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La fusée Ariane 5
emportant SMART 1 peu
de temps avant son
lancement depuis Kourou.
(Benny Audenaert)
SMART 1 ne se contente pas d’être un programme tech-
nologique exceptionnel. D’emblée, les responsables du
projet ont décidé de confier au vaisseau spatial une des-
tination scientifique intéressante : la Lune. C’est la pre-
mière mission européenne vers notre compagnon de
route naturel, après les dizaines de sondes lunaires amé-
ricaines et russes de l’époque des pionniers de la con-
quête spatiale, les missions habitées Apollo et les sondes
américaines Clémentine et Lunar Prospector, plus récen-
tes.
L’envoi de nouvelles sondes vers la Lune est intéressant
à plusieurs égards. La Lune est en effet loin d’avoir révélé
tous ses secrets. SMART 1 va se pencher en particulier
sur l’étude de la présence éventuelle et la répartition
d’eau glacée sur la Lune. Le directeur du projet Giuseppe
Racca résume l’importance de la mission de SMART 1
pour l’Europe : «SMART 1 ouvre de nouveaux horizons à la
fois dans le domaine des technologies spatiales, mais aussi
dans celui de la recherche scientifique. Nous proposerons régu-
lièrement des informations et des images, afin que chacun
puisse participer à notre formidable aventure lunaire.»
D’après le responsable scientifique du projet, Bernard
Foing, «les minéraux de la Lune seront identifiés dans l’infra-
rouge en détail comme jamais auparavant. L’étude par rayons
X nous permettra d’établir le premier inventaire minutieux
des éléments chimiques majeurs de la Lune. Ajoutez à cela les
nombreuses images de nos caméras perfectionnées et il est
clair que SMART 1 va nous apporter une image complète-
ment neuve de la Lune.»
Le coût de SMART 1 s’élève à environ 110 millions
d’euros. Ce prix inclut la sonde spatiale, le lancement,
les instruments de bord et le contrôle de la mission.
Selon les normes spatiales, ce programme est bon mar-
ché. Une mission spatiale scientifique «normale» coûte
très facilement cinq fois plus.
Un parcours très spécial,
équipé d’un moteur peu
ordinaire
La Lune gravite entre 350.000 et 400.000 kilomètres
de la Terre. Dans les années ’60 et ’70, il fallait près de
trois jours aux astronautes américains du programme
Apollo pour atteindre la Lune. SMART 1 a mis pas
loin de 14 mois. Pourquoi ? Cela s’explique par l’itiné-
raire très spécial qu’a suivi la sonde pour aller de la
Terre à la Lune et qui lui a fait parcourir plus de 84
millions de kilomètres.
Après son lancement, SMART 1 est d’abord arrivée
sur une orbite elliptique autour de la Terre, comme
un satellite de communication classique. A l’aide de
son moteur ionique, l’engin spatial n’a cessé d’éten-
dre l’ellipse pour se rapprocher de la Lune par un
mouvement en spirale. SMART 1 a finalement été
«happée» par la Lune vers la mi-novembre 2004. Il lui
a fallu encore environ deux mois supplémentaires,
aidée de son moteur ionique et par des orbites tou-
jours plus serrées, pour atteindre à la mi-janvier 2005
son orbite opérationnelle définitive autour de la
Lune. L’orbite est située à une altitude entre trois
cents kilomètres au-dessus du pôle sud et trois mille
kilomètres au-dessus du pôle nord.
Pourquoi cet étrange parcours? Il était nécessaire, car les
moteurs à ions ne déploient pas la puissante poussée des
fusées chimiques traditionnelles. Comparé à la puis-
sance des moteurs classiques, une sonde spatiale équi-
pée d’un moteur ionique ressemble à une tortue, même
s’il s’agit d’une tortue extrêmement efficace. Les moteurs
à ions bénéficient d’une impulsion spécifique élevée (rap-