L’autre Parole, no 131, automne 2011 3
LIMINAIRE
Quand quatre femmes se sont réunies il y a 35 ans pour fonder L’autre Parole, elles ouvraient
un chantier dont elles ne pouvaient prévoir ni l’ampleur ni la durée. Elles en avaient toutefois
imaginé la difficulté, puisqu’elles avaient formé le projet d’effectuer une brèche dans la forte-
resse patriarcale qu’est l’Église catholique romaine. Leurs seuls outils étaient et demeurent la
parole et la plume. Le cercle des ouvrières a grandi au fil du temps. Il le fallait, l’entreprise exi-
geant tellement d’énergie, de ténacité, de générosité, de courage, de conviction et, diront cer-
tains, d’audace téméraire...
Pour retrouver le cœur du message évangélique, le rendre audible et ajusté aux besoins, aux at-
tentes et aux espérances des femmes de notre temps, éprises de justice et d’égalité, pour leur
redonner leur pleine dignité de filles de Dieu, il nous a fallu, à L’autre Parole, déconstruire un
système aliénant. Nous avons dû en dénoncer les injustices, et interpeller ceux qui les maintien-
nent et les justifient en prétendant obéir ainsi à Dieu, et respecter la volonté de Jésus.
Dans ce 131
e
numéro de L’autre Parole, le premier en version électronique, nous prenons acte
que la forteresse patriarcale se dresse toujours devant nous. Toutefois, de plus en plus de
femmes, sans compter un bon nombre d’hommes de bonne volonté et de bon jugement, bien
sûr, reconnaissent la justesse de notre cause et la soutiennent.
Les femmes à qui nous ouvrons nos pages aujourd’hui, avec bonheur et reconnaissance, ont de
longs états de service en tant que féministes chrétiennes militantes. Le contre-discours féministe
en a souvent été un de déconstruction. Elles y ont contribué. Il fallait révéler les failles du sys-
tème. Ce faisant, des plans de reconstruction se sont du même coup élaborés. Nous vous offrons
ici des questions, dont vous devinerez sans peine les réponses, et plusieurs encourageantes pro-
positions de reconstruction. Elles me paraissent toutes avoir un point commun : abandonner la
pyramide patriarcale, où tout se décide au sommet, pour enfin construire une table ronde, sym-
bole par excellence de la convivialité et de l’idéal démocratique.
Voilà, le mot est lâché! Nous croyons que l’avenir de l’Église réside dans sa démocratisation.
Qui peut affirmer, avec certitude, que Dieu préfère les pyramides aux tables rondes? Et que de-
viennent les pyramides quand leur base s’effrite et se délite sous leur trop lourde charge? Ne
ployons plus sous le fardeau, jetons un regard sur un autre horizon, plus lumineux plus stimu-
lant. Nos auteures nous suggèrent des moyens de le rapprocher. Pour y arriver, je vous propose
de faire nôtre le conseil de Lanza del Vasto :