n° 9410
LE FINANCEMENT DU DEVELOPPEMENT
ET LE SYSTEME MONETAIRE INTERNATIONAL
Elie SADIGH*
décembre 1994
*Maître de Conférences, Université de Bourgogne
Chercheur au LATEC
Trois catégories de pays en développement sont à distinguer, dont une, surtout, ne peut constituer ni une épargne
intérieure suffisante, ni un excédent de la balance commerciale, lui permettant de financer son développement.
Cette catégorie de pays n'ayant pas la possibilité de rembourser sa dette n'a pas une place de choix parmi les pays
emprunteurs sur le marché financier international. Les organisations internationales ne disposent pas de fonds
suffisants pour faire face aux besoins de ces pays. Le système monétaire international actuel ne leur est pas
favorable.
Une réforme du système monétaire international est donc nécessaire, réforme qui rendrait désuète l'étude en termes
de liquidité internationale, car les excédents et les déficits seront toujours égaux, de ce fait le taux de l'intérêt ne
sera plus fonction de l'offre et de la demande et il ne sera plus influencé par les tensions sur la monnaie
internationale. En outre, le nouveau système permettra de constituer un fonds de solidarité destiné à financer le
développement des pays les moins avancés.
Three categories of developing countries must be distinguished. Of these, one cannot constitute either sufficient
domestic savings, or a balance of trade surplus, which would allow it to finance its development. This same
category which has no possibility^ to pay back its debts doesn't have a good standing among the borrowing
countries, on the international financial market. International organizations don't have sufficient funds to face up to
the needs of these countries. Therefore, the current international monetary system is not favourable to these
countries.
Consequently, a reform of the international monetary system is necessary. This reform should make the study of
international liquidity outdated, because the surplus and deficit will always be equal, therefore the rate of the
interest will not depend on supply and demand and won't be influenced by tensions on international currency,
anymore. Besides, the new system will allow to constitute a solidarity fund, meant to finance the development of the
undeveloped countries.
Développement, épargne, investissement, financement, système monétaire international, réforme, fonds de
solidarité, fonds de garantie, taux d'intérêt.
LE FINANCEMENT DU DEVELOPPEMENT
ET LE SYSTEME MONETAIRE INTERNATIONAL
INTRODUCTION
La principale richesse d'une nation est sa richesse humaine. C'est donc cette richesse
humaine qu'il convient de mettre en valeur, afin de satisfaire les besoins économiques de chaque
nation.
Cette mise en valeur dépend essentiellement de deux facteurs indissociables (voire trois, si
l'on tient compte du facteur politique1 ) dont l'un est l'éducation, que nous entendons ici au sens
large du terme: l'éducation ou l'instruction, qui dépasse la simple capacité de lire et d'écrire, qui
stimule la croissance des Hommes, leur permettant de participer aussi bien à l'évolution
économique qu'à l'évolution démocratique de la nation, les aidant ainsi à s'intégrer à la vie de la
communauté2. En effet, l'accès à la technologie et sa pleine utilisation, qui favorise le
développement économique, exige un relèvement du niveau de l'instruction. L'autre facteur,
directement lié au premier, est le financement du développement; c'est l'un des problèmes majeurs
auxquels se trouvent confrontés les pays en développement.
Nous le savons, le but du développement est de satisfaire les besoins humains. Or ces
besoins ne peuvent être satisfaits que par l'effort
productif.
Il est donc nécessaire que les pays en
développement s'organisent pour augmenter la capacité de leur production et faire face à leurs
besoins, ce qui dépend pour une grande part de leurs possibilités de financement.
Platon présente ainsi le gouvernement digne de ce nom à l'un des ses disciples: "Si tu découvres pour ceux qui doivent
commander, une condition meilleure que le pouvoir lui-même, tu auras le moyen d'avoir un Etat bien gouverné; car c'est dans
cet Etat seul que commanderont ceux qui sont vraiment riches, non en or, mais en vertu et en sagesse, qui sont les richesses
nécessaires au bonheur." (La République, P. 223).
2 Un exemple du mariage de la démocratie et du développement de l'éducation peut être donné par Botswana: « Qui pourrait
croire qu'existe, dans cette Afrique devenue, pour nombre d'Occidentaux, synonyme de faillite et de massacres fratricides, un
pays où la paix civile et le pluralisme politique prévalent, sans discontinuer, depuis vingt-huit ans d'indépendance? Où le taux
de croissance de l'économie a été, des années 60 au début des années 90, un des plus forts du monde- frôlant les 12% par an?
Un pays qui a l'honneur de ne pas figurer dans les rapports d'Amnesty International? Où le taux de scolarisation figure parmi
les plus élevés des pays en développement, (94% des enfants en âge d'entrer à l'école sont scolarisés)...
Vaste comme la France ou le Kenya, mais désertique, peu peuplé, et privé de tout débouché sur la mer, le Botswana était alors
classé parmi les vingt pays les plus pauvres de la planète ». Catherine Simon Le Monde du 27 septembre 1994.
Mais le problème du développement ne se pose pas de la même façon pour tous les pays en
développement. Trois types de pays en développement sont en effet à distinguer:
1° Les pays riches, les pays pétroliers
2° Les pays dont le niveau de savoir est assez avancé.
3° Les pays dont les niveaux de savoir et de ressources sont limités.
En ce qui concerne les premiers, l'une des causes de leur retard actuel est l'organisation
politique et sociale. En outre, la plupart des dirigeants de ces pays "confondent" les caisses de
l'Etat et leur fortune personnelle. Cela explique pourquoi une grande partie de leurs ressources
n'est pas utilisée pour financer l'évolution économique.
Ainsi le problème du financement ne se pose-t-il pas véritablement dans ces pays; c'est
davantage le problème de l'utilisation des ressources qui se pose que celui des besoins du
financement du développement. Ces nations ont le choix dans l'utilisation de leurs excédents:
financer le développement des secteurs agricole et industriel, ainsi que les importations des
produits de consommation, ou placer leurs excédents sur le marché financier international; choix
qui n'est pas indifférent pour leur avenir et leur dépendance vis-à-vis de l'extérieur. Certains pays
ont privilégié les deux dernières possibilités en négligeant la première, la plus importante pourtant.
En ce qui concerne le deuxième type de pays: ce sont des pays comme l'Inde, le Brésil, etc.
Ces pays pourront d'autant plus facilement s'en sortir qu'ils parviendront à diminuer les inégalités
et à résoudre le problème de leur endettement. Or, les charges de la dette absorbent une grande
partie des possibilités de financement de leur développement et le système monétaire international
actuel ne facilite pas leur désendettement.
Par conséquent, sans oublier de considérer le problème posé par l'endettement d'une grande
partie des pays de la deuxième catégorie, nous allons centrer notre étude sur les pays les moins
avancés. Ces pays ont un besoin important de ressources financières qu'ils ne peuvent ni obtenir
grâce à leurs exportations ni emprunter, car ils ne sont en mesure ni de supporter les charges ni,
surtout, de rembourser le capital, ce qui leur pose un problème grave, tant sur le plan économique
que sur le plan humain.
Notre but, dans ce travail, est de démontrer comment une réforme du système monétaire
international permettrait de résoudre certains problèmes posés non seulement aux pays de la
troisième catégorie, mais également à ceux de la deuxième catégorie.
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