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N* 100
Modèles, théories et arguments en économique
Pierre Salmon
Novembre 1987
Communication psene au I9ème colloque annuel de HME.
La réflexion sur la pensée économique se développe très rapidement. Y
participent de nombreux économistes, mais aussi, phénomène nouveau, un
nombre appréciable de philosophes. Je voudrais défendre ici une certaine
conception de la recherche à mener dans ce qui est en train de devenir une
spécialité ou un domaine aussi bien pour les économistes que pour les
philosophes.
I. Trois principes euristiques pour la réflexion méthodologique
La difficulté que rencontre immédiatement toute réflexion sur
l’économique tient à ses liens oblis avec la philosophie des sciences et à
l’état actuel de cette philosophie des sciences.
Liens obligés: la Justification de la nécessi de se référer à la
philosophie des sciences est développée dans Méthodologie économique (cf.
Mingat, Salmón et Wolfelsperger [ 1985], ci-après MSW). L’argument
principal est quon ne peut guère réfchir sur la science économique sans
faire appel à des considérations qui sont de nature philosophique d’une part
et qui ont é largement battus dans le cadre de la philosophie des
sciences d'autre part. Faute de prendre connaissance de ces débats, on
risque d'enfoncer des portes ouvertes ou d’adopter des positions dont le
caractère inadéquat a été démontré.
Etat de la philosophie: citons deux caractéristiques principales.
D'abord, la philosophie des sciences progresse actuellement de façon
rapide mais assez confuse. On peut affirmer qu'il n'y a plus actuellement de
grandes perspectives philosophiques qui n'apparaissent comme assez
largement probmatiques dès qu'on essaye de les préciser. Il y a progs,
cependant, parce que des points difficiles ont été un peu éclaircis, des
pistes fausses identifiées, des voles nouvelles assez prometteuses
ouvertes. Ensuite, la philosophie des sciences reste encore largement
influene par une rence explicite ou implicite aux théories de la
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physique, sans considération suffisante pour la varié des problèmes
épismologiques et méthodologiques qu'on trouve dans les autres
disciplines. Ces deux caractéristiques impliquent une double exigence pour
la flexion sur l'économique. Elle ne peut se dispenser d’un effort coûteux
pour connaître, comprendre, évaluer les analyses plus ou moins
contradictoires et souvent assez techniques que nous offre aujourd’hui en
abondance la littérature philosophique. En même temps, elle doit comporter
un effort considérable pour tenir compte des particularités de la discipline
économique.
Les inconvénients de linsuffisance de l’effort consenti dans l'une ou
lautre direction apparaissent clairement dans la façon dont beaucoup
d’écrits de nature méthodologique répondent à la question: l'économique,
ou, plus souvent l'économie o-classique (au sens large), est-elle
scientifique? Le cheminement intellectuel sous-jacent aux ponses
apportées à cette question semble être le suivant. D’abord, on part de la
question: quand peut-on dire d'une activité intellectuelle qu’elle est
scientifique? Malgré tous ses débats internes, la philosophie des sciences
actuelle répond en général: il en est ainsi si elle consiste à formuler des
théories ou des hypothèses et à essayer de les confronter sérieusement
avec les faits. Dans l'ensemble, la méthodologie et l'épistémologie
économiques adoptent cette caractérisation, en tout cas comme point de
départ de leurs analyses de la "science économique. Je pense d'ailleurs
que, parmi les images très simples (trop simples), celle- est la
meilleure. Mais son adoption est souvent à l'origine de conclusions
pessimistes quant au caractère scientifique de notre discipline: le
méthodologue examine l’activité des économistes et estime le plus souvent
qu’elle ne consiste pas ou consiste peu à formuler des hypothèses et
théories et à les confronter rieusement avec les faits, il conclut donc
que la discipline n'est pas réellement scientifique ou ne l'est que très peu.
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A son tour, ce pessimisme conduit à l'une ou l'autre des deux conclusions
suivantes. Pour certains méthodologues les économistes doivent adapter
leur pratique aux principes de l’activité scientifique (tels que les voient
ces méthodologues). Pour d'autres, les économistes peuvent continuer à
faire ce quils font mais on doit cesser d'interpter leur activité comme
scientifique.
Je crois qu'il faut refuser cette alternative, mais il y a plusieurs
façons de le faire. Celle que je voudrais défendre ici consiste dans un
programme de recherche méthodologique et épismologique reposant sur
trois principes euristiques.
Premrement, il faut partir du postulat selon lequel, dans ses
grandes lignes, la démarche suivie par les économistes (telle qu'elle
s’exprime par exemple dans le contenu des grandes revues scientifiques)
est appropre ou correcte, ce qui signifie qu'il faut exclure tout appel à un
changement de pratique. Ce postulat n’est pas nécessairement la
conséquence d'une définition de la méthodologie (on peut vouloir la définir
comme normative), ni le reflet d'une croyance dans le caractère approprié
de ce que font les économistes (on peut souhaiter qu'ils se comportent
autrement). Il est fondé sur le pari stratégique qu'en le respectant on aura
une meilleure chance de découvrir des choses nouvelles et éclairantes. En
cela, il est semblable à la stratégie du situationnisme logique pconisée
par Popper: postulons la rationalité et faisons varier autant que cessaire
les caractéristiques attribuées à la situation (cf. Hands [1985], et sa
bibliographie). Il y a deux raisons d’entretenir l'espoir que cette stratégie
sera féconde. Dabord, de façon générale il paraît toujours préférable de
comprendre avant de critiquer. Ensuite, jusqu maintenant, on a surtout
fait linverse, ce qui a, je crois, conduit à des rendements décroissants de
la réflexion méthodologique sur l'économique. On peut espérer que le
respect du postulat la fera entrer au moins pendant un certain temps dans
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