Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. III - n° 1 - janvier-février-mars 2014
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dossier thématique
NGS
analysées, souvent des tumeurs de type luminal A de
faible grade et de faible prolifération. Il a aussi permis
l’identification de mutations de gènes connus pour être
plutôt mutés dans des maladies hématopoïétiques, tels
que RUNX1, CBFB, MYH9, MLL3 et SF3B1, et proposait
une signature mutationnelle des carcinomes luminaux
B avec TP53, RB1, RUNX1 et MALAT1 (8).
Les mutations activatrices de HER2 permettent-
elles de prédire la réponse aux inhibiteurs
de tyrosine kinases anti-HER2 ?
La mise en évidence de mutations situées dans le
domaine tyrosine kinase de HER2 dans des carcinomes
RE+ (8) et des carcinomes lobulaires infiltrants (9) ouvre
la perspective de thérapies ciblées anti-HER2 en dehors
du contexte de l’amplification de HER2.
Des essais avec des inhibiteurs de tyrosine kinase de
HER2 (nératinib) sont en cours.
Mutations d’ESR1
Deux articles (10, 11) publiés dans le même numéro de
la revue Nature en décembre 2013 ont montré que, sous
la pression du traitement antihormonal par tamoxifène
ou par antiaromatases, des cancers du sein métasta-
tiques présentaient des mutations essentiellement
localisées dans le domaine de liaison du ligand, entre
les acides aminés 534 et 538, selon une fréquence de
22 % (20 cas sur 91).
Les mêmes auteurs ont montré que les mutations d’ESR1
n’étaient présentes dans aucune tumeur triple-négative
(sur 80 cas) et étaient présentes dans 0 % (sur 390 cas
[11]) à 3 % (dans l’essai BOLERO [10]) des cas de carci-
nomes luminaux avant toute thérapie antihormonale.
De plus, ces mutations déclenchent l’activation du
récepteur en l’absence de tout ligand, ce qui pourrait
expliquer l’apparition de la résistance aux inhibiteurs de
l’aromatase. Même si les formes mutées du récepteur
sont encore capables de fixer les antiestrogènes, de
plus fortes doses que celles utilisées en clinique sont
nécessaires pour inhiber l’activité du récepteur muté.
Les mutations entraînent des changements conforma-
tionnels des récepteurs mutés, ce qui pourrait permettre
le développement et la mise au point de nouvelles
thérapies antihormonales.
La détection dans le sang de la présence des molécules
d’ADN circulant muté offre également des possibilités
de suivi personnalisé intéressantes pour les patientes
sous hormonothérapie.
Amplification de MCL1 et JAK2
après chimiothérapie néo-adjuvante
des carcinomes triple-négatifs
L’équipe dirigée par C. Arteaga, du Vanderbilt-Ingram
Cancer Center, de Nashville, a réalisé un séquençage
combiné à une analyse transcriptomique des reliquats
après chimiothérapie de 74 carcinomes triple-négatifs.
Les principaux résultats indiquent que 89 % de ces car-
cinomes présentent une mutation de TP53 – résultat
identique aux données de séquençage obtenues avant
chimiothérapie –, et une amplification du gène MCL1
dans 54 % des cas analysés, contre seulement 19 %
des tumeurs triple-négatives basal-like analysées par
le TCGA (p = 0,0006) et une fréquence élevée de perte
de PTEN et d’amplification de JAK2.
Les auteurs concluent que, dans 90 % des cas ana-
lysés, des anomalies “actionnables”, c’est-à-dire soit
cibles thérapeutiques, soit paramètres de définition
du pronostic, étaient observées après le séquençage
massif parallèle des tumeurs triple-négatives après une
chimiothérapie (12, 13).
Conclusion
Le séquençage parallèle massif des carcinomes mam-
maires a considérablement amélioré notre compréhen-
sion de la biologie des cancers du sein. Et ces progrès
devraient s’amplifier dans les mois à venir. Les résultats
accessibles à la communauté scientifique dans des
bases de données internationales vont être interpré-
tés sous différents angles et contribuer ainsi à ouvrir
d’autres pistes pour la prise en charge des patientes.
La détection de l’ADN circulant, comme outil de suivi
et d’efficacité thérapeutique, est déjà mise en pratique
dans des centres spécialisés.
La meilleure prédiction de la réponse aux thérapies
ciblées ainsi que l’évaluation après traitement du statut
mutationnel des tumeurs permettront une personna-
lisation plus exacte des traitements.
Enfin, la plupart des tumeurs du sein analysées jusqu’à
présent étaient des carcinomes de type non spéci-
fique (canalaires sans autre indication). Les autres
types histologiques sont en train d’être séquencés.
Ces analyses permettront certainement d’améliorer
encore la classification des carcinomes mammaires et
d’affiner les stratégies de traitement proposées aux
patientes. ■
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Références
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts concernant cet article.