ON OD lettre n 17

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Eschyle / romeo castellucci
orestie (une comédie organique ?)
OD ON
la violence
mise à nu
carlo collodi / joël pommerat
pinocchio
ÉLOGE D'UN PETIT
MENTEUR
les bibliothèques de l'odéon
conrad m'a ouvert
deux mondes
o
Lettre N 17
Odéon-Théâtre de l’Europe
décembre 2015
orestie (une comédie organique ?)
2
Orestie 3
castellucci,
la violence
mise à nu
Cette mise en scène émerge – sans en
sortir – de la boue de l'oubli dans lequel
ont été plongées les puissances qui
frappent encore, à chaque lecture de
L'Orestie, les cordes les plus profondes
de l'être. […] Non, ce qui me fouette,
ce ne sont pas les mots, ce n'est pas
la vertigineuse poésie d'Eschyle. Ce
qui m'émeut, c'est la fable nue, les
événements contenus dans L'Orestie,
qui viennent ôter et créer des vides.
Il n'y aura donc pas de reconstruction philologique du «véritable» esprit
de la tragédie, ni même de restitution contemporaine de sa signification. Il ne s'agit pas ici de résoudre la
«question tragique», même si l'on sou-
Le metteur en scène poursuit son compagnonnage avec le Théâtre de l'Odéon en se replongeant,
sommaire
vingt ans après sa création, dans la vertigineuse œuvre d'Eschyle. Un spectacle brûlant et spectral
pour clôturer le «Portrait» que lui consacre le Festival d'Automne à Paris.
p. 2 à 5
Orestie
(une comédie organique ?)
Eschyle / Romeo Castellucci
la violence mise à nu
La parole
poétique n'est
qu'une pâle
figurante
qui s'évanouit
devant le cri
du singe.
retourner au corps
p. 6 et 7
PINOCCHIO
Carlo Collodi / Joël Pommerat
toute la lumière sur pinocchio
ÉLOGE D'UN PETIT MENTEUR
p. I à IV
les bibliothèques
de l’odéon
"CONRAD m'a ouvert deux
mondes" PAR MATHIAS ÉNARD
met ici la ­
tragédie à des interrogations nouvelles, quand ce n'est pas à
de brûlantes investigations. La mise en
scène sera cette tentative qui déclare
sa propre mégalomanie : redoubler le
tragique pour le décharger dans le physique ; elle sera un instrument de précipitation linguistique : plus nombreuses
seront les chutes, plus grandes seront
nos garanties d'efficacité vis-à-vis de
la scène. Mais l'effet produit ne sera
pas celui d'une pantomime magmatique : la structure exacte de la fable
restera de toute façon reconnaissable,
telle qu'Eschyle l'a dessinée. Les mots
du poète seront eux aussi entendus,
mais dans une perspective qui ne les
place plus au premier plan.
BOURDIEU,
la sociologie de haute lutte
dire la honte en sept mots
p. 8 et 9
une scénographe
sur le gril
BERTHIER fait peau neuve
p. 10
AVANTAGES ABONNÉS
Invitations et tarifs préférentiels
p. 11
ACHETER ET RÉSERVER
SES PLACES
Trois éléments m'ont attiré vers
L'Orestie d'Eschyle. Avant tout, la
violence inaccoutumée qui s'y
exprime – remplaçant quelque pensée,
religion ou logos que ce soit – dans
sa forme extrême et apodictique.
Ensuite, la magnificence terrienne de
Clytemnestre, dont le ventre souffre
une inexplicable offense. Enfin, la
forme complexe de la faute d'Oreste,
si surchargée de beauté et de malheur.
p. 12
le coupe-papier à l'odéon
SOUTENEZ LA CRÉATION
THÉÂTRALE
LE CERCLE DE L'ODÉON
La matière essentielle de cette trilogie
est la violence, prise dans son cercle et
au sommet de sa virulence. Toutes les
limites sont dépassées, d'autant plus
que tout se joue au sein d'une famille.
L'efficacité du texte lui-même vacille,
paradoxalement, devant la répétition
obsessionnelle de la violence qui remplit toutes choses d'elle-même, comme
d'une substance. La parole poétique
n'est qu'une pâle figurante qui s'évanouit devant le cri du singe, devant
la langue écorchée, l'éructation de la
gorge tranchée – autrement dit, devant
la réalité ontologique de la violence
qui, pareille à un suc vénéneux, envahit toutes choses. […]
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Le moteur indifférencié qui met tout en
mouvement, c'est la violence : non pas
la poésie violente, non pas une violence
poétique, mais une violence muette
Xxxxxxxxxxxxx © Xxxxxxxxxx
© Luca del Pia
et sordide qui agit pour son propre
compte. Le langage poétique, les situations dramatiques viennent ensuite ; ce
ne sont là que des inventions dont la violence s'est dotée. Qu'on ne voie pas là
son apologie. Il s'agit – au-delà de toute
certitude rhétorique sur la tragédie qui
ne distingue en son centre que la seule
poésie – d'adresser à la tragédie une
interrogation en partant de ce qu'elle
voudrait camoufler sous les jupes de
l'ambiguïté. Mais «la tragédie est l'équilibre d'une balance qui n'est pas celle
de la justice, mais de la violence», selon
l'anthropologue René Girard. […]
La scène se présente comme un vieux
plateau de cinéma tombé dans l'oubli
et qu'envahit la poussière. Les personnages de cette Orestie vont et viennent
comme des spectres, répétant avec
l'obstination de l'épuisement des
scènes que plus personne ne tourne.
Mais la représentation, comme par
autocombustion, éclate en excès, en
coups sensoriels, en visions suprêmes,
pour ensuite se refermer derrière la vitre
d'un quelconque peep-show souterrain.
C'est comme une représentation jouée
par les morts et que les caméras, abandonnées, ne captent plus. C'est, en fin de
compte, une représentation qui ne veut
pas se voir. Toute la vieille scénographie
est parcourue par des conduites et des
tubes d'oxygène. C'est un système,
aussi complexe qu'archaïque, de gaines
et d'embouts respiratoires pendus à
des tubes qui distribuent aux acteurs
de l'air, de l'eau chaude et des sérums
physiologiques. La scénographie du
plateau suggère une atmosphère de
sanatorium qui sent le médicament, la
moisissure, le pansement, dans une
obscurité brune et poussiéreuse, une
odeur de sauna pour dames. Le palais
des Atrides devient le lieu d'accueil
d'une blessure destinée à ne jamais se
refermer. Par effroi, par nécessité, elle
oppose une cure au pourrissement de la
matière dramaturgique qui retombe sur
elle. La caméra qui tourne sans bobine
La
représentation
éclate en excès,
en coups
sensoriels…
ne signifie pas autre chose : le regard,
circulaire et aliéné, revient toujours à la
même scène de ce studio aporétique.
En arrière-fond, d'avilissantes rumeurs
– d'inopportunes colonnes sonores. Des
lumières souterraines et sordides qui
«surprennent» des éclairs d'action. Du
fumier, des flaques d'huile, des précipitations de cendres : le foyer du cinéma
Eschyle. Paillettes et singes. Poumons et
lapins en plâtre. Ampoules qui explosent,
cuir. ­Jabberwocky de Lewis Carroll et
femmes obèses. Poussière rouge et
Wagner distordu. Loques en charpie et
pleurnichements de peau trempée.
Asinus mysteria vehens.
Que la tragédie se fasse donc ânesse,
porteuse de mystères.
Texte inédit de Romeo Castellucci,
mai 1994 (traduit de l'italien par
Daniel Loayza)

© Luca del Pia (détail)
4
5
La trilogie en trois langues
2 – 20 décembre
Théâtre de l’Odéon 6e
ORESTIE
( une comédie
organique ? )
CORIFEO
Mio re, mio re,
come ti piango
dal fondo del cuore fedele !
Quali parole ti dico ?
Giace il tuo corpo in questo tessuto di ragno.
Ignominiosa morte ha preso il tuo respiro.
Ahimé, ahimé ! Ingannevole colpo mortale,
mano di donna ti vinse :
della tua donna, armata di scure a due tagli.
d’après Eschyle
de Romeo Castellucci
musique
Scott Gibbons
collaboration à la lumière
Marco Giusti
automatisations
Giovanna Amoroso
& Istvan Zimmermann
direction de la construction décors
Massimiliano Scuto
& Massimiliano Peyrone
Claudia Paola Castellucci et Romeo Castellucci :
Orestea (una tragedia organica ?)
avec
Simone Toni
NicoNote
Marika Pugliatti
Georgios Tsiantoulas
Loris Comandini
Marcus Fassl
Antoine Marchand
Carla Giacchella
Giuseppe Farruggia
ΧΟΡΟΣ
ἰὼ ἰὼ βασιλεῦ βασιλεῦ,
πῶς σε δακρύσω ;
φρενὸς ἐκ φιλίας τί ποτ᾽ εἴπω ;
κεῖσαι δ᾽ ἀράχνης ἐν ὑφάσματι τῷδ᾽
ἀσεβεῖ θανάτῳ βίον ἐκπνέων.
ὤμοι μοι κοίταν τάνδ᾽ ἀνελεύθερον
δολίῳ μόρῳ δαμεὶς δάμαρτος
ἐκ χερὸς ἀμφιτόμῳ βελέμνῳ.
durée estimée 2h30
production déléguée
Socìetas Raffaello Sanzio
coproduction Odéon-Théâtre de
l’Europe, Festival d’Automne à Paris,
MC2: Maison de la Culture de Grenoble,
Célestins – Théâtre de Lyon, Théâtre
Nouvelle Génération – Centre
dramatique national de Lyon, La rose
des vents – Scène nationale Lille
Métropole à Villeneuve d’Ascq,
Le Maillon – Théâtre de Strasbourg /
Scène européenne, Romaeuropa
Festival, TNT – Théâtre national de
Toulouse Midi-Pyrénées ; Théâtre
Garonne – scène ­européenne – Toulouse
avec le Festival d’Automne à Paris
Eschyle : Agamemnon, vv. 1489 ss.
© Socìetas Raffaello Sanzio
Retourner au corps
de l'Orestie
LE CORYPHÉE
Castellucci voulait réveiller la puissance d'un texte «anesthésié». Son adaptation de la
trilogie d'Eschyle creuse sa matière première, travaille tour à tour la force des mots et
celle des images pour un théâtre de sensations où Bacon n'est jamais loin…
certaines scènes de ce spectacle peuvent
heurter la sensibilité des plus jeunes, il est
déconseillé aux moins de 16 ans
«J'implore des dieux la fin de la souffrance...» Une voix, brisée par les parasites et l'émotion, lance son appel au
ciel, couverte par le sifflement de
chasseurs-bombardiers passant audessus d'une scène cubique, noire,
black box qui tient du ring, du cirque,
de la chambre de torture et de la tente
camouflée. Des rafales de mitraillettes
éclatent. Le bruit sourd d'explosions,
régulières comme les battements
d'un cœur, scande le premier volet
d'Orestea (una commedia organica ?)
de la Socìetas Raffaello Sanzio.
Romeo Castellucci, metteur en scène
d'Orestea (una commedia organica ?),
Paolo Guidi et leurs sœurs Claudia
et Chiara étaient à peine âgés de 20
ans, en 1981, quand ils ont fondé la
Socìetas Raffaello Sanzio. Ils ont
associé le mot latin societas, qui
évoque une société industrielle quelconque, au nom du peintre Raphaël
pour un faisceau de raisons : «La
forme parfaite, le nom du plus grand
des paquebots italiens et notre hostilité aux dénominations américaines
à la mode à l'époque.» Ils mènent un
travail patient de «pédagogie renversée» auprès d'enfants et d'adolescents. Une clef de leur travail est
là : «Notre travail a une relation avec
l'enfant. Étymologiquement, l'infans
est celui qui ne parle pas, comme
dans la deuxième partie d'Orestea
(una commedia organica ?).»
Le coryphée est un homme-lapinblanc, le lapin d'Alice aux pays des
merveilles, cagoulé. Suivi d'une portée de lapereaux en plâtre dangereusement explosifs. Pourquoi Alice ?
Parce qu'Alice est la sœur en sacrifice d'Iphigénie. Égisthe (sorti d'une
backroom fesses à l'air) va tenter de
faire parler l'homme-lapin. Chocs et
électrochocs. Paroles mécaniques.
Agamemnon peut entrer en scène,
jovial et tourbillonnant. Romeo
Castellucci a confié ce rôle à Loris, un
trisomique. «Ce n'est pas pour provoquer. C'est le texte qui est provocant. J'ai choisi Loris parce qu'il est un
monarque : il est hors de toute discussion. Et parce qu'il est innocent.» Le
metteur en scène estime que le texte
a été «anesthésié». «Il faut le creuser
pour en faire ressurgir les forces profondes. Retourner au corps et non pas
à l'antique, tout en étant rigoureux sur
le fond, sur les sources. Redécouvrir une communication élémentaire,
non pas intellectuelle, mais qui passe
directement par le système nerveux,
par les sensations, et redonne au
théâtre sa force et sa spécificité.» Le
texte, pris à la lettre, est ouvert aux
associations d'idées pour «en faire
sortir des figures, des visions». Si
Clytemnestre et Cassandre sont
obèses, «c'est parce que les femmes
pèsent sur le drame». Lorsque
Clytemnestre, en tutu, tient délicatement dans ses mains épaisses les
petits chaussons de son fils et crie son
nom d'une voix aiguë, cela sonne juste,
à pleurer.
La tragédie
est soumise
à la primauté
de l'œil. Un
œil éclectique,
contemporain.
La Socìetas joue avec les mots, avec
leur étymologie, avec leur histoire,
avec les images qu'ils suscitent. Les
arts plastiques infiltrent, débordent
parfois Orestea (una commedia
organica ?). La tragédie est soumise
à la primauté de l'œil. Un œil éclectique, contemporain. Engageant dans
le tableau vivant. Avec un goût de la
citation dont l'excès paraît venir à
l'encontre des principes proclamés
par le metteur en scène, comme
lorsqu'il fait éclairer à plusieurs
reprises la scène par la lampe du
Guernica de Picasso. Plus discret (parce que ready-made) est le
recours à une roue de bicyclette de
plus en plus petite, inscrivant, via
Duchamp, le rétrécissement des
destins.
Si un nom, un seul, devait apparaître à
l'affiche de cette Orestea (una commedia
organica ?), à l'égal de celui d'Eschyle, ce
serait celui de Francis Bacon, dont on se
souvient qu'il est l'auteur d'un triptyque
inspiré par la tragédie. Nombre de scènes,
jusqu'au tremblement généralisé du plateau à la fin des Choéphores, lorsque le
monde vient à se dérober sous les pieds
des acteurs, sont «baconiennes». À aucun
moment, il ne s'agit d'illustrer ses peintures. Plutôt de leur enlever leurs cadres
dorés et leurs vitres inviolables. Romeo
Castellucci peut alors citer directement
le peintre : une chaise de bureau ne cesse
de tourner sur elle-même ; quatre singes
figurent les Érinyes ; une charogne de
chèvre au centre de l'espace redonne
souffle à Agamemnon !
Dans la seconde partie, presque muette,
blanc sur blanc, qui regroupe Les
Choéphores et Les Euménides, le metteur en scène peint d'après le nu. Ses
corps talqués renvoient à Carrare. Le
blanc habille et désamorce toute tentation de voyeurisme. Entre obésité et
anorexie, des silhouettes indésirables
s'affrontent. De loin. D'invraisemblables
machines les menacent, les soutiennent.
Les héros sont sous assistance respiratoire. Ils touchent à l'art corporel dans
sa version dure, celle des actionnistes
viennois, mais dans une forme scénique
mimée, presque apaisée. Répétition de
lents simulacres. Pas de sang, du vermillon en pluie.
Ô mon roi, mon roi,
comment puis-je te pleurer ?
Que peut dire mon cœur d'ami ?
Pris dans la toile de l'araignée,
tu expires dans cette agonie sacrilège.
Ô malheur, malheur - cette couche ignoble
où tu gis, dompté par une mort perfide
sous les coups à double tranchant de ton
épouse.
Eschyle : L'Orestie, tr. fr. D. Loayza, Flammarion, coll. GF, 2001
Extrait de Ces années Castellucci,
de Jean-Louis Perrier, éd. Les Solitaires
Intempestifs, 2014, pp. 23-26
(texte d'abord paru dans Le Monde
du 8 juillet 1997)
© Socìetas Raffaello Sanzio (détail)
les
bibliothèques
6 Pinocchio
7
décembre 2015
Joël pommerat / Entretien avec Éric Soyer
OD ON
toute la lumière
sur Pinocchio
Depuis près de vingt ans, Éric Soyer conçoit les scénographies et éclairages sophistiqués
des spectacles de Joël Pommerat. À l'occasion de cette reprise, il évoque, pour La Lettre,
leur complicité et leur travail de création autour du personnage imaginé par Carlo Collodi.
Quand vous êtes-vous rencontrés, vous
et Joël Pommerat ?
J'ai connu Joël il y a une petite vingtaine
d'années. C'était au Théâtre de la Main
d'Or. Il y présentait ses premiers travaux,
d'abord Les Événements, sur lequel
je n'ai pas travaillé, puis Pôles. J'ai
commencé avec lui sur Treize étroites
têtes, créé aux Fédérés, à Montluçon.
Depuis, il y a eu dix-huit spectacles et
deux opéras tirés de ses pièces.
Comment avez-vous abordé ce projet
Pinocchio ?
Eh bien, tout simplement, Joël est venu
me voir un jour et m'a dit : «On va faire
Pinocchio.» J'ai lu le livre de Collodi,
et je dois dire que j'ai été surpris. J'ai
découvert un roman d'aventures, avec
des tas d'épisodes, des quantités de
lieux… À partir de ce texte, il fallait
qu'on se fixe des rendez-vous à traiter
dans la narration. Des rendez-vous,
c'est-à-dire les points sur lesquels
on va se retrouver pour les traiter
ensemble et, à partir de là, inventer
le spectacle. Joël distribue des axes
de recherche communs à chacun des
protagonistes du staff artistique. Je
travaille sur la lumière et les espaces,
et au son, il y a François Leymarie,
qui conçoit, Antonin Leymarie, qui
compose, et Grégoire Leymarie, qui
diffuse et mixe les sources en jeu.
On définit un dispositif lumineux et
sonore, des matières et, à travers des
improvisations plus ou moins orientées
avec les comédiens en costumes, la
grammaire du spectacle commence
à se mettre en place. Les comédiens
nourrissent profondément son écriture.
On savait qu'il serait question du
passage de l'inanimé à l'animé. Alors,
comment on commence ? Avec une
marionnette, pour passer ensuite à
l'humain ? Ou avec l'humain dès le
début ? Autre rendez-vous : la baleine.
Comment est-ce qu'on s'y prend pour
faire ressentir l'isolement au milieu de
la mer ? Et pour montrer l'intérieur de
la baleine ? Même chose pour la fée,
qui est évidemment un personnage-
clef. Même chose pour le nez… Donc,
à ce stade du travail, on a retenu des
éléments de Collodi, des thèmes, mais
sans essayer d'établir un découpage
précis et trop contraignant.
Des idées entrent en collision, et,
finalement, nous découvrons nousmêmes quelque chose. Joël dit souvent
qu'il cherche l'image juste. Celle qui
recrée une réalité, qui va faire passer
un peu de réel reconstruit.
cernés de noir. Une espèce d'allégorie
du clown blanc, qui serait aussi un
forain ou un phénomène de foire. Un
individu étrange, un peu inquiétant.
Pour Pinocchio, il intervient dès le
démarrage du spectacle.
Cette élaboration progressive et
collective demande aux comédiens
une très grande souplesse…
Comment attaquez-vous le travail des
lumières ?
Et vos éclairages se construisent en
même temps que ces recherches ?
Évidemment. Une grande souplesse de
la mémoire et une grande capacité de
proposition. Eux aussi sont pris dans cet
entonnoir, où on commence très large
et où on définit de plus en plus à mesure
qu'on avance. Comme chaque membre
de l'équipe de création, ils alimentent
le processus et sont alimentés en
retour. Il faut qu'ils absorbent peu à
peu la structure, tout en étant prêts
à faire les ajustements et les coupes
nécessaires… Ils doivent à la fois
mémoriser et oublier. Mais c'est aussi
cela qui fait la justesse des spectacles.
Jusqu'à très tard, on laisse des portes
ouvertes. On préserve des possibles,
sans chercher à faire une belle image.
Avec Joël, on se parle en termes
d'atmosphères, d'ambiances, de
lieux, d'époques. Pour Cendrillon,
il voyait quelque chose de plutôt
contemporain, tournant autour du
verre, de la transparence. Pour
Pinocchio, par contre, il fallait un
climat un peu suranné, au sens d'une
mémoire populaire ancienne, mais qui
ne soit pas totalement localisable : un
univers des années 50 ou 60, un peu
fellinien, un peu forain. On s'est dès
le début concentré sur le cirque, les
roulottes… Et donc, sur certains types
de personnages. Comme celui qu'on
appelait le bateleur, un être étrange,
grimé en blanc, torse nu, les yeux
En fait, la lumière arrive très tôt et
très tard. Longtemps avant le premier
rendez-vous au plateau, je suis allé
visiter des fabricants de matériel
d'éclairage spécialisés dans les fêtes
foraines. J'ai rassemblé des images,
j'ai cherché différents grains de lumière.
Le premier travail consiste toujours
à réunir un ensemble d'ingrédients,
d'objets à fabriquer. Ils sont nécessaires
pour les phases de recherche scénique.
C'est aussi un de nos premiers sujets de
discussion avec Joël. Ses spectacles
sont dépouillés, mais il y a souvent
une multiplicité d'accessoires au
plateau. Dans Pinocchio, la tournette
de la chanteuse en est un. 
Portrait de Joseph Conrad par Jeanne Detallante
© Costume3pièces.com
© élisabeth Carecchio
8 Les Bibliothèques de l'Odéon
II
Les Bibliothèques de l'Odéon III
9
vu par mathias énard
«conrad m'a ouvert
deux mondes»
Pierre bourdieu,
la sociologie de haute lutte
À l'occasion de la sortie au Seuil du premier volume de Sociologie générale - Cours au
Collège de France 1982-1984, Patrick Champagne et Julien Duval se penchent sur le
Initié dès l'adolescence à la littérature et aux voyages par
sociologue du déterminisme social, exégète critique des privilèges de classe.
Joseph Conrad, l'auteur de Zone et de Boussole partagera
sur la scène de l'Odéon son goût pour l'écrivain britannique.
Quelles nouvelles de votre Conrad,
Mathias énard, depuis que vous êtes
venu nous en parler à l'Odéon, au salon
Roger Blin, en novembre 2012 ?
Depuis 2012, mon Conrad, comme
vous dites, mon cher Conrad n'avait
pas beaucoup de raisons de changer,
puisqu'il est l'un de mes auteurs de
chevet depuis l'adolescence. J'ai juste
ajouté un détail à son portrait. Dernièrement, j'ai eu l'occasion de passer à
Marseille. J'en ai profité pour aller voir
la maison qu'il a habitée à son arrivée,
alors qu'il n'était encore qu'un tout
jeune marin de dix-sept ans. C'est dans
une petite rue tout près du port, dans
un quartier qui n'a pas souffert de la
guerre. J'ai trouvé amusant d'imaginer
que celui qui s'appelait encore Józef
Teodor Konrad Korzeniowski aurait
pu opter pour la marine française et
choisir de devenir un auteur français...
Pourtant, il est tellement britannique.
Aussi britannique que Stevenson, né
à Édimbourg, ou que Kipling, né à
Bombay. Et en même temps, il vient
d'ailleurs, de très loin. Mais on ne peut
pas présager des destins. Un mousse
polonais est devenu un grand écrivain anglais, mais auparavant, il aura
été Marseillais d'adoption, il parlait le
français depuis l'enfance, et il aura
navigué quatre ans sous pavillon de
la République. Tout est toujours possible dans une vie.
Pourquoi Conrad vous est-il si cher ?
Au cœur des ténèbres a été un de
mes premiers chocs de lecteur. Je
lisais pour voyager, pour échapper à ma chambre, et Conrad m'a
ouvert deux mondes en un. Le premier, c'est celui qu'on appelle le vaste
monde. De ce point de vue, Conrad
a été pour moi ce que Fenimore
Cooper a peut-être été pour lui. Avec
ses récits maritimes, il m'offrait l'immensité. Je suis entré dans Conrad
par la voie de la mer, et ses premiers
romans m'ont fasciné. Mais en même
temps, il me faisait pénétrer dans le
monde de l'écriture. Plus tard, j'ai lu
ses œuvres «terrestres», qui m'ont
passionné sur un autre plan, pour la
maîtrise spectaculaire de l'art narratif dont elles témoignent. Il y a chez
lui une science très maîtrisée de l'ellipse, du non-dit, des descriptions
brèves extraordinairement efficaces,
du détail significatif... J'admire aussi
sa capacité à décrire des milieux très
différents. Il y a dans ses romans une
diversité humaine assez stupéfiante.
L'Agent secret, par exemple, propose
des ambiances très inattendues, très
loin de ce qu'on attendrait superficiellement de Conrad. Il y décrit Genève
avec une ironie et un sens satirique
réjouissants. Son humour est une
arme d'autant plus puissante qu'il
n'est jamais désopilant. Ses sarcasmes ont l'intelligence précise d'un
acte chirurgical.
Votre écriture, comme celle de Conrad,
se nourrit d'un rapport entre écriture
et voyage, ou entre écriture et franchissement des frontières, à commencer par celles du mal. Je me trompe ?
Merci ! Mais le monde de Conrad me
semble beaucoup plus vaste que le
mien. Il a mis à profit une pax britannica,
ou peut-être coloniale, pour explorer
un empire mondial. Il a visité aussi
bien des territoires français qu'une
Amérique du Sud en pleine mutation.
Et il a vérifié au passage que le temps
des grands élans, des grandes découvertes, était fini. L'une de ses grandes
intuitions est que le monde est désormais fermé. Je sens toujours chez lui
ce qu'on pourrait appeler l'échec de
l'inconnu. Vu de loin ou de haut, le
voyage conradien débouche souvent
sur une déception ou une amertume.
Conrad est né en 1857, l'année des
Fleurs du mal. Lui aussi a voulu aller
«au fond de l'inconnu pour trouver du
nouveau», mais comme Baudelaire, il
en est revenu. Il en rapporte un nouveau regard, une sorte de désenchantement qui subvertit «l'inconnu». La
mer n'est jamais chez lui un grand paysage rêvé, une occasion de déployer
des fastes lyriques. Elle est un lieu
d'affrontement, une frontière en soi,
une «ligne d'ombre» à franchir – pas du
tout un élément plastique pour peintre
ou pour poète, mais une zone neutre,
révélatrice, par laquelle vérifier ce que
l'on est.
Se souvenir de Pierre Bourdieu, c’est
d’abord se rappeler une allure physique et un maintien du corps qui
n’étaient qu’à lui et en disaient long
sur son rapport au monde et sur sa
pensée. C’était par exemple un plissement des yeux tout ensemble malicieux et amical, où perçait une pointe
de moquerie préventive. C’était une
inflexion de la voix tour à tour inquiète
et assurée, où l’accent de son Béarn
natal était soigneusement camouflé
(ce qu’il se reprochait parfois). C’était
toute une impatience des mains et des
de tous – dans les milieux bien dotés
tout au moins. Sa pensée bien souvent irritait. Ses modèles explicatifs
participant d’une théorie puissante
étaient jugés trop massifs et quelque
peu arrogants. C’est que sa sociologie critique était impitoyable pour ceux
qui abusaient de leur pouvoir et de leur
position. Débusquant chez eux l’imposture, il pourfendait sans relâche les
«intellectuels médiatiques» ou ceux
qui, dans l’université, perpétuaient un
savoir tout scolastique. De là, envers
lui, des haines souvent violentes et qui
doigts qui pointait, la belle voix aidant,
les idées fortes et les concepts audacieux – Bourdieu aimant à ajouter que
l’analyse, pour être sérieuse, pourrait
demander des heures et des heures.
Or, dans la théorie du sociologue, l’incorporation de traits sociaux hérités
par l’individu était un point crucial. Et,
pour qui avait le bonheur de l’approcher et savait un peu décoder, il y avait
matière à traduire le Bourdieu physique en Bourdieu psychique. Ainsi de
son sens du travail et de la lutte («la
sociologie est un sport de combat»).
Ainsi des origines modestes exprimées dans une manière de timidité
comme dans le souci généreux des
dominés de toute espèce. De quelques
mots adressés à ces derniers, travailleurs, jeunes ou femmes, il aimait à
donner le conseil d’analyser leur situation pour ne pas se laisser avoir.
Et pourtant ce Pierre Bourdieu séduisant et séducteur était loin d‘être aimé
pouvaient même entraîner avec elles
les victimes de l’imposture régnante.
Des étudiants, par exemple, ou certains journalistes ou encore un public
plus large se cabraient lorsqu’on leur
exposait une théorie qui mettait tout
l’accent sur l’origine de classe ou sur
l’histoire familiale comme facteurs
déterminants des existences.
Dès ses premiers ouvrages, Bourdieu
parla ainsi de reproduction sociale et
des avantages accordés aux «héritiers». Ce qui renvoyait les moins dotés
à un destin comme écrit par avance. Et,
cependant, Bourdieu ne niera jamais
l’existence effective d’une «marge de
liberté». Voyons-le écrire dans ses
admirables Méditations pascaliennes :
«La dépendance de toute action symbolique efficace à l’égard des dispositions préexistantes se rappelle encore
dans les discours ou les actions de
subversion qui, comme les provocations et toutes les formes de rupture
Est-ce que ce post-romantisme désenchanté de Conrad explique l'acuité du
«nouveau regard» qu'il porte sur la violence du monde ?
Conrad, au cœur de Au cœur des
ténèbres, fait dire à Kurtz un seul
mot répété : «L'horreur. L'horreur». Et
Marlow, le narrateur, nous rapporte
cette parole. Marlow et Kurtz sont
aussi indissociables qu'un prophète
et son témoin – le second porte en
quelque sorte l'horrible évangile
inversé du premier. Et ce message
qu'il nous rapporte, cette «horreur»,
sont indicibles. La vérité du néant,
Marlow nous la laisse entrevoir dans
ses effets – têtes coupées, corps mutilés – plus qu'il ne la formule. Comment
dire cela, quelle forme face au nihilisme ? Conrad est l'un des premiers
à voir le défi que «l'horreur» jette à la
langue. Aujourd'hui, en ce début d'un
siècle qui semble vouloir encore battre
des records en la matière, on pourrait
croire que son œuvre en est affaiblie.
Je crois exactement le contraire. Il est
un modèle de lucidité, un homme de
son temps et du nôtre. Ce n'est pas un
hasard si on continue à le lire autant
aujourd'hui.
Djan Seylan, un arrêt de bus dans le
quartier de Taksim à Istanbul (Turquie),
1989 (détail) © Djan Seylan / adoc-photos
Mathias Énard
est romancier. Grand admirateur de
Conrad, il a commenté Au cœur des
ténèbres dans le cadre d’une série associant
un écrivain contemporain à un classique GF
(Flammarion, 2012). Dernier roman paru :
Boussole (Actes Sud, 2015).
couverture de
Victory de Joseph Conrad,
Random House Publisher, 1915
Grande salle
exils
présenté par Paula Jacques
Joseph Conrad
Propos recueillis par Daniel Loayza
Paris, septembre 2015
vu par Mathias Énard
textes lus par Jean-Damien Barbin
lundi 14 décembre / 20h
iconoclaste, ont pour fonction et en
tout cas pour effet d’attester en pratique qu’il est possible de transgresser
les limites imposées et en particulier
les plus inflexibles, celles qui sont inscrites dans les cerveaux.» (Seuil, coll.
Liber, 1997, p. 279). Invitation à chacun
de nous d’y aller de sa rupture avec
l’ordre au terme d’une analyse critique
résolue.
De formation philosophique, Pierre
Bourdieu a refondé la sociologie
dans l’urgence et l’a fait depuis une
observation de la société algérienne. Il
s’est ainsi progressivement doté d’un
équipement qui associait étroitement
théorie et pratique et aima parler par la
suite de la «boîte à outils» qu’il mettait
à la disposition de quiconque acceptait de faire de la science sociale une
arme d’interprétation et de lutte. Avec
Bourdieu, nous nous sommes donc
mis à raisonner en termes de champ,
d’habitus, de capital social et de capital symbolique ou encore de disposition et de distinction, d’autonomie et
de jeu. En particulier, il nous a appris
à ne plus percevoir l’art ou la littérature comme pratiques désincarnées
de création pure mais en tant qu’espaces de concurrence en vue de la
détention d’un pouvoir et de l’imposition d’un goût.
Dans cette ligne, Pierre Bourdieu
s’est aventuré sur le terrain politique
mais avec précaution. «Une révolution
ratée, disait-il aux étudiants de 68, se
paye très cher.» Mais il n’a pas cessé
d’appeler de ses vœux la venue d’une
«gauche de gauche», d’une gauche
combattant en tout domaine l’inégale
répartition des biens et avantages
ou refusant ces «classements», qui
sont en eux-mêmes des abus de pouvoir. C’est l’immense leçon que nous
laisse ce penseur de la radicalité que
fut l’auteur de La Distinction ou de La
Domination masculine.
Jacques Dubois
Paris, septembre 2015
Salon Roger Blin
penser ; passé, présent
animé par Catherine Portevin
Pierre Bourdieu
une introduction à la sociologie générale
avec Patrick Champagne & Julien Duval
Jeudi 10 décembre / 18h
Jacques Dubois
est docteur en Philosophie et Lettres
de l’Université de Liège, professeur de
littérature française et spécialisé dans la
sociologie du champ littéraire.
Auteur entre autres de Pour Albertine.
Proust et le sens du social (Seuil, 1997).
Dire la honte en sept mots
novembre / DÉCEMBRE
Affront public ou jugement introspectif… Marc Crépon, spécialiste
de philosophie politique et morale contemporaine à l'École
normale supérieure, interroge les visages de la honte.
Salon Roger Blin
10
Pinocchio 11
7
LECTURE
Pour Louis de Funès
de Valère Novarina mardi 3 & mercredi 4 novembre / 18h
5 – 20 décembre
Ateliers Berthier 17e
lu par Frédéric Le Sacripan
Autrui
Il appartient à Sartre d’avoir donné dans L’Être et le Néant (1943) une
analyse incontournable de ce que la honte nous apprend de notre relation à
autrui : «La honte, dans sa structure première est honte devant quelqu’un. Je
viens de faire un geste maladroit ou vulgaire : ce geste colle à moi, je ne
le juge ni ne le blâme, je le vis simplement, je le réalise sur le mode du
pour-soi. Mais voici tout à coup que je lève la tête : quelqu’un était là
et m’a vu. Je réalise tout à coup toute la vulgarité de mon geste et j’ai
honte […]. Or, autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même :
j’ai honte de moi tel que j’apparais à autrui. Et, par l’apparition même
d’autrui, je suis mis en mesure de porter un jugement sur moi-même comme sur
un objet, car c’est comme objet que j’apparais à autrui.»
Grande salle
PINOCCHIO
SCÈNEs IMAGINAIREs animé par Arnaud Laporte
Carte blanche à Angélica Liddell vendredi 6 novembre / 20h
Éloge d'un petit
menteur
Carte blanche à Romeo Castellucci samedi 5 décembre / 14h30
Salon Roger Blin
DIRE LA HONTE Écrivaine et auteure de livres pour enfants, Agnès Desarthe
animé par Marc Crépon
Honte et catastrophe jeudi 12 novembre / 18h
cultive une méfiance toute naturelle pour Pinocchio, un
conte qui leur déconseille de raconter des histoires…
Salon Roger Blin
L'EUROPE DES ARTISTES
J'interviens ici en tant que Madame
Tout-le-monde et, avec l'esprit de
contradiction qui me caractérise, je
vais commencer par répondre à une
question qu'on ne m'a pas posée. Il
y a quelque chose dans l'histoire de
Pinocchio qui m'a toujours gênée, au
point de m'empêcher d'aller y voir de
plus près. Les contes pour enfants,
j'en ai beaucoup lu, j'en lis encore.
Mais devant Pinocchio, rien à faire, je
ressens une sorte de méfiance. Je suis
donc très heureuse que le spectacle de
Joël Pommerat, que je n'ai pas encore
découvert, me donne l'occasion de
changer de point de vue !
présenté par Martine Méheut
Catastrophe
À quelques années d’écart, Günther Anders (en 1958) et Kenzaburō ōé (en 1963)
rencontrent les survivants en sursis d’Hiroshima ; et ce que l’un et l’autre
décrivent comme la seule attitude légitime qu’appelle leur souffrance
– mais cela vaut de toutes les guerres, des massacres et des génocides –
est une honte irrésistible. Ainsi le premier décrit-il dans les termes
suivants le sentiment qu’il partage avec les autres membres de la délégation
internationale, dont il fait partie : «Vous allez vous demander de quoi était
fait ce sentiment identique chez nous tous […] : [il] consistait dans le fait
que nous avions honte les uns devant les autres, et, plus exactement, que
nous avions honte d’être des hommes.»
Humiliation
Il arrive que la honte soit indissociable d’une humiliation dont le souvenir
ne cesse de nous hanter. Lisant les pages que consacrait l’essayiste
autrichien Jean Améry à la torture, le philosophe Avishai Margalit fait la
même analyse : «L’humiliation représente une expérience constitutive. Elle
conditionne le fait que nous puissions nous considérer comme une personne
humiliée, de même que l’échec complet d’un projet qui nous tenait à cœur peut
nous amener à nous considérer comme un individu raté. L’humiliation, au sens
fort, parce qu’il s’agit d’une attaque fondamentale contre ce que nous sommes
en tant qu’être humain, devient un élément constitutif de notre être.»
Rougeur / pâleur
Dans une célèbre lecture talmudique intitulée «Mépris de la Torah comme
idolâtrie», Levinas rappelle la violence extrême qu’il y a à faire pâlir
de honte le visage du prochain. Mais cela se dirait tout aussi bien de la
rougeur : «Très importante aussi, la gravité attachée, dans le dire de Rabbi
Eléazar Hamodaï, à l’acte d’infliger la honte à autrui. Faire pâlir le visage
de l’autre homme est comparé ailleurs au meurtre. Dans "Baba Metsia", 58b,
“Quiconque fait pâlir de honte le visage de son prochain en public se compare
à un assassin.” Ce refus du sang dans la pâleur des joues serait aussi
horrible qu’une effusion de sang.»
Regard sur les arts plastiques
avec Yvon Lambert samedi 14 novembre / 17h
Regard sur l'opéra
avec Lukas Hemleb samedi 12 décembre / 17h
Studio Gémier
XXIe scène / nouvelles voix contemporaines
une proposition de Sophie Loucachevsky
Linda McLean lundi 16 novembre / 19h
Salon Roger Blin
PENSER ; PASSÉ, PRÉSENT
animé par Catherine Portevin
Roland Barthes
une vie à l'œuvre jeudi 19 novembre / 18h
Pierre Bourdieu
une introduction à la sociologie générale jeudi 10 décembre / 18h
avec Patrick Champagne & Julien Duval
Salon Roger Blin
LECTURE
Paroles de soldats
d'Hubert le Roux & Antoine Sabbagh
vendredi 20 novembre / 18h & samedi 21 novembre / 15h
lu par Victoire Du Bois, William Edimo, Ambroise Sabbagh, Pierre Yvon
Salon Roger Blin
LECTURE
Pinocchio
de Carlo Collodi samedi 28 novembre / 15h
à partir de 8 ans
extraits lus par Thibault de Montalembert
© élisabeth Carecchio
 L'arbre foudroyé du début en
est un autre. Il y a des scènes dans
une salle qui est un hommage à La
Classe morte de Kantor… Idéalement,
les accessoires sont immergés dans
Grande salle
EXILS
animé par Paula Jacques
Joseph Conrad lundi 14 décembre / 20h
vu par Mathias Énard
textes lus par Jean-Damien Barbin
Grâce à
l'émerveillement
du public, on
a les moyens
d'aborder des
questions qui
peuvent être
graves.
Solidarité
Pourquoi avons-nous eu le sentiment, tout au long de l’été, que les disparus
de la Méditerranée, les morts d’Eurotunnel, les noyés de la mer Égée, les
tergiversations interminables des dirigeants européens étaient la honte de
l’Europe et qu’une partie de celle-ci rejaillissait sur nous ? La honte ici,
dans son ambivalence même, avait un double visage : celui de l’abandon, du
laisser-mourir et celui de leur refus. L’Europe nous faisait honte, parce
que le discours sécuritaire de ses dirigeants s’apparentait à un consentement
meurtrier. Mais ce sentiment que nous continuons d’éprouver renvoie aussi à
une responsabilité et affirme l’exigence solidaire d’une attention, d’un soin
et d’un secours.
Violence
L’ambivalence de la honte tient à son lien intime avec notre expérience
de la violence. D’un côté, elle constitue l’un des sentiments premiers
qu’appellent, de partout, la vulnérabilité et la mortalité d’autrui. Parce
qu’elle fonde notre appartenance au monde, il est juste de l’éprouver pour
échapper à l’indifférence. Mais d’un autre côté, il n’y a pas de blessure
plus destructrice imposée à l’autre que de lui imposer la honte, publiquement
ou en privé.
Salon Roger Blin
DIRE LA HONTE
tarifs
Grande salle
Plein tarif 10€ / Tarif réduit 6€
Salon Roger Blin
Tarif unique 6€
XXIe scène
entrée libre sur réservation
[email protected]
CARTE
LES BIBLIOTHÈQUES DE L’ODÉON
Carte 10 entrées 50€
Certaines manifestations ne sont pas
accessibles avec la carte, du fait de tarifs
exceptionnels
date limite d’utilisation : 30 juin 2016
01 44 85 40 40 theatre-odeon.eu
conçu et animé par Marc Crépon
Aux origines de la honte
Jeudi 15 octobre / 18h
Honte et catastrophe
Jeudi 12 novembre / 18h
Le premier détail qui me frappe, dans
cette histoire de Pinocchio, c'est celui
que tout le monde retient : ce fameux
nez qui s'allonge. Quelqu'un ment et
ça se voit. Ce n'est pas seulement
didactique, c'est d'une cruauté
proprement terrifiante. Un enfant est
sur la sellette, et il est pris en défaut,
humilié. Il est le petit sauvage qu'on va
éduquer… Normalement, dans un conte,
on est du côté de l'enfant et ce sont
les adultes qui font les bêtises ou qui
commettent les crimes. Là, l'enfant est
la cible de la critique. C'est très curieux.
Cette ironie aux dépens du plus faible
et du plus innocent est d'une férocité
étrange.
avec Tiphaine Samoyault
suivez-nous
#Bibliodeon
l'image et font tellement partie de sa
substance qu'on peut ne plus y penser.
S'ils attirent l'attention du public sur
eux, ce doit être uniquement pour le
conduire ailleurs. Nous donnons des
indications, l'imaginaire de chacun fait
le reste.
Pour faire réfléchir, vous faites d'abord
rêver ?
C'est ce qui permet à Joël d'aborder
des problèmes profonds. Y compris
quand il s'adresse aux enfants. Il les
prend au sérieux. Le choc esthétique
permet même de faire passer la
violence : grâce à l'émerveillement
du public, on a les moyens d'aborder
des questions qui peuvent être graves.
La mort de la mère, dans Cendrillon.
Ou l'attitude de Pinocchio envers son
père. Il y a un moment où le pantin
devient un vrai petit tyran. Il fallait
faire sentir que Pinocchio a un côté
odieux, pulsionnel. Le miroir que Joël
tend aux enfants n'est pas toujours
flatteur. La difficulté consiste à ne
pas faire de cadeaux au personnage,
sans pour autant tomber dans le
moralisme, et tout en permettant
aux enfants de faire le rapport avec
eux-mêmes. Pinocchio doit tirer tout
seul les leçons de ses aventures et le
public doit en faire autant de son côté.
Ce n'est pas simple, vu le rapport de
Pinocchio à l'autorité : dès qu'il se
trouve confronté à elle, il s'enfuit… Du
coup, ses difficultés s'aggravent sans
cesse, jusqu'à ce que sa fuite l'amène
à une impasse, au fond du ventre de
la baleine !
Propos recueillis par Daniel Loayza
Paris, septembre 2015
éric Soyer
Scénographe, créateur de lumières, il
accompagne le processus d'écriture
de différents metteurs en scène,
chorégraphes et compositeurs sur les
scènes d’Europe. Il collabore avec Joël
Pommerat depuis 1997. Plusieurs fois
nommé aux Molières, il a remporté en
2008 et 2013 le Prix du meilleur créateur
d'éléments scéniques, décerné par le
Syndicat de la Critique.
Et qui doit passer par le mensonge pour
grandir. On ne doit pas y rester, mais
il faut bien faire cette erreur-errance
du mensonge, ne serait-ce que pour
découvrir qu'on peut être autre qu'on
n'est.
Mais dans Pinocchio, ce qui est très
spécial, c'est que le défaut moral soit
lié à une altération physique qui le
rend immédiatement perceptible. Le
mensonge de Pinocchio se voit comme
le nez au milieu du visage… Pour un
enfant, l'idée que son être soit ainsi
transparent est insupportable. Un
mensonge, c'est aussi un masque ou
un abri : vous ne me voyez pas, vous
n'avez pas le droit de me voir. Pinocchio,
lui, est privé de tout droit de réserve,
de toute intimité dans la découverte
de la transgression. Heureusement
qu'il ment quand même ! C'est ce qui
le rend héroïque. Que serait un enfant
qui n'essaierait pas de raconter des
histoires, et d'abord à soi-même ?
Qu'est-ce que ça veut dire, «dire la
vérité» ? Dire ce qu'on a fait, mettre en
mots ce qui a eu lieu ? La vérité, toute
la vérité et rien que la vérité ? Mais
pour quelqu'un qui écrit, ce lien-là
– quelque chose arrive, tu le racontes –
est complètement emmêlé, tout sauf
immédiat. Aucun chemin, aucun tunnel,
aucun fil ne fait passer du matériau à la
narration, rien sauf un saut dans le vide.
Pinocchio est un récit particulièrement
Ensuite, il est souvent question de
métamorphose dans les contes. Des
douloureux pour quelqu'un qui se
humains sont changés en bêtes, des
demande tout le temps : «Qu'est-ce que
princes en crapauds, des prix de
je fais du réel» ? Parler, c'est déformer,
beauté deviennent des sorcières… c'est mentir – mais est-ce que la beauté
Dans Pinocchio, il est question d'une
ne rachète pas l'inexactitude 
? La
marionnette qui est transformée en
question de l'imposture, dans Pinocchio,
petit garçon, et je trouve ce cas de
est cruciale. En racontant ses salades,
figure particulièrement angoissant. «il se la raconte» aussi, comme on dit.
Pinocchio, c'est du bois qui devient chair. Mais c'est une étape…
Il y a en yoga un enseignement que je
Inversement, dans Casse-Noisette, un
petit garçon est devenu une figurine, trouve charmant. Devant telle posture
mais, au fond, c'est la même horreur :
compliquée, certains maîtres vont
celle d'un enfant devenu objet.
vous dire : allez aussi loin que vous
pouvez dans votre geste, même si ce
Voilà pourquoi Pinocchio, pour moi, a
n'est presque rien – mais imaginezvous et voyez-vous dans la réussite
un statut doublement marginal dans
complète. C'est un mensonge qu'on
l'univers des contes : parce que son
héros est sur la sellette et parce qu'il
se fait à soi-même, mais qui contient
est un enfant-objet. Bien sûr, Pinocchio
un enseignement : dans ce mensonge,
est l'histoire d'un «enfant» tenu à l'écart
la réalisation du projet, la joie qu'elle
de l'enfance réelle ou de plein exercice, donne, est déjà présente en germe. Il
et raconte comment cet écart est
y a de cela dans l'auto-idéalisation du
finalement annulé. Mais je reste sur
petit garçon, ou de la petite marionnette.
l'impression qu'être humain serait
Le mensonge par anticipation peut être
un pas dans la bonne voie. Si Pinocchio
dès lors quelque chose qui se mérite
– comme si le conte nous disait qu'au
ment, c'est qu'il n'est pas de bois… Voilà
fond Pinocchio ne sera aimé que s'il est
la leçon que j'en retiens.
bien sage. L'amour serait conditionnel,
l'enfance serait conditionnelle – comme
Propos recueillis par Daniel Loayza
certaines formes de liberté.
Paris, septembre 2015
Pinocchio a un côté chevalier errant,
ses erreurs font l'histoire. Il résiste à un
modèle moral. C'est sans doute là ce
qui fait le succès de ses aventures : ce
conte est aussi un roman de formation
et un roman picaresque, il fait voir qu'on
ne naît pas enfant modèle, on le devient
– d'ailleurs, une fois qu'on l'est devenu, il
n'y a plus d'histoire. Mais c'est quoi, un
enfant modèle ? C'est d'abord un enfant,
quelqu'un qui grandit tant bien que mal.
Agnès Desarthe
Pour les enfants, elle a publié à l'École des
Loisirs une trentaine de titres.
Pour les adultes, elle a signé aux éditions de
l'Olivier une dizaine de romans. Le dernier
paru, Ce cœur changeant, vient de remporter
le prix littéraire du Monde 2015.
Agnès Desarthe est également nouvelliste,
essayiste (Comment j'ai appris à lire, Stock,
2013) et traductrice de l'anglais.
d’après Carlo Collodi
de Joël Pommerat
spectacle pour tous, à partir de 8 ans
collaboration artistique
Philippe Carbonneaux
scénographie et lumière
Éric Soyer
collaboration à la lumière
Renaud Fouquet
costumes
Marie-Hélène Bouvet
collaboration aux costumes
Élisabeth Cerqueira
& Jean-Michel Angays
compositions musicales
Antonin Leymarie
son
François Leymarie
Grégoire Leymarie
& Yann Priest
avec
Myriam Assouline
Sylvain Caillat
Pierre-Yves Chapalain
Daniel Dubois
Maya Vignando
durée 1h15
production
Compagnie Louis Brouillard
coproduction
Espace Malraux – Scène nationale de
Chambéry et de la Savoie, Centre
Dramatique Régional de Tours, Théâtre de
Villefranche – Scène conventionnée Rhône
Alpes, La Ferme de Bel Ébat – Guyancourt,
Théâtre Brétigny – Scène conventionnée du Val d’Orge, Gallia Théâtre – Scène
conventionnée de Saintes, Théâtre
National de Bordeaux Aquitaine, Les
Salins – Scène nationale de Martigues,
Théâtre du Gymnase – Marseille, CNCDC –
Châteauvallon, MC2 : Maison de la Culture
de Grenoble, Cavaillon – Scène nationale,
Automne en Normandie, CDN de
Normandie – Comédie de Caen
la Compagnie Louis Brouillard est
conventionnée et reçoit le soutien du
Ministère de la Culture / DRAC Île-deFrance et de la Région Île-de-France
Joël Pommerat est associé au Théâtre
National – Bruxelles et à l’Odéon-Théâtre
de l’Europe. Il fait partie de l’association
d’artistes de Nanterre-Amandiers
les textes de Joël Pommerat sont édités
chez Actes Sud-Papiers
créé le 8 mars 2008 aux Ateliers Berthier
de l’Odéon-Théâtre de l’Europe
Salon Roger Blin
LECTURE
Pinocchio de Carlo Collodi
extraits lus par Thibault de Montalembert
à partir de 8 ans
samedi 28 novembre / 15h
Une scénographe
sur le gril
13
9
rencontre avec Isabelle Neveux, régisseur-scénographe de l'Odéon
Plongée dans l'un des métiers du théâtre et détour en coulisses avec notre
collaboratrice, qui a participé aux travaux d'aménagement des Ateliers Berthier.
Berthier
fait peau neuve
un équipement
technique modernisé
Au départ, le site de Berthier
était un entrepôt de décors.
Sa transformation en salle de
spectacle s'est faite assez
vite et à moindre coût, pour
accueillir nos activités pendant
la rénovation du Théâtre de
l'Odéon. Cet été, nous avons
engagé les travaux nécessaires
pour doter le bâtiment d'un gril,
en vue d'améliorer les conditions
de montage et de sécurité, un
projet lancé par le directeur
technique. Mon rôle a surtout
consisté à étudier en amont les
réponses à notre appel d'offres,
puis à collaborer avec l'agence
de scénographie (Michel Fayet —
Changement de vue) dont le projet
a été retenu...
QU'EST-CE QU'UN GRIL ?
© Benjamin Chelly
Un gril, à l'origine, c'est un
caillebotis en planches de
bois ajourées, situé, dans les
théâtres à l'italienne, au-dessus de la scène et assez solide
pour qu'on puisse circuler dessus et y fixer des poulies. On les
fabrique aujourd'hui en métal,
avec une maille qui est ici de
50 millimètres. Sur ce gril, on
peut poser des moteurs et faire
passer des câbles ou des fils. On
peut aussi installer des équipements au niveau supérieur, sur
les rails qu'on appelle le «faux
gril», ou par en-dessous...
... Il y aura sous ce gril des
porteuses – ces barres mobiles
sur lesquelles on accroche les
décors et les lumières. Jusqu'ici,
à Berthier, nous n'avions que des
passerelles, des accroches et des
ponts roulants. Les passerelles
transversales vont rester, mais
seront plus pratiques.
Désormais,
le
gril
s'étend
à 12,80 mètres de hauteur sur
quasiment toute la surface de la
salle, 13 mètres de large sur
31 mètres de long. Il a fallu
faire un compromis : pour gagner
de la hauteur scénique, un gril
élevé est préférable, mais il
faut aussi que les techniciens
puissent aller et venir sans
difficulté sous le toit à deux
pentes. Nous avons pris comme
repères ces superbes poutres
horizontales qui courent d'une
pente à l'autre : on doit pouvoir
passer dessous sans se cogner
la tête ! Elles sont d'origine,
comme toute la ferme de la toiture.
Tout ce qui est métallique a été
ajouté depuis.
Cette installation est assez
nouvelle dans un lieu modulable
de format «halle», très apprécié
actuellement des créateurs. En
Europe, il est encore assez
rare de trouver dans ces salles,
qui sont souvent des bâtiments
industriels
recyclés,
des
équipements d'une telle qualité,
comparables à ceux d'un théâtre
à l'italienne. Les porteuses
de Berthier seront de dernière
génération
et
déplaçables.
Chacune sera reliée à un système
de pilotage central. L'ensemble
des moteurs sera synchronisable
et
assez
silencieux
pour
fonctionner pendant le jeu. Ces
moteurs pourront être accrochés
où l'on veut sans difficulté, alors
qu'auparavant, les régisseurs
devaient se harnacher, s'accrocher
à un fil de sécurité, et souvent
travailler en porte-à-faux depuis
un pont roulant ou une passerelle
élévatrice.
Je me suis formée aux Beaux-Arts et parallèlement à la fac d'architecture. Puis j'ai
appris mon métier de scénographe à l'école du Théâtre national de Strasbourg. En
1997, j'ai conçu un décor pour l'Odéon : Penthésilée. Le directeur technique de l'époque,
Alain Wendling, m'a proposé d'intégrer l'équipe comme régisseur-scénographe.
J'ai été surprise. Il me proposait d'entrer dans un service technique, alors qu'en
règle générale, on considère plutôt les scénographes-concepteurs comme de doux
rêveurs. C'est normal : ils privilégient l'imaginaire, ils n'ont pas à se poser d'abord des
problèmes de réalisation. Mais après six ans à concevoir et à construire des décors,
j'avais travaillé un an dans le domaine de l'image de synthèse. C'est ma maîtrise des
logiciels graphiques en 3D, après un stage à l'École des Gobelins, qui m'a finalement
fait revenir au théâtre.
Mon travail consiste à faire les plans des scénographies, mais plus généralement à
faire le trait d'union entre l'artistique et le technique, pour aider les scénographes à
rendre leur projet viable. Il y a des concepteurs qui présentent un travail très abouti,
avec des maquettes et des plans. Avec d'autres, il y a beaucoup plus de choses à
préciser. Certains dessinent et peignent leurs projets, et c'est à nous d'élaborer leur
vision à partir du rendu graphique. Dans le cas des metteurs en scène qui arrivent avec
des idées de décor, il faut même commencer par définir les dimensions générales…
C'est toujours un travail très interdépendant, qui circule des ateliers de construction à
la direction technique, entre les différentes régies. Je tiens à jour le plan de référence,
à mesure que les plans se précisent en construction, en lumière… en centralisant tout
sur le logiciel que j'utilise.
Il m'est arrivé aussi d'être sur les deux terrains à la fois, côté conception et côté
construction. C'était une position un peu stressante, mais amusante… J'ai travaillé
par exemple sur Quatre à quatre, un projet de Georges Lavaudant à Berthier, sur
son Orestie, ou sur Lenz avec Marie-Paule Trystram au Petit-Odéon. Aujourd'hui, au
théâtre, je préfère travailler en équipe sur un plan plutôt technique. Le côté artistique,
je le développe autrement. Cet engagement me convient. J'avais toujours eu envie
d'un travail collectif, et je suis attachée à la notion de métier, d'artisanat. Mon père
était soudeur. J'aime les ateliers.
un accueil redéployé
Nous avons profité de ce chantier estival pour remanier les
zones d'accueil du public. Les
circulations ont été revues. Un
voile de béton a été abattu au
fond de la librairie, de façon à
ouvrir un nouvel accès au café.
Nous avons aussi amélioré les
espaces techniques, les vestiaires du personnel, les locaux
destinés à l'entretien, sans oublier l'accessibilité pour les
personnes à mobilité réduite.
Le bar et les comptoirs ont été
remis aux normes. Comme toujours, il a fallu jongler avec
toutes sortes de paramètres de
sécurité et de contraintes plus
ou moins lourdes, budgétaires,
esthétiques
ou
fonctionnelles. Les responsables du bâtiment préfèrent du solide qui
soit d'entretien facile, certains veulent du mobilier qui
ait de la classe, d'autres aiment
un style plus brut, inspiré de la
Schauspielhaus de Marthaler à
Zurich… Le public jugera !
© Benjamin Chelly
Propos recueillis par Daniel Loayza,
Paris, septembre 2015
14
15
Avantages abonnés
Acheter et réserver ses places
En lien avec ses partenaires culturels,
l’Odéon-Théâtre de l’Europe propose à ses abonnés des offres privilégiées.
Ouvertures de location tout public
Calendrier
ORESTIE (une comédie organique ?) représentations du 02/12 au 20/12
7 octobre theatre-odeon.eu • 15 octobre guichet / téléphone
DÉCEMBRE
2015
Offres dans la limite des places disponibles
La Colline – théâtre national
Théâtre – Automne italien
Septembre – octobre
La saison 15/16 de La Colline s’ouvre sous le signe de l’Italie avec
l’ultime chef-d’œuvre de Luigi Pirandello, Les Géants de la montagne, mis
en scène par Stéphane Braunschweig, suivi de trois créations, en italien
surtitré en français, d’artistes majeurs : Ce ne andiamo per non darvi altre
preoccupazioni (Nous partons pour ne plus vous donner de soucis) et Reality, de
Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, et L’Origine del mondo, de Lucia Calamaro.
Odéon 6e Berthier 17e
Grande salle / salon Roger Blin
mer 2Orestie 20h
jeu 3Orestie 20h
ven 4Orestie 20h
sam 5Orestie 20h Pinocchio 20h
Romeo Castellucci / Scènes imaginaires 14h30
dim6 Relâche Pinocchio 15h
lun 7
mar8 Orestie 20h Pinocchio 20h
mer9 Orestie 20h Pinocchio 15h / 20h
jeu10 Orestie 20h Pinocchio 20h
Pierre Bourdieu / Penser ; passé, présent
18h
ven11 Orestie 20h Pinocchio 20h
sam12 Orestie 20h Pinocchio 20h
L'Europe des artistes – Lukas Hemleb / Regard sur l'opéra
17h
dim13 Orestie 15h Pinocchio 15h
lun14
Joseph Conrad – Mathias énard / Exils
20h
mar15 Orestie 20h Pinocchio 20h
mer16 Orestie 20h Pinocchio 15h / 20h
jeu17 Orestie 20hPinocchio 20h
ven18 Orestie 20h Pinocchio 20h
sam19 Orestie 20h Pinocchio 20h
dim20 Orestie 15hPinocchio 15h
pinocchio représentations du 05/12 au 20/12
4 novembre theatre-odeon.eu • 12 novembre guichet / téléphone
les bibliothèques de l’odéon
Vous pouvez réserver pour l'ensemble de la saison 15/16
Par téléphone
01 44 85 40 40 du lundi au samedi de 11h à 18h30
Au guichet du Théâtre de l’Odéon
du lundi au samedi de 11h à 18h
> Abonnement «Automne italien», tarif préférentiel 3 spectacles : 36€ / 27€ (- de 30 ans)
> Réservation au 01 44 62 52 52 / sur www.colline.fr
> La Colline – théâtre national, 15 rue Malte-Brun, Paris 20e
Abonnés
vacances scolaires
zone A
zone B
zone C
Si vous n’avez pas choisi vos dates de spectacles :
«L'opéra doit aller de l'avant»
© Sascha Weidner
Entretien avec Stéphane Lissner, directeur de l'opÉRa national de paris
– Vous pourrez réserver vos dates, à tout moment de l’année.
Merci de vérifier la disponibilité de la date choisie auprès du service
abonnement avant de retourner votre contremarque.
– Nous vous conseillons de choisir vos dates avant l’ouverture de
réservation tout public, afin que nous puissions vous placer au mieux.
Vous avez la possibilité de réserver des places supplémentaires
aux dates d’ouverture de location de chaque spectacle.
Vous bénéficiez d’un tarif réduit pour Les Bibliothèques de l’Odéon, en grande salle.
Contact 01 44 85 40 38 [email protected]
Au théâtre comme à l'opéra, comment faire pour que les publics s'approprient
réellement les lieux qu'ils fréquentent ?
Les Géants de la montagne © élisabeth Carecchio
Je vois trois problèmes, dont le premier est évidemment le prix de la place.
Nous menons une politique tarifaire et nous proposons des abonnements très
avantageux, mais cela réclame un budget conséquent. Le deuxième paramètre
est la nature de l'offre artistique. à l’Opéra, il existe des œuvres que l'on monte
pour le plaisir sensuel qu'offre la musique, pour le divertissement, comme
L'Élixir d'amour de Donizetti, tandis que d’autres, comme Moïse et Aaron
de Schönberg, permettent d'aborder des sujets de réflexion très profonds.
Comment faire pour que nos publics, déjà conquis ou à venir, s'intéressent à
ces deux extrêmes  ? Troisième problème : l'institution, qui est un monument. Le
simple fait d’y entrer peut être impressionnant. Mais les choses ont beaucoup
changé. Nous accueillons 900 000 personnes par saison !
Philharmonie de Paris
Concert - Prometeo de Luigi Nono
Le 7 décembre à 20h30
Orchestre symphonique du SWR Baden-Baden et Freiburg, Ensemble
recherche, Schola Heidelberg, SWR Experimentalstudio de la Fondation
Heinrich Strobel. Direction : Ingo Metzmacher et Matilda Hofman
Le compositeur vénitien Luigi Nono définissait son Prometeo comme une
«tragédie de l’écoute». Cette fresque à la fois puissante et intime, agrégeant
l’électronique et les sons directs, nécessite la présence de deux chefs.
Fragments sonores, superpositions de voix oscillant entre chant et parole,
échos lointains, créent un fascinant maëlstrom poétique.
Alors, ce diagnostic étant posé, comment comptez-vous agir ?
Ma première réponse a été la création d’une plateforme digitale, «3 e scène».
Nous avons invité des créateurs de tous domaines à réaliser des films de
toute nature, pourvu qu'il y soit question de musique, de danse, de voix ou de
l’architecture de l’Opéra. Une trentaine de projets ont été lancés. La moitié sont
disponibles en ligne depuis le 15 septembre. Mathieu Amalric a tourné avec la
soprano Barbara Hannigan sur le thème de la voix, du souffle. Glen Keane, le
grand dessinateur de Disney, est venu saisir les mouvements d’une danseuse…
Le but est de créer un pont entre l'institution et les nouvelles générations du
grand public. L'Opéra, pour qui sait voir, c'est tout un monde.
Et comment faites-vous pour consentir de tels efforts tarifaires ?
Nos charges artistiques sont énormes, c'est vrai, mais je connais la gestion
de ce genre de maisons. Nous avons par ailleurs de grands sponsors qui nous
accompagnent – notamment sur «3 e scène» avec Van Cleef & Arpels et JeanFrançois Dubos, ou sur les avant-premières, soutenues par BNP Paribas.
La saison 2015-2016 est la première où vous avez la haute main sur la
programmation. Quel esprit comptez-vous insuffler ?
Dans une époque comme la nôtre, il faut aller de l'avant, utiliser les immenses
savoir-faire de nos 1 700 salariés. Produire davantage ne veut pas dire avec plus
de moyens – plutôt moins, comme tout le monde par les temps qui courent…
Nous allons engager dix-huit nouvelles productions, neuf opéras et neuf
ballets, dont un spectacle pour les 5-12 ans, Vol Retour, signé Katie Mitchell.
Propos recueillis par Daniel Loayza, Paris, septembre 2015
ORESTIE (une comédie organique ?)
du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h, relâche le lundi
relâche exceptionnelle le dimanche 6 décembre
pinocchio
du mardi au samedi à 20h, les mercredis à 15h et 20h
le dimanche à 15h, relâche le lundi
Tarifs
Spectacles
Théâtre de l’Odéon 6e
Ateliers Berthier 17e
> Tarif préférentiel : 50€ en catégorie 1
> Par téléphone au 01 44 84 44 84 ou sur internet avec le code «PROMETEO»
> Philharmonie 1, Grande salle, 221 avenue Jean-Jaurès, Paris 19e
Et qu'en est-il du rapport à la scène réelle ?
J'avais expérimenté, à la Scala de Milan, une mesure qui a eu énormément de
succès : réserver des avant-premières aux moins de 28 ans. À Paris, treize
soirées leur seront dédiées, soit 280 000 places à 10 euros. À l'exception d'un
ballet classique, il ne s'agira que de créations signées Forsythe, Castellucci,
Anne Teresa de Keersmaeker, Calixto Bieito…
Représentations
Opéra – Moses und Aron
d'Arnold Schönberg
Mise en scène Romeo Castellucci
Les 23 et 31 octobre à 19h30
Le 6 novembre à 19h30
Figure capitale de la musique du
XXe siècle, Schönberg signe avec
Moses und Aron son dernier opéra
et écrit une partition d’une grandeur
tragique exceptionnelle. Philippe
Jordan guide l’ensemble des forces
musicales de l’Opéra national de
Paris, dans une mise en scène
signée Romeo Castellucci.
> Réduction de 20%* dans les trois
premières catégories
> operadeparis.fr, onglet «Billetterie», en
indiquant le code ODEON152 dans le champ
«Offres en partenariat»
> au 08 92 89 90 90 (0,34€ TTC/min),
aux guichets du Palais Garnier, ou de l'Opéra
Bastille, en précisant le code ODEON152
> Opéra Bastille, Place de la Bastille, Paris 12e
* Offre non rétroactive et non cumulable
Plein tarif
Moins de 28 ans, bénéficiaire du RSA*
Demandeur d’emploi*
Public en situation de handicap*
Élève d’école de théâtre*
Lever de rideau (2h avant la représentation)
Pass 17* (dates spécifiques)**
* Justificatif indispensable lors du retrait des places
série 1
série 2
série 3
série 4série unique
40 € 28 € 18 €
20 € 14 € 9 €
14 €
7 €
36 €
18 €
22 € 18 € 12 €
—
— 8 €
—
—
—
—
—
—
8 €
—
6 €
—
22 €
8 €
—
22 €
—
—
10 €
22 €
Contacts
Groupe d’adultes, amis, association,
comité d’entreprise,
01 44 85 40 37
[email protected]
Public de l’enseignement
01 44 85 41 18
[email protected]
Public de proximité des Ateliers Berthier,
public du champ social et public en
situation de handicap
01 44 85 40 47
[email protected]
**Pinocchio / 10 décembre / 20h
Pinocchio
Moins de 15 ans*
Accompagnateur (un par enfant)
—
—
—
—
—
—
*Justificatif indispensable lors du retrait des places
Les
l’Odéon
Bibliothèques deThéâtre
de l’Odéon 6eTarifs exceptionnels
© Graziano – Arici
Retrouvez toutes
les offres du moment
sur la page «Avantages»
de notre site internet
Grande salleRoger Blinsérie 1
Plein tarif
Carte Les Bibliothèques de l’Odéon
Abonné Odéon
Moins de 28 ans, bénéficiaire du RSA*
Demandeur d’emploi*
Public en situation de handicap*
Élève d’école de théâtre* (2h avant la représentation)
* Justificatif indispensable lors du retrait des places
10 €
—
6 €
6 €
6 €
6 €
série 2 série 3série 4
6 €
—
6 €
6 €
22 € 18 € 12 €
11 € 9 €
6 €
11 € 9 €
6 €
11 € 9 €
6 €
8€
4€
4€
4€
6 €
6 €
11 €
11 €
4€
4€
9 €
9 €
6 €
6 €
Carte Les Bibliothèques de l’Odéon
Carte 10 entrées 50€
Carte à utiliser librement ; une ou plusieurs
places lors de la même manifestation.
Réservation fortement conseillée.
Certaines manifestations ne sont pas accessibles
avec cette carte — tarifs exceptionnels.
Un tarif préférentiel est cependant consenti aux
abonnés Odéon et aux détenteurs de la Carte
(cf. tarifs exceptionnels, voir ci-contre).
Le Coupe-Papier
à l'Odéon
2 octobre – 1er novembre / Odéon 6e
16
IVANOV
d’Anton Tchekhov
mise en scène Luc Bondy
10 octobre – 21 novembre / Berthier 17 e
VU DU PONT
d’Arthur Miller
mise en scène Ivo van Hove
création
Les librairies du théâtre changent : l'institution spécialiste des arts de la scène s'installe
au Théâtre de l'Odéon et aux Ateliers Berthier. Son libraire, Johann Vitiello, nous raconte
son métier et ses envies.
10 – 15 novembre / Odéon 6e
la programmation des Bibliothèques de
l'Odéon, il y aura davantage de romans,
d'essais, d'ouvrages de sciences humaines.
L'offre sera plus ouverte qu'au CoupePapier, s'adressant à un public qui vient au
théâtre mais s'intéresse aussi à autre chose.
Cela permettra surtout de renforcer les liens
qui existent déjà entre le Théâtre de l'Odéon
et le Coupe-Papier, puisque beaucoup de
gens pensent qu'on peut acheter des places
à la librairie ! Quelqu'un pourra demander un
livre le soir à l'Odéon, je le lui expédierai le
lendemain car il y a de grandes chances que
l'ouvrage recherché soit au Coupe-Papier.
Ça sera un nouveau service, personne
ne fait ça actuellement. Les spectateurs
pourront aussi commander un livre dont il
aura été question pendant une rencontre
des Bibliothèques. Les spectateurs doivent
pouvoir se dire «C'est possible ! Ici je peux
enrichir ma bibliothèque en fonction de
ce dont on m'a parlé à l'Odéon.» Quand
quelqu'un me demande quelque chose
qu'il cherche depuis des années, je lui dis
toujours «oui, c'est possible». Je trouve, je
ne trouve pas, mais d'abord je cherche. Être
libraire c'est d'abord offrir ce service.»
PRIMERA CARTA DE SAN PABLO
A LOS CORINTIOS
d’Angélica Liddell
avec le Festival d’Automne à Paris
2 – 20 décembre / Odéon 6e
ORESTIE
(une comédie organique ?)
d’après Eschyle
de Romeo Castellucci
avec le Festival d’Automne à Paris
5 – 20 décembre / Berthier 17e
PINOCCHIO
d’après Carlo Collodi
de Joël Pommerat
6 janvier – 13 février / Odéon 6e
RICHARD III
de William Shakespeare
mise en scène Thomas Jolly
28 janvier – 23 avril / Berthier 17 e
OTHELLO
de William Shakespeare
mise en scène Luc Bondy
création
17 mars – 13 mai / Odéon 6e
PHÈDRE(s)
L’Amour de Phèdre de Sarah Kane ;
Euripide, Sénèque, J. M. Coetzee
mise en scène Krzysztof Warlikowski
création
13 – 29 mai / Berthier 17 e
NOUS SOMMES REPUS
MAIS PAS REPENTIS
Ils sont mécènes de la saison 2014-2015
(Déjeuner chez Wittgenstein)
de Thomas Bernhard
mise en scène Séverine Chavrier
Soutenez
la création théâtrale
en rejoignant le
Cercle de l'Odéon
20 mai – 25 juin / Odéon 6e
LA MOUETTE
d’Anton Tchekhov
mise en scène Thomas Ostermeier
3 – 25 juin / Berthier 17 e
LES PALMIERS SAUVAGES
d’après William Faulkner
mise en scène Séverine Chavrier
Information et contact
Pauline Rouer
[email protected]
octobre 2015 – juin 2016
5
LES BIBLIOTHÈQUES
DE L’ODÉON
Théâtre de l’Odéon
Place de l’Odéon Paris 6 e
Métro Odéon RER B Luxembourg
Ateliers Berthier
1 rue André Suarès (angle du Bd Berthier) Paris 17e
Métro et RER C Porte de Clichy
Salles accessibles aux personnes à mobilité réduite,
nous prévenir impérativement au 01 44 85 40 40
Toute correspondance est à adresser à
Odéon-Théâtre de l’Europe – 2 rue Corneille – 75006 Paris
@TheatreOdeon
theatre-odeon.eu
01 44 85 40 40
couverture : Orestie © Luca del Pia (détail) / Licences d’entrepreneur de spectacles 1064581 – 1064582
«Il y a quatre ans, le Coupe-Papier risquait de
fermer et son propriétaire, pour le relancer,
cherchait quelqu'un qui soit d'abord un
libraire, plutôt qu'un amoureux du théâtre.
C'est par la librairie théâtrale que je suis venu
au théâtre ! Il m'a fallu acquérir une culture
pointue très rapidement. Le Coupe-Papier
est né à l'époque de Jean-Louis Barrault
à l'Odéon, aujourd'hui c'est une institution,
avec un fonds très riche sur l'histoire du
théâtre, les textes contemporains, la danse,
les livres épuisés. Mon idée est qu'une
librairie doit être pleine de livres, je fais le
maximum pour qu'ils soient tous là. Des
gens viennent du monde entier ici. On a la
chance d'avoir encore beaucoup d'éditeurs
de théâtre en France, ce n'est pas souvent
le cas ailleurs. Un exemple, Angélica Liddell
a été éditée en France avant de l'être en
Espagne.
Pour l'Odéon, l'idée est d'établir une belle
librairie de théâtre, de nourrir le public autour
de la pièce, mais aussi de lui permettre de
trouver l'actualité du moment en littérature,
cinéma… La librairie de Berthier est plus
grande et le fonds de théâtre y sera
probablement plus étoffé. Dans le 6e, avec
Téléchargement