FU + oxaliplatine)
chez les patients n’ayant pas rec¸u de bevacizumab en premie
`re
ligne [23] ; prodrogues orales du 5-FU : cape
´citabine associe
´e a
`
l’irinote
´can (xeliri) [24] ou a
`l’oxaliplatine (xelox) [22] ;
Dans le traitement de premie
`re ligne de
l’ade
´nocarcinome pulmonaire avance
´
L’ajout de bevacizumab a
`l’association paclitaxel-carbopla-
tine augmente significativement le taux de re
´ponse (35 %
versus 15 %), la survie sans progression (me
´diane de 6,2 mois
versus 4,5 mois) et la survie globale (me
´diane de 12,3 mois
versus 10,3 mois) [8] ;
Dans le traitement du cancer du sein avance
´
L’ajout de bevacizumab a
`une chimiothe
´rapie de premie
`re
ligne par paclitaxel augmente significativement la survie sans
progression (me
´diane de 11,8 mois versus 5,9 mois) mais pas
la survie globale (me
´diane de 26,7 mois versus 25,2 mois) [9] ;
Dans le carcinome re
´nal a
`cellules claires (CRCC) avance
´
Le bevacizumab en association avec l’interfe
´ron-alpha 2a a
e
´te
´e
´value
´. Le bevacizumab associe
´a
`l’interfe
´ron-alpha 2a
augmente significativement la survie sans progression (me
´-
diane de 10,2 mois versus 5,4 mois) [22].
Le sorafe
´nib et le sunitinib
Le sorafe
´nib est un inhibiteur multicible de tyrosine kinase
dont les principales cibles sont VEGFR-2, VEGFR-3, platelet
derived growth factor receptor (PDGFR-b), FLT3 ( fms-
related tyrosine kinase 3) RAF, BRAF, et KIT (stem-cell growth
factor receptor)[18]. Il est actuellement indique
´dans le
traitement des cancers avance
´s du rein et du foie [6,7]. Dans
le traitement de seconde ligne du CRCC avance
´,unbe
´ne
´fice
est apporte
´par le sorafe
`nib en monothe
´rapie versus un
placebo en termes de survie globale (me
´diane de 19,3 mois
versus 15,9 mois) et de survie sans progression (me
´diane de
5,5 mois versus 2,8 mois) [6]. Le sorafe
´nib est le premier
me
´dicament a
`obtenir une AMM dans le traitement du carci-
nome he
´patocellulaire avance
´, suite aux re
´sultats de l’e
´tude
Sharp (me
´diane de survie globale de 10,7 mois versus
7,9 mois ; me
´diane de survie sans progression de 5,5 mois
dans le bras sorafe
´nib versus 2,8 mois) [7].
Le sunitinib est e
´galement un inhibiteur multicible de
tyrosine kinase dont les principales cibles sont identiques a
`
celles du sorafe
´nib auxquelles s’ajoutent colony-stimulating
factor 1 receptor (CSF1R) [10]. Il est indique
´comme traite-
ment du CRRC avance
´et apre
`se
´chec ou intole
´rance de
l’imatinib dans les tumeurs stromales digestives [5,25]. Dans
le traitement de premie
`re ligne du CRCC avance
´, le sunitinib
compare
´a
`l’interfe
´ron-alpha augmente significativement le
taux de re
´ponse objective (31 % versus 6 %) et la survie sans
progression (me
´diane de 11 mois versus 5 mois) et la survie
globale (me
´diane de 26,4 mois versus 21,8 mois) [5]. Une
e
´tude de phase II re
´cente sugge
`re une efficacite
´du sunitinib
apre
`se
´chec du bevacizumab dans cette indication [26].
Manifestations vasculaires et re
´nales des
anti-angioge
´niques
E
´valuation des effets vasculaires et re
´naux :
classification utilise
´e en oncologie
Les anti-angioge
´niques, quelle que soit la sous-classe a
`
laquelle ils appartiennent, pre
´sentent des profils de tole
´-
rance vasculaire et ne
´phrologique communs caracte
´rise
´s par
l’hypertension arte
´rielle (HTA) et la prote
´inurie. Dans les
essais the
´rapeutiques, l’e
´valuation de ces toxicite
´s est re
´a-
lise
´e selon les crite
`res usuels de la classification common
terminology criteria for adverse events of the national
cancer institute (NCI-CTCAE) (Tableau 1)[27]. Les crite
`res
de
´finissant le grade des toxicite
´s sont critiquables, notam-
ment car elles ne reprennent aucune des recommandations
internationales de diagnostic et de prise en charge de l’HTA ;
les valeurs prises en compte pour la pression arte
´rielle (PA) et
la prote
´inurie ne
´cessitent donc une validation. L’inte
´reˆt de
cette classification est cependant de permettre de comparer
les l’incidence et la se
´ve
´rite
´des effets inde
´sirables dans les
essais the
´rapeutiques d’oncologie.
Effets secondaires vasculaires et re
´naux :
e
´pide
´miologie et physiopathologie
HTA
L’HTA est l’effet inde
´sirable le plus fre
´quemment observe
´
chez les patients traite
´s par des anti-VEGF. Son incidence
Tableau 1 Grade des toxicite
´s : HTA et prote
´inurie (classification NCT-CTC [v2.0]).
Toxicite
´01 2 3 4
HTA Pression
arte
´rielle
normale
Asymptomatique, transitoire
(<24 h), augmentation >
20 mmHg pour la diastolique
ou >150/100 mmHg pour un
hypertendu ante
´rieur, sans
intervention the
´rapeutique
Re
´cidivante, persistante
(>24 h) ou symptomatique
avec une augmentation >
20 mmHg de la diastolique
ou >150/100 mmHg pour
un hypertendu ante
´rieur
avec ne
´cessite
´d’introduire
une monothe
´rapie
Ne
´cessite
´d’un
traitement
me
´dicamenteux
supple
´mentaire
Mise en jeu du
pronostic vital
Prote
´inurie Nulle ou
<0,15 g/24 h
1 + ou 0,15—1,0 g/24 h 2 + a
`3 + ou 1,0—3,5 g/24 h 4 + ou >3,5 g/24 h Syndrome
ne
´phrotique
Effets vasculaires et re
´naux des me
´dicaments anti-angioge
´niques 605
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re
´elle n’est pas connue avec exactitude car la PA a e
´te
´
mesure
´e dans des conditions non optimales, car l’incidence
de l’HTA a e
´te
´rapporte
´e selon les crite
`res usuels de la
classification NCI-CTCAE (Tableau 1) et non ceux de
´finissant
l’HTA selon les recommandations de l’ensemble des socie
´te
´s
savantes et instances de sante
´publique nationales et inter-
nationales (140 et/ou 90 mmHg ou utilisation d’un traite-
ment antihypertenseur quel que soit le chiffre de pression
arte
´rielle [PA]).
Les caracte
´ristiques de cette HTA sont les suivantes :
l’e
´le
´vation de la PA sous traitement est constante de
`s les
premie
`res semaines de traitement chez tous les patients
qu’ils soient initialement hypertendus ou normotendus ; elle
atteint fre
´quemment le stade d’HTA chez les patients nor-
motendus et rend plus difficile le controˆle tensionnel des
patients connus comme hypertendus. Cette HTA est dose-
de
´pendante. Le Tableau 2 re
´sume les donne
´es concernant
l’HTA associe
´e aux traitements anti-angioge
´niques.
Les mesures conventionnelles de PA au cabinet me
´dical ne
permettent pas toujours de faire le diagnostic de l’HTA, ce
qui justifie l’utilisation de l’automesure de la PA chez les
patients traite
´s par me
´dicaments anti-VEGF [28]. Cette HTA
iatroge
`ne est ge
´ne
´ralement controˆlable par les traitements
antihypertenseurs et elle compromet rarement la poursuite
du traitement anti-angioge
´nique. Plus rarement, elle peut
avoir des conse
´quences graves a
`court terme. Ses conse
´-
quences a
`long terme n’ont pas e
´te
´e
´value
´es [29].
Plusieurs tableaux cliniques associe
´s a
`l’HTA ont e
´te
´rap-
porte
´s chez certains patients traite
´s par me
´dicaments anti-
VEGF : HTA maligne, HTA se
´ve
`re re
´fractaire, leucoence
´pha-
lopathie poste
´rieure re
´versible associe
´ea
`une HTA se
´ve
`re ont
aussi e
´te
´rapporte
´es.
Le me
´canisme physiopathologique de l’HTA n’est pas
comple
`tement e
´lucide
´et passe par la neutralisation des
effets physiologiques majeurs du VEGF au niveau de la cellule
endothe
´liale et donc de la paroi vasculaire. La perfusion de
VEGF exoge
`ne s’accompagne d’une hypotension par le biais
de l’activation de la NO-synthase endothe
´liale et de la
production de monoxyde d’azote (NO) [30].A
`ce jour, on
conside
`re que cette HTA iatroge
`ne serait due a
`une inhibition
de la NO synthase endothe
´liale avec une re
´duction de la
libe
´ration de NO par les cellules endothe
´liales en re
´ponse a
`
diffe
´rents stimuli entraıˆnant une alte
´ration de la vasodilata-
tion endothe
´lium de
´pendante, une rare
´faction arte
´riolaire et
capillaire [31], une alte
´ration structurale des microvaisseaux
et une augmentation de l’activite
´sympathique adre
´nergique
[32].
Les atteintes re
´nales
Parmi les complications re
´nales observe
´es chez les patients
recevant un anti-VEGF, la plus fre
´quente est la prote
´inurie.
La prote
´inurie peut apparaıˆtre avec un de
´lai variable apre
`sla
mise sous traitement anti-angioge
´nique. Elle est presque
constamment associe
´ea
`l’HTA. Comme l’HTA, la prote
´inurie
iatroge
`ne est aussi habituellement re
´versible a
`l’arreˆt des
anti-VEGF. Parmi les anti-angioge
´niques, l’expe
´rience est la
plus importante avec le bevacizumab. Le taux de survenue
d’une prote
´inurie lie
´ea
`l’administration du bevacizumab
varie entre 21 et 64 % selon les e
´tudes [33]. Elle est le plus
souvent sans conse
´quence sur la poursuite du traitement
anti-angioge
´nique et la fonction re
´nale. La prote
´inurie est
aussi de
´pendante de la dose de bevacizumab [33]. Une
ne
´phrectomie pre
´alable pour CRCC ne semble pas augmenter
l’incidence de la prote
´inurie ou de l’aggravation d’une pro-
te
´inurie pre
´existante sous bevacizumab par rapport aux
patients ayant un carcinome colique (ayant donc deux reins)
[33]. L’incidence la prote
´inurie de grade 3 (>3,5 g/j) varie
de 1,0 a
`6,5 % selon les e
´tudes [4,8,9,22].
Tableau 2 HTA et effets re
´naux associe
´s aux me
´dicaments anti-angioge
´niques.
Anti-VEGF Effets secondaires Re
´fe
´rences
Anticorps monoclonaux
Bevacizumab (Avastin
1
)
HTA [33,53,54]
Faible dose : HTA : incidence : 2—32 % [33]
Forte dose : HTA : incidence : 21—30 % [33,37—39]
Prote
´inurie [34,35,53]
Prote
´inurie ne
´phrotique [34,35]
Syndrome ne
´phrotique impur [55]
Glome
´rulopathie a
`de
´poˆt d’IgA [56]
Nephrite interstitielle aigue
¨[37—39,55]
MAT
Inhibiteurs des tyrosines kinases
Sunitinib (Sutent
1
) HTA : incidence : 20—26 % [38,58,61]
MAT [57]
Sorafe
´nib (Nexevar
1
) HTA : incidence : 16—33 % [19,20]
Ne
´phrite interstitielle aigue
¨[36]
AZD2171 HTA [59]
PTK787 (vatalanib) HTA, prote
´inurie [59]
ZD6474 (vandetanib, Zactima) HTA, prote
´inurie [59]
GW-786034 (Pazopanib) HTA [59]
AG-013736 (Axitinib) HTA, prote
´inurie [60]
L’HTA est habituellement de
´finie par une e
´le´vation de la pression arte
´rielle diastolique >20 mmHg ou une pression arte
´rielle >150/
100 mmHg mesure
´e de manie
`re conventionnelle (classification NCT-CTC [v2.0]).
606 J.-M. Halimi et al.
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