L’AVIS REGIONAL Conseil économique, social et environnemental de Bretagne

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L’AVIS REGIONAL
Conseil économique, social et environnemental de Bretagne
N°51 - Avril 2011
Pouvoirs et démocratie à l’épreuve du changement
climatique en Bretagne à l’horizon 2030
Changement climatique, énergies et démocratie
locale : des enjeux pour la Bretagne
De l'élaboration de l'offre de formation continue à
l'insertion professionnelle - Forum « prospective »
Pour la concrétisation
d’un Réseau Nautique Atlantique
Les conditions de succès du développement
des énergies marines dans l’arc atlantique
© Jean-Luc Dolmaire - Photoalto
SOMMAIRE
n°51
AVRIL 2011
Edito du Président :
3
Pouvoirs et démocratie
à l’épreuve du changement
climatique en Bretagne
à l’horizon 2030
4
Changement climatique, énergies
et démocratie locale :
des enjeux pour la Bretagne
Forum « Prospective »
12
17
De l'élaboration de l'offre de
formation continue
à l'insertion professionnelle
32
35
29
Opinion :
Anne SAGLIO
34
Les conditions de succès
du développement
des énergies marines
dans l’arc atlantique
Dernières parutions
Revue d'information du Conseil économique, social et environnemental de Bretagne
Directeur de la publication : A. Even
Conception/Rédaction : P. Le Foll, M. Reymond, O. Coutand,V. Gicquel, F.Tartarin, J. Cristescu, J. Berel
Conception/Réalisation graphique : ARCOM Search © Rennes 2011
Impression : Région Bretagne
ISBN 1269 10 97
Pour la concrétisation d’un
Réseau Nautique Atlantique
C O N S E I L E C O N O M I Q U E , SOCIAL
ET ENVIRONNEMENTAL DE BRETAGNE
7, rue du Général Guillaudot - CS 26918 - 35069 RENNES Cedex
Tél. : 02 99 87 17 60 • Fax : 02 99 87 17 69
Email : [email protected]
Site internet : www.ceser-bretagne.fr
EDITO
Contribuer collectivement
aux grands enjeux régionaux
Arrivée à mi mandat en novembre 2010
notre assemblée a tenu à faire le point sur
son travail des trois dernières années dans
"Sept priorités pour la Bretagne : bilan d'activités 2007-2010". Au delà des avis donnés
sur le budget, les grandes orientations stratégiques et l'ensemble des dossiers soumis
par le président du Conseil régional, notre
Conseil
Economique,
Social
et
Environnemental s'est autosaisi à de nombreuses reprises. Ses commissions ont en
premier lieu mené leurs réflexions et
énoncé des préconisations sur des questions
au coeur des compétences de la Région
comme le développement économique, l'aménagement du territoire et l'environnement, la formation. Elles se sont aussi
emparées de questions de société et de
gouvernance dans leurs dimensions régionales. Les sections "Prospective" et "Merlittoral" ont produit leurs contributions originales avec le précieux concours des personnes extérieures.
Confronter ses idées
Bien que ses travaux s'inscrivent plutôt dans
le temps long, le CESER de Bretagne dans sa
volonté de s'inscrire dans une démocratie
consultative vivante et efficace a souhaité
apporter le concours de sa réflexion collective face à la crise financière, économique,
sociale et s'inscrire dans le débat sur la
réforme territoriale. Convaincue que la
consultation publique ne peut se contenter
de collecter des opinions mais doit s'enrichir
de contributions construites par la confrontation d'idées, notre assemblée a rédigé un
cahier d'acteurs dans le cadre du débat
public sur "le développement et la régulation des nanotechnologies". Le CESER a
également répondu à des sollicitations de la
commission européenne sur la réforme de la
PAC et sur la"politique maritime intégrée
pour le bassin de l'océan atlantique".
S’ouvrir
Si le CESER est par nature régional il s'inscrit
néammoins dans un réseau de relations avec
les CESER des régions de la façade atlantique française (ARESE) et européenne (RTA)
avec lesquels il a produit des contributions
collectives. De même il a pris une part active
au sein de l'Assemblée des CESER de France
dont j’assure la présidence.
Si la deuxième assemblée régionale a avant
tout à remplir sa mission de consultation
auprès des instances politiques de la région
ses avis ont une raisonnance au delà et peuvent recueillir l'écoute de l'Etat en région et
des pricipaux acteurs économiques, sociaux
et environnementaux. C'est pourquoi la
bonne diffusion de ses analyses et préconisations est un véritable enjeu d'où l'élargissement de ses moyens de communication
avec les synthèses "horizon(s) Bretagne(s)"
et sa lettre électronique d'informations.
Enrichir l’action publique
et la démocratie
Mais nous restons fidèles à “l'Avis régional"
qui depuis 1993 est la publication qui diffuse
les synthèses de nos travaux et les comptes
rendus des forums prospective. Ce numéro
51 est une bonne illustration de nos récentes contributions.
Croiser les perspectives d'un changement
climatique avec les nécessaires évolutions de
la démocratie, c'est replacer la gouvernance
locale dans les responsabilités qui sont les
siennes. Promouvoir le développement
humain durable nécessite des actes publics
de régulation depuis le niveau planétaire jusqu'au niveau local en passant par les sous
ensembles géopolitiques mondiaux
(Europe...) et nationaux. Les accords internationaux sur le changement climatique
comme celui de Cancun ne peuvent en soi
suffire et la Bretagne ne doit pas se réfugier
derrière une moindre vulnérabilité apparente. Si le problème est global, le défi pour
les territoires locaux n'en est pas moins réel
avec toute la difficulté en ce domaine,
comme dans d'autres de concilier le temps
court du mandat démocratique et le temps
long de la vie et de la nature. Les préconisations de notre Conseil sur les "politiques
énergétiques en Bretagne" peuvent être un
élément de réponse, d'où l'organisation de
ce forum prospective où nous avons voulu
associer "changement climatique, énergies
et démocratie" dans la contribution des spécialistes et la réflexion collective. Dans une
nouvelle approche d’un progrès plus soucieux de la nécessaire permanence des ressources qui permette dans la durée l'accès à
une vie décente pour le plus grand nombre,
capter l'énergie venue de la mer est un
atout pour la Bretagne. L’autosaisine "Des
énergies marines en Bretagne : à nous de
jouer!" est venue à temps et a très certainement contribué à la prise de conscience
régionale sur les opportunités de cette
immuable ressource. C'est cette étude du
CESER de Bretagne qui a servi de base aux
travaux réalisés en coopération au sein du
Réseau Transnational Atlantique dont le rapport a eu une forte écoute auprès des autorités européennes.
C'est également un projet collaboratif
conduit dans la durée avec les CESER de la
façade française de l'Atlantique qui a
débouché sur la préconisation de la constitution d'un "Réseau Nautique Atlantique"
dont les principales propositions ont été
reprises en projets d'actions de coopération
par les exécutifs des régions concernées, ce
qui est une première.
"De l'élaboration de l'offre de formation
continue à l'insertion professionnelle :
l'exemple du programme régional des
stages" est une étude de la commission formation qui analyse une action politique au
coeur des compétences de la région et renvoie très directement à l’obligation de contribuer par nos avis à l'administration de la
région. En des temps où la flexibilité du travail augmente l'égalité d'accès à une formation de qualité et l'individualisation des itinéraires doit permettre de contribuer à la sécurisation des parcours professionnels et de vie.
Dans les mois à venir les travaux engagés
par nos commissions, sections, groupes de
travail vont être soumis à l'approbation de
notre assemblée et donner lieu à communication : "Comment optimiser le projet
Bretagne à grande vitesse pour le développement des territoires en Bretagne",
"Milieux côtiers, ressources marines et
société", "Les univers sociaux et culturels
des jeunes en Bretagne et leurs engagements dans la vie collective", "Quel mode
de développement économique pour la
Bretagne de demain ? ", "Appropriation
sociale et mise en mise en débat des sciences et technologies en Bretagne à l’horizon
2025", "Enseignements supérieurs et politiques régionales : enjeux et défis",
"Comment optimiser les fonds européens
en Bretagne ? "
Toutes ces contributions de la société civile
organisée ont pour ambition de faire entendre la voix des "corps intermédiaires", des
"forces vives" en région ; Nous formons le
voeu qu'elles permettent par leur participation d'enrichir l'action publique et notre vie
démocratique en région Bretagne.
Alain EVEN
Président du CESER de Bretagne
3
PROSPECTIVE
Pouvoirs et démocratie à l’épreuve du changement
climatique en Bretagne à l’horizon 2030
Le changement climatique et son attribution aux activités humaines
sont désormais considérés comme une réalité par la quasi-totalité
des climatologues. Depuis la parution, en 2007, du 4ème rapport du
Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat
(GIEC), la prise de conscience s’est accélérée, tant au niveau des
gouvernements que des citoyens. Les contreverses développées en
2009 se sont conclues avec le rapport de l’Académie des sciences
qui reconnaît en particulier qu’il s’est produit une augmentation du
réchauffement climatique de 1975 à 2003, que cette augmentation
est principalement due à la hausse de la concentration de CO2
dans l'atmosphère, laquelle est incontestablement due à l'activité
humaine. L’Académie conclut aussi que cette hausse constitue une
menace pour le climat et, de surcroît, pour les océans en raison du
processus d’acidification qu’elle provoque. Ces questions qui ne
sont pas sans interroger la manière dont s’exerce la démocratie,
figurent au cœur du rapport du CESER intitulé « Pouvoirs et
démocratie à l’épreuve du changement climatique en Bretagne à
l’horizon 2030 », adopté en octobre 2009.
4
Que sait-on du changement climatique et de ses conséquences possibles ?
Selon le GIEC, alors que la planète s’est
réchauffée en moyenne de +0,76°C au
cours du XXème siècle (de 1905 à
2006), le réchauffement à l’horizon
2010 serait compris de +1,8°C à +4°C
(selon le scénario retenu). Cette fourchette d’estimations concer ne le
réchauffement global, c’est-à-dire une
moyenne planétaire, qui ne rend donc
pas compte des variations régionales.
Témoignant de cette variabilité, la
France, au cours du XXème siècle, s’est
réchauffée plus vite que la moyenne du
globe (+0,9° C).
L’évolution de la température n’est qu’un
des paramètres climatiques ; elle s’accompagne d’autres évolutions qui peuvent être, par exemple, une diminution
constante du volume des glaciers, une
lente montée du niveau des océans... En
France, parallèlement à la hausse de
+0,9°C, les étés ont été de plus en plus
chauds, le nombre de jours de gel s’est
réduit en hiver, les vagues de chaleur esti-
vales ont été plus nombreuses et les
vagues de froid en hivers ont diminué. La
variabilité des températures maximales a
également présenté des signes d’augmentation, particulièrement en été.
Les travaux des scientifiques associés au
GIEC montrent qu’au cours des prochaines décennies, le niveau de la mer pourrait s’élever en moyenne planétaire de
+18 cm à +59 cm (et même davantage
selon des estimations postérieures à la
publication du 4ème rapport), mais aussi
que les phénomènes météorologiques
extrêmes (tempêtes, canicules, cyclones,
fortes précipitations) pourraient être plus
fréquents et plus intenses…
Les incertitudes scientifiques demeurent
importantes lorsqu’il s’agit d’évaluer les
impacts présents et à venir de ces changements. En effet, les études d’impacts
nécessitent d’être réalisées à l’échelle
des territoires, et notamment à l’échelle
locale. Or, les scénarios climatiques du
GIEC sont des scénarios climatiques
planétaires. L’incertitude concernant les
impacts à venir résulte ainsi d’une accumulation d’incertitudes : incertitudes
liées aux scénarios d’émissions de gaz à
effet de serre (les « scénarios-SRES » du
GIEC), incertitudes liées aux modèles
climatiques et aux simulations climatiques, incertitudes liées à la « descente
d’échelle » ou régionalisation des simulations, enfin, incertitudes liées aux
modèles d’impacts, incluant notamment celles qui pèsent sur les données
utilisateurs.
En dépit de cette difficulté, des recherches sont conduites pour tenter d’évaluer les impacts futurs, la vulnérabilité
des systèmes socio-économiques et
naturels, et les possibilités d’adaptation
(le but étant notamment de faciliter l’adaptation et d’en réduire le coût).
Les travaux d’un groupe dédié à ces
questions au sein du GIEC ont montré
que le nombre de travaux scientifiques
relatifs aux tendances observées dans
PROSPECTIVE
l’environnement physique et biologique
et à leurs relations avec le changement
climatique s’est considérablement
étoffé depuis 2001.
A l’échelle de la France et des régions
françaises, les recherches se multiplient (programmes de l’agence nationale de la recherche, travaux de l’Inra,
etc.). La Bretagne est notamment
concernée par un projet de recherche
intitulé « Climaster », lancé en 2008,
qui vise à caractériser la réalité du
changement climatique dans le grand
ouest, pour « permettre aux acteurs
régionaux une anticipation raisonnée
des évolutions à venir et des conséquences en termes de gestion et de
pratiques relatives aux activités agricoles et à la gestion des ressources naturelles ». Le Golfe du Morbihan fait lui
aussi, depuis 2008, l’objet d’une étude
européenne intitulée « Imcore » qui
doit permettre d’évaluer l’impact écologique, social et environnemental du
changement climatique.
Sans pouvoir toujours les caractériser
de manière précise, les chercheurs estiment que les impacts sont/seront
nombreux sur les milieux et les domaines d’activités. Sont à ce titre souvent
évoqués des changements qui concernent : la disponibilité de la ressource
en eau, le niveau de la mer, la vulnérabilité des littoraux, l’acidification des
océans, la fonte des glaciers, les débits
de certains fleuves, la production et la
consommation d’énergie, la répartition
spatiale de la végétation, les maladies
dont peuvent être victimes les arbres
forestiers, les dates des vendanges, les
cépages et les aires d’AOC, les cultures, les prairies, le risque d’apparition
et de développement de certaines maladies et donc la santé, l’agriculture, le
tourisme, les activités d’assurance, la
foresterie, les politiques d’urbanisme
et d’habitat…
En ce qui concerne la région, une étude
de 2009 du Conseil Scientifique de
l’Environnement de Bretagne portant
France : impacts du changement climatique à 2100
Réduire, réutiliser, recycler
sur les impacts sur les écosystèmes
marins indique que la montée du
niveau de la mer est déjà une réalité
(+ 1 millimètre par an, hors évènements
exceptionnels de surcote) et que l’on
peut retenir « l’hypothèse d’une probable surcote de quelques centimètres à
quelques dizaines de centimètres à la
fin de ce siècle pour les littoraux du
massif armoricain », ce qui ne doit pas
être considéré comme négligeable, en
particulier si l’on considère, par exemple, que « les quais du port de Brest
sont déjà à la limite de la submersion
par pleine mer de vive eaux et sans vent
de suroît ».
Il s’agit là d’un type d’impacts, à savoir
les impacts directs sur l’environnement.
Mais il faut s’attendre aussi à subir en
Bretagne des impacts indirects qui sont
ceux qui découlent des mesures qui
sont décidées au nom de la lutte contre
le changement climatique, et ceux qui
découlent des impacts qui se produisent ailleurs (par contrecoup).
5
PROSPECTIVE
L’adaptation et l’atténuation, les deux volets des politiques climatiques
Pour faire face au changement climatique, des politiques d’atténuation et parfois des politiques d’adaptation ont été mises en place.
En Bretagne, les stratégies territoriales, l’environnement et les activités
h u m a i n e s s e m b l e n t e n c o re p e u
modifiées par le changement climatique, même si certains territoires,
avec les plans climat territoriaux
notamment, ont pris des initiatives
visant à réduire les émissions de
CO2, et si le changement climatique
est un des facteurs qui permet d'expliquer des perturbations de l’environnement ou du fonctionnement de
certains écosystèmes (un changement de température, même faible,
peut induire des changements dans
le cycle de vie de certaines espèces,
ou favoriser l'apparition de maladies)… Il y a fort à parier qu’à l’avenir, ils seront davantage modifiés.
Un grand nombre de phénomènes extrèmes.
Les pouvoirs et la démocratie en Bretagne
à l’épreuve du changement climatique
Répondre au défi de l’atténuation/
adaptation au changement climatique
constitue un défi considérable pour
les territoires car il suppose, tout à la
fois :
- d’intégrer le temps long des phénomènes climatiques et environnementaux dans les politiques publiques,
- d’intervenir sur des problématiques
globales (« systémiques ») avec une
capacité d’intervention relativement
limitée (périmètres géographiques,
compétences, moyens) ;
- de contribuer à un objectif global,
planétaire (l’atténuation), sans pouvoir produire de résultat à court terme
et sans l’assurance de parvenir même
à en produire à long terme (si nous
sommes les seuls à agir…), et donc
sans bénéfice immédiat et visible ;
- de décider alors que les connaissances scientifiques sont encore incomplètes (au sujet des impacts, des
risques au niveau des territoires…), et
alors que les bénéfices politiques ne
sont pas évidents…
A l’horizon 2030, dans le domaine des
politiques climatiques, l’exercice des
pouvoirs et de la démocratie en
Bretagne dépendra de nombreux facteurs. Certains de ces facteurs sont
indépendants de la question climatique
(ex. la participation des citoyens et les
rapports de la société au politique, l’organisation territoriale, la montée des
thématiques du risque, de l’aversion au
risque et du développement durable
dans l’espace public…) tandis que d’autres sont plus spécifiques (ex. la capacité de mobilisation autour du problème climatique, la perception des
risques climatiques…).
© Bertrand Demée
6
En France, le volet « atténuation »,
qui est de loin le volet le plus développé, se traduit notamment par l’application du Protocole de Kyoto (le
marché européen de quotas de CO2).
En termes de « gouvernance », il faut
retenir que la logique de l’atténuation
se traduit le plus souvent par des
décisions nationales et internationale s, a ppliqué e s loca le me nt. S i la
logique de « l’adaptation » était plus
présente, on pourrait s’attendre à ce
qu’elle relève davantage de l’initiative
et de la responsabilité des échelons
territoriaux, car ce sont les territoires
qui subissent et subiront directement
les impacts du changement climatique, ceux-ci variant d’un territoire à
l’autre.
© Gérard Cazade
Tandis que les premières visent à agir
sur les causes du réchauffement (les
émissions de CO2) pour en limiter le
niveau dans le but de faciliter ou de
rendre possible l’adaptation des systèmes socio-économiques et nature l s , l e s p o l i t i q u e s d ’ a d a p t a t i o n
consistent plutôt à envisager les
adaptations possibles en prenant
acte du fait qu’il faut se préparer dès
à présent à vivre dans un monde
dont le climat aura été modifié…
Limiter les émissions de CO2.
A bien des égards, et notamment en
raison de ces difficultés, le changement climatique invite à une recomposition de nos capacités d'action collective.
PROSPECTIVE
Plusieurs scénarios possibles à l’horizon 2030
Les hypothèses climatiques
❚ Première hypothèse :
En 2030, le réchauffement global s’est
produit comme prévu par le GIEC dans
son rapport de 2007. La température
s’est donc élevée de +0,2°C par
décennie en moyenne. Les différentes
régions du monde se sont trouvées
diversement affectées. D’une manière
générale, même si réchauffement s’est
poursuivi sans emballement, les conséquences sont importantes car en raison
de la non-linéarité des phénomènes et
de la sensibilité des écosystèmes, même
de petites variations de température
ont pu avoir un impact considérable
(cf. les « effets de seuil », les capacités
de résilience).
❚ Deuxième hypothèse :
Le GIEC s’est trompé dans son rapport
de 2007 dans le sens où l’augmentation du réchauffement global a été
supérieure aux prévisions qu’il avait
faites à l’horizon 2030. Les impacts
sont beaucoup plus importants et
pour l’après 2030 (ce qui se dessine à
l’horizon 2100), c’est le pire des scénarios du GIEC qui semble se réaliser.
Ces deux hypothèses créent deux
contextes différents à tous les
niveaux : mondial, national, régional.
Dans les deux hypothèses, il a été imaginé que la Bretagne devrait faire face
à un ensemble de problèmes tels que :
- un afflux plus important de populations nouvelles (migrations internes à
la France et arrivées en provenance
d’autres pays plus durement touchés
par le réchauffement) ;
- des tensions et conflits d’usages
accrus autour de la ressource en eau ;
une plus grande variabilité météorologique avec un plus grand nombre de
Les sous-scénarios
de « gouvernance »
phénomènes extrêmes (canicules, tempêtes, inondations…) ;
- un risque accru d’érosion côtière, de
submersion marine des zones basses
et de salinisation des nappes phréatiques littorales… ;
- une élévation de la température de la
mer et une acidification des océans
avec des conséquences sur les ressources marines biologiques (l’acidification
ayant par exemple des effets négatifs
sur les organismes qui fabriquent une
coquille et les espèces qui en dépendent) ;
- une modification de l’aire de répartition de plusieurs espèces de poissons
et de mollusques dont l’huître japonaise introduite à des fins aquacoles ;
une réduction accélérée de la biodiversité ;
- une modification des habitats, des
paysages et des aires de répartition
des espèces ;
l’apparition d’espèces invasives
(algues, insectes ravageurs…) ;
- des phénomènes de désertification,
d’érosion (après minéralisation des
tourbières) ou de disparition des forêts
(remplacées par des landes sèches) ;
- l’apparition de pandémies, de maladies à vecteurs, de nouveaux risques
pour la santé…
Quatre sous-scénarios de « gouvernance » ont été imaginés, en fonction
d’une prééminence variable des échelons
politiques de gouvernement et d’un
degré variable de participation et de
mobilisation des autres acteurs (citoyens,
entreprises, associations, etc.).
Résumé schématique des clés des
sous -scé nar ios en ter mes de pré é m i n e n ce v a r i a b l e d e s é ch e l o n s
politiques
Sous-scénario 1
échelon mondial relayé par national
modèle décisionnel « top down »
(descendant)
Sous-scénario 2
échelon européen
+
échelon national
modèle décisionnel « top down »
(descendant)
Sous-scénario 3
Cependant, dans la deuxième hypothèse, le bilan au niveau planétaire est
encore plus négatif (nombreux impacts
néfastes), et en Bretagne, la rapidité
des changements est telle que les
impacts négatifs l’emportent nettement. De plus, la région subit par
contrecoup certains effets qui sont liés
aux conséquences qui sont produites
dans d’autres régions plus vulnérables.
échelon européen
+
échelon national
+
échelon régional
+
échelon local
mais accent sur les divergences locales
et absence de coordination
Sous-scénario 4
© Bertrand Demée
Sur la base de ces réflexions et des
connaissances acquises au moyen de
nombreuses auditions, la Section
« Prospective » du CESER a imaginé
plusieurs scénarios possibles. Ces scénarios ont été construits en croisant des
hypothèses concernant le changement
climatique avec quatre « sous-scénarios »
de « gouvernance ».
échelon mondial
+
échelon européen
+
échelon national
+
échelon régional
+
échelon local
avec accent sur bonne cohérence
et subsidiarité
7
PROSPECTIVE
gouvernance tentent de s’imposer, et
produisent des résultats, suivant d’autres logiques (ex. logiques de marché,
de réseaux familiaux…).
❚ Scénario 1 :
« Un pilote pour la planète »
En 2030, le gouvernement des questions climatiques est dominé par un
comité réduit de pays, sorte de
« G30 », qui fixe les grandes orientations et décide des principales mesures
à mettre en œuvre.
❚ Scénario 4 :
« Ensemble contre vents et
marées »
8
Cette situation découle d’une succession de crises grave, la crise climatique
s’étant conjuguée à des crises d’une
autre nature (économique, financière,
alimentaire, énergétique, écologique…)
provoquant des guerres. L’Union européenne est affaiblie. En France, l’Etat
relaie les décisions du nouveau G30, de
manière autoritaire. Les régions n’ont
guère leur mot à dire. Dans ce
contexte, le mot d’ordre de l’efficacité
prime et il y a peu de place pour la
concertation ou les processus participatifs au niveau territorial.
❚ Scénario 2 :
« L’Etat climatiseur »
En 2030, la gouvernance mondiale est
faible car on n’est parvenu à aucun
consensus entre les Etats. Dans ces
conditions, les politiques climatiques
sont décidées par l’échelon national
combiné avec l’échelon européen.
En France, les réformes territoriales ont
renforcé le rôle de l’Etat. Ainsi, celui-ci a
conservé quatre de ses « monopoles » :
la définition de l’intérêt général, la maîtrise d’ouvrage des politiques
publiques, la collecte et l’attribution
des ressources, et le monopole du pouvoir d’agencer les pouvoirs locaux. En
outre, les moyens du « gouvernement
à distance » ont été renforcés (évaluations et indicateurs de performance,
cahiers des charges types, « démocratie
numérique »…). L’Etat prend les décisions, mais ne peut les mettre en
œuvre seul : il s’appuie donc sur les
collectivités territoriales, relais de sa
politique.
© Bertrand Demée
Le mot d’ordre de l’efficacité prime et il y
a peu de place pour la concertation ou le
débat public. L’échelon régional n’a
guère son mot à dire, d’autant qu’il n’est
pas « visible » à l’échelon planétaire, tandis que l’Union européenne est affaiblie.
❚ Scénario 3 :
« Grâce à nous le déluge »
En 2030, l’action des Etats est morcelée, et on est loin d’un régime multilatéral ou de réglementations unifiées
dans le domaine de la lutte contre le
changement climatique. Il y a un rôle
croissant des entités subétatiques, telles les régions, les métropoles et les
villes, « qui utilisent une marge de
liberté plus ou moins grande pour se
livrer entre elles à d’autres formes de
concurrence afin de se doter des
meilleurs atouts » (Pierre Dardot,
Christian Laval, La nouvelle raison du
monde, 2009).
En France, cette situation n’est pas
sans lien avec l’échec de la réforme territoriale qui avait été commencée en
2009. Ainsi, il y a des divergences locales entre l’Etat et les collectivités, mais
aussi de la concurrence et une absence
de coordination entre les collectivités.
Sur les questions climatiques, il n’y a
pas de convergence dans les analyses,
soit parce que les niveaux d’information sont très inégaux, soit parce que
les enjeux de l’adaptation mettent en
exergue des conflits latents (par ex.
autour du nucléaire, de la fiscalité, de
la mobilité, de la croissance économique, de l’urbanisation, etc.).
Au final, les questions climatiques sont
peu gouvernées, ou d’autres modes de
Au niveau européen et mondial, les
processus décisionnels sont plus démocratiques qu’autrefois, dans le sens où,
au niveau de l’Union européenne, le
Parlement est mieux élu et où, au
niveau international, les principales
décisions se prennent dans le cadre
multilatéral des Nations Unies (une
sorte de « G192 » s’est mis en
place…). La « gouvernance » internationale qui s’est mise en place a permis
d’accorder un plus grand nombre
d’Etats autour d’une « vision partagée
» pour une coopération à long terme
dans le cadre de la Convention cadre
des Nations Unies sur le changement
climatique (CCNUCC).
En France, une nouvelle organisation
des pouvoirs s’est mise en place, plus
décentralisée, de type plus ascendant,
et suivant le principe de subsidiarité.
La responsabilité est prise par le plus
petit niveau d'autorité publique compétent, le niveau supérieur n'intervenant que si son action peut être plus
efficace.
La décentralisation a abouti à la mise
en place de véritables gouvernements
régionaux et d’institutions urbaines
achevées. Les collectivités territoriales
contribuent à promouvoir le dialogue
avec les citoyens, à l’échelle des territoires. Il en découle, dans le domaine
des politiques climatiques comme
dans d’autres domaines, des mises en
cohérence plus faciles et davantage
de convergence dans les analyses,
même si dans le même il faut craindre
aussi un primat du local, le développement de certains égoïsmes territoriaux…
Pour chacun de ces scénarios ont été
ensuite examinées les conséquences
du contexte et des logiques sousjacentes sur les modalités de la lutte
contre le changement climatique en
Bretagne.
PROSPECTIVE
Les enseignements de la prospective : des questions qui se posent à la Bretagne
ple, à la démographie, à l’urbanisation
et à l’artificialisation des sols).
La description de plusieurs futurs possibles, en rupture ou en prolongation de
la situation présente, a pour but d’éclairer les prises de décisions. A cet effet,
l’exercice permet d’interpeller le Conseil
régional ainsi que l’ensemble des
acteurs régionaux sur un certain nombre d’enjeux qui affecteront certainement la Bretagne. Il n’a pas pour objet
d’apporter des réponses mais plutôt
d’ouvrir des pistes de réflexion, de provoquer le débat et de susciter des questionnements.
Le rapport souligne un besoin d’observations et de recherches sur le changement climatique et ses effets à l’échelle
de la Bretagne, dans le but d’anticiper
les adaptations nécessaires.
Il pourrait sembler judicieux d’intégrer,
dès à présent, les deux dimensions des
politiques climatiques (atténuation/
adaptation), dans les démarches stratégiques et de planification, tels que, par
exemple, les plans climat-énergie territoriaux, les agendas 21, les schémas de
cohérence territoriale (SCOT), et tous
les projets d’aménagement, d’équipements et d’infrastructures qui sont des
projets impliquant des réflexions et des
investissements à long terme…
Les incertitudes scientifiques qui
pèsent, en l’état actuel de la recherche,
sur la nature et sur l’ampleur des
conséquences du changement climatique, ne devraient pas empêcher toute
action.
© Et - alors
La question de l’adaptation
au changement climatique
n’est-elle pas sous-évaluée ?
ner une prise de retard dans la réflexion
et dans la mobilisation autour de ces
questions.
Quels moyens de vigilance la
Bretagne pourrait-elle mettre
en œuvre ?
Le rapport du CESER a permis de mettre en évidence un manque de données
territorialisées. Il conviendrait en particulier d’étudier les points de vulnérabilité de la Bretagne (c’est-à-dire ses faiblesses, en mettant le changement climatique au regard d’autres évolutions
comme celles qui ont trait, par exem-
Le CESER considère aussi qu’il est
important que l’analyse et la réflexion
autour des enjeux rattachés à ces questions puissent faire l’objet d’une expertise plurielle ; et qu’il y a lieu de favoriser l’appropriation sociale de ces questions, y compris des questions scientifiques (connaissances, controverses…).
L’expertise plurielle doit permettre d’associer la société civile, dans ses diverses
composantes, pour favoriser l’appropriation sociale mais aussi pour que,
dans l’élaboration des solutions, puissent être mieux pris en compte tous les
enjeux dans leurs dimensions sociales,
humaines, économiques et environnementales.
9
Quelle place de la connaissance, de l’information et de
la formation pour une maîtrise des enjeux climatiques ?
La capacité d’adaptation et d’atténuation à l’échelle territoriale dépend
des conditions socio-économiques et
Le fait que la Bretagne apparaisse relativement moins vulnérable que d’autres
régions au regard de certains impacts
(par exemple, le risque de submersion
marine y est moins prégnant que dans
les régions méditerranéennes, le
Languedoc-Roussillon, l’Aquitaine, la
Vendée et le Nord-Pas-de-Calais) invite
les acteurs régionaux à se montrer particulièrement vigilants. Cette moindre
vulnérabilité apparente pourrait entraî-
© Et - alors
Une moindre vulnérabilité
apparente de la Bretagne ne
la met-elle pas en situation
de manquer de vigilance ?
PROSPECTIVE
A cet égard, le Conseil régional détient
plusieurs leviers liés à ses compétences
actuelles qu’il pourrait actionner. A titre
d’exemple, il pourrait :
- intégrer le changement climatique
dans les cahiers des charges qu’il propose aux organismes de formation, et
aux organismes chargés de la diffusion
de la culture scientifique technique et
industrielle ;
- favoriser la prise en compte du changement climatique dans la formation
professionnelle continue ;
- soutenir les actions de sensibilisation
et d’information destinées au public, en
particulier celles qui sont menées par
les associations ;
- d’une manière générale, favoriser par
tous les moyens le développement de la
culture scientifique et l’appropriation
sociale des sciences en Bretagne.
10
En cas d’afflux massif de
migrants, la Bretagne est-elle
préparée ?
Tous les scénarios indiquent que le
changement climatique devrait avoir un
effet positif sur le solde migratoire de la
Bretagne. L’attractivité résidentielle de
la région et donc son solde migratoire
s’amplifierait considérablement. Une
telle hypothèse aurait des conséquences importantes sur de nombreuses
politiques publiques, liées notamment
au logement, à l’emploi, au développement économique, aux services à la
personne, à la mobilité, aux équipements et aux infrastructures, à la
demande/production énergétique, à la
cohésion sociale, etc.
Cette hypothèse d’une croissance
fo rte du s ol d e mi g ra to i re d e la
Bretagne a déjà été envisagée par le
CESER dans le cadre d’une précédente
réflexion sur les mobilités en Bretagne
(« Mobilité des populations et territoires de Bretagne à l’horizon 2030 »),
dans laquelle il indiquait plusieurs pistes d’intervention possibles pour le
Conseil régional.
© Michel Ogier
environnementales mais aussi de l’accès aux informations, de la sensibilisation, de la prise de conscience et de la
capacité de la société à se mobiliser
autour de ces questions.
Des mutations dans l’agriculture.
Quelles conséquences du
changement climatique sur
les activités ?
Toutes les activités exploitant ou mettant en jeu, d'une façon ou d'une
autre, les ressources naturelles, se trouvent interrogées et auront à se transformer du fait des changements environnementaux, desquels participe le changement climatique.
Celui-ci interroge tout particulièrement
le devenir des activités de collecte et
d’exploitation des ressources naturelles : agriculture, pêche, exploitation
forestière… En effet, ces activités
sont/seront directement concernées par
les impacts du changement climatique
sur l’environnement (perturbations de
l’environnement ou du fonctionnement
de certains écosystèmes…), ainsi que
par les décisions qui sont/seront prises
en matière de politiques d’atténuation
(réduction des émissions de gaz à effet
de serre).
Tout indique par ailleurs une prise en
compte croissante - amplifiée par l’émergence de la question du changement climatique dans l’espace public des enjeux socio-économiques de la
biodiversité et des services liés au fonctionnement des écosystèmes, qui pourrait également avoir des conséquences
sur ces activités.
Pour illustrer ces évolutions, les scénarios montrent la possibilité de muta-
tions lourdes du modèle agricole breton, au carrefour de nombreux enjeux.
Quelles que soient les mutations envisagées, elles devront s’accompagner de
politiques publiques fortes, notamment
dans le domaine de la recherche.
Quelles peuvent être les
conséquences d’une monétarisation des services rendus
par la nature ?
L’exercice de prospective montre que
l’attribution d’une valeur monétaire à
certains services rendus par la biodive rsité e t le s é cosystè me s, pe ut
conduire jusqu’à une marchandisation
de la nature, et même à des phénomènes de spéculation. Les pouvoirs
publics doivent être vigilants à l’égard
de cette menace. Ils doivent aussi
favoriser les débats publics sur ces
questions qui ne manqueront pas d’avoir des conséquences, y compris en
Bretagne.
La Bretagne n’encourt-elle
pas un nouveau risque de
« périphérisation » ?
Le Plan routier breton qui a montré
son efficacité par le passé, ne devientil pas un handicap dans un contexte
de lutte contre le changement climatique ? Celle-ci bouscule les projets
d’infrastructures établis suivant l’ancien modèle énergétique (le pétrole
PROSPECTIVE
Quels sont les rôles possibles
pour le Conseil régional ?
Le Conseil régional peut jouer divers
rôles dans le domaine des politiques climatiques, avec un degré variable d’implication. Ainsi il peut par exemple se
contenter d’appliquer les règles de l’extérieur, se limitant au strict exercice de
ses compétences.
Mais il peut aussi choisir d’aller plus loin
en ayant une action volontariste par le
biais de l’éducation, de la culture scientifique et technique, de la formation,
de l’information, de l’incitation (via par
exemple ses politiques territoriale et/ou
le soutien aux associations). Dans cette
perspective, il peut actionner tous les
leviers dont il dispose, liés à ses compétences : transport, foncier, formation,
soutien à la recherche, développement
économique, en prenant des initiatives
fortes. Ceci suppose le maintien d’une
clause de compétence générale des
Régions.
Ne conviendrait-il pas d’inventer de nouvelles pratiques
démocratiques pour répondre
à de tels enjeux ?
Les adaptations et les remises en cause
provoquées par le changement climatique pourraient encore s’accélérer dans
l’avenir, a fortiori si celui-ci se conjugue
à d’autres crises (ex. crises économiques
et financières, crises alimentaires, crises
écologiques, crises énergétiques…).
Leurs modalités et la manière dont elles
seront vécues dépendront de beaucoup
de choses et notamment des comportements collectifs et individuels, de la
capacité de la société à se mobiliser et à
anticiper les adaptations nécessaires,
des initiatives diverses qui naîtront, portées par des individus, des entreprises,
des associations, des groupes d’élus…
Elles dépendront donc notamment de
la qualité de la sensibilisation, de l’information et de la formation de la
population, et de la qualité de l'exercice
de la démocratie locale.
l’Etat et des collectivités territoriales ; il
faut aussi démultiplier en région les
moyens d’associer la société civile aux
réflexions menées sur ces sujets…
La démocratie locale est d’autant plus
nécessaire qu’elle constitue un moyen
de contrer certaines dérives possibles
comme celle que souligne l’un des scénarios (le scénario 4) d’une évolution
vers des décisions politiques qui, au
nom de l’écologie, sous-estimeraient les
autres enjeux comme les enjeux de
cohésion sociale, avec un ordre négocié
moins « social » ou « politique » que
« environnemental » (où la nature
prime sur l’humain, le naturel sur le
social, le global sur le local…).
Vient de paraître
« Scénarios climatiques : indices sur
la France métropolitaine pour les
modèles français ARPEGE-Climat et
LMDz et quelques projections pour
les DOM-COM », 26 janvier 2011,
Yannick Peings, Météo-France/CNRM,
Marc Jamous, IPSL, Serge Planton,
Météo-France/CNRM, Hervé Le Treut,
IPSL, Mission confiée à Jean Jouzel. Ce
rapport est destiné à servir de référence
nationale aux acteurs de l'adaptation. Il
avait été demandé par la Secrétaire
d'Etat à l'Ecologie, dans le cadre de la
préparation - en cours - du premier Plan
national d'adaptation au changement
climatique.
Une question aussi importante que le
changement climatique ayant potentiellement tant d’implications et pouvant
susciter tant de remises en cause
appelle des innovations en matière d’action collective. Il ne s’agit pas seulement
de mieux combiner l’intervention de
© Frédéric de la Mure - MAE
Il peut aussi changer de rôle et de statut, revendiquer et mener une politique
climatique , par exemple, en étant
comptable des bilans carbone à l’échelle du territoire régional, en coordonnant les plans climat-énergie territoriaux et les agendas 21 locaux… Ceci
suppose encore que la Région dispose
toujours de la clause de compétence
générale, mais aussi de moyens nouveaux tels qu’une capacité juridique et
financière, et même un pouvoir prescriptif.
© Philippe Lepoittevin
sans le climat) et pourrait conduire à
s’inte rroge r sur ce rta ins proje ts
comme le projet d’aéroport à NotreDame des Landes.
Des projets d’infrastructures remis en cause.
Section « Prospective »
Rapporteurs : MM. Gilbert BLANCHARD
et Jean-Luc LE GUELLEC
Contact : Virginie GICQUEL,
Conseillère technique
Tel : 02 99 87 18 79
[email protected]
Consultez le rapport du CESER
sur le site : www.ceser-bretagne.fr
11
PROSPECTIVE
Changement climatique, énergies et démocratie locale :
des enjeux pour la Bretagne - Forum « Prospective »
Le Sommet de Copenhague de décembre 2009 n’a pas permis aux 192 Etats membres de la Convention
cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUC) de s’accorder sur un objectif mondial
contraignant en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cet échec (semi-échec ou
semi-réussite, c’est l’objet de controverses) ouvre peut-être la voie à un regain d’initiatives, au niveau
national et/ou au niveau des territoires, en matière de lutte et d’adaptation au changement climatique.
A tous les égards, la prise de conscience et l’action sur les territoires sont une nécessité.
C’est sur ces thèmes de la démocratie locale, des politiques énergétiques et du changement climatique
que le CESER de Bretagne a organisé en février 2010 un forum « Prospective ». Prenant appui sur les
différents rapports publiés par le CESER en 2009, ce forum a été l’occasion d’ouvrir un large débat
avec le public sur la place et le rôle de chacun dans le défi énergétique et climatique qui, selon Pierre
RADANNE, est l’enjeu majeur du XXIe siècle et appelle une « solidarité obligatoire ».
l’énergie, un enjeu majeur pour la Bretagne
Le contexte énergétique
12
La Bretagne est une région particulièrement sensible à la question de l’énergie, d’une part parce qu’elle ne
produit que très peu de l’énergie
qu’elle consomme, d’autre part parce
que son système de distribution énergétique, et en particulier électrique,
est fragile. Cette sensibilité s'inscrit
aujourd'hui dans un contexte où les
déséquilibres environnementaux doivent influencer fortement les enjeux
du développement économique et
social.
D a n s s o n a u t o s a i s i n e "P o u r u n e
approche concertée des politiques
énergétiques en Bretagne", le CESER
souligne que pour assurer une gestion durable de l’énergie sur son territoire, la Bretagne se doit d’être
exemplaire dans la recherche d’une
plus grande efficacité énergétique et
dans le développement des énergies
renouvelables.
Un atout pour la Bretagne :
l’énergie venue de la mer
L’histoire s’écrit maintenant du côté
des énergies renouvelables, et en particulier des énergies marines : la
Bretagne a la chance de bénéficier le
long de ses 2700 km de côtes de res-
sources énergétiques exceptionnelles,
avec à la fois des vents soutenus, une
houle puissante et quelques-uns des «
spots » de courants de marée les plus
importants en France.
Afin d’exploiter pleinement cette énergie venue de la mer, de contribuer à
relever le défi de parvenir à 20% d’énergies renouvelables en 2020, et de
saisir cette opportunité de développement pour la région, le CESER de
Bretagne avait appelé de ses vœux,
dans son rapport de mars 2009 (voir
l’Avis régional n°49 de novembre
2009), à une convergence des initiatives prises par différents acteurs, à différents niveaux. Pour n’en rappeler
que quelques-unes, citons le Plan
Energie et la démarche de planification
et de concertation proposés par la
Région Bretagne ; l’initiative Ipanema
conduite au niveau national par les
différents acteurs du développement
des énergies marines ; la planification
à l’échelle de la façade maritime
menée dans le cadre du Grenelle de
l’environnement ; et enfin la création à
Brest, avec pour chef de file l’Ifremer,
de la plateforme technologique pour
les énergies marines, annoncée suite
au Grenelle de la mer. Cette convergence est aujourd’hui amorcée et il
reste à espérer que le processus de
planification stratégique spatialisée en
cours soit conforté et pérennisé.
PROSPECTIVE
Politiques énergétiques, territoires et collectivités territoriales
L’organisation territoriale
des acteurs de l’énergie
Pour répondre à l’enjeu énergétique
breton, il est avant tout nécessaire que
tous les acteurs et toutes les collectivités se retrouvent dans un consensus
pour la définition d’une gouvernance
territoriale de l’énergie.
© Galam - Fotolia.com
Pour le CESER, il apparaît clairement
que les collectivités territoriales bretonnes ont un besoin primordial d'approfondir et de partager leurs connaissances de la situation énergétique de leurs
territoires. Toute mise en œuvre de politiques énergétiques doit s'appuyer sur
une analyse fine de ces données qui
doit permettre un large débat démocratique indispensable à l'acceptation
sociale des projets et à l'implication
concrète des bretons.
Chaque collectivité a sa place à prendre
dans la recherche de solutions énergétiques. Mais l'implication de chacune
doit être articulée autour des enjeux
d'intérêt général propre à son territoire
et au public vis-à-vis duquel elle est
légitime. Le Conseil régional a un rôle
majeur à jouer pour cette mise en
cohérence des acteurs.
l’Agence locale de l’énergie de
Bretagne sud (ALOEN),
- M. Michel LESAGE, Président de
Saint Brieuc Agglomération,
- M. Christophe MARTINS, Vice-président du Syndicat d’énergie d’Ille-etVilaine (SDE),
- M . G i l l e s P E T I T J E A N , D i re c t e u r
régional de l’ADEME.
La convergence de tous vers une politique énergétique commune est essentielle pour un développement durable
de la Bretagne. Il en va de l'efficacité et
de la sécurité énergétique pour tous les
territoires et tous les usages.
Lors de son intervention, Michel BALBOT a présenté la démarche de création de l'Agence locale de l'énergie du
C e ntre oue st Bre ta gne da ns un
conte xte loca l pa rticulie r e t e n
réponse à un appel d’offre européen
(en 1998). Cette agence a permis à un
certain nombre d'acteurs locaux et
régionaux de s'investir dans la définition d'une politique énergétique
appropriée à la situation locale.
Pour participer à cette nécessaire
mobilisation des acteurs autour de la
question primordiale de l'énergie en
Bretagne, le CESER a donc organisé
ce forum. Au cours de cette journée,
après la présentation de ces deux
études "énergies", une table ronde a
permis l'intervention à tour de rôle
de :
- M. Michel BALBOT, ancien Président
du Pays du Centre ouest Bretagne, à
l'origine de la création (et premier
Président) de l'ALECOB, agence
locale de l'énergie,
- M. Jean-Paul AUCHER, Président de
Ensemble, en partageant des informations, un vocabulaire, puis des données, ils ont participé à la conception
territoriale d'une véritable politique
mobilisatrice. Lieu de démocratie
locale, l'Agence a ainsi permis la validation d'un certain nombre d'actions
à l'origine d'un développement local
autour de la question de l'énergie
(économie partagée).
Pour Jean-Paul AUCHER, la situation
en Bretagne sud semble différente.
Les acteurs locaux ont été plus difficiles à mobiliser autour de la question
énergétique et la création de l'agence locale n'a pas été une évidence (créée en 2008). Aujourd'hui,
alors que l'agence vient d'ajouter le
pays vannetais dans son territoire
géographique, son travail est déjà de
se faire reconnaître. Ensuite, par des
actions de vulgarisation auprès du
public, et en particulier des propriétaires, l'agence cherche à mettre en
valeur les actions possibles en faveur
des économies d'énergie et avant
tout dans l'habitat où le chantier est
immense.
Allant dans le sens des préconisations
du rapport du CESER, Michel LESAGE
a d'abord souligné que le développement des territoires d’un point de
vue énergétique est du ressort de la
mobilisation de tous et pas uniquement de la responsabilité des institutions. La mobilisation collective, le
partenariat, la mise en réseau des
acteurs permet réellement d’agir
mieux.
C’est en ce sens (démocratie locale)
que, dans l’agglomération de Saint
Brieuc, les collectivités territoriales et
les acteurs de la société civile et associative se sont mobilisés sur un certain nombre de thématique dont l’énergie. Dans ce cadre, ils ont récemment organisé des rencontres territoriales (en 2009) sur le thème de l’énergie.
Michel LESAGE a aussi rappelé que si
les communes et intercommunalités
n'ont pas de compétences directes
en matière d'énergie, leurs compétences spécifiques et fondamentales
que sont le logement, l'habitat, la
mobilité, les transports, … leur permettent d'agir effectivement sur les
questions énergétiques.
Il a ensuite illustré ces propos par un
certain nombre d'exemples significatifs d'actions réalisées sur le territoire
13
PROSPECTIVE
Christophe MARTINS a profité de son
temps de parole pour présenter les
syndicats départementaux d'électrification (ou d'énergie), dits SDE. Bien
que le plus ancien parmi les acteurs
locaux de l'énergie, le SDE n'en est
pour autant pas le plus connu, si ce
n'est par les élus territoriaux.
L'exposé de Christophe MARTINS a
mis en relief toute la difficulté des
SDE à se positionner au sein des
acteurs de l’énergie autrement que
dans leur rôle historique de gestionnaire des réseaux électriques basse
et moyenne tension.
14
Représentant les services de l'Etat,
Gilles PETITJEAN (ADEME) était le
seul non élu de notre table ronde.
Soulignant l'isolement dont souffrait
auparavant sa structure, il s'est félicité de cette prise de conscience
généralisée mais récente sur la
nécessité d’agir sur l’énergie.
Comme préconisé par le CESER, un
observatoire de l'énergie se met en
place (effectif depuis début 2009) et
une conférence régionale de l'énergie s'est réunie une première fois en
janvier 2010.
Dans le cadre de la réorganisation
territoriale des services de l'Etat, il
faut maintenant s'attacher à organiser le jeu des acteurs. Il est important de bien identifier les territoires
de compétences et de pouvoir ainsi
positionner les outils au service des
acteurs territoriaux (agence locale de
l'énergie, espace info-énergie,
conseil en énergie partagé…) au
niveau de l'échelon territorial le plus
pertinent.
Le débat qui a suivi les différentes
interventions a d'ores et déjà montré
la mobilisation d'un grand nombre
d'acteurs pas encore forcément repérés (exemple des universités) autour
de cette question essentielle de l'énergie pour le développement durable et harmonieux de la Bretagne.
© Hugues Panon
briochin. Le débat lui a ensuite permis d'expliquer le refus par les collectivités locales de l'implantation
d'une centrale de production électrique à Ploufragan telle que proposée par Gaz de France.
Pouvoirs et démocratie
à l’épreuve du changement climatique
Le changement climatique, un enjeu majeur du XXe siècle
Conférence de M. Pierre RADANNE,
Président de l’Association 4D, ancien
Président de l’ADEME, expert en politiques énergétiques.
❚ La réduction des émissions de
CO2, une « ardente obligation
d’action »
Alors que le GIEC a indiqué dans son
dernier rapport qu’il faut stabiliser le
réchauffement de la température terrestre à +2°C, en réduisant les émissions mondiales de gaz à effet de serre,
celles-ci ont augmenté d’un tiers depuis
le début du protocole de Kyoto. La stabilisation des émissions n’est pas facile
à atteindre. Elle implique que les pays
industrialisés réduisent leurs émissions
pour compenser le décollage des pays
en développement. Si les émissions
européennes diminuent (l’Europe tiendra ses engagements au titre du protocole de Kyoto), ce n’est pas du tout le
cas de pays tels que la Chine, l’Inde,
l’Amérique du Nord.
Tous les travaux du GIEC montrent que
le défi posé à notre civilisation est
considérable. Nous sommes face à la
« première question politique totale »,
et ceci pour plusieurs raisons.
En effet, pour commencer, le changement climatique est une « question planétaire à solidarité obligatoire » car le
climat est indivisible. Les émissions de
gaz à effet de serre d’un pays ont des
impacts sur tous les autres. Il souligne
combien notre destin à tous est
extraordinairement lié.
Ensuite, la question du changement climatique invite chacun à participer personnellement à l’effort de réduction
des émissions puisque la moitié de ces
émissions, en France, provient des choix
qui sont faits dans le domaine de la vie
privée : chauffage, alimentation,
transports, consommation, etc. Les
comportements personnels pèsent d’un
poids tout à fait considérable. Selon
Pierre Radanne, il s’agit plutôt d’une
bonne nouvelle dans la mesure où elle
implique nécessairement un progrès
démocratique considérable. En effet,
« nous devons aller chercher, pour
résoudre notre problème, l’alliance de
chaque personne, non pas sa soumission, non pas son obéissance, mais l’intégration, dans la manière dont elle
accomplit sa vie, dans chacun des ses
actes, de l’idée que cette nécessité-là
fait humanité à travers la manière dont
on va gérer le problème. »
PROSPECTIVE
Enfin, le changement climatique souligne le rôle central des collectivités locales, pour trois raisons. La première est
que les collectivités locales décident des
investissements qui ont une longue
durée de vie (bâtiments, infrastructures
de transport, réseaux, etc.). Ces décisions à longue portée dans le temps
devraient intégrer la nécessité de diviser
par deux les émissions mondiales, soit
par quatre celles de la France (le « facteur 4 »). Deuxièmement, elles agissent
sur la localisation des activités et sur
l’optimisation des fonctions transport.
Troisièmement, elles ont un contact
direct avec le citoyen, à travers l’exercice de leurs compétences. Pierre
Radanne a insisté sur leurs compétences dans le domaine de la formation
continue ; soulignant que l’adaptation
de la société, la réduction de sa vulnérabilité (face au changement climatique) constitue « d’abord un projet
éducatif culturel ».
❚ L’état de l’opinion
sur le changement climatique
Aujourd’hui, une très grande partie de
l’opinion sait qu’il y a un problème.
Mais il existe dans le même temps une
très grande confusion autour de ces
questions, même si, d’une manière
générale, les facteurs déclenchant sont
plutôt bien identifiés (consommation de
combustibles fossiles, industrialisation
et surtout transports). La société française sait que le changement climatique
existe mais les comportements ne diffèrent pas réellement. Pourquoi les gens
savent et n’agissent pas ? Est-ce une
trop mauvaise nouvelle, que l’on cherche à refouler ?
mer leurs marges de manœuvre (par ex.
: isoler le logement). Il leur faut pouvoir
identifier des réponses techniques et
dégager la vision d’un nouvel équilibre
entre recherche personnelle de plaisir et
stabilité du climat.
Ensuite, des dispositions sont à prendre
au niveau collectif. Il s’agit en particulier de mener des réalisations exemplaires (dans les domaines de la construction, des transports, des énergies
renouvelables…) pour susciter un effet
d’entraînement ; de se doter d’un
calendrier collectif (international, national, local) pour que les individus qui
s’engagent à changer aient aussi une
vision du progrès réalisé collectivement ; et de garantir l’équité (le débat
sur la taxe carbone a montré que sans
sentiment d’équité, les solutions politiques sont rejetées).
❚ Une nouvelle définition
du progrès
Pierre Radanne a insisté sur la nécessité
de développer une nouvelle définition
du progrès, basée sur la recherche
d’« un infini dans le monde fini », l’infini étant : la relation à l’autre, la communication, la culture, le savoir… Le
scénario de réussite est celui du passage d’une société de consommation à
une société relationnelle. C’est ce passage qu’il faut réussir, et pour le réussir
d’une façon démocratique, il faut parvenir à substituer à l’ancienne promesse
– celle du bonheur par la consommation, par la consommation massive –,
une nouvelle promesse de réussite de
vie. Il faut pouvoir raconter une vie
réussie au 21ème siècle à un enfant de
10 ans, qui va vivre ce siècle et qui
devra aimer ce siècle.
Aux 19ème et 20ème siècles, la question
était : la science et la technique peuvent-elles améliorer nos vies ? La
réponse a été positive si l’on considère
que l’espérance de vie a augmenté de
25 ans au cours du siècle (mais pour un
cinquième de l’humanité). Au 21ème
siècle, la question n’est plus celle-ci. Au
cours du siècle qui commence, nous
serons plus nombreux, nous voudrons
tous bien vivre, or les ressources sont
limitées et parfois en net déclin, la
charge sur l’environnement est déjà
trop lourde (comme le montrent le
changement climatique, la perte de
biodiversité, etc. La valeur de ce siècle,
aux sens moral, personnel, technologique, économique et financier, sera
l’optimisation de l’utilisation des ressources, consistant à faire de chaque
gramme de matière le meilleur usage
possible. Ce sera la condition du progrès social et la condition de la paix. On
entre donc dans un mouvement profond et durable de re-régulation pour
chercher cette optimisation.
15
❚ Des transformations majeures en
termes de gouvernance
et un retour de la planification
territoriale
La conférence de 2009 de Copenhague
sur le climat qui devait être l'occasion
En premier lieu, il faudrait que les individus puissent constater une prise en
charge sérieuse de cette question par
les principaux acteurs (responsables
publics, entreprises, secteur éducatif,
médias). Il faudrait aussi qu’ils puissent
bénéficier d’un réel effort d’explication
rationnel leur permettant de comprendre et de s’approprier le sujet ; qu’ils
puissent évaluer quantitativement leurs
propres sources d’émission afin d’esti-
© Michel Ogier
Comment passer de l’angoisse à l’action ? Pierre Radanne apporte des éléments de réponse.
Passer d’une société de consommation à une société relationnelle.
de renégocier un accord international
sur le climat pour remplacer le protocole de Kyoto, a montré qu’une gouvernance mondiale est indispensable,
quoique difficile à construire. Au niveau
international, la question climatique va
imposer une gestion mondiale dans le
cadre de l’ONU, juridiquement contraignante. Au niveau national, se profile
un retour de la planification territoriale
car les engagements internationaux et
nationaux imposeront une planification
descendante, comme cela s’applique
déjà aux grandes branches industrielles
(marché des quotas européens d’émission). D’ici 10 ans, nous aurons une
planification territoriale contraignante
pour atteindre les objectifs collectifs car
il ne sera pas possible de faire autrement.
Il y a de cela dans les scénarios prospectifs élaborés par le CESER de Bretagne.
16
Mais il faudra dans le même temps
- sur ce point les scénarios du CESER
divergent (ils envisagent d’autres futurs
possibles) - une avancée démocratique
considérable en raison de l’importance
des actions à engager du côté des individus/consommateurs.
❚ Les plans climat énergie
territoriaux
La loi Grenelle II prévoit l’établissement
de « plans climat énergie territoriaux »
pour toutes les collectivités de plus de
50 000 habitants, et au niveau de
chaque région, un schéma régional climat de l’air et de l’énergie. Ces schémas régionaux, co-élaborés par le
Conseil régional et le Préfet de région,
devront être mis en place pour la fin de
l’année 2011 ; ils devront être le lieu
d’emboitement des différents niveaux
de territoires.
La préparation des « plans climat énergie territoriaux » doit être une co-construction. Elle nécessité une vision de la
démocratie territoriale avec 2 niveaux.
Un premier niveau, de « démocratie
élaborative », consiste à réunir autour
de la table au moins 1/1000ème de la
population (et si possible 1 %), pour
faire travailler les personnes ensemble,
dans le cadre d’ateliers, en réponse à
© Charles Crié - CRB
PROSPECTIVE
une question simple : « Que doit faire
notre territoire pour tenir sa place vis-àvis du reste de l’humanité pour stabiliser le climat sur Terre ? ». Au cours de
ce travail qui peut durer 9 mois, les personnes réfléchissent, engagent des
débats et élaborent un livre blanc qui
sera soumis à une inspection financière,
technique, juridique et devra donner
lieu à publication.
Le deuxième niveau est celui de la
démocratie représentative. Concernant
une mutation de cette ampleur, le problème pour la démocratie représentative est de disposer d’un mandat fort
de la société. Ce mandat doit être construit et la phase de « démocratie élaborative », conclue par le livre blanc, renforce considérablement la capacité de
décision des élus.
Dans le cas du plan climat de la Ville de
Paris, 2 000 personnes ont travaillé
pendant 9 mois en groupes de travail.
Elles ont rédigé un livre blanc de 157
pages qui a été adopté à l’unanimité.
Un tel document, ainsi élaboré, renforce considérablement le pouvoir politique dans sa capacité de décision.
Tout le monde demande que le politique fasse preuve de volonté mais la
volonté du politique se construit, en
allant chercher des adhésions dans la
société.
Finalement, il faut faire société en prenant collectivement en charge les
enjeux de ce siècle. Comment donner
plus de sens à nos vies sinon en pre-
nant en charge les sujets de notre
époque et en donnant à nos enfants
des solutions pour leur vie dans un siècle qui sera très différent du siècle
passé ?
Pierre Radanne a conclu la conférence
par ces mots : « Je souhaite à chacun
pour cette année et pour la totalité de
votre vie une bonne vie dans ce 21ème
siècle avec les questions qu’il vous
pose. »
Section « Mer-littoral »
Rapporteurs : MM. Guy JOURDEN
et Philippe MARCHAND
Contact : Fanny TARTARIN,
Directrice adjointe du CESER
Tel : 02 99 87 18 73
Mel : [email protected]
Section « Prospective »
Rapporteurs : MM. Gilbert BLANCHARD
et Jean-Luc LE GUELLEC
Contact : Virginie GICQUEL,
Conseillère technique
Tel : 02.99.87.18.79
Mel : [email protected]
Commission
« Aménagement des territoires,
environnement »
Rapporteurs : MM. Ange BRIERE
et Alain LE MENN
Contact : Olivier COUTAND,
Conseiller technique
Tel : 02 99 87 17 62
Mel : [email protected]
FORMATION
De l'élaboration de l'offre de formation continue
à l'insertion professionnelle
L’exemple du Programme régional des stages du Conseil régional de Bretagne
Dans un contexte marqué par la récente réforme de la formation
professionnelle continue (2009), et par l’existence d’enjeux autour de
l’affirmation du rôle des Régions dans ce domaine, le CESER de
Bretagne a souhaité porter un regard sur l’élaboration du principal
dispositif de formations qualifiantes du Conseil régional de Bretagne.
Si elles bénéficient d’une compétence de droit commun en matière de
financement et de programmation d’actions de formation continue
pour tous les publics, les Régions ne sont cependant pas les seules à
intervenir pour la formation continue des demandeurs d’emploi.
Ainsi le Programme régional des stages (PRS) s’inscrit au sein d’une
offre globale de formation continue proposée sur le territoire breton.
L’analyse de ce dispositif doit la prendre en compte.
Puisque l’offre de formation PRS vise avant tout à l’insertion professionnelle de ses bénéficiaires, ce rapport analysera les résultats de
l’action sur les trajectoires professionnelles des stagiaires ainsi que
les processus déployés par le Conseil régional pour y parvenir.
De nouvelles orientations sont apparues
pendant l’écriture de ce rapport, impulsées aussi bien par l’Etat que par la
Région : nouvelle loi sur l’orientation et
la formation tout au long de la vie
conduisant notamment à une co-élaboration Etat-Région d’un Contrat de Plan
Régional de Développement des
Formations Professionnelles, mais aussi
la réflexion du Conseil régional sur la
mise en place d’un Service public régional de la formation en Bretagne. Elles
posent question sur les évolutions et les
perspectives futures pour la politique de
formation continue de la Région et son
Programme régional des stages.
17
L’offre de formation professionnelle continue
pour les demandeurs d’emploi en Bretagne
Quelle offre de formation
continue pour répondre aux
attentes des demandeurs
d’emploi et des entreprises ?
❚ Quels dispositifs pour les demandeurs d’emploi en Bretagne ?
© Hugues Panon
En Bretagne, l’offre globale de formation
est constituée de l’ensemble des actions
proposées par les 1884 organismes de
formation intervenant sur le territoire.
Selon les déclarations faites au
Groupement d’intérêt public pour la relation emploi formation (GREF), 4327
actions de formation seraient ainsi disponibles en Bretagne pour l’ensemble des
particuliers, actifs occupés et demandeurs d’emploi.
Mais pour ces derniers, il ne s’agit pas
tant de considérer l’ensemble des actions
de formation disponibles que la dizaine
de dispositifs proposés pour eux sur le
territoire breton. La majorité d’entre eux
ont été créés par le Conseil régional, en
vertu des lois de décentralisation de
1983 et de 2004 qui lui transfèrent la
compétence de droit commun en
matière de financement et de programmation d’actions de formation professionnelle continue pour les jeunes et les
adultes à la recherche d’un emploi.
Le Conseil régional n’est pourtant pas le
seul à exercer cette responsabilité sur le
territoire de la région ; il la partage avec
Pôle emploi (pour l’Etat), et les partenaires sociaux. Ceux-ci ont créé le « contrat
de professionnalisation » qui, à la différence des dispositifs mis en place par la
Région et par Pôle emploi, est un contrat
de travail. Il prévoit une alternance entre
des périodes de travail en entreprise et
des périodes de formation.
Les dispositifs de formation mis en place
par le Conseil régional et par Pôle emploi
FORMATION
Les dispositifs d’aides indiv iduelles
correspondent essentiellement à la mise
en œuvre de la compétence de financement des actions de formation par la
Région ou Pôle emploi. Le domaine des
actions de formation financées n’est
pas prédéterminé par l’institution
concernée mais répond directement au
projet professionnel du demandeur
d’emploi ou au besoin spécifique d’une
entreprise. Ainsi, une action de formation
financée correspond souvent à un bénéficiaire particulier.
Au titre de ces dispositifs, le Conseil
régional a mis en place :
- L e Ch è q u e F o r ce : il finance des
actions de formation courtes permettant
au demandeur d’emploi d’adapter ou de
remettre à niveau ses compétences.
18
- Le Chèque Formation : il finance des
actions de formation longues qualifiantes
répondant au projet professionnel du
demandeur d’emploi lorsque celui-ci ne
trouve aucune réponse dans le PRS.
- La Formatio n d’accès sécurisé à
l’emploi (FASE) : elle finance des actions
de formation qualifiantes pour les
demandeurs d’emploi non indemnisés au
titre du chômage et est accordée sur la
base d’un engagement des employeurs à
recruter les personnes à l’issue de leur
formation.
P ôle emploi intervient au travers de
l’Action de formation préalable au
recrutement (AFPR). Elle finance des
formations pré-qualifiantes ou qualifiantes qui sont ouvertes depuis 2009 à tous
les demandeurs d’emploi. Elles visent à
adapter leurs compétences à l’emploi
proposé par un employeur qui s’engage
à recruter la personne à l’issue de la
période de formation.
Dans le cadre des dispositifs collectifs
de formation, la Région et Pôle emploi
financent des actions dont ils ont précisément défini non seulement l’objectif (pré-qualifiant ou qualifiant) mais
également la thématique ou le
domaine (par exemple une action de
préparation aux concours, d’accompagnement à la construction du projet professionnel, ou une action visant à acquérir les compétences nécessaires à l’exercice d’un métier précis dans un secteur
d’activité ciblé). Chacun de ces dispositifs
correspond soit à une action ou prestation de formation particulière, soit au
regroupement de plusieurs actions de
formation en une offre globale. Dans
tous ces dispositifs, une action de formation correspond à un ensemble de bénéficiaires.
Au titre des dispositifs collectifs de formation, le Conseil régional a mis en
place :
- Les Ateliers de pédagogie personnalisés (APP) et les Ateliers de savoirs
fondamentaux (ASF). Les APP sont des
dispositifs plutôt pré-qualifiants, mis en
place pour aider les demandeurs d’emploi à préparer des examens et concours
du niveau V au niveau Bac et les ASF
visent à la lutte contre l’illettrisme, à l’apprentissage du numérique, ou à la préparation au code de la route.
- Le Dispositif régional d’insertion
professionnelle (DRIP)
Le DRIP se décline en quatre prestations
en amont de l’emploi ou de la qualification qui visent par exemple à l’accompagnement à l’orientation et la construction
du projet professionnel ou à l’acquisition
des savoirs professionnels de base.
- Les Actions territoriales et ex périmentales de formation
Flexibles et rapides à mettre en place,
ces actions qualifiantes ou pré-qualifiantes interviennent en réponse aux
besoins de formation exprimés par des
entreprises ayant des projets de recrutement dans des secteurs qui ne sont
pas couverts par des actions de formation du DRIP, du PRS ou de l’offre de
l’AFPA.
- Le Programme régional des stages
Le PRS regroupe un ensemble d’actions
de formation qualifiantes par secteur
d’activ ité économique. La nature des
actions de formation (elles correspondent
souvent à un métier précis) est fixée par
la Région, notamment en fonction de
besoins plutôt structurels en emplois et
qualifications sur le territoire.
© Bertrand Demée
sont de deux types. Il existe des dispositifs d’aides individuelles et des dispositifs
collectifs de formation. C’est en fonction
de cette offre dans son ensemble que le
PRS est élaboré par la Région.
- L’offre de l’AFPA, organisme public de
formation dont la gestion et le financement des actions de formation ont été
transférées à la Région.
Elle se compose essentiellement d’actions
de formations pré-qualifiantes et qualifiantes dans les domaines du tertiaire, du
bâtiment et de l’industrie.
Pôle emploi a mis en place le dispositif
des « Actions de formation conv entionnées » (AFC). Elles correspondent
principalement à des actions qualifiantes.
Le domaine de l’action de formation est
décidé en fonction des projets de recrutements exprimés par les entreprises du
territoire et des offres d’emploi déposées
par les employeurs. Ainsi les formations
sont en lien direct avec le recrutement
sur un poste de travail.
Les études menées par le GREF analysent
l’offre régionale de formation continue
en se focalisant principalement sur six
dispositifs qualifiants pour les demandeurs d’emploi. Elles rapprochent ainsi le
Chèque formation, le PRS, l’offre de
l’AFPA, l’offre de l’Assedic, le contrat de
professionnalisation, et le Congé individuel de formation (CIF). L’analyse de la
répartition des 17 278 stagiaires sortis
d’une action de formation effectuée
dans le cadre de ces dispositifs de formation montre l’importance du contrat de
professionnalisation et du PRS. Avec une
part de 29% pour le premier et de 25%
pour le PRS, ces deux dispositifs rassemblent en effet plus de la moitié des effectifs considérés. Par ailleurs, la majorité
des stagiaires se concentre sur des formations du domaine tertiaire.
FORMATION
❚ Le rôle de la Région dans la mise en
complémentarité de ces dispositifs
© Hugues Panon
Les caractéristiques communes de plusieurs de ces dispositifs montrent qu’il
existe entre eux des points de recoupement. Cela pose éminemment la question de leur articulation : en pratique, ces
dispositifs interviennent-ils en complémentarité ou en concurrence ? Si les
actions de formation peuvent viser alternativement soit à l’acquisition de compétences en amont de la qualification soit à
l’obtention d’une qualification, elles se
rejoignent dans un objectif commun et
non exclusif de promotion sociale : l’insertion dans l’emploi du public auquel
elles s’adressent.
Dans cette relation de la formation à
l’emploi, le positionnement de chaque
dispositif de formation existant en
Bretagne souligne quelques tensions
quant au rôle de la qualification : faut-il
promouvoir l’insertion directe dans l’emploi à la suite d’une formation pré-qualifiante ? La qualification doit-elle répondre à des besoins plutôt conjoncturels ou
structurels ? L’action de formation qualifiante est-elle plus efficace en termes
d’insertion dans l’emploi lorsqu’elle est
mise en place rapidement ? Faut-il privilégier les formations courtes ou les formations plus longues ? Ces questions se
posent d’autant plus que l’on observe un
déportement de la demande et donc des
effectifs du PRS vers le DRIP.
Une forte concentration des formations dans le domaine du tertiaire.
formation (mais la compétence pour la
programmation de formations de niveau
I et II est partagée avec l’Etat). Le rôle de
coordination de la Région s’est affirmé
par l’élaboration de sa Stratégie régionale emploi formation (SREF), en concertation avec l’ensemble des acteurs intervenant en faveur de l’emploi et de la formation sur le territoire breton. La SREF a
notamment conduit à la mise en place
d’une nouvelle stratégie visant à la complémentarité des dispositifs à l’échelle
régionale.
Cette stratégie s’appuie sur une nouvelle
procédure d’évaluation des besoins en
emploi et en qualification et permet de
faire le lien entre les besoins identifiés et
l’offre globale de formation sur le territoire : les filières générale, technologique,
et professionnelle de formation initiale,
mais aussi l’ensemble des dispositifs de
formation continue que propose la
Région ainsi que ceux de Pôle emploi, et
le contrat de professionnalisation.
Le Conseil régional, par la compétence
que lui a confiée la loi en 2002, est
responsable du développement cohérent
de l’ensemble des filières et dispositifs de
C’est en tentant compte de ce cadre que
la Région élabore, adapte, et dimensionne son PRS pour qu’il se positionne à
la fois en réponse à l’analyse des besoins
en emploi et en qualification, et en complémentarité par rapport aux autres
dispositifs.
© Hugues Panon
Focus sur le Programme régional
des stages (« PRS ») élaboré
par le Conseil régional
Évaluer les besoins en emploi.
Certaines caractéristiques du PRS ont
connu des évolutions depuis 2004. Les
éléments exposés ci-dessous en tiennent
compte pour décrire le dispositif tel qu’il
est conçu aujourd’hui.
❚ A qui le PRS s’adresse-t-il ?
Les actions de formation du PRS s’adressent aux demandeurs d’emploi inscrits
sur les listes de Pôle emploi, aux bénéficiaires de contrats aidés, aux actifs de la
production agricole souhaitant s’installer
ou se perfectionner dans leur métier, et
depuis la rentrée 2008 (PRS 2008-2009)
aux salariés de niveau infra V en préavis
de licenciement économique. Les bilans
réalisés concernant les caractéristiques
des stagiaires du PRS montrent qu’ils
sont majoritairement des hommes et
pour moitié des personnes âgées de
moins de 28 ans.
❚ Qu’est-ce que le PRS ?
Le Programme régional des stages prend
la forme d’un catalogue d’actions de formation qualifiantes programmées par le
Conseil régional en fonction des besoins
structurels en emploi et en qualification
qu’il a pu évaluer à l’échelle du territoire
régional et des pays. Cette démarche
doit permettre de créer un lien étroit
entre les besoins en emploi et la qualification visée par la formation, dans l’objectif que celle-ci débouche sur une insertion professionnelle durable des demandeurs d’emploi.
Le PRS est publié chaque année avant
l’été à l’attention des publics bénéficiaires et des structures chargées de
leur prescrire les actions de formation
continue. Le démarrage des actions de
19
FORMATION
formation a souvent lieu dès la rentrée
de septembre.
❚ Le PRS en chiffres
Concernant la répartition des demandeurs d’emploi par niveau de formation, au 31 décembre 2008, 41% des
demandeurs d’emploi étaient des personnes ayant un niveau de formation
correspondant au BEP-CAP (niveau V).
Par ailleurs, si 70% des demandes
d’emploi concernent le secteur tertiaire,
les domaines particuliers de la vente, du
tourisme, et des services, ainsi que les
fonctions sociales et médico-sociales
sont ceux qui comptent le plus grand
nombre de projets de recrutement.
20
Concernant le budget accordé au PRS,
à titre indicatif en réalisations pour
l’année 2008, le Conseil régional a
consacré 21,7 millions d’euros au
financement des actions de formation
inscrites dans son Programme régional
des stages. A ce montant, il faut ajouter 6,2 millions d’euros au titre de la
rémunération de 2 404 stagiaires et
2,5 millions d’euros au titre de l’aide à
la restauration.
❚ Financement de la formation,
rémunération et contribution du
stagiaire au coût de la formation
Les personnes suivant une action de
formation du Programme régional des
stages bénéficient non seulement de la
prise en charge de leur formation par le
Conseil régional mais également d’une
rémunération dont le montant est fixé
par décret et varie en fonction de la
situation du stagiaire. Seuls les stagiaires du PRS ne bénéficiant pas déjà
d’une indemnisation (ayant droit à l’allocation chômage versée par Pôle
emploi par exemple) ont droit à cette
rémunération. Pour en bénéficier, les
personnes concernées doivent effectuer
une demande auprès de l’organisme
dispensant la formation du PRS. Celui-ci
en informe la Région qui verse ensuite
© Stéphane Cuisset - CRB
244 actions de formation ont été mises
en œuvre dans le cadre du PRS 20092010. Dans ce contexte, la Région a
rappelé l’importance de l’accès à la
qualification, facteur clé de sécurisation
des parcours professionnels.
directement la rémunération au bénéficiaire.
cière des stagiaires mais en fonction de
leur niveau de formation.
Dans le cadre de l’application du
régime public de rémunération des stagiaires, ces derniers peuvent aussi
bénéficier d’une prise en charge de
leurs frais de transports et/ou d’hébergement dont le montant varie également en fonction de la situation du stagiaire. En complément, le Conseil régional attribue depuis septembre 2007
(PRS 2007-2008) une aide à la restauration aux stagiaires dont la rémunération
est inférieure ou égale à 1 000 euros.
Préconisation : Moduler la contribution financière demandée aux stagiaires en fonction de leurs ressources financières, v oire l’annuler pour
les personnes percev ant les forfaits
du Conseil régional. Le Conseil régional doit faire appliquer ces mesures
de façon identique par tous les organismes de formation pour une égalité de traitement des stagiaires.
Si le Conseil régional rémunère les
organismes de formation pour la prestation de formation qu’ils effectuent, il
prévoit également que ces organismes
puissent demander aux stagiaires une
participation financière aux coûts de
formation. Pour le CESER, au-delà
d’une interrogation sur la justification
et l’efficacité d’une contribution financière des stagiaires, le fait que l’application d’une telle mesure soit laissée à la
discrétion des organismes de formation
compromet l’égalité de traitement des
stagiaires.
Actuellement, il revient aux organismes
de formation souhaitant l’appliquer de
déterminer le montant de la contribution demandée au stagiaire et de l’indiquer dans la proposition transmise à la
Région. Le Conseil régional fixe cependant un montant maximal que la
contribution demandée au stagiaire ne
peut dépasser mais il le fait varier non
pas en fonction de la situation finan-
❚ La procédure d’appel d’offres et la
place des organismes de formation
dans la mise en œuvre des actions
de formation
Le rôle et les relations du Conseil régional et des organismes de formation ont
beaucoup évolué, notamment depuis
l’affirmation par l’Union européenne (et
sa réglementation, transposée en droit
national) que la formation professionnelle constituait une activité de marché
et non pas de service public. Ainsi
depuis 2004, l’attribution des actions
de formation programmées par le
Conseil régional aux organismes de formation se fait dans le cadre d’un appel
d’offres soumis aux règles des marchés
publics. Chaque action de formation du
PRS met donc en concurrence plusieurs
organismes de formation pour sa mise
en œuvre.
L’analyse du PRS 2008-2009 montre
que les réseaux d’organismes de formation concentrent presque 50 % du marché. Ainsi, 20% des 228 actions de for-
FORMATION
mation du PRS ont été attribuées au
réseau des « Greta », organisme public
prestataire de formations continues. Les
centres du CLPS (organisme privé)
dispensent quant à eux 10% des formations du PRS.
L’AFPA, organisme public créé il y a 60
ans par l’Etat et les partenaires sociaux
pour dispenser des formations répondant aux besoins de reconstruction du
pays dans l’immédiat après-guerre et
ensuite aux mutations économiques,
occupe une position particulière depuis
le transfert de sa gestion à la Région.
Ses actions de formation n’ont pas
encore été soumises à l’appel d’offres
et restent regroupées pour composer
une offre spécifique et cohérente financée par la Région, à côté du PRS. C’est
la raison pour laquelle aucune action de
formation du PRS n’a été attribuée à
cet organisme. Cependant, la mise en
œuvre du Service public régional de formation et les évolutions à attendre
quant au positionnement de l’AFPA
pourraient changer la donne.
Pourtant, la Bretagne se caractérise par
un bon niveau de qualification des jeunes issus de la formation initiale et une
élévation générale (comme ailleurs) de
la qualification des emplois : autant
d’éléments qui mériteraient d’être également pris en compte par le Conseil
régional dans la constitution de sa principale offre de formation qualifiante.
Cela permettrait aussi de poursuivre un
objectif de promotion sociale.
Le poids peu important des services
de formation continue des universités
dans le PRS est également lié à la
nature de la demande du Conseil
régional au travers de son appel d’offres PRS qui est très peu dirigée vers les
formations de niveaux II et I (licences,
masters et doctorats). Or ce sont des
formations de ces niveaux que dispensent les universités.
Préconisation : Offrir dans le catalogue du PRS davantage de formations
de niv eaux II et III, sans que cela ne
se fasse au détriment des autres formations de niv eaux inférieurs.
❚ Niveaux de formation et secteurs
d’activité correspondant aux
actions de formation du PRS
Les résultats de l’évaluation des besoins
en emploi et en qualification menée par
le Conseil régional en amont de l’élaboration du PRS et/ou la volonté politique
de s’adresser aux demandeurs d’emploi
les moins qualifiés l’ont conduit à programmer prioritairement des actions de
formations de niveau V (BEP, CAP) et IV
(Bac professionnel par exemple). Elles
représentent ainsi 80% de l’offre totale
du PRS 2008-2009, contre seulement
18% pour le niveau III (BTS, DUT) et
2% pour le niveau II (licence professionnelle, par exemple).
Certains secteurs sont sous-représentés.
L’identification des besoins structurels
en emplois et en qualifications permet
également au Conseil régional de décider de la nature, du nombre d’actions
de formation, mais également du nombre de places par action à attribuer
pour chaque secteur d’activité économique. Ainsi, les secteurs pour lesquels
le PRS 2008-2009 attribue le plus
d’heures de formation sont l’agriculture, l’animation, la pêche, le transportlogistique, la métallurgie-plasturgie, et
le bâtiment.
Certains secteurs (l’hôtellerie-restauration, les fonctions transversales de l’entreprise, le tertiaire, la bureautique)
apparaissent comme sous-représentés
par rapport à leur poids dans l’économie bretonne ou par rapport aux mutations de l’économie en cours. C’est
notamment le cas du développement
des éco-activités (cf. Avis régional
n° 50). A ce titre, le CESER incite à
confirmer la réalité de la prise en
compte dans le PRS des métiers liés au
développement durable.
© Emmaanuel Pain - CRB
Parmi les autres organismes publics, les
services de formation continue des universités dispensent seulement 1% des
actions de formation proposées dans le
PRS. Cela est notamment lié aux processus administratifs du PRS ; ils compliquent la réponse à l’appel d’offres et la
mise en œuvre de ses actions, et sont
difficilement conciliables avec les modes
de fonctionnement (pédagogique,
administratif, et comptable) de
l’Université. Le dispositif administratif et
technique du PRS est jugé inadapté par
la plupart des organismes de formation
qui souhaiteraient une meilleure prise
en compte du suivi qu’ils réalisent
auprès des stagiaires pendant leur
période d’alternance en entreprise et
un meilleur accompagnement par la
Région des démarches qu’ils effectuent
pour individualiser les parcours de formation des stagiaires.
Ces décalages entre la réalité de la
structuration ou les mutations de l’économie bretonne et le PRS peuvent s’expliquer par des stratégies de branches
qui préfèrent solliciter d’autres dispositifs de formation que le PRS ou par
l’absence de structuration de certaines
branches au niveau régional et l’absence de contrat d’objectifs emploi-formation. Or ce sont là les moyens par
lesquels le Conseil régional effectue son
analyse des besoins en emploi et en
qualification.
21
FORMATION
Analyse du Programme régional des stages, de son élaboration à l’entrée
des stagiaires sur le marché du travail
22
L’analyse des besoins en qualification et la procédure
d’appel d’offres vers les organismes de formation
❚ Améliorer l’évaluation des besoins
en emploi et en qualification
Cette étape est au cœur de la construction par la Région de son offre de formation professionnelle. Elle est essentielle car c’est à partir d’elle que le
Conseil régional va non seulement pré-
naux pour financer et programmer des
actions de formation professionnelle
pour tous les publics, dans les faits trois
acteurs (Région, Etat, et Pôle emploi) se
partagent actuellement ces compétences vis-à-vis des demandeurs d’emploi,
selon une logique de statuts. Cet
enchevêtrement des responsabilités
affecte la lisibilité de l’ensemble du système et compromet l’appréhension par
la Région des besoins des publics dont
elle n’a pas l’entière responsabilité.
© Franck Betermin
De nombreuses évolutions ont marqué
l’élaboration du PRS : le passage à une
procédure d’appel d’offres vers les
organismes de formation depuis 2004,
la mise en place de la Stratégie régionale emploi formation depuis 2006 qui
a entraîné la conception d’une nouvelle
stratégie d’évaluation des besoins et
emploi et en qualification. Le processus
détaillé ci-dessous est celui qui gouverne l’élaboration du PRS depuis 2007.
Celle-ci s’étale sur environ une année et
se décline en plusieurs étapes dont les
principales sont :
• l’analyse des besoins en emploi et en
qualification.
• L’élaboration et le lancement de l’appel d’offres vers les organismes de formation . A partir de l’analyse des
besoins, un « cahier des clauses techniques particulières » est élaboré. Il présente les actions de formation (ou «
lots ») dont la mise en œuvre est soumise à l’appel d’offres par secteur d’activité. Pour chaque action, il est indiqué
le territoire (un ou plusieurs pays) sur
lequel la Région souhaite qu’elle soit
mise en place, le niveau de sortie de
formation, le type de validation qu’elle
vise, et le nombre de places de formation qu’elle doit pouvoir ouvrir.
• La notification des marchés aux organismes de formation (après instruction
des dossiers et choix d’un organisme de
formation par action) et la publication
du catalogue des formations du PRS.
• L’entrée en formation des premiers
stagiaires.
Entre l’analyse des besoins et la sortie
des tous premiers stagiaires, il s’écoule
au minimum dix-huit mois.
voir et ajuster l’ensemble de ses dispositifs de formation les uns par rapport
aux autres (dont le PRS) mais également
les concevoir en tenant compte des
autres voies de formation et des dispositifs mis en place par d’autres acteurs.
L’analyse des besoins en emploi et en
qualification, déclinée par secteur d’activité, est particulièrement importante
pour la construction du Programme
régional des stages dont les actions de
formation, également déclinées par
secteur, en découlent directement.
Pourtant, son efficacité est entravée par
un certain nombre de difficultés. Pour y
remédier, certaines conditions devraient
être réunies.
Si l’ensemble des préconisations présentées ci-dessous s’appuie sur les
constats qui ont pu être fait par différents acteurs (branches professionnelles, organismes de formation,…) intervenant dans l’élaboration et/ou la mise
en œuvre du PRS, elles dépassent donc
le cadre même de ce dispositif pour s’étendre de manière générique à la construction d’une offre régionale de formation.
❚ Finaliser le processus de décentralisation de la formation professionnelle continue au profit des
Régions.
En dépit de la compétence générale
attribuée par la loi aux Conseils régio-
Deux outils ont été créés par la loi pour
permettre à la Région de jouer pleinement son rôle de coordination de l’ensemble des dispositifs mis en place par
différents acteurs sur le territoire : le
Plan régional de développement de la
formation professionnelle (PRDFP) et le
Comité de coordination régional de
l’emploi et de la formation professionnelle (CCREFP) dont le fonctionnement
en Bretagne a indéniablement permis le
rapprochement des acteurs. Il appartient donc de renforcer ces deux outils,
en rendant le premier prescriptif, et en
approfondissant la dynamique engagée
au sein du second.
Trois évolutions récentes semblent
cependant remettre en cause la capacité des Régions à jouer pleinement leur
rôle : le remplacement du PRDFP par un
« Contrat de plan régional de développement des formations » dont la
responsabilité serait copartagée entre
l’Etat et la Région, l’ouverture des
dispositifs de formation mis en place
par Pôle emploi à tous les demandeurs
d’emploi qui pose la question des
financements qui étaient jusque là partagés entre cette institution et le
Conseil régional, et l’hypothèse possible d’un retrait de la clause de compétence générale aux collectivités.
❚ Mieux anticiper les mutations et
les évolutions socio-économiques
en adoptant une démarche prospective
L’analyse actuelle des besoins en emploi
et en qualification paraît trop déconnectée des grandes mutations de l’économie et de l’emploi qui interrogent le
FORMATION
rôle de la formation continue et la
manière même de construire l’offre de
formation. Pour mieux les prendre en
compte, le Conseil régional gagnerait à
prendre appui sur les ressources provenant des différents territoires infrarégionaux et à accompagner leur interconnections autant que leurs initiatives.
Cela passe particulièrement par la valorisation et la mise en réseau des outils
existants tels que les observatoires
comme le GREF mais aussi les observatoires de branches et les différents observatoires territoriaux dont il faut souligner la qualité du travail. Ils contribuent
indéniablement à améliorer la connaissance des territoires, des dynamiques et
mutations de l’emploi, et de leurs relations complexes avec les politiques de
formation. A ce titre, il faut aussi souligner les apports de la gestion territoriale des emplois et des compétences
qui mobilise l’ensemble des acteurs de
territoire et prend en compte tous les
publics pour envisager les mobilités
entre secteurs et entre territoires dans
une optique de sécurisation des parcours professionnels.
voire parfois au niveau interrégional).
De plus, lorsque les espaces adéquats
pour leur mobilisation existent (par
exemple, les comités de coordination
locaux des Maisons de la formation
professionnelle), les branches professionnelles et les partenaires sociaux estiment avoir des difficultés à y participer.
Préconisation : Mettre en place au
s e i n d e l ’Ag e n ce é co n om i q u e d e
Bretagne une v eille particulière sur
les mutations des métiers et les
« nouv eaux métiers ».
Sans nécessairement aller jusqu’à une
fusion de ces deux directions comme
c’est le cas par exemple à la Région
Rhône-Alpes, un rapprochement devrait
s’opérer afin notamment d’assurer la
cohérence entre les contrats de filières
et les contrats d’objectifs emploi-formation aujourd’hui utilisés comme autant
d’outils pour l’analyse des besoins en
emploi et en qualification.
❚ Renforcer la concertation avec les
branches professionnelles
Bien qu’elles soulignent une amélioration de la concertation avec le Conseil
régional depuis la mise en place de la
nouvelle stratégie régionale d’évaluation des besoins en emploi et en qualification, les branches professionnelles
regrettent le périmètre et les procédures trop figées sur lesquels l’analyse
régionale s’appuie, allant jusqu’à questionner sa réelle efficacité.
L’analyse des besoins en emploi et en
qualification menée par la Région s’opère en effet à deux niveaux (le niveau
régional et celui des pays) qui ne correspondent pas forcément à la structuration des branches (elles interviennent
au mieux au niveau départemental,
Le Conseil régional doit poursuivre ses
efforts pour travailler en concertation
avec les autres financeurs de la formation continue pour une plus grande
complémentarité de l’offre. Ceci doit
permettre une meilleure compréhension des branches professionnelles sur
la spécificité de son offre de formation.
❚ Renforcer la collaboration entre
les directions de la formation professionnelle et du développement
économique au sein du Conseil
régional
❚ Mieux prendre en compte la
demande sociale
Si la demande économique et la
demande sociale de formations trouvent leur point de raccordement dans
l’emploi (offre ou demande), elles se
distinguent sur deux points :
• les besoins exprimés par les acteurs
économiques et les attentes des personnes peuvent entrer en contradiction
(c’est le cas par exemple lorsque les
besoins en emploi des premiers sont
ciblés sur des secteurs et métiers qui ne
sont pas attractifs pour les populations) ;
• il est plus difficile de saisir la demande
© Franck Betermin
Préconisation : Clarifier le positionnement du PRS par rapport aux autres
dis pos iti fs de for mat ion co nti nue
disponibles sur le territoire.
sociale que de recueillir l’expression des
branches professionnelles (même si cela
pose parfois également problème).
La prise en compte des mobilités entre
secteurs, et des dynamiques à l’œuvre
sur les territoires est un moyen de
répondre à ces problématiques. Le travail du réseau des Maisons de la formation professionnelle mis en place par le
Conseil régional devrait conduire à
mieux approcher la demande sociale et
à coordonner tous les acteurs participants à l’Accueil, information, orientation, et l’accompagnement (AIOA) des
personnes. Au-delà, il importe de faciliter le rapprochement de l’ensemble des
acteurs de la concertation, de l’emploi,
et de la formation sur les territoires.
L’identification des besoins des personnes peut permettre d’appréhender l’attrait des personnes pour certains dispositifs de formation continue (le contrat
de professionnalisation, ou le DRIP, plutôt que le PRS), ou de percevoir leur
vision du rôle de la formation.
❚ Rendre possible la participation
des organismes de formation
La procédure d’analyse des besoins en
emploi et en qualification menée par la
Région ne sollicite que très peu les organismes de formation. Cela est notamment dû au passage à une procédure
d’appel d’offres qui a transformé et rigidifié les relations entre ces deux acteurs. Les
règles de la concurrence exigent en effet
que les contacts entre eux soient limités
pendant la période de l’appel d’offres.
23
FORMATION
Pourtant, par leur proximité avec les
demandeurs d’emploi stagiaires et leur
implantation dans les territoires infrarégionaux, les organismes de formation disposent d’une réelle connaissance des territoires et des mutations
de l’emploi. Par ailleurs, cette rigidité
empêche également les organismes de
formation de s’exprimer sur la pertinence des actions de formations programmées par le Conseil régional à la
suite de cette analyse.
24
Préconisation : Associer dav antage
en amont les organismes de formation à la définition de l’offre de formation. Afin de bénéficier de leur
co n n ai s s a nce d e s te r r i to i r e s, d e s
rencontres entre le Conseil régional
et les organismes de formation doiv ent être organisées lors de la
co n s u l t a t i o n s u r l ’a n a l y s e d e s
besoins en qualification.
❚ Le point de vue des organismes
de formation sur la procédure
d’appel d’offres pour la mise en
œuvre des actions du PRS
Selon les organismes de formation
auditionnés, le passage à une procédure d’appel d’offres dès 2004 a eu des
conséquences plutôt positives. Il a en
effet permis d’améliorer la transparence
du processus de construction de l’offre
de formation du Conseil régional et de
l’attribution des marchés en mettant à
la connaissance des organismes de formation les critères de sélection sur lesquels s’appuie la Région (ceux-ci sont
cependant encore trop peu détaillés
pour eux).
D’un point de vue plus technique,
l’appel d’offres a permis aux organisme s de fo rma ti o n d ’o b te n ir d e s
garanties de paiement plus rapide que
ne le permettait la subvention dont
l’élasticité de paiement était plus
importante. Il a également permis de
sécuriser les organismes de formation
et de garantir une certaine pérennité
grâce à la possibilité pour le Conseil
régional de reconduire deux fois un
© Hugues Panon
Il apparaît donc opportun d’assouplir
le fonctionnement du marché de la
formation pour davantage les faire
participer.
marché conclu avec un organisme
pour la mise en œuvre d’une action
de formation du PRS.
Cependant, l’appel d’offres n’est pas
sans inconvénients pour les organismes
de formation. Comme signalé précédemment, la complexité des procédures
entraîne une charge administrative
lourde que ces organismes (particulièrement les petits) ne sont pas toujours en
mesure d’assumer. Elle présente le
risque que ceux-ci mobilisent leurs
compétences vers des aspects plus
administratifs que pédagogiques. C’est
notamment le problème posé par la
mise en œuvre de l’individualisation des
parcours de formation imposée par le
cahier des charges. Elle demande en
effet le temps et les moyens nécessaires
à l’ingénierie et à l’accompagnement
des changements de pratiques tant
pour les formateurs que pour les stagiaires. Un appui du Conseil régional
serait donc souhaitable pour aider les
organismes dans leur ingénierie pédagogique.
De l’entrée en formation des
stagiaires à leur insertion sur
le marché du travail
❚ Fragmentation et chevauchement
des compétences entre les acteurs
Alors que les structures chargées de
l’Accueil, information, orientation et
accompagnement (AIOA) constituent
non seulement le premier interlocuteur
des demandeurs d’emploi dans le cadre
de leur parcours de formation et d’emploi mais aussi les prescripteurs des
actions de formation du PRS, les études
menées par le GREF montrent qu’elles
ne sont pas toujours les premières ni en
tous cas les seules à diffuser l’information sur ce dispositif.
La diffusion de l’information sur le PRS
est fragmentée entre une multitude
d’acteurs formant un paysage complexe et dont le rôle ne se limite souvent pas à l’information sur les dispositifs de formation dont le PRS fait partie.
C’est précisément lorsque le rôle principal de chaque acteur entre en conflit
avec son rôle d’information et de prescription que les blocages se font. Ainsi,
en ayant pour objectif prioritaire l’accès
direct à l’emploi des publics, Pôle
emploi n’est pas incité à diffuser l’information sur le PRS ni à le prescrire. Cela
est d’autant plus le cas que cette institution dispose de sa propre offre de formation continue qualifiante, désormais
ouverte à l’ensemble des demandeurs
d’emploi.
Par ailleurs, la publication du catalogue
du PRS par le Conseil régional a souvent lieu en juin pour un démarrage de
certaines actions prévues dès la rentrée
de septembre. Ce laps de temps très
court incite les organismes de formation, guidés par la nécessité de « recruter » suffisamment de stagiaires pour
garantir l’ouverture de leurs formations,
à assurer le relais de la diffusion de l’information sur le PRS.
FORMATION
Il est pourtant essentiel que la prescription soit effectuée et qu’elle constitue
une garantie que le projet professionnel
et de formation ait bien été validé et
que le demandeur d’emploi ait pu
bénéficier d’un réel accompagnement.
Il appartient à la Région de favoriser
une meilleure répartition et compréhension commune des rôles de chacun en
Préconisation : Dév elopper les liens
entre les organismes de formation
et les prescripteurs afin de les informer sur les dates de recrutement, le
nombre de places disponibles, etc.
Créer un serv ice w eb permettant le
s u i v i e n t e m p s r é e l d e s p l a ce s
disponibles.
Un autre problème apparaît en ce qui
concerne le recrutement des stagiaires,
phase au cours de laquelle, à l’inverse,
les organismes de formation interviennent plutôt seuls. Cette situation pose
question car les organismes de formation, n’étant rémunérés qu’à la condition que le stagiaire ait effectué au
moins deux tiers des offres prescrites, ne
sont pas incités à recruter les candidats
les plus en difficultés qui présentent des
risques de décrochage en cours de formation. Leur sélection devrait découler
d’une décision concertée et associer non
seulement les structures accompagnatrices et prescriptrices mais également les
branches professionnelles aux organismes de formation.
© Martin Boudier
La situation constatée pour la diffusion
de l’information sur le PRS se retrouve
en ce qui concerne sa prescription aux
publics bénéficiaires. Alors que le
Conseil régional prévoit une entrée
dans le PRS sur validation obligatoire du
projet de formation des demandeurs
d’emploi de moins de 26 ans par les
Missions locales et une prescription
souhaitable pour les autres publics, seul
un stagiaire du PRS 2003-2004 sur
deux déclare en avoir bénéficié. Cela
conduit les organismes de formation à
prendre le relais mais pose la question
de leur légitimité à intervenir en tant
que prescripteur, et de leur capacité à
accorder le temps et les moyens nécessaires à l’examen et à la validation du
projet professionnel du candidat. De
plus, les pratiques de prescription de
tous ces acteurs ne répondent pas à
des critères harmonisés.
repositionnant clairement Pôle emploi
et les Missions locales comme prescripteurs officiels des formations du PRS.
du parcours antérieur, et des projets de
chaque stagiaire. Concrètement cela
peut se traduire par une individualisation des temps de formation (incluant
par exemple la réduction ou l’augmentation du temps hebdomadaire de formation par exemple) ou des lieux,
types, et stratégies d’apprentissage (formation à distance par exemple).
❚ Le déroulement des stages du PRS
en organisme de formation
L’individualisation des parcours de formation impose une transformation des
pratiques pour tous les acteurs (organismes de formation, formateurs, stagiaires). Pour qu’elle soit réellement
efficace et se déploie sans altérer la
dynamique de groupe, elle requiert une
très forte implication des organismes de
formation qui doivent faire preuve d’adaptabilité ainsi que d’une capacité
d’innovation et de flexibilité organisationnelle pour accompagner ces changements. La Région a un rôle à jouer
pour apporter un appui aux organismes
de formation dans la mise en place de
cette nouvelle démarche pédagogique.
Toutes les actions de formation proposées par le PRS se déroulent en alternance entre le centre de formation et
l’entreprise, et répondent au principe
d’une individualisation des parcours de
formation en fonction de la situation,
Préconisation : Renforcer l’accompagnement des organismes de formation dans l’év olution de leurs pratiques liées à l’indiv idualisation des
parcours de formation des stagiaires.
© Hugues Panon
Préconisation : Diffuser plus rapidem e n t a u pr è s d u p ub l ic l 'of f re d e
formation du PRS par une communication dans les médias régionaux
d ès v ali dat ion p ar l a Co mmi ssio n
permanente du résultat des appels
d'offres.
La mise en place de parcours individualisés et adaptés à la situation de chaque
stagiaire n’exclut pas les abandons en
25
FORMATION
26
De même, le retour des stagiaires sur
les actions de formation suivies dans le
cadre du PRS est encore peu sollicité. La
dernière étude du GREF concernant ces
questions (publiée en janvier 2008)
concerne les stagiaires du PRS 20032004. Elle montre que 87% d’entre eux
ont déclaré que la formation suivie
dans le cadre du PRS avait répondu à
leurs attentes. Elle ne donne cependant
aucune indication sur la nature de ces
attentes. Ceci pourrait pourtant particulièrement éclairer le Conseil régional
quant au rôle que les personnes attribuent à la formation.
❚ De bons résultats en termes d’insertion professionnelle
Environ 90% des stagiaires du PRS
voient les compétences acquises en
cours de formation certifiées par un
diplôme ou un titre professionnel. Cette
qualification, en reconnaissant l’ensemble des savoirs acquis est incontestablement un élément de sécurisation du
parcours professionnel du stagiaire.
54% des bénéficiaires du PRS 20032004 sont en emploi dans la semaine
qui suit la fin de la formation (dont
36% en CDI), 75% sont en emploi 18
mois après la fin de la formation (dont
53% en CDI), et 89% ont connu au
moins une période d’emploi au cours
des 18 mois qui ont suivi la fin de la
formation (la bascule dans l’emploi se
faisant le plus souvent entre le 4ème et
le 6ème mois).
© Michel Ogier
Préconisation : Mener une enquête
détaillée sur les motifs de rupture
des parcours de formation dans le
cadre du PRS, comme cela est fait
pour les ruptures de contrats d'apprentissage.
Préconis ation : Prév oi r la mise en
place, en début de formation, d’un
contrat entre le stagiaire et l’organisme de formation afin de définir
les attentes et les engagements des
deux parties.
58% des stagiaires accèdent à un emploi.
ailleurs s’opérer au-delà des 18 mois
observés. On peut cependant retenir
que la majorité des stagiaires du PRS
(58%) connaît des trajectoires marquées par un accès rapide et durable à
l’emploi.
L’étude menée par le GREF révèle un
autre élément très intéressant qui traduit bien la complexité du lien entre
l’emploi et la formation : 18 mois après
la fin de la formation PRS, 43% des stagiaires occupent un emploi n’ayant
aucun rapport direct avec la formation
suivie dans ce cadre.
Au cours des 18 mois suivant la fin de
la formation, les trajectoires professionnelles des anciens stagiaires du PRS
sont plurielles et contrastées ; des
retournements de situation peuvent par
Cette élasticité de la relation entre le
secteur ou domaine de l’emploi occupé
et celui de la formation n’est pas propre
au PRS. Elle se constate également dans
différentes filières de formation professionnelle ou initiale. Elle peut néanmoins être utilement analysée au
regard de la construction du PRS.
© Hugues Panon
cours de formation. Constatés par les
organismes de formation, ces ruptures
de parcours concernent environ 10%
des stagiaires. Selon les organismes de
formation, elles s’expliquent davantage
par des événements périphériques à la
formation (raisons financières ou retour
à l’emploi, même précaire) que par des
problèmes inhérents à la formation ellemême. Ces analyses pourraient utilement être complétées par le recueil du
point de vue direct des stagiaires.
Si l’ensemble des actions de formation
du PRS s’appuie sur l’analyse des
besoins en emploi et en qualification,
celle-ci ne semble pas déterminante
dans l’insertion professionnelle des
bénéficiaires. Ces derniers semblent
en effet avoir acquis la capacité de
s’a da pte r à un cha nge me nt de
conjoncture économique perturbant
les prévisions sur lesquelles s’appuyait
le PRS.
FORMATION
La politique de formation professionnelle continue
du Conseil régional de Bretagne et le Programme
régional des stages : évolutions et perspectives
Bien qu’il soit difficile d’attribuer l’acquisition de cette flexibilité au seul PRS,
le rôle de celui-ci ne peut être nié.
Celui des organismes de formation est
également à souligner dans l’accompagnement des stagiaires dans leur
recherche d’emploi, la détermination
du contenu précis des actions de formation et les pédagogies mises en
place, le travail sur les savoir-être, …
qui sont autant de facteurs favorisant
l’employabilité des individus.
La situation des publics bénéficiaires est
au fondement de la politique de formation continue du Conseil régional.
Parce que l’efficacité du PRS se mesure
aussi dans sa capacité à la faire évoluer
favorablement, le Conseil régional doit
se donner les moyens de poursuivre et
d’approfondir les études sur les attentes des bénéficiaires et le suivi de leur
situation.
Au niveau de l’évaluation des besoins
en emploi et en qualification, deux territoires sont actuellement pris en
compte par la Région : le territoire
régional dans son ensemble et le territoire de chaque pays breton. L’analyse
des besoins au niveau des pays paraît
pertinente compte tenu de l’histoire et
de la légitimité qu’ils détiennent en
Bretagne. Toutefois, d’autres acteurs
(Pôle emploi, les Maisons de l’emploi,
les Missions locales, les branches professionnelles…) susceptibles d’enrichir
l’analyse des besoins de la Région par
leurs expériences interviennent à d’autres niveaux. Ainsi l’analyse des besoins
en emplois effectuée par Pôle emploi
s’effectue non pas à l’échelle des pays
mais des zones d’emploi.
Préconisation : Créer une mission
permanente intégrée au GREF, chargée de suiv re la situation de l’ensemble des bénéficiaires du PRS, en
lien étroit av ec les organismes de
f or ma ti on et le s s tr uctu re s AI OA
(Accueil, information, orientation,
accompagnement) prescriptrices.
L’ensemble de ces constats invite donc
le Conseil régional à adopter une
approche systémique pour prendre en
compte l’ensemble des besoins, des
acteurs, et des territoires. Une telle
approche pourrait en effet lui permettre
de mieux appréhender les mutations
globales de l’économie et les dynamiques des secteurs, des branches professionnelles, et des entreprises.
© Martin Boudier
Quant à la mise en place des actions de
formations, la question des territoires
se pose encore. Elle peut inviter,
comme c’est le cas pour la mise en
place de formations de niveaux I et II, à
dépasser le périmètre institutionnel de
la région pour mettre en place des
coopérations interrégionales.
Par ailleurs, si la structuration des
actions de formation sur l’ensemble du
© CRB
Les analyses du PRS et de ses évolutions
présentées tout au long de ce rapport
montrent que la question du rôle du
territoire et des échelles territoriales à
prendre en compte dans la politique de
formation continue de la Région se
pose à tous les niveaux.
De nouvelles possibilités de formation.
territoire régional doit prendre en
compte la localisation des entreprises,
elle doit également considérer voire
anticiper les logiques de flux et de
mobilité des activités économiques (restructuration, mutations, mais aussi la
mobilité des salariés d’un secteur d’emploi à un autre) et des populations. Il
s’agit par exemple d’observer les distances entre le lieu de résidence et le
lieu de travail, ou entre le lieu de résidence et le lieu de formation (sachant
que les individus peuvent être plus
mobiles pour aller se former que pour
aller travailler).
L’évolution des modalités pédagogiques
de mise en œuvre des actions de formation pousse à son extrême la logique
de flux pour remettre en question les
frontières même des territoires. Avec
l’individualisation des parcours de formation, la possibilité pour les stagiaires
de suivre une action de formation
ouverte et à distance, et l’ « e-learning »,
le lieu physique de la formation pourrait se déplacer du centre de formation
vers le domicile, voire d’autres espaces
de partage des savoirs qui pourraient
être créés.
Ainsi, la prise en compte par la Région
des différents espaces territoriaux, des
acteurs qui s’y investissent et des
logiques de flux qui s’y installent peut
27
FORMATION
© Stéphane Cuisset - CRB
Pour conclure...
Non loin de la question des territoires
infrarégionaux et de la prise en compte
de leurs dynamiques, se pose la question de la capacité de la Région à jouer
un véritable rôle d’ensemblier et de
facilitateur des coopérations entre l’ensemble des acteurs de la formation
continue intervenant sur le territoire.
Cette capacité dépend à la fois des
compétences qui lui sont fixées par la
loi, de sa volonté et de sa responsabilité politique, et de l’organisation des
pouvoirs entre les acteurs avec lesquels
elle se partage les compétences en
matière de formation professionnelle
continue.
A ce titre des évolutions sont actuellement en cours et des incertitudes persistent. Ainsi, la récente ouverture des
actions de formation mises en place
par Pôle emploi à l’ensemble des
demandeurs d’emploi, la création d’un
« contrat accompagnement formation » pour les jeunes de moins de 26
ans, et la création d’un « contrat de
plan régional de développement des
formations » prévue par la nouvelle loi
sur l’orientation et la formation tout au
long de la vie semblent indiquer une
réaffirmation du rôle de l’Etat dans la
gestion de la formation continue, aux
côtés de la Région.
D’autres évolutions qui dépendent plus
directement de la Région vont sans
doute modifier l’architecture des dispositifs de formation continue, et particulièrement le PRS. Le Conseil régional
travaille sur la création d’un Service
public régional de la formation dont le
périmètre recouvrirait en partie celui
des actions de formation du PRS et
modifierait les modalités de mandatement avec les organismes de formation. Comment se déroulera la mise en
place du référencement des organismes de formation annoncée ?
Quant aux évolutions à venir susceptibles d’avoir un impact sur le PRS et la
politique régionale de formation
continue , le C E S E R e xprime se s
inquiétudes et souhaite que soient
clarifiées au plus vite les relations avec
l’Etat et que soient précisés en conséquence le rôle de chaque acteur et les
conditions de mise en œuvre de la
politique régionale de formation
continue.
Les dispositifs de formation continue
impulsés par la Région doivent participer à réduire le risque de dualisation
du marché du travail en fonction des
qualifications en permettant le développement et l’actualisation des compétences.
© Emmanuel Pain
28
donc lui permettre d’acquérir une
vision plus systémique et macroéconomique pour construire son offre de formation. Dans un mouvement inverse,
la formation continue joue un rôle pour
le territoire breton puisque la hausse
du niveau de qualification de ses habitants est un facteur d’attractivité pour
la Bretagne. Aussi, une politique de
formation doit-elle prendre en compte
toutes ces dimensions.
Tout au long de ce rapport, et en prena nt a ppui sur l’e xe mple du
Programme régional des stages, le
CESER a analysé la procédure d’élaboration par la Région de son offre de
formation. Nous avons cherché à
mettre en évidence les évolutions
mises en œuvre dans ce cadre depuis
la mise en place de la SREF. Si celles-ci
ont eu incontestablement des effets
positifs, des améliorations sont toujours possibles concernant l’analyse
des besoins en emploi et en qualification et les relations du Conseil régional avec les organismes de formation
dans le cadre de la procédure d’appel
d’offres. Les préconisations émises
par le CESER dépassent donc le cadre
du seul PRS pour interroger les modes
d’action et de coopération de la
Région avec les autres acteurs du territoire.
Commission « Formations,
Enseignements supérieurs »
Rapporteurs : MM. Robert JESTIN
et Thierry LENEVEU
Contact : Caroline Mével,
Conseillère technique
Tel : 02 99 87 18 74
Mel : [email protected]
Consultez le rapport du CESER
sur le site : www.ceser-bretagne.fr
COOPERATION
Pour la concrétisation
d’un Réseau Nautique Atlantique
Le thème de ce rapport n’est pas nouveau pour le réseau des
Conseils économiques sociaux et environnementaux régionaux
de l’Atlantique. La présentation du premier rapport « Pour une
coopération interrégionale en faveur d’un nautisme durable »
lors du Grand Pavois 2009 a généré une demande de la part
d’élus de Bretagne, Pays de la Loire et Poitou-Charentes de
poursuivre les réflexions sur cette thématique, mais avec l’objectif de proposer un plan d’action pour mettre en œuvre les
préconisations issues de cette première étude.
Une seconde étude s’est alors rapidement orientée sur la nécessaire structuration d’un outil de coopération interrégionale.
Ainsi est née l’idée de Réseau Nautique Atlantique, orienté R&D
et mobilisant entreprises de la filière nautique, pôles de compétitivité, centres de recherches, technopôles, acteurs de la formation et acteurs institutionnels.
29
Un contexte favorable au développement du nautisme
Un littoral atlantique doté
d’atouts
Le littoral atlantique concentre les activités de construction (plus de la moitié
de la production française, tant en chiffre d’affaires qu’en effectifs) et de pratiques nautiques françaises et mondiales. La moitié des bateaux de plaisance
est immatriculée sur cette façade et
40% des pratiquants français s’adonnent à de multiples activités : pêche
promenade, régates, char à voile, kyte
surf, kayak de mer, etc. La coexistence
de plusieurs leaders mondiaux (voile,
glisse, pneumatique...) et d’un large
tissu de petites entreprises traditionnelles engendre des logiques de production et de développement totalement
différentes.
Génératrice à ce jour de 40 000
emplois en France, dont 30 000 dans
les services, l’industrie nautique française en général et atlantique en particulier, présente un savoir-faire reconnu
mondialement qui s’appuie aussi bien
sur des compétences humaines et techniques que sur une capacité d’innovation et d’expérimentation.
C’est le secteur industriel français qui a
exporté le plus avec un taux moyen de
66% de sa production totale. Pour
autant, le nautisme ne peut se restreindre à son seul poids économique. Par
ses ports, ses activités nombreuses et
variées, son occupation visuelle de
l’espace, le nautisme apporte une très
forte contribution à l’attractivité touristique du littoral.
Une crise économique qui
appelle le changement
L’engouement pour le nautisme s’est
traduit à l’aube des années 1960 par le
développement d’une filière industrielle
qui, jusqu’en 2008, a connu une croissance constante et forte avant que la
crise mondiale ne divise quasiment par
deux le chiffre d’affaires de nombreux
constructeurs. Fin 2009, sur le marché
national, les ventes de bateaux à
moteur (70% du marché) et de voiliers
ont baissé de 20%. Cette diminution
des ventes de neuf entraîne un report
sur l’équipement et l’entretien.
La crise a en réalité accéléré un processus de diminution de l’activité qui était
déjà engagé. On note peu de fermetures d’entreprises, mais les trésoreries
sont très préoccupantes, à l’image de
certains équipementiers qui ont subi
une baisse de 80% de leur chiffre d’affaires. Nombreuses sont les entreprises
qui ont ré-internalisé une partie de
leurs activités afin de maintenir leurs
effectifs, ce qui a fragilisé le réseau
pourtant essentiel des sous-traitants. Il
paraît probable que dans les années à
venir, le paysage industriel nautique sur
la façade atlantique connaisse de profondes mutations : recapitalisations,
regroupements d’entreprises, dépôt de
bilan, reprises d’entreprises, etc.
COOPERATION
Une évolution sociologique
des pratiques et des comportements
Un programme de huit
actions pour lancer
le Réseau Nautique
Atlantique
Une nouvelle catégorie d’acheteurs
émerge, particulièrement dans les classes d’âge des 30 à 50 ans qui rationalisent davantage leurs investissements et
passent progressivement d’une logique
patrimoniale à une logique de prestations « clefs en main ». De plus, l’augmentation du coût de la vie et les incertitudes liées à l’avenir commencent à
écarter de nombreux clients de l’achat
d’un bateau neuf.
30
Cap sur l’innovation
et la coopération
interrégionale
Les industriels du nautisme doivent
répondre à un triple défi : assurer la
pérennité de leur activité et des
emplois, conforter leur avance technologique et intégrer les nouvelles donnes
environnementales et sociétales.
Des objectifs prioritaires
Pour entrer dans une nouvelle dynamique de développement, la filière
nautique doit identifier et anticiper de
manière concertée les évolutions
nécessaires.
Cette capacité d’anticipation est
pour l’instant limitée en raison de la
relative jeunesse de la filière, son
hétérogénéité, son cloisonnement et
sa situation fortement fragilisée par
la première crise structurelle de son
histoire. La filière manque donc de
données fiables, et surtout, d’un système d’analyse et de partage des
informations.
© FCM Graphic-Phovoir
Cette tendance est corroborée par le
vieillissement constant des plaisanciers
propriétaires dont l’âge moyen était en
2009 de 70 ans. Seules les entreprises
en capacité d’être présentes sur les
marchés émergents (Chine, Turquie,
Brésil, Inde…) pourront compenser en
partie les pertes liées au non renouvellement des propriétaires.
De ces objectifs prioritaires se sont
dégagés les deux axes de travail, dans
lesquels s’inscrivent les propositions
d’actions (2 actions pilotes et 6 actions
complémentaires) pour la mise en
œuvre du Réseau Nautique Atlantique.
C’est dans ce contexte d’incertitude et
de visibilité réduite que la coopération
interrégionale peut prendre tout son
sens : la filière industrielle nautique
atlantique a besoin d’être accompagnée dans cette nouvelle phase de
développement. L’aide apportée par les
CESER de l’Atlantique à travers cette
étude consiste donc à proposer un
cadre stratégique de travail. Pour ce
faire, six priorités ont été retenues
parmi les objectifs identifiés dans la
première étude :
- Le développement d’une meilleure
coordination interrégionale des structures de R&D existantes afin de favoriser
l’innovation ;
- L’inscription résolue dans une logique
environnementale par le développement de l’éco-conception et des écomatériaux ;
- L’accroissement de la professionnalisation et de la compétitivité des entreprises par un recours facilité à l’accompagnement et aux conseils des structures habilitées (Chambres de Commerce
et d’Industrie, Chambres de Métiers et
de l’Artisanat…) ;
- Les évolutions et adaptations nécessaires au niveau des emplois et des
compétences (formation) ;
- Le développement des exportations
notamment vers les marchés émergents (Asie, Moyen-Orient,...) et
- Une analyse des pratiques et des
attentes des clients (observatoire,
veille…).
Axe Innovation : mettre en
œuvre un programme interrégional de développement
de l’innovation industrielle et
de l’éco-conception
❚ Action pilote 1 : créer un logiciel
d’éco-conception
EnvironLe futur logiciel d’éco-conception
permettra d’analyser toutes les étapes de
la vie d’un bateau, afin de pouvoir mesurer son impact réel sur l’environnement.
Les principaux postes sur lesquels agir
sont les matériaux, la motorisation, la
production et la gestion de l’énergie à
bord, les équipements divers et consommables, la fin de vie.
❚ Action 2 : financer davantage les
travaux de recherche
Les thèses peuvent être considérées
comme le premier maillon de la chaîne
de valeur qui aboutit à la mise sur le
marché de produits éco-innovants. Un
ciblage des sujets de thèses financées
dans le cadre des bourses CIFRE
(Conventions industrielles de formation
par la recherche) ou encore en cofinancement par les Conseils régionaux peut
être décidé sur les thèmes suivants :
biomatériaux, motorisation, économies
d’énergie, peintures, traitements,
gréements, accastillage…
❚ Action 3 : lancer des appels à
projet pour le développement de
produits nautiques éco-innovants
Des appels à projets pourraient être
lancés pour créer une large gamme de
COOPERATION
produits nautiques éco-innovants :
accastillage, aménagement intérieur
(contreplaqué marine 100% écologique, colles bio-sourcées), peintures et
traitements divers (antifouling biodégradable), produits d’entretien, énergies renouvelables, gestion fine de l’énergie à bord, motorisation…
❚ Action 4 : accélérer le développement des bio-composites
Constitués à 98% de fibres végétales
et de résines bio-sourcées, les biocomposites sont compostables en fin
de vie. Le temps de recherche avant la
production d’un matériau réellement
fiable étant estimé entre 5 et 10 ans,
selon les moyens accordés à la recherche, il est donc nécessaire d’accélérer
le processus. Le développement actuel
des « day boats » pourrait intégrer ces
nouveaux matériaux. De plus, l’aéronautique et l’automobile, tout comme
le design d’ameublement et l’habitat,
sont en attente de bio-composites à
haute performance.
Axe Coopération : soutenir la
structuration et le développement des entreprises de l’industrie nautique par la
coopération interrégionale.
❚ Action pilote 5 : création d’un
Extranet « Nautisme en Atlantique »
❚ Action 7 : créer une Gestion prévisionnelle des emplois et des
compétences interrégionale
(GPEC)
La polyvalence des métiers du nautisme, le manque d’expérience de certains dirigeants dans la gestion des
ressources humaines, la petite taille de
la plupart des entreprises et des difficultés de recrutement justifient la
mise en place d’une GPEC (Gestion
prévisionnelle des emplois et des compétences). Cet outil permettrait de
faciliter l’adaptation et la reconversion
des salariés et d’inscrire les entreprises
dans les perspectives d’activité et
d’emploi de demain. La mutualisation
de l’offre de formation à l’échelle des
trois régions de la façade atlantique
répondrait à ces problèmes, particulièrement dans des secteurs très spécialisés comme les matériaux composites,
l’éco-conception et les techniques de
construction.
❚ Action 8 : faire stand commun sur
les salons internationaux
Un stand commun pourrait être conçu
afin d’affirmer la visibilité des entreprises atlantiques sur les salons internationaux. Un nombre plus important de
PME/TPE de la façade augmenteraient
ainsi leurs accessibilités aux marchés du
nautisme dans le monde (Australie,
Afrique du Sud, Nouvelle Zélande,
Chine, Emirats Arabes Unis,
Thaïlande…).
Miser sur un réseau
interrégional
L'objectif du Réseau Nautique Atlantique
est d'accompagner l’évolution de la filière
industrielle nautique atlantique dans le
respect des principes du développement
durable, depuis la recherche fondamentale jusqu'à la production et la commercialisation de produits éco-conçus.
Les Conseils régionaux ont toute compétence pour accompagner les professionnels du nautisme : formation, aide à l’innovation et la recherche, aide au développement et à la performance interne et
externe, promotion, développement commercial. On mesure également tout l’intérêt qu’il y a, pour les entreprises de la
façade, à anticiper les changements en
matière de normalisation et de réglementation européenne, et à proposer, à l’international, des produits innovants. La
collaboration public/privé se justifie pleinement par une convergence d’intérêts,
entre un espace territorial qui cherche une
visibilité sur l’échiquier international et des
entreprises qui visent un développement
national et à l’export.
31
Rapporteur : M. Alain LE MENN
Contact : Juliette CRISTESCU
Tel : 02 99 87 18 77
[email protected]
Morgane MERESSE - CESER Atlantique
[email protected]
Téléchargez l’étude sur le site :
www.ceser-bretagne.fr
La création d’un Extranet « Nautisme
en Atlantique » permettrait de répondre à un besoin d’information et de
veille, notamment en termes d’analyses
sociologiques des pratiques, d’études
de marché, de guide vers les aides et
dispositifs disponibles qui seraient diffusées auprès des acteurs de la filière
nautique.
Le Réseau Nautique Atlantique pourrait
lancer une étude de marché à l’échelle
de la façade atlantique afin de mieux
mesurer les attentes et les opinions des
différentes clientèles du nautisme dans
son ensemble ainsi qu’en matière de
produits éco-conçus.
© Marmara - Vialeron - Le Figaro
❚ Action 6 : une étude de marché
sur le nautisme à l’échelle de la
façade atlantique
ENERGIE
Les conditions de succès du développement
des énergies marines dans l’arc atlantique
Au-delà et en complément de sa réflexion sur le développement des énergies marines en Bretagne, le CESER a engagé
avec ses homologues de la façade atlantique française, espagnole et portugaise, une étude sur les obstacles au développement des énergies marines dans l'arc atlantique, visant à identifier ces obstacles et à proposer des recommandations permettant de les lever.
Une approche interrégionale
32
De l’Ecosse au Portugal, l’arc atlantique
présente un fort potentiel pour l’exploitation des énergies marines, pour le développement de la recherche et le développement industriel qui y sont liés. Les
régions du RTA disposent en effet de ressources exceptionnelles, de compétences
variées et complémentaires parmi les
acteurs de la recherche et du développement économique, et de nombreux projets y sont en cours de développement.
L’énergie des vagues constitue une ressource de premier ordre pour les régions
du RTA, exposées à une houle puissante
et régulière, avec des zones très favorables comme le Golfe de Gascogne.
Particulièrement exposées au vent, ces
régions bénéficient en outre, en
quelques points particuliers, de ressources importantes en courants de marée.
L’Europe assiste actuellement à un important déploiement de l’éolien offshore
posé, seule technologie mature aujourd’hui. Néanmoins, ces projets se développent presque exclusivement sur les vastes
plateformes continentales du Nord de
l’Europe dont les eaux sont peu profondes. Les régions du RTA, exception faite
de la Bretagne et de la Galice, ne pourront bénéficier de cet essor du fait d’un
plateau continental trop abrupt. Seul
l’éolien offshore flottant ouvre des perspectives à ces régions pour l’exploitation
de l’énergie éolienne en mer, mais il suppose une rupture technologique et
nécessite par conséquent, comme les
technologies d’exploitation de l’énergies
des vagues et des courants, des efforts
de recherche, de développement et de
démonstration importants avant de pouvoir compter sur les énergies marines
dans le bouquet énergétique.
Pouvoir profiter pleinement du développement des énergies marines dans l’arc
atlantique et de leurs retombées sur les
territoires constitue donc un défi d’envergure, exigeant une vision à long terme et
une volonté politique forte. Le panorama
comparé des régions atlantiques révèle
un dynamisme inégal, avec un déploiement d’initiatives et de projets dispersés.
Il est indispensable d’intégrer ces initiatives dans des stratégies régionales de
long terme, capables de mobiliser, pour
atteindre des objectifs quantitatifs définis, des instruments, des moyens et des
ressources ainsi que l’ensemble des
acteurs scientifiques, industriels, économiques et sociaux.
Accompagner
le développement
jusqu’à la maturité
des technologies
En-dehors de l’éolien offshore posé, les
technologies d’exploitation des énergies
marines ne sont pas matures. Leur développement ne sera possible que s’il est
soutenu par des mécanismes adéquats
dès les premières phases de R&D jusqu’à
la phase de démonstration de viabilité à
échelle réelle et en pleine mer, qui
marque le stade préindustriel de développement.
Il est indispensable de mettre à la disposition des développeurs des infrastructures destinées à la recherche, aux essais et
à la démonstration en mer de leurs
machines, telles qu’elles existent déjà
dans certaines régions atlantiques. La
coopération interrégionale peut être un
levier important pour la création, le
financement et l’appui au fonctionnement de ces infrastructures.
Afin de pouvoir prétendre à des financements européens, il est important pour
tous les acteurs des énergies marines de
se mobiliser, de démontrer l’intérêt du
développement des énergies marines et
de faire en sorte qu’elles fassent l’objet
d’une Initiative Industrielle Européenne,
comme il en existe une pour l’énergie
éolienne.
La création d’infrastructures de recherche et d’essais ouvre des opportunités
d’activités et d’emplois dont il faut avoir
conscience. En effet, de telles infrastructures requièrent des entreprises d’ingénierie, des biens d’équipement, des services logistiques, des services portuaires…
ENERGIE
L’installation en mer de telles infrastructures, parce qu’elles sont expérimentales
et de petite envergure, devrait bénéficier
d’une législation simplifiée. Elle devrait
également pouvoir s’appuyer sur une
évaluation précise, en amont, des sites
propices bénéficiant de ressources intéressantes et dénués d’obstacles d’ordre
légal, environnemental ou socio-économique. L’installation de tels dispositifs en
mer est en effet étroitement liée au problème de l’insertion d’une nouvelle activité dans des espaces maritimes et
côtiers densément utilisés. La prévention
des conflits susceptibles de se faire jour
est essentielle. A défaut, elle pourrait
susciter une opposition systématique de
certains usagers de la mer.
Favoriser ensuite le
déploiement commercial
Seul l’éolien offshore posé est aujourd’hui mature et fait l’objet de déploiements commerciaux en Europe.
Toutefois, il convient d’anticiper cette
phase de déploiement très en amont, y
compris pour les autres technologies
encore en développement aujourd’hui,
tant les perspectives à envisager sont
nombreuses et, parfois, complexes.
L’installation de machines en mer nécessite des moyens logistiques et portuaires
conséquents. Les besoins logistiques sont
accentués par les fenêtres météorologiques réduites pendant lesquelles les
interventions en mer sont possibles.
Cette limitation des temps d’installation
exige une capacité de stockage importante, un nombre plus grand de barges
de transport et de navires d’installation
spécialisés, qui doivent travailler en
même temps. L’adaptation ou la construction des infrastructures portuaires et
des navires spécialisés nécessitent des
délais importants et doivent être envisagés le plus en amont possible des projets.
L’adaptation de la réglementation constitue le deuxième point à anticiper. Les
cadres législatifs actuels, inadaptés et
pour la plupart en cours d’évolution, doivent être clarifiés, simplifiés et stabilisés
afin que les investisseurs disposent de
toutes les garanties quant à leurs projets
et bénéficient de délais raisonnables
pour l’instruction de leurs dossiers.
Deux procédures peuvent être engagées
simultanément : d’un côté, une procédure administrative d’instruction des projets coordonnée pour faciliter l’examen
commun des projets et limiter les redondances de procédure ; de l’autre côté,
une procédure de concertation à caractère territorial. L’introduction d’un nouvel
usage sur le domaine public maritime
nécessite une concertation qui n’est prévue, aujourd’hui, que dans quelques
cadres très particuliers. La nécessité de la
concertation et de l’implication des territoires conduit à proposer un partenariat
entre l’Etat et les collectivités régionales,
visant à organiser la concertation entre
tous les acteurs. La Bretagne a déjà mis
en place une Conférence régionale de la
mer et du littoral, dans laquelle l’Etat, le
Conseil régional et l’ensemble des parties prenantes (pêcheurs, porteurs de
projets, associations…) participent à la
définition partagée des zones propices
pour le développement de l’éolien offshore posé.
Le développement des énergies marines
nécessite par ailleurs un large soutien de
la société. Il est donc indispensable d’informer et de former la population, de
comprendre les perceptions qu’elle peut
avoir du développement des énergies
marines, de rechercher une appropriation collective, et de mener en amont un
exercice de planification stratégique spatialisée pour le déploiement des énergies
marines. Cet exercice, conduit en
concertation avec les acteurs, doit s’appuyer sur un recensement des usages
existants, permettant de disposer d’informations communes pour envisager le
partage de l’espace marin et la cohabitation des différents usages. La planification stratégique spatialisée doit conduire
à définir des objectifs, des espaces de
réalisation et un calendrier partagés, à
optimiser la complémentarité entre les
sites de production, et à intégrer les
enjeux du développement des réseaux
de transport et des possibilités de stockage de l’électricité.
Le déploiement commercial des énergies
marines soulève enfin des enjeux environnementaux. S’agissant d’une nouvelle activité, non envisagée lors de la
mise en œuvre de la réglementation
européenne, il est nécessaire de solliciter
une clarification de l’Union européenne
sur les implications de certains textes, et
de renforcer l’acquisition de connaissances sur le milieu marin. On ne connaît
pas l’impact des dispositifs expérimentaux sur le milieu marin, et encore moins
celui des parcs. Cette incertitude ne doit
pas être un blocage, mais un stimulant
pour le développement de systèmes
d’observation continue et de recherche.
Le travail commun des régions atlantiques sur ce sujet devra aboutir à une
harmonisation des critères et des indicateurs permettant d’obtenir des résultats
partagés.
Optimiser le développement socio-économique
Le développement des énergies marines
doit provoquer un effet de dynamisation
des régions atlantiques. Les secteurs
mobilisables sont nombreux et présents
dans ces régions. La diversification ou la
création de nouvelles activités doit s’appuyer sur un renforcement de la recherche, une aide au déploiement industriel
d’une filière « énergies marines » s’appuyant sur les filières existantes (construction navale, secteur parapétrolier, électrotechnique, matériaux, télécommunications, océanographie opérationnelle…),
un développement de la formation aux
nouveaux métiers, professionnelle et
initiale, le développement d’outils de sensibilisation et de communication.
Un effort concerté est donc nécessaire,
pour lequel doivent être mobilisés les
moyens scientifiques, technologiques et
financiers, les moyens industriels et
logistiques et les compétences professionnelles. La coopération interrégionale
sur la façade atlantique doit permettre
de relever ce défi.
Correspondant pour le CESER Bretagne :
M. Guy JOURDEN
Contact : Fanny TARTARIN,
Directrice adjointe du CESER
Tel : 02 99 87 18 73
[email protected]
Téléchargez l’étude sur le site :
www.ceser-bretagne.fr
33
OPINION
Cette rubrique libre n’engage que son auteur.
Elle est alternativement assurée par les différentes composantes de l’assemblée.
Faire confiance aux jeunes
Isabelle (23 ans) nous disait : « Tous
les choix que j’ai eus à l’école, on
me les a imposés. Je n’av ais pas le
droit de dire mon mot parce que j’étais jeune. »
34
Ces deux vécus de jeunes de la même
génération semblent à l'opposé l'un de
l'autre, mais ne témoignent-ils pas d'un
même désir : avoir son mot à dire sur sa
propre vie et sur le monde environnant ? Si leurs aspirations sont les
mêmes, il faut bien reconnaître que
tous les jeunes n’ont pas les mêmes
opportunités de devenir acteurs de leur
propre vie, citoyens à part entière de
leur pays et du monde.
© CRB
Ouest-France, du samedi 5 fév rier
2011, nous rapportait ceci à propos
d e la Belg ique :« Ap rès 220 jo urs
sans gouv ernement, cinq jeunes de
20 à 27 ans ont lancé l'idée d'une
m a n if p ou r ex i ge r q ue l es p ol i ti ci e n s f r a n co p h o n e s e t f l a m a n d s
s 'e n t e nd e n t e nf i n . S an s m o y e ns ,
av ec cinq téléphones portables, ils
ont fait descendre 40 000 personnes
dans la rue le 23 janv ier ».
« une école qui accentue les différences
et brise certains d’entre eux », les écartant irrémédiablement d’un monde du
travail de plus en plus exigeant qu’ils
aspirent pourtant à rejoindre. On leur
fait sans cesse remarquer qu’ils n’ont
pas de métier, pas d’expérience professionnelle, voire pas de permis de
conduire … que beaucoup ne peuvent
pas passer, tellement il coûte cher !
Certains ont la chance de faire des études, de voyager, de découvrir des mondes nouveaux, d'échanger avec des jeunes d'autres milieux … Pour eux, l'avenir est ouvert sur tous les possibles.
Même si leur insertion dans le monde
du travail n’est pas évidente du fait de
la crise économique actuelle, la majorité
d’entre eux peuvent compter sur le soutien de leur entourage, sur leurs relations, sur les expériences ou les stages
dont ils ont déjà pu bénéficier.
A tout cela s’ajoutent des préjugés sur
leur quartier ou leur famille. Lorsqu’ils
deviennent majeurs, bon nombre continuent à habiter chez leurs parents, certains en couple avec des enfants.
Malgré le surpeuplement et le manque
de moyens, les parents éprouvent une
certaine fierté de pouvoir les soutenir.
Trop souvent pourtant, des discours
extérieurs dévalorisants poussent ces
jeunes à se désolidariser de leurs proches et de leur quartier. Or, perdre ses
racines et la confiance en ses parents,
c'est se retrouver dans le vide.
Et puis il y a les autres, beaucoup d’autres, qui ne se voient pas offertes les
mêmes chances en raison d’une vie plus
difficile dans leur famille et dans leur
quartier. Avec eux, l’école échoue dramatiquement. La plupart, entrés en
sixième sans maîtriser les savoirs de base
(écriture, lecture, calcul), font partie des
120 000 élèves qui sortent chaque
année du cursus scolaire sans accéder à
une formation qualifiante. Ils nous disent avec force qu’ils n’acceptent plus
Beaucoup aspirent à se rassembler pour
agir avec des adultes à leurs côtés.
Cette dynamique collective est essentielle pour leur permettre de se situer
socialement, de s’approprier identité et
citoyenneté. Pour mener à bien certains
projets, les jeunes ont besoin de soutien, mais pas seulement. Pour que
naisse une expression collective, souvent plus riche que l'expression individuelle car bénéficiant des apports de
tous, les jeunes doivent être convaincus
que leur parole est attendue pour produire du changement.
Comme ils l’expriment dans le message
qu’ils ont rendu public le 17 octobre
2010 à l’occasion de la Jour née
Mondiale du Refus de la Misère,
« regarde-moi comme une chance »,
ils refusent d’être mis à part à cause de
leurs difficultés : « nous avons du mal à
comprendre ce monde mais nous voulons y trouver notre place ».
Le Conseil régional de Bretagne a fait
des politiques de la jeunesse une des
priorités de son mandat pour que
chaque jeune ait accès à un toit, à une
formation, à une passion. Il a confié au
CESER la mission de « mieux identifier
les modes d’expression, de mise en projet et d’engagement des jeunes dans la
vie collective, c'est à dire les expériences et processus par lesquels ils font ou ne font pas - l'apprentissage progressif de leur citoyenneté, y compris
sous des formes, des langages, des
modes de sociabilité et de participation
sociale et publique inédits aux yeux des
générations précédentes."
Gageons que ce travail nous aidera à
répondre à cette question essentielle :
comment apprendre de tous les jeunes
sans exception pour enrichir notre
citoyenneté et notre démocratie ?
Anne SAGLIO
Vice-présidente déléguée du CESER
PUBLICATIONS
Dernières parutions du CESER
Sept orientations prioritaires pour la Bretagne
Bilan d’activités du CESER de Bretagne 2007-2010
Organisé autour de sept orientations prioritaires (s'ouvrir, innover, se développer, s'organiser, se former, coopérer,
s'affirmer), ce document présente les principales contributions du CESER au développement régional. Il propose
une analyse des questions régionales et formule des préconisations pour imaginer l'avenir.
Contact : Muriel REYMOND, Conseillère technique
Tél : 02 99 87 18 76
Mel : [email protected]
Téléchargez ou commandez le rapport du CESER
dans la rubrique « études » du site : www.ceser-bretagne.fr
Travaux en cours au CESER de Bretagne
❚ A paraître en mai 2011 :
- « Les marées vertes en Bretagne : pour un diagnostic partagé,
garant d’une action efficace »
Rapporteurs : MM. Jean-Paul GUYOMARC’H et François
LE FOLL
❚ A paraître en juin 2011 :
- « Les univers sociaux et culturels des jeunes en Bretagne et
leurs engagements dans la vie collective »
Le premier volet de cette étude (univers sociaux et culturels) a été adopté par le CESER en janvier 2011. Il
est téléchargeable dans la rubrique « études » du
site : www.ceser-bretagne.fr
Rapporteurs : Mme Annie GUILLERME et M. Sylvère
QUILLEROU
❚ A paraître en octobre 2011 :
- « Quel mode de développement économique pour la
Bretagne de demain ? »
R a p p o r t e u r s : M m e M a r y v o n n e G U I AVA R C ’ H e t
M. Jean LE TRAON
- « Milieux côtiers, ressources marines et société »
Rapporteurs : MM. Jean-Paul GUYOMARC’H et
François LE FOLL
❚ A paraître en décembre 2011 :
- « Comment optimiser le projet Bretagne à grande vitesse
pour le développement des territoires en Bretagne »
Rapporteurs : MM. Jean-Philippe DUPONT et Pascal
OLIVARD
❚ A paraître en janvier 2012 :
- « Enseignements supérieurs et politiques régionales :
enjeux et défis »
Rapporteurs : M. Luc AVRIL et Mme Anne SAGLIO
- « Appropriation sociale et mise en mise en débat des
sciences et technologies en Bretagne à l’horizon 2025 »
Rapporteurs : MM. Bernard DUBOIS, Jean-Claude
MOY et Mme Claudia NEUBAUER
❚ A paraître au 1er semestre 2012 :
- « Comment optimiser les fonds européens en Bretagne ? »
Dans le prochain numéro de l’avis régional
❚ Synthèses des rapports :
- A vos marques, prêts… bougez ! En avant pour une région active et sportive
- Les marées vertes en Bretagne : pour un diagnostic partagé, garant d’une action efficace
- Contribution du CESER de Bretagne au débat national sur la dépendance
35
Le Conseil économique,social et environnemental de Bretagne :
Une assemblée consultative
au service de la démocratie locale
Deuxième assemblée de la Région Bretagne, le Conseil économique, social et environnemental régional
(CESER) a une fonction d’avis sur le budget du Conseil régional et ses politiques ainsi que sur des politiques
de l’Etat en région. Par son droit d’autosaisine, il émet de sa propre initiative des avis et des vœux sur
toute question relevant d’un intérêt régional.
Le CESER élabore, sous forme de rapports, des réflexions et propositions sur des sujets qui concernent
les domaines de la « formation et de l’enseignement supérieur », du « développement économique et
de la recherche », de « l’aménagement du territoire et de l’environnement » et de « la qualité de la vie, de
la culture et des solidarités ». Il suit tout particulièrement les questions relevant de la « mer et du littoral » et
cherche aussi à anticiper les évolutions futures et il réalise des études prospectives d'intérêt régional.
Dans le cadre de ses travaux il participe à la mission d’évaluation des politiques publiques.
Le CESER est une assemblée ouverte aux coopérations par sa représentation dans plus de 60 organismes
extérieurs régionaux.
Il mène une démarche de coopération active avec les autres Conseils économiques, sociaux et environnementaux de France et européens de l’Arc Atlantique.
Les 113 membres qui constituent le CESER sont des acteurs du tissu économique, social et environnemental de la Bretagne, ils représentent tous les courants de la société civile. Désignés par le Préfet de
région sur proposition des organismes socioprofessionnels représentés, ou au titre de personnalité
qualifiée, ils sont répartis en quatre collèges.
Les activités du CESER se déroulent en assemblée plénière, en Bureau et dans des travaux réalisés en
commissions et sections… Une présentation plus détaillée, sa composition, son actualité et les rapports
préparés selon une méthode très participative et adoptés en assemblée plénière sont accessibles à tous sur
le site, ceser-bretagne.fr. Une synthèse est présentée dans la revue « l’Avis régional ». Ces publications
donnent lieu à des forums de présentation et de débats.
Tous les rapports du CESER peuvent être :
- Téléchargés sur le site internet : www.ceser-bretagne.fr
- Envoyés gratuitement sur demande
- Présentés publiquement sur demande
7, rue du Général Guillaudot - CS 26918 - 35069 Rennes Cedex
Tél : 02 99 87 17 60 - E-mail : [email protected]
www.ceser-bretagne.fr
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