Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation MISE AU POINT Programmes et parcours de rééducation périprothétique de hanche et de genou Rehabilitation programs and clinical care pathways after total hip and total knee arthroplasty Patricia Ribinik*, Marc Genty** La fiabilité actuelle des implants et la qualité de la prise en charge ont permis l’essor de la chirurgie prothétique de hanche (100 000 prothèses totales de hanche [PTH]/an environ) et, dans une moindre mesure, de genou (50 000 prothèses totales de genou [PTG] environ) dans le traitement de l’arthrose en France. Quel que soit le type de prothèse implantée, la prise en charge postopératoire immédiate et au sortir du service de chirurgie est préparée au mieux par une prise en charge préopératoire de rééducation, d’information et d’éducation thérapeutique du patient (ETP). Les besoins et les attentes des patients Le projet thérapeutique pré- et postopératoire est élaboré avec le patient. Il tient compte non seulement de ses besoins fonctionnels, mais aussi de ses attentes quant au geste chirurgical. Les objectifs du patient ne sont pas toujours ceux du chirurgien et du médecin de MPR, même si tous ont pour projet d’obtenir l’indolence, la mobilité et la stabilité permettant d’espérer la reprise des activités de la vie quotidienne, de certaines activités de loisirs ou de sport, voire des activités professionnelles, avec ou sans poste adapté. Le patient peut parfois se fixer des objectifs en termes d’activités et de participation qui peuvent ne pas être raisonnables : charge à l’équipe médicale de repérer cette situation et de permettre au patient de réviser ses attentes du geste chirurgical. Le programme de rééducation Le projet thérapeutique est construit à partir de l’évaluation (interrogatoire et examen clinique) pré- et postopératoire pour répondre aux besoins du patient. Il est centré sur la douleur, les troubles trophiques, les amplitudes articulaires, la qualité musculaire et la fonction. Des évaluations cliniques régulières permettent d’adapter le programme à l’évolution du patient. En préopératoire (1-6) Le patient bénéficie d’une préparation à l’intervention comportant : • une information sur le déroulement de la prise en charge médicochirurgicale : calendrier, parcours de soins, modalités des soins de rééducation postopératoire ; Mots-clés : Prothèse totale de hanche (PTH) - Prothèse totale de genou (PTG) - Programmes de rééducation - Rééducation Parcours de soins - Médecine physique et de réadaptation (MPR) Keywords: Total hip arthroplasty Total knee arthroplasty - Rehabilitation program - Clinical care pathway - Physical and rehabilitation medicine • une évaluation des espérances du patient vis-à-vis des résultats de la chirurgie, afin de mettre en évidence des attentes non raisonnables, source de mécontentement au décours de celle-ci ; • une éducation visant à préparer la récupération et à améliorer l’autonomie : utilisation des aides de marche, glaçage de l’articulation, réalisation de contractions musculaires isométriques, réalisation de postures, apprentissage de la protection articulaire pour une PTH et initiation aux règles d’hygiène de vie avec une arthroplastie ; • une adaptation de l’environnement personnel : aménagement du domicile pour prévenir le risque de chutes, acquisition d’aides techniques ; • des séances de kinésithérapie selon les besoins. Idéalement, le patient bénéficie d’un programme d’ETP associant séances éducatives pluridisciplinaires et exercices adaptés, pour faciliter le retour à domicile et optimiser les transferts en service de MPR. Les recommandations de la SOFMER datant de 2007 restent d’actualité. Une rééducation préopératoire, qui doit comporter au minimum de la kinésithérapie associée à de l’éducation, est recommandée avant une arthroplastie totale de hanche et de genou. De l’ergothérapie pouvant comporter une visite à domicile peut également être proposée. La kinésithérapie isolée avant une arthroplastie totale de genou n’est pas recommandée. Pour les patients les plus fragiles, du fait de capacités fonctionnelles altérées, de comorbidités et/ou de problèmes sociaux, une rééducation pluridisciplinaire comportant au minimum de l’ergothérapie et une éducation est souhaitable. La réalisation d’une rééducation avant une arthroplastie totale de la hanche ou du genou contribue à réduire la durée de séjour et à modifier les modalités de retour à domicile. Cette prise en charge doit faire appel à des professionnels de santé compétents dans l’éducation des patients et la préparation du retour à domicile. * Service de médecine physique et de réadaptation, CH de Gonesse. ** Centre thermal d’Yverdon, Suisse. Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation - 01 - Octobre - novembre - décembre 2013 19 Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation MISE AU POINT Les recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) en 2008 précisent le contenu de la kinésithérapie préopératoire avant PTG, qui doit associer un travail analytique (maintien des amplitudes articulaires et renforcement musculaire), de la kinésithérapie respiratoire et de l’ETP. Cette éducation concerne l’utilisation des aides techniques, la réalisation des transferts, la montée et la descente des escaliers, ainsi que le déroulement de la phase postopératoire. L’évaluation préopératoire des besoins des patients est également capitale. L’utilisation de questionnaires prédictifs de l’orientation des patients comme le Risk Assessment and Predictor Tool (RAPT) est une aide à l’orientation postopératoire. En postopératoire (4, 7-12) Le programme de rééducation comprend : • la lutte contre la douleur et les troubles trophiques ; • la prévention thromboembolique ; • la récupération des amplitudes articulaires ; • le réveil et le renforcement musculaire analytique péri-articulaire et global des membres inférieurs ; • le lever précoce, la marche avec puis sans aides techniques ; • l’autonomisation pour les activités de la vie quotidienne ; • le réentraînement à l’effort. Le contenu et les modalités de réalisation sont variables, toujours adaptés aux besoins des patients. La progression est rapide grâce aux progrès réalisés ces dernières années dans la gestion de la douleur postopératoire (thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuses). L’analyse de la littérature ne permet pas de privilégier un programme rééducatif par rapport à un autre (nombre de séances, intensité, contenu, approche multidisciplinaire, lieu de réalisation du programme). • Recommandations Sofmer-Sofcot-SFR 2007 Après mise en place d’une prothèse totale de hanche L’intérêt d’une mobilisation articulaire très précoce après PTH n’est pas établi à partir des données de la littérature. La question de leur intérêt ne peut être abordée que sur la base d’un consensus professionnel. Les pratiques professionnelles françaises encouragent la mobilisation articulaire très précoce pour les hanches complexes. Il semble intéressant de mettre en place des études de bonne qualité méthodologique, permettant d’évaluer l’intérêt des mobilisations “fonctionnelles”, correspondant au premier lever et à une reprise précoce de la marche, en retenant comme critères principaux d’évaluation le statut algofonctionnel final ainsi que la réduction des situations de handicap. Il est recommandé de prescrire une série de séances de kinésithérapie après arthroplastie totale de hanche quand le patient peut rentrer directement à domicile à la sortie du service de chirurgie, surtout dans un objectif d’amélioration fonctionnelle. – 20 L’analyse de la littérature apporte quelques arguments pour une prescription de kinésithérapie à domicile après implantation d’une PTH. Les principaux paramètres améliorés seraient la force musculaire et la fonction. Le programme, le nombre de séances et les objectifs recherchés doivent être précisés et évalués dans des essais cliniques avec une bonne méthodologie. On ne retrouve pas de différence de coût notable sur la prise en charge à domicile. Une prise en charge en kinésithérapie à domicile après la sortie du service de chirurgie ne paraît pas diminuer le coût global de la prise en charge. – Après mise en place d’une prothèse totale du genou Les conclusions issues de la revue de la littérature et des pratiques professionnelles en France suggèrent l’intérêt d’une mobilisation très précoce, c’est-à-dire dès J0 après mise en place d’une PTG. Cette modalité, utilisant la technique de mobilisation passive continue, ne semble pas augmenter la fréquence des complications et peut permettre une récupération plus précoce des amplitudes articulaires. Des études de bonne qualité méthodologique, posant spécifiquement la question de l’avantage de la mobilisation très précoce, sont recommandées. Outre les résultats sur le gain de mobilité articulaire, elles devront particulièrement prendre en compte les critères économiques (durée d’hospitalisation en service de chirurgie, besoins de recours à des centres de rééducation, consommation de soins de kinésithérapie, consommation d’antalgiques), mais aussi le confort et la satisfaction du patient. Après arthroplastie totale de genou, la mobilisation passive continue peut constituer un adjuvant pour améliorer les résultats à court terme, mais il n’y a pas de preuves suffisantes dans la littérature pour substituer la mobilisation passive continue aux autres techniques de rééducation à visée mobilisatrice. Cette technique demeure cependant largement intégrée dans la pratique de rééducation après PTG en France, tant en service de chirurgie orthopédique qu’en médecine physique et de réadaptation (MPR). L’analyse de la littérature ne permet pas de recommander la prescription systématique de kinésithérapie chez les patients ayant la possibilité de rentrer directement à domicile après la pose d’une PTG. Il existe cependant quelques arguments suggérant qu’elle peut faciliter la récupération musculaire et fonctionnelle (mais pas la mobilité). Suivant les pratiques professionnelles françaises des chirurgiens et des spécialistes en MPR, il peut donc être utile de prescrire une série de kinésithérapie chez ces patients, surtout dans un objectif d’amélioration fonctionnelle. Des études de bonne qualité méthodologique sont nécessaires pour définir des critères d’indication de la prescription de kinésithérapie ambulatoire après la sortie du service de chirurgie, concernant les patients qui vérifient les critères d’orientation vers une sortie directement à domicile, et pour évaluer les programmes les plus efficaces. Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation - 01 - Octobre - novembre - décembre 2013 Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation Les parcours de soins (13-16) Parcours SOFMER-FEDMER Un parcours de soin de rééducation décrit globalement les besoins des patients par typologie, les objectifs d’une prise en charge en MPR, et propose les moyens humains et matériels à mettre en œuvre, leur chronologie, ainsi que les principaux résultats attendus. Les patients sont d’abord regroupés en grandes catégories, selon la sévérité de leurs déficiences, puis chaque catégorie est déclinée selon la Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF), en fonction de différents paramètres personnels ou environnementaux susceptibles d’influencer la réalisation du parcours de base “optimum”. Les parcours ci-dessous, rédigés de manière consensuelle validée par le Conseil scientifique de la SOFMER, en partenariat avec la FEDMER, et s’appuyant sur les données de la littérature, s’adressent à des patients ayant bénéficié d’une PTH ou d’une PTG de première intention ou d’une reprise de PTH ou de PTG. • Principes Le calendrier des soins postopératoires est lié à l’état préopératoire du patient, aux délais de cicatrisation cutanée, à la technique chirurgicale et aux implants utilisés. Les modalités d’organisation des soins tiennent compte de l’état du patient et de son environnement sanitaire et social. L’utilisation du questionnaire RAPT peut faciliter l’orientation du patient. Les parcours décrits correspondent aux situations les plus habituelles. Séquence préopératoire Le patient est préparé à l’intervention et aux suites opératoires par un travail éducatif, construit dans le cadre d’un projet collaboratif avec le chirurgien. Il bénéficie d’une information et d’une éducation au glaçage de l’articulation, à la prévention thromboembolique, au renforcement musculaire isométrique, à la déambulation avec les aides de marche qui seront nécessaires après la chirurgie, et à l’apprentissage des règles d’hygiène de vie avec une arthroplastie. Les patients devant bénéficier d’une PTH sont éduqués à la protection articulaire dépendant de la voie d’abord prévue par le chirurgien (prévention des luxations). Ceux devant bénéficier d’une PTG sont éduqués aux postures d’extension. Ce travail éducatif est réalisé lors de séance(s) en soins ambulatoires de masso-kinésithérapie (MK) individuelle(s) ou collective(s) : de 2 à 10 séances, selon qu’il s’agisse d’une PTH ou d’une PTG. Séquence 1 postopératoire : rééducation en phase aiguë, rééducation et réadaptation à la vie quotidienne. Délai de cicatrisation cutanée, musculaire et/ou de consolidation osseuse ; période qui dure jusqu’à 4 semaines postopératoires pour le genou, et qui peut s’étendre jusqu’à 6 semaines pour la hanche, selon la voie d’abord. La prise en charge a pour objectif de dépister et traiter les complications médicales, de lutter contre la douleur, de récupérer la mobilité, d’obtenir une force musculaire permettant d’acquérir la marche avec des aides techniques puis sans celles-ci, d’utiliser les escaliers, de mettre en œuvre, dans les activités de la vie quotidienne, la protection articulaire pour la prévention de la luxation de hanche chez le patient ayant bénéficié d’une PTH. En court séjour médicochirurgical : le patient bénéficie d’un bilan MK et de soins MK quotidiens. Au décours de l’hospitalisation en chirurgie : • s’il s’agit d’une PTH, le patient bénéficie, 3 fois par semaine, de MK en soins ambulatoires, pendant 3 à 6 semaines (bilan MK en début et en fin de série) et revoit son chirurgien entre 6 et 8 semaines après l’opération ; • s’il s’agit d’une PTG, le patient bénéficie, 3 ou 4 fois par semaine, de MK en soins ambulatoires, pendant 3 à 6 semaines (bilan MK en début et fin de série) et revoit son chirurgien à 4 semaines postopératoires. On distingue 2 catégories cliniques et 3 séquences de soins : • Catégorie 1 : 1 seule déficience et PTH ou PTG de première intention ; • Catégorie 2 : plusieurs déficiences et PTH ou PTG de première intention ou reprise de PTH ou de PTG. Chaque catégorie peut être déclinée de 6 façons : a : déficiences sans difficulté ajoutée ; b : nécessité d’adaptation (purement matérielle) de l’environnement ; c : inadaptation ou insuffisance du réseau médical ; d : difficultés sociales ; e : projet professionnel ; f : pathologies médicales associées ayant une incidence fonctionnelle. Catégorie 1 : 1 seule déficience et arthroplastie de première intention Déficience sans difficulté ajoutée (parcours 1.a) : dans les situations les plus habituelles, le médecin MPR n’intervient pas. Séquence 2 postopératoire : réadaptation à l’effort (à titre indicatif, de la fin de la séquence 1 jusqu’à la neuvième semaine postopératoire) La prise en charge a pour objectif d’obtenir une articulation indolore, mobile et stable, ayant une force permettant un appui monopodal ainsi que la reprise adaptée des activités de loisir (marche sans fatigue, vélo, nage, golf, etc.) si cela est possible, et la reprise des activités professionnelles si les conditions de travail le permettent. • S’il s’agit d’une PTH : le patient bénéficie 2 à 3 fois par semaine de MK en soins ambulatoires pendant 3 semaines. Un bilan MK est réalisé en début et fin de série. Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation - 01 - Octobre - novembre - décembre 2013 21 Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation MISE AU POINT • S’il s’agit d’une PTG : le patient bénéficie 2 à 3 fois par semaine de MK en soins ambulatoires pendant 4 semaines. Un bilan MK est réalisé en début et fin de série. Dans certaines situations (classification CIF) telles un environnement architectural personnel ne permettant pas un retour à domicile d’emblée (parcours 1.b), un accès à des soins ambulatoires de MK trop éloigné (parcours 1.c), ou encore en cas d’isolement social (parcours 1.d), une hospitalisation peut être nécessaire pendant 1 mois environ, au terme de laquelle l’état fonctionnel rend possible ce retour à domicile. • S’il s’agit d’une PTH : hospitalisation en soins de suite et de réadaptation (SSR) polyvalent. • S’il s’agit d’une PTG : hospitalisation en service de MPR (SSR spécialisés en appareil locomoteur). • Si le patient a un projet professionnel (parcours 1.e) : une hospitalisation en service de MPR, de préférence à temps partiel, peut être nécessaire pendant 3 à 4 semaines. La prise en charge a pour objectifs : le renforcement musculaire adapté, le réentraînement à l’effort, l’évaluation ergothérapique et l’adaptation du poste de travail si nécessaire, chez un sujet encore en activité professionnelle. • Certaines complications médicales postopératoires (parcours 1.f) [sepsis, hématome, défaut de cicatrisation, etc.] peuvent imposer un transfert en service de MPR pendant 3 à 8 semaines. Catégorie 2 : plusieurs déficiences et arthroplastie de première intention ou de reprise Il s’agit essentiellement de patients bénéficiant de 2 arthroplasties dans le même temps opératoire, ou antécédents autres d’arthroplasties, de polyarthrite rhumatoïde, d’insuffisance cardiorespiratoire, d’hémi plégie, de maladie de Parkinson, de démence, etc. Déficiences sans difficulté ajoutée (parcours 2.a) Séquence préopératoire La consultation de MPR, qui a lieu dans le cadre d’un projet collaboratif avec le chirurgien, permet de repérer en préopératoire, pour mieux gérer en postopératoire, les patients susceptibles de décompenser ou d’aggraver une pathologie préexistante, des symptômes notamment neurologiques (dont les troubles du tonus). Le patient bénéficie d’un bilan préopératoire analytique et fonctionnel, d’une évaluation des conditions sociales voire professionnelles, d’une prescription de séances de MK en soins ambulatoires (4 à 6 séances, s’il est prévu une PTH, 6 à 10 séances s’il est prévu une PTG), selon les besoins et les possibilités de récupération, visant à préparer l’intervention par un travail éducatif (tel que décrit dans le parcours 1.a), un travail de récupération d’amplitudes lorsque celui-ci est possible (tenir compte de la douleur, de la raideur intra-articulaire) et nécessaire (raideur extra-articulaire), une optimisation des capacités cardiorespiratoires. 22 Une proposition d’orientation pour réaliser la rééducation postopératoire est faite. Séquence 1 postopératoire ; rééducation en phase aiguë, rééducation et réadaptation à la vie quotidienne. Délai de cicatrisation cutanée, musculaire et/ou de consolidation osseuse ; période qui dure jusqu’à 4 semaines postopératoires pour le genou, et qui peut s’étendre jusqu’ à 6 semaines pour la hanche selon la voie d’abord. La prise en charge a pour objectif de dépister et traiter les complications médicales, de lutter contre la douleur, de récupérer la mobilité, d’obtenir une force musculaire permettant d’acquérir la marche avec des aides techniques, puis sans quand cela est raisonnable, d’utiliser les escaliers, de mettre en œuvre dans les activités de la vie quotidienne la protection articulaire pour la prévention de la luxation de hanche chez le patient ayant bénéficié d’une PTH. En cours séjour médicochirurgical : le patient bénéficie d’une consultation de MPR pour analyser les besoins en rééducation et réadaptation, choisir l’orientation pour réaliser la rééducation et la prescrire. Un bilan MK et des soins MK quotidiens sont réalisés. Au décours de l’hospitalisation en chirurgie : le patient est hospitalisé le plus souvent en service de MPR en hospitalisation à temps complet (SSR spécialisés en appareil locomoteur) car il nécessite au moins 2 séances de rééducation quotidiennes, au moins 2 heures par jour, réparties parmi les paramédicaux rééducateurs, une évaluation régulière (bilan médical MPR et des paramédicaux rééducateurs) et une coordination pluridisciplinaire assurée par le MPR. Le retour au domicile antérieur doit être préparé. Selon l’état du patient, cette phase peut être prolongée au-delà de la quatrième semaine pour une PTG ou de la sixième semaine pour une PTH, et le mode de prise en charge peut être modifié. Séquence 2 postopératoire : réadaptation à l’effort (à titre indicatif, de la fin de la séquence 1 jusqu’à la neuvième semaine postopératoire). La prise en charge a pour objectif d’obtenir une articulation indolore, mobile et stable, ayant une force permettant un appui monopodal, ainsi que la reprise adaptée des activités de loisirs (marche sans fatigue, vélo, nage, golf, etc.) si cela est possible, et la reprise du travail si le patient est encore en activité et si les conditions professionnelles le permettent. • S’il s’agit d’une PTH : le patient bénéficie, 2 à 3 fois par semaine, de MK en soins ambulatoires pendant 3 semaines. Un bilan MK est réalisé en début et fin de série. Le patient est revu en consultation MPR à 9 semaines postopératoires. • S’il s’agit d’une PTG : le patient bénéficie, 2 à 3 fois par semaine, de MK en soins ambulatoires pendant 4 semaines. Un bilan MK est réalisé en début et fin de série. Le patient est revu en consultation MPR à 2 mois postopératoires. Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation - 01 - Octobre - novembre - décembre 2013 Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation Toutefois, si les objectifs ne sont pas encore atteints au terme de la séquence 1 (raideur, déficit musculaire, complication médicochirurgicale), et si l’environnement personnel, sanitaire et social le permet, la séquence 2 peut se dérouler en hospitalisation à temps partiel de MPR (SSR spécialisés en appareil locomoteur). Le patient bénéficie ainsi d’au moins 2 séances de rééducation quotidiennes essentielles pour l’optimisation fonctionnelle, d’au moins 2 heures par jour, d’une évaluation régulière (bilan médical MPR et des paramédicaux rééducateurs) et d’une coordination pluridisciplinaire assurée par le MPR. Selon l’état du patient, cette phase peut être prolongée et le mode de prise en charge peut être modifié. Dans les situations les plus habituelles, il n’est pas nécessaire de poursuivre la prise en charge MPR et MK au-delà du deuxième ou du troisième mois postopératoire. Dans certaines situations (classification CIF) telles un environnement architectural personnel peu adapté (parcours 2.b), une inadaptation ou une insuffisance du réseau médical, un accès à des soins ambulatoires de MK trop éloigné (parcours 2.c), le parcours est celui décrit précédemment, à savoir le parcours 2.a, avec une hospitalisation à temps complet en MPR qui peut se prolonger. Le patient rentre au domicile lorsque son état fonctionnel rend possible ce retour. • Certaines situations sociales (parcours 2.d) peuvent nécessiter, au terme du séjour en MPR, une hospitalisation en SSR polyvalent ou en SSR pour personnes âgées polypathologiques et à risque de dépendance, avant le retour au domicile antérieur. • Si le patient a encore un projet professionnel (parcours 2.e), une hospitalisation en service de MPR, de préférence à temps partiel, peut être nécessaire pendant 3 à 4 semaines. • Certaines pathologies médicales associées ayant une incidence fonctionnelle (parcours 2.f) peuvent nécessiter la prolongation de l’hospitalisation à temps complet en MPR avant le retour au domicile antérieur. D’autres situations peuvent nécessiter un changement de projet de vie avec, pour l’initier, un passage en SSR pour personnes âgées polypathologiques et à risque de dépendance. Programme PRADO-Orthopédie : une expérience de parcours sollicité par la CNAM qui va débuter au centre hospitalier de Gonesse La Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) teste actuellement un programme d’accompagnement du retour à domicile en orthopédie “PRADO-Orthopédie” pour les patients qui sont susceptibles de rentrer directement au domicile après l’une des interventions suivantes : • chirurgie pour rupture de la coiffe des rotateurs ; • PTH (hors reprise) ; • PTG (hors reprise) ; • ligamentoplastie du croisé antérieur du genou ; • prothèse de hanche pour fracture du col fémoral ; • ostéosynthèse fémorale après fracture trochantérienne. Dès que l’hospitalisation en MCO n’est plus jugée nécessaire par l’équipe médicale, et qu’un transfert en SSR (a fortiori en MPR) ne s’impose pas, le patient, s’il en est d’accord, est mis en relation avec un conseiller de la CNAM. L’objectif du conseiller est de proposer un service d’aide pour favoriser le retour à domicile des patients nécessitant temporairement un soutien à la vie quotidienne. Le conseiller, agent administratif, placé dans le cadre de cette mission sous la responsabilité du service médical de la CNAM, rencontre la personne hospitalisée éligible à ce service pendant son hospitalisation et s’assure de sa prise en charge effective par les professionnels impliqués dans le projet, dès le premier jour de sa sortie. Le conseiller met en relation le patient avec le ou les professionnels concernés (IDE, MK, aide-ménagère, service de portage des repas, etc.) Le patient est libre du choix des professionnels de santé libéraux. Au centre hospitalier de Gonesse (CHG), le service de MPR est implanté au sein de celui de court séjour médicochirurgical et travaille en collaboration avec le service d’orthopédie depuis plus de 20 ans. Il fait partie du pôle locomoteur constitué des 2 services. En pratique, l’expérimentation PRADO-Orthopédie débute le 1er septembre au centre hospitalier de Gonesse. L’organisation existante pour les patients devant bénéficier d’une arthroplastie de hanche ou de genou dans un contexte de chirurgie programmée n’évolue pas ; elle existe depuis plusieurs années, et la diffusion des parcours de soins Sofmer-Fedmer est venue la conforter. Un nouvel intervenant apparaît dans la filière : le conseiller de la CNAM, qui rend visite aux patients éligibles afin de recueillir leur adhésion en postopératoire et qui est susceptible d’aider le patient à trouver les professionnels intervenant auprès de lui à sa sortie, si celui-ci n’a pu en trouver en préopératoire. Les patients susceptibles de bénéficier du programme PRADO-Orthopédie sont repérés lors de la consultation de chirurgie orthopédique et le protocole est présenté dès celle-ci. Le patient est adressé à la consultation de MPR (1 mois et demi avant l’intervention) pour évaluer ses besoins en rééducation pré- et postopératoire, en tenant compte des facteurs personnels et environnementaux qui peuvent influencer ces besoins (parcours de soins SOFMER-FEDMER). Si la faisabilité d’entrer dans le programme PRADOOrthopédie est confirmée et que le patient en est d’accord, le chirurgien orthopédiste correspondant et le médecin traitant en sont informés par courrier. Le patient contacte l’infirmier et le kinésithérapeute de son choix. Le patient est libre de se retirer du projet à tout moment, sur simple avis verbal. Des soins de rééducation préopératoires sont prescrits si nécessaire, à réaliser en ville ou sur le plateau technique de rééducation du CHG. Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation - 01 - Octobre - novembre - décembre 2013 23 Actualités en Médecine Physique et de Réadaptation MISE AU POINT L’évaluation MPR postopératoire est réalisée à J1-J2, la faisabilité du parcours envisagé en préopératoire est alors confirmée ou non. Le médecin MPR rédige la prescription de MK. Le chirurgien est informé de la faisabilité du parcours de soins et donne son accord pour l’entrée du patient dans le programme PRADO-Orthopédie. Le cadre de santé d’orthopédie contacte le conseiller de la CNAM, qui va alors effectuer sa mission. Le patient est suivi à la consultation de MPR pour évaluer et adapter le programme de rééducation 3 semaines après la sortie, puis 1 fois par mois environ jusqu’au terme des soins de rééducation. Il est également suivi à la consultation d’orthopédie à 2 mois, 6 mois et 1 an postopératoires, puis tous les 2 ans. Le médecin traitant du patient assure la coordination entre les professionnels de santé et réoriente le patient vers le pôle locomoteur en cas de complications. Une évaluation aura lieu après 6 mois de mise en œuvre. Les indicateurs de suivi en MPR à Gonesse (4, 10) Tout au long de la prise en charge, quel que soit le parcours de soins, sont recueillis les indicateurs suivants : • les paramètres de déficience : douleur, mobilité, force ; • les paramètres fonctionnels : utilisation ou non d’aides de marche, périmètre de marche, vitesse de marche, montée et descente des escaliers, reprise d’activités de loisirs et/ou professionnelles. Ils sont le témoin des attentes et de l’évolution clinique du patient en termes de déficiences, de limitation d’activité et de restrictions de participation. Les indicateurs de suivi pour le service MPR spécifiques au programme PRADO-Orthopédie sont : • le nombre de patients vus en consultation susceptibles de bénéficier du programme ; • le nombre de patients effectivement entrés dans le programme ; • le nombre de séances de MK réalisées en soins ambulatoires ; • les modalités de transport pour se rendre chez le MK et les modalités de prise en charge financière de ces transports. Conclusion : efficience et satisfaction du patient Les modalités de prise en charge pré- et postopératoire ont donc évolué avec la nécessité de revoir la pertinence des hospitalisations en MPR, ainsi que nos organisations. Il importe de proposer à nos patients des conditions optimales de retour à domicile après hospitalisation. Les prestations “d’aide à la vie quotidienne” doivent être développées, et les soins de rééducation doivent être accessibles aux patients (modalités pour se rendre chez les thérapeutes) si l’on veut diminuer les durées d’hospitalisation en orthopédie et réduire le nombre de passage en SSR, tout en maintenant une qualité de service et de résultats identiques à ceux obtenus lors des prises en charge sur les plateaux techniques de MPR. Il conviendra d’évaluer l’impact médicoéconomique de ces nouvelles organisations. Références bibliographiques 24 1. Coudeyre E, Jardin C, Givron P, Ribinik P, Revel M, Rannou F. Quel est l’intérêt d’une rééducation avant la pose d’une prothèse totale de hanche ou de genou ? Élaborations de recommandations françaises pour la pratique clinique. Ann Réadapt Med Phys 2007; 50(3):179-88. 2. Coudeyre E, Eschalier B, Lefevre-Colau MM. Quelle éducation thérapeutique du patient avant prothèse totale de genou ? Lett Méd Phys Réadapt 2011;27(1):23-8. 3. 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