Dépistage des cancers
Objectifs :
¤ Argumenter les principes du dépistage du cancer.
¤ Décrire l'épidémiologie des 5 cancers les plus fréquents chez la femme (incidence,
prévalence, mortalité).
¤ Expliquer les principaux facteurs de cancérogenèse et leur incidence sur la prévention.
¤ Décrire l'histoire naturelle du cancer.
¤ Expliquer et hiérarchiser les facteurs de risque.
¤ Expliquer les principes de prévention primaire et secondaire.
Sommaire :
Faq 1 - Critères pour la mise en place d'un dépistage
Faq 2 - Cancer de l'ovaire
Faq 3 - Cancer de l'endomètre
Faq 4 - Cancer du col utérin
Faq 5 - Cancer du sein
Faq 6 - Faut-il mettre en place un dépistage du cancer du sein ?
Points essentiels
Faq 1 - Quels sont les critères pouvant justifier la mise en place d'un
dépistage ?
Certains cancers ont les caractéristiques d'une pathologie se prêtant au dépistage :
- gravité,
- fréquence dans l'absolu ou dans une population définie à forte incidence,
- phase pré-clinique longue où le diagnostic est possible (avec guérison),
- pathologie dont le diagnostic précoce augmente la curabilité.
Un test de dépistage doit avoir lui-même des caractéristiques particulières :
- économiquement viable ce qui suppose qu'il soit évalué,
- simple et acceptable pour la population,
- reproductible,
- fiable.
Ainsi tout oppose un test de dépistage et un test diagnostique :
Test Sujets Groupes Coût Précision Base
thérapeutique
Dépistage sains étendus faible 0 0
Diagnostic malades individu élevé élevée +
Un test de dépistage va être apprécié selon :
- sa fiabilité intrinsèque :
o Sensibilité = sujets ayant test +/ sujets malades => capacité à identifier les sujets malades,
o Spécificité = sujets ayant un test - / sujets sains => capacité à identifier les sujets sains,
o Sensibilité et spécificité sont des notions non prospectives,
o en cancérologie le choix du seuil de positivité privilégie la sensibilité :
- sa fiabilité extrinsèque : l'intérêt d'un test est fonction de :
o sa valeur intrinsèque,
o et de la prévalence de la maladie dans une population donnée,
o on définit ainsi des valeurs prédictives :
* positive : probabilité d'être malade avec un test +,
* négative : probabilité d'être sain avec un test –.
On peut donc résumer ces données par ce tableau :
Malades Sains
Test + a c (faux +)
Test - b (faux -) d
Total a + b c + d
Se = a / a+bjkklkkl VPP = a / a+c donne une certitude avant l'action diagnostique.
Sp = d / c+d fhkfkfkVPN = b / b+d donne une certitude avant la surveillance.
La prévention :
- primaire : consiste à empêcher l'apparition des cancers et donc doit agir sur les facteurs de risques,
- secondaire : vise à combattre la transformation de lésions bénignes en malignes,
- tertiaire : prévient les séquelles de la maladie et des traitements et concourt à réinsérer les
patientes.
Faq 2 - Quelle est l'incidence du cancer dans la population féminine ?
Le nombre de nouveaux cas / an / 100 000 personnes est de 400 chez l'homme et de 300 chez la
femme (approximativement).
Le cancer reste en France une pathologie grave intéressant la Santé Publique comme en témoignent
les chiffres de mortalité selon l'Inserm en 1994 :
Hommes Femmes Total
M. Cardio-vasculaires 76 807 (28.4%) 90 627 (36.4%) 167 434 (32.2%)
Cancers 87 537 (32.3%) 57 096 (23.0%) 144 633 (27.8%)
Accidents 27 413 (10.1%) 17 506 (7.0%) 44 919 (8.6%)
Troubles respiratoires 19 507 (7.2%) 17 652 (7.1%) 37 159 (7.1%)
Troubles digestifs 13 448 (5.0%) 12 073 (4.8%) 25 521 (5.0%)
Autres 45 976 (17%) 54 154 (21.7%) 100 130 (19.3%)
Total des décès 270 688 249 108 519 796
Rappelons le nombre de naissances en 2001 : 774 800 naissances.
Le taux standardisé de mortalité en France est de 253 / 100 000 habitants / an.
De manière identique, le cancer est une pathologie fréquente comme en témoigne l'incidence :
H
incidence
H †(Tx/100
000/an)
F
incidence
F †(Tx/100
000/an)
Sein 79 – 84.7 10 780 (36.7)
Colon
rectum 44.5 - 56 8 280 (29.6) 39 – 44.9 7 740 (26.3)
Utérus
(col et
corps)
30.3 - 33 3 083 (10.4)
Peau
(sauf baso-
cell)
14 – 29 782 (2.8) 12 – 29.8 741 (2.5)
Ovaire 11.1 - 12 3 212 (10.9)
Estomac 13.4 – 21 3 582 (12.8) 8.7 - 15 2 400 (8.2)
Poumons 51.1 – 66.6 19 784 (70.8) 4 - 9 3 331 (11.3)
TOTAL 349 – 409 87 537 (313.3) 275 - 320 57 096 (193.9)
Faq 3 - Faut-il mettre en place un dépistage du cancer de l’ovaire ?
1. EPIDEMIOLOGIE DESCRIPTIVE
L'incidence du cancer de l'ovaire est de 11 à 12 femmes / 100 000 femmes par an, ce qui correspond
à 3 000 nouveaux cas par an : on estime donc qu'1 femme / 85 présentera en France un cancer de
l'ovaire.
Le pic de fréquence est de 58 ans.
La mortalité de ce cancer est importante : 10,8 / 100 000 femmes / an, avec une survie globale à 5
ans de 35%. Ces mauvais résultats sont explicables en partie par le fait que 60% des cancers de
l'ovaire sont découverts à un stade évolué (stades III IV) et que si la survie à 5 ans des stades Ia est
de 80% celle des stades IV est de moins de 10%.
2. EPIDEMIOLOGIE ANALYTIQUE
Les facteurs étiologiques des cancers ovariens sont mal connus et semblent peser d'un poids
modeste (Risque Relatif = 2 pour la quasi totalité de ces facteurs, ce qui explique que l'on peine à
définir un profil de risque utilisable pour une politique de dépistage) : on distingue des facteurs liés à :
- l'environnement : talc et amiante,
- l'alimentation : la consommation de graisses animales, le café,
- les virus ourliens,
- la fertilité :
¤ un période ovulatoire prolongée : premières règles précoces et ménopause tardive,
pauciparité et première grossesse à terme tardive,
¤ l'allaitement artificiel,
¤ l'infertilité et les traitements inducteurs de l'ovulation ?
¤ à l'inverse, la contraception orale, l'hystérectomie et la ligature tubaire (probablement par le
biais d'une extinction ovarienne d'origine vasculaire),
¤ le contexte génétique est très étudié :
* 1 antécédent familial n'est retrouvé que dans 3% des cancers de l'ovaire (le Risque
Relatif est de 3,1),
* 1% des cancers ovariens sont liés :
- à un gène dominant autosomique à pénétrance variable
- rendant compte d'un risque de cancer ovarien de 50% si la mère est atteinte
- 3 syndromes sont décrits :
o ovaire isolé,
o sein et ovaire,
o Lynch II.
* d'autres cancers "génétiques" sont connus : syndrome de Peutz Jeghers, et
dysgénésies gonadiques avec Y.
3. HISTOIRE NATURELLE
Elle est mal connue : on invoque le rôle de l’ovulation entraînant un traumatisme de la coque
ovarienne et l’inclusion de fragments de cette coque dans le stroma ovarien où des influences
hormonales et celles de facteurs de croissance vont agir et concourir à la cancérisation.
Figure : ovulation avec rupture de la coque ovarienne, internalisation d'un fragment de coque
ovarienne et sa cancérisation sous l'effet des hormones et facteurs de croissance intra-ovariens.
La croissance serait lente puisqu’une tumeur d’un centimètre correspondrait à trois ans d’évolution.
L'extension se fait localement par extension péritonéale suivant les grands courants péritonéaux (le
long des gouttières pariéto-coliques et des coupoles diaphragmatiques), par atteinte de l'épiploon
flottant, et par voie lymphatique et hématogène par les ligaments ronds, lombo-ovariens et utéro-
ovariens vers les axes ilio-fémoraux et lombo-aortiques.
Figure : mode d'extension des cancers ovariens.
Sont décrites des formes de transition entre des lésions bénignes, Border-Line et malignes, des
lésions frontières de l’ovaire et même des carcinomes in situ de l’ovaire, mais il faut retenir
qu’actuellement l’histoire naturelle de ce cancer est mal connue.
4. DEPISTAGE
Il repose principalement sur l’échographie pelvienne et les marqueurs sériques, notamment le CA 125
; ce dépistage reste décevant en raison de la faible valeur prédictive de ces examens qui est de l’ordre
de 10 %, essentiellement lié au fait que la prévalence de la maladie est faible dans la population
générale et que la fréquence comparée des formations kystiques ovariennes bénignes est fréquente.
Figure : échographie pelvienne de kyste ovarien : l'échographie évoque un kyste organique, le
marqueur CA 125 est élevé : il s'agit d'un endométriome ovarien et non d'un cystadénocarcinome
ovarien.
Par ailleurs, on peut s’interroger sur l'impact de ce dépistage en terme de survie, car dès qu’une
lésion est visible ou bien exprime un marqueur CA 125, il s’agit déjà d’un cancer avéré dont le
traitement n’est pas constamment efficace.
5. PREVENTION
Elle est principalement secondaire concernant la castration prophylactique dans les formes familiales.
L’ovariectomie bilatérale réduit le risque de cancer de l’ovaire, mais le risque de carcinose péritonéale
après ovariectomie prophylactique est estimé à 1,8% chez les femmes à risque familial de cancer de
l’ovaire Ainsi le collectif d'experts réunis par l'Inserm recommande cette ovariectomie aux femmes
ayant un risque tumoral de plus de 40% (tandis qu'elle est envisageable si le risque est de plus de
20%), ayant eu le nombre d’enfants souhaité. Cette chirurgie ne doit pas être proposée chez les
femmes de moins de 35 ans ou de moins de 40 ans sans enfant, ou lorsque le risque tumoral est
inférieur à 5%. Cette décision doit être prise dans un cadre multidisciplinaire, avec un suivi
psychologique, après un délai de réflexion d’au moins trois mois, et le geste effectué par coelioscopie
sauf contre-indication, après une exploration soigneuse de la cavité abdominale, en enlevant
largement l’annexe, avec ensachage et en prévoyant une étude histologique. Enfin, une substitution
hormonale peut être discutée en tenant compte de son impact mammaire sur ce terrain particulier.
Chez les patientes à risque modéré, la contraception orale assure une protection ovarienne prouvée.
Faq 4 - Faut-il mettre en place un dépistage du cancer de l’endomètre?
1. EPIDEMIOLOGIE DESCRIPTIVE
L’incidence est de 13,6 pour 100.000 femmes par an, correspondant à 5,000 nouveaux cas annuels
en France (soit une femme sur 70 qui fera un cancer endométrial).
Le pic de fréquence est à 64 ans.
La survie globale à 5 ans des cancers de l'endomètre est de 71 à 84 % ; celles des stades précoces
stade I est de 80 % (ce qui correspond à 80 % des formes de découverte des cancers de
l’endomètre). A l’inverse, les stades IV ont un pronostic sombre à 5 ans avec une survie globale de 10
%.
2. EPIDEMIOLOGIE ANALYTIQUE
La cause principale des cancers de l’endomètre est une exposition estrogénique non ou mal
compensée par une séquence progestative :
- traitement estrogénique seul,
- Tamoxifène,
- obésité androïde (qui explique le terrain diabétique, hypertendu, hyper-uricémique volontiers
associé),
- une ménopause tardive avec une période périménopausique prolongée,
- des ovaires polykystiques,
- la pauciparité est fréquente sur ce terrain.
Sur le plan génétique, sont décrits des syndromes de Lynch II dans lesquels les cancers de
l’endomètre sont représentés.
La contraception orale semble avoir une valeur de protection.
3. DEPISTAGE
Les explorations endo-cavitaires, cyto ou histologiques, ont une faible valeur prédictive positive et un
obstacle cervical existe dans 10 à 20 % des cas chez ces patientes ménopausées, les rendant
inopérants.
Le test aux progestatifs (prescription de progestatifs durant 10 jours et exploration des patientes qui
saignent à l'arêt de cette séquence) longtemps utilisé est trop peu spécifique.
Actuellement, l’échographie semble être le meilleur examen, mais il n’est pas évalué en terme de
dépistage. On considère que lorsque l’épaisseur de l’endomètre est supérieur à 5 mm, il y a
pathologie. Dans ces cas-là, la valeur prédictive positive est de 30 % ; à l’inverse, cet examen est
surtout intéressant par sa valeur prédictive négative de 100 % lorsque l’endomètre est moins de 5
mm.
Figure : aspects d'endomètre normal (coupe longitudinale) chez un femme ménopausée et épaissie
(coupe transversale) en échographie vaginale.
Lorsqu'une échographie retient un endomètre d'épaisseur anormale, des explorations endocavitaires
sont indispensables : l'hystéroscopie (qui a supplanté l'hystérosalpingographie) permet de visualiser la
cavité utérine et de réaliser conjointement des prélèvements histologiques orientés.
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