Émile Perreau-Saussine Catholicisme et démocratie. Une histoire

Librairie
141
Émile Perreau-Saussine
Catholicisme et démocratie.
Une histoire
de la pensée politique
Préface de Pierre Manent, Paris,
Le Cerf, coll. « La Nuit surveillée »,
2011, 272 p., 27
Un vrai démocrate peut-il être
catholique ? Un vrai catholique peut-
il s’accorder totalement avec la
démocratie ? Il y a longtemps que,
sur un autre registre certes, Maurice
Merleau-Ponty reprochait au chré-
tien de n’être pas un « compagnon
sûr ». Ce soupçon s’étend bien au-
delà des engagements politiques.
Mais qui ne ruse avec les principes ?
De nombreux catholiques ont vécu
des loyautés sans restriction, ou des
dualités d’appartenance à la fois har-
monieuses, intéressantes et créa-
trices. Dans l’histoire des démocra-
ties européennes et même mondiales,
ils n’ont pas démérité, loin de là,
comme serviteurs de la vie démo-
cratique ou combattants de son éta-
blissement et de son rétablissement.
Le problème, dans l’affaire, n’est pas
du côté de la démocratie car la
démocratie libérale s’est imposée
objectivement, pour l’instant, comme
« le » mole d’existence politique le
plus enviable –, ni des individus
catholiques finalement, mais de
l’Église enseignante et de son appré-
hension, à tous les sens du mot, de
l’exigence démocratique. La démo-
cratie apporte-t-elle quelque chose à
l’Église ? L’Église peut-elle non seu-
lement accepter la démocratie, mais
lui être utile ? Le livre aborde ces
questions à lan. Elles ont eu besoin,
pour être clairement posées, d’un
long parcours historique, qui va de
Bossuet à la « laïcipositive » (l’au-
teur explique pourquoi il adhère à
cette expression contese). Dans une
démarche à la fois historique et
conceptuelle, il est expliqué com-
ment la démocratie, après bien des
refus, des détours, des hésitations, est
devenue pour l’Église catholique
aussi l’horizon politique indépas-
sable tout en créant pour elle de
nouveaux dilemmes.
Pour sa démonstration, l’auteur
soutient paradoxalement une thèse
qui fait loi dans la rhétorique de
l’Église elle-même comme une vérité
théologique, mais qui est générale-
ment critiquée par les théologiens,
les historiens et les sociologues : la
continuité entre les conciles de Vati-
can I (1870-1871) et de Vatican II
(1962-1965). Perreau-Saussine argu-
mente que le second concile de
réformes et de réconciliation avec la
modernité, y compris politique a
prolongé et achevé le premier
concile de l’infaillibilité pontificale et
de l’extériorité par rapport à la
société moderne. En réalité, Vati-
can I aurait, selon l’auteur, extirpé
l’Église de ses enfermements dans les
histoires nationales ; le catholicisme
s’est reconstruit à Rome, autour du
pape, pour parer à son effondrement
dans les nations européennes ; en
France particulièrement, il aurait
relevé l’Église en rompant définiti-
vement avec la tradition gallicane
que la Révolution avait déjà mise à
mal (tout en prétendant la promouvoir
voir la Constitution civile du cler
de 1790). Après l’échec des tenta-
tives de restaurations autoritaires de
la Vérité dans la vie politique, l’étape
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