Inégalités en santé: ne pas avancer, c'est reculer Étude MC prothèse totale

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MC-Informations
Analyses et points de vue
262
Périodique trimestriel de l’Alliance nationale des Mutualités chrétiennes
décembre 2015
Inégalités en santé: ne pas avancer,
c'est reculer
La lutte contre les inégalités en santé constitue un grand
défi. Les MC sont prêtes à le relever !
Étude MC prothèse totale
de hanche
Devenir invalide
150
Indice standardisé (pour l'âge, le sexe et la région)
130
Le département R&D de l’Alliance nationale des
Mutualités chrétiennes (MC) a analysé 85.000
prothèses totales de hanche (PTH) depuis 1990.
Les forces et les limites du modèle d’analyse ont
été analysées avec les chirurgiens, les hôpitaux
et les associations scientifiques. Les résultats
ont été présentés dans des congrès et dans les
hôpitaux. Ils ont été publiés dans des revues
scientifiques, MC-Informations et sur Internet.
La dernière étape de la démarche est de les présenter
aux patients et au grand public. C’est ce que nous
faisons dans cet article, pas seulement pour les coûts
des soins, mais aussi pour les éléments de qualité des
soins que nous avons pu récolter.
devenir invalide - Belgique 2012
143,2
140
devenir invalide - Belgique 2006
132,8
population de référence
120
117,7
113,2
110
105,4
100
104,7
92,0
90
80
70
91,7
80,0
population de référence (indice =100) :
titulaires MC entre 20 et 64 ans
1. inférieurs
2. bas
72,6
3. moyens
4. hauts
5. supérieurs
classes de secteurs statistiques de résidence
Enquête Énéosport
La mise en mouvement des aînés représente
un des facteurs de protection important permettant d’avancer en âge tout en maintenant
une qualité de vie optimale.
Proportion de réponses des répondants
affiliés à énéoSport, en fonction des
buts à pratiquer une activité sportive
(plusieurs réponses étaient possibles)
- Bien-être : 80%
- Esthétique : 8%
Étude urgences hospitalières
Ce sont les jeunes enfants, les personnes âgées, des populations plus précarisées ou ayant moins de revenus, comme les bénéficiaires de l’intervention
majorée, du revenu d’insertion sociale, les invalides qui ont davantage recours
aux urgences hospitalières.
Proportion de membres de la MC qui ont eu recours aux urgences hospitalières au
moins une fois au cours de l’année 2013 – quelques critères sociaux
30%
ensemble des membres MC
27,9%
- Santé (sans prescription) : 68%
26,0%
25%
- Santé (avec prescription) : 5%
- Créer relations : 53%
21,5%
21,4%
21,1%
20%
20,0%
18,7%
15%
13,8%
12,6%
10%
5%
0%
MUTU
ALITE
CHRE
TIENN
E
Ensemble des Bénéficiaires
membres MC de l'intervention
majorée
Bénéficiaires
du revenu
d'insertion
sociale
Handicapés
Invalides
Familles
chômeurs de
monoparentales longue durée
chômeurs de
longue durée
20-24 ans
chômeurs de
longue durée
25-29 ans
La solidarité, c’est bon pour la santé.
Éditorial
L’une des principales missions de notre service d’étude
consiste à examiner ce qui « se passe » dans le domaine
complexe des soins de santé et de l’incapacité de travail dans
notre pays, et de le rendre accessible et transparent pour
le lecteur. En 2015, la société n’admet plus qu’un chercheur
protège ses données vis-à-vis du monde extérieur, à moins
que ce ne soit pour des raisons de protection de la vie privée.
C’est ainsi qu’un juge a confirmé, lors d’un procès intenté
par Test-Achats contre l’État belge, que le Service public
fédéral Santé publique est obligé de révéler le résultat de ses
inspections de l’hygiène des mains dans les hôpitaux, plutôt
que de les consigner dans un vague rapport. La transparence
est nécessaire à l’amélioration de la qualité. C’est ainsi que
dans de nombreux pays, on a observé que la qualité dans les
hôpitaux ne s’améliorait qu’après la publication des résultats
hôpital par hôpital. À l’étranger, la « public disclosure » est
acceptée depuis longtemps et L’International Consortium for
Health Outcomes Measurement (ICHOM) indique d’ailleurs
clairement que la transparence est une composante
essentielle de la promotion de la qualité.
Voilà 15 ans, la Mutualité chrétienne publiait pour la première
fois les chiffres concernant la variabilité entre hôpitaux des
résultats des opérations de prothèses de hanche planifiées.
La collaboration fut intense avec le secteur et les chiffres
ont été régulièrement actualisés. Nous avons énormément
investi dans le feed-back aux hôpitaux. Mais de nombreuses
personnes nous ont reproché de ne pas révéler les chiffres
nominalement, hôpital par hôpital. Les membres de la MC
pouvaient toutefois contacter leur médecin-conseil pour
demander des informations concernant les hôpitaux de
leur région. Vu la tendance internationale à la transparence
dans les soins de santé et le fait que nous estimons que
non seulement nos membres, mais également les médecins
généralistes, ont droit à ces informations, nous publions
maintenant pour la première fois les données par hôpital de
notre étude sur les prothèses de hanche. La transparence
permet aux hôpitaux de comparer leur résultat à celui des
autres hôpitaux. Espérons qu'elle réduira la variabilité entre
hôpitaux et permettra d’améliorer la qualité, comme c’est le
cas à l’étranger. On parle en anglais à ce sujet de « Sunshine
disinfects ».
Dans le présent numéro, nous examinons également le profil
des personnes qui se rendent aux urgences, avec une attention
particulière pour les disparités régionales. Une comparaison
internationale révèle que le recours aux urgences n’est pas
significativement plus élevé en Belgique. Nous observons que
ce sont surtout les défavorisés, les invalides, les jeunes enfants
et les personnes âgées qui se rendent aux urgences. Dans les
deux tiers des cas, ils le font de leur propre initiative sans y être
2
envoyé par un médecin. D’autre part, on constate également
que posséder un DMG ou être inscrit dans un centre de santé
de quartier n’influence pas les résultats. Autre fait marquant,
44 % des visites ont lieu la nuit, le week-end ou lors des jours
fériés.
Une autre étude met en lumière les inégalités de santé en 2012,
en les comparant à celles mesurées en 2006. Les résultats
de cette étude se basent sur une analyse des données de
consommation de soins (nos données de remboursement)
par groupes sociaux (déterminés sur base des revenus par
secteur statistique). De nombreux indicateurs sont restés
stables entre 2012 et 2006, avec parfois même une amélioration,
comme l’augmentation du DMG, de l’usage des médicaments
bon marché et du tiers payant social. Pour d’autres indicateurs,
on constate un accroissement des inégalités, comme pour
les admissions en psychiatrie, l’usage des antidépresseurs
et le risque de devenir invalide. Cet accroissement survient
malgré une attention accrue pour la problématique et une
série de mesures positives pour combler le fossé en matière
de santé. Lutter contre les inégalités de santé reste donc un
défi majeur pour les prochaines années, d’autant plus à l’heure
de l’austérité budgétaire.
Outre l’analyse des données de remboursement, interroger
directement de nos membres est certainement une manière
d’accéder à une source d’informations majeure. Par exemple,
tout le monde sait à quel point la prévention des maladies et
le rôle de l’activité physique dans ce contexte est importante.
Chez les personnes âgées aussi, l’activité physique est le
meilleur « médicament » préventif. Afin de mener des actions
de promotion et d’évaluation de ce constat, il est évidemment
nécessaire de mesurer et de savoir à quel point les ainés font
du sport. Une enquête auprès de nos membres, en collaboration
avec l’UCL et Énéosport, permet de situer le niveau sportif des
seniors et quelles sont les incitations ou les obstacles à leur
pratique. L’aspect santé, le bien-être, la condition physique
et les relations sociales sont des incitants majeurs pour les
personnes âgées, que nous pouvons reprendre dans des
campagnes de promotion.
Michiel Callens
Directeur du département R&D
MC-Informations 262 • décembre 2015
Étude MC prothèse totale de hanche
24 ans d’analyses : l’étape suivante d’une collaboration
transparente et équilibrée entre soignants et soignés et
entre hôpitaux et mutualités
Xavier de Béthune, Katte Ackaert – Département Recherche et Développement
Résumé
Le département R&D de l’Alliance nationale des Mutualités chrétiennes (MC) a analysé 85.000 prothèses
totales de hanche (PTH) depuis 1990. Les forces et les limites du modèle d’analyse ont été analysées avec les
chirurgiens, les hôpitaux et les associations scientifiques. Les résultats ont été présentés dans des congrès
et dans les hôpitaux. Ils ont été publiés dans des revues scientifiques, MC-Informations et sur Internet.
La dernière étape de la démarche est de les présenter aux patients et au grand public. C’est ce que nous
faisons dans cet article, pas seulement pour les coûts des soins, mais aussi pour les éléments de qualité des
soins que nous avons pu récolter.
L’ambition de la MC est que la transparence accrue autour de la qualité des soins encourage les collaborations
responsables entre tous les acteurs du système de santé et renforce la qualité des soins et la sécurité des
patients à travers des relations plus équilibrées et mieux informées entre eux et ceux qui les soignent.
C’est pourquoi nous avons inclus dans l’article les premières réactions que nous avons reçues de la part des
hôpitaux. Le dialogue ne fait que commencer...
Mots-clés : transparence, prothèse totale de hanche, coûts, durée de survie d’une prothèse, révision, qualité
1.Introduction
La MC publie régulièrement les résultats d’études diverses qui
mettent en valeur plusieurs éléments du système de santé de
notre pays. Les mutualités sont en effet les seules organisations
qui disposent de banques de données qui peuvent décrire
les soins aux mêmes patients dans des contextes de soins
différents. L’information proposée est donc souvent nouvelle et
pertinente.
Un des principaux sujets récurrents de ces analyses sont les
pratiques de soins, principalement hospitalières, liées aux
Prothèses Totales de Hanche (PTH). Trois séries d’études
consécutives décrivent à ce stade-ci, 24 années de pratique. La
possibilité de suivre le patient après sa sortie de l’hôpital et à
plus long terme, de savoir si la PTH primaire est révisée, même
quand cela ne se passe pas dans le même hôpital, représentent
deux informations originales de nos études.
Nous avons décidé, à partir de maintenant, de compléter nos
résultats par l’identification des institutions qui dispensent
les soins. Nous revenons en détail sur la justification de ce
choix dans l’article qui suit, qui reprendra aussi, indicateur
par indicateur, les hôpitaux qui se distinguent nettement des
autres, dans les deux sens du terme.
MC-Informations 262 • décembre 2015
3
2. Les études PTH de la MC
C’est au tournant du siècle que la MC organise une première
conférence de presse et publie un rapport circonstancié sur
les soins liés aux PTH électives1 en Belgique. Les résultats de
l’étude sont assez clairs :
• les soins en Belgique sont comparables à ce qu’on trouve
dans la littérature internationale, où les pays scandinaves
occupent néanmoins le haut du pavé ;
• comme à d’autres endroits2, la variabilité des soins d’un
hôpital à l’autre est très importante, avec certains domaines
de surconsommation manifeste, comme la transfusion
sanguine ;
• parmi les modèles de PTH disponibles, la prothèse totalement
cimentée monobloc présente les meilleurs résultats en
termes de survie et coûte le moins cher.
Dans la mesure où suffisamment de données étaient
disponibles, les résultats par hôpital et par chirurgien
ont ensuite été mis à disposition des intéressés de façon
confidentielle à travers un module interactif sur Internet. Une
dizaine d’années plus tard, la MC met à jour ses données3 4 5 6
La variabilité des pratiques reste un défi majeur, mais
certaines surconsommations ont été réduites. C’est
principalement le cas de la transfusion sanguine dont le
taux est passé de 60% à 25% des patients opérés. La durée
de séjour a été réduite de moitié environ et les coûts pour
l’assurance maladie-invalidité (AMI) n’ont pas augmenté
malgré une inflation de 17%. Au niveau des prothèses, les
prothèses non cimentées ont maintenant une part de marché
de 65%. Les professionnels ont donc globalement nié les
résultats de la première étude au sujet des types de prothèses.
En même temps, la survie des prothèses à dix ans s’est
améliorée de 92% à plus de 93%. Il n’y a donc manifestement
pas péril en la demeure.
En septembre de cette année, nous avons rajouté quatre
années à ces analyses en publiant les résultats d’une nouvelle
mise à jour des données. Ceux-ci montrent que plusieurs
améliorations perçues approchent de leurs limites. La durée
de séjour s’est réduite d’un jour en quatre ans et le taux de
transfusion est à 17%. Les coûts totaux connaissent une hausse
modérée. La survie des prothèses, dont 80% sont aujourd’hui
des modèles non cimentés, a augmenté à 94,58%.
Mais, malgré ces améliorations significatives en 15 ans,
la variabilité des pratiques reste un phénomène difficile
à maîtriser. Entretemps, plusieurs initiatives ont vu le jour
pour inciter les prestataires de soins à adopter une politique
de qualité systématique des soins et d’harmonisation des
pratiques. Les contrats qualité-sécurité du Service Public
Fédéral Santé publique, Sécurité de la Chaîne alimentaire
et Environnement (SPF SPSCAE), la création du KCE (Centre
4
d’expertise fédéral des soins de santé) et de l’Agence
Intermutualiste (AIM-IMA), la mise en place progressive de
e-Health et plus récemment de healthdata.be (qui intègre
le registre Orthpride ®), la création de plusieurs réseaux
hospitaliers, comme le Réseau Itinéraires Cliniques, le
Réseau Santé Louvain, les Initiatives de Qualité de la
Mutualité chrétienne ou les réseaux qualité-sécurité du
SPF Santé Publique font partie d’une première vague. La
déclaration de politique régionale flamande7 – qui promeut
l’accréditation, les indicateurs et un rôle spécifique pour
l’inspection -, celle plus récente de la Région wallonne8,
le projet Vlaams Indicatorenproject (VIP²) en Flandre9 et la
création de la Plateforme pour l’Amélioration continue de
la Qualité des soins et de la Sécurité des patients (PAQS) 10
en Belgique francophone représentent une deuxième vague
d’initiatives.
Les choses n’en restent certainement pas là. Les déclarations
récentes de la Ministre de la Santé Publique évoquent la
transparence totale des données et des résultats et un
financement couplé à ces résultats11.
Il est donc logique que la MC continue à impulser ces évolutions
et d’étude en étude réfléchisse aux meilleurs moyens de
présenter les résultats aussi bien aux autorités et aux
prestataires qu’au grand public et surtout aux futurs candidats
à une PTH. Les objectifs étaient et restent :
• d’impulser une dynamique d’amélioration continue de la
qualité des soins ;
• de faciliter le choix des soins pour les membres de la MC et
de la société en général ;
• de garantir l’utilisation optimale des moyens de la sécurité
sociale.
3. Comparaison des deux dernières études
Nous avons donc d’abord comparé de façon détaillée les
résultats actuels à ceux de l’étude précédente3 4 6.
Tous les hôpitaux repris dans cette étude avaient reçu dans
le courant de 2009 leurs données concernant les activités de
2006 et 2007 et concernant la survie des prothèses primaires
unilatérales qu’ils avaient implantées entre 1998 et 2007. En
2011, nous avons mis à jour les données des années 2008 et
2009 et pour la survie à 10 ans des prothèses jusqu’en 2009.
Nous avions ensuite visité 35 hôpitaux entre mars 2010 et février
2011, ensemble avec des médecins -conseils de la MC et des
représentants des associations scientifiques d’orthopédie
et de traumatologie5. Chaque visite consistait en un exposé
interactif des résultats sur les principaux indicateurs de l’étude.
Nous avions inclus des hôpitaux avec les résultats les plus
MC-Informations 262 • décembre 2015
favorables dans ces visites, pour pouvoir proposer des options
réalistes d’amélioration de la qualité aux autres hôpitaux.
Nous avons demandé aux hôpitaux de nous communiquer les
actions qu’ils envisageaient de mener en 2011 pour améliorer
ou maintenir leurs résultats.
Nous avons aujourd’hui actualisé notre étude sur la base des
données 2012-201312. Les analyses de survie des prothèses
portent sur les années 2004-2013.
Nous disposons de données en 2008-2009 et 2012-2013 pour 76
hôpitaux qui avaient opéré plus de 30 patients MC pendant les
deux périodes.
Sauf pour la transfusion (-8%) et les soins intensifs (-4%), les
évolutions sont généralement peu marquées. La durée de
séjour diminue globalement d’un jour. Les coûts médians pour
l’assurance maladie-invalidité augmentent de 2% tandis que
ceux à charge du patient diminuent de 17%.
Ce qui ne change pas, est la variabilité d’un hôpital à l’autre,
comme nous l’avons déjà décrit dans notre article de septembre
201512.
Les différences entre les hôpitaux visités et non visités en
2010-2011 sont trop variables pour être analysées de façon
synthétique. Nous avons comparé les résultats dans leur
ensemble et pour les 5 hôpitaux qui avaient les résultats les plus
favorables et les plus défavorables en 2008-2009 pour chaque
indicateur. Nous avons aussi regardé si leurs plans d’action
avaient eu un impact. Les quelques tendances qui semblent
ressortir de cette analyse généralement qualitative, vu les très
petits nombres, sont toujours contredites par les résultats de
quelques hôpitaux.
A Izegem, à la St. Jozefkliniek, la transfusion faisait partie
du plan d’action de l’équipe que nous avions rencontrée. Le
taux de transfusion s’est, réduit des deux tiers, de 75% à 26%.
Dans un contexte général de réduction des durées de séjour,
les Cliniques St. Joseph à Liège ont réduit de 5 jours la durée
médiane de séjour en service aigu, mais ont rallongé la durée
médiane de séjour globale (service aigu et de revalidation)
de 2 jours. Au Algemeen Ziekenhuis d’Audenarde, le taux de
prestations de soins intensifs a chuté de 47%. Par contre, à
l’hôpital de Veurne, que nous n’avons pas pu visiter, ce taux
d’admission est resté stable autour de 80% ! Mais ces quelques
exemples paradoxaux ne reflètent pas l’impression générale
d’une amélioration, même si celle-ci reste modérée.
4. Faut-il maintenant rendre nos résultats
transparents ?
Clairement, aucune approche ou aucun incitant ne peut à lui
seul influencer de façon significative des évolutions globales
dans la prise en charge hospitalière de patients qui subissent
une intervention chirurgicale majeure, même si elle est bien
codifiée, comme la pose d’une PTH. Nous avons parcouru
en 15 ans les démarches et les incitants qui reposent sur la
transmission confidentielle d’informations. Est-il donc temps
d’ajouter une pierre à l’édifice en publiant nominativement
les indicateurs dont nous disposons, pour contribuer à
l’amélioration de la qualité des soins et de la sécurité des
patients ?
Malgré les nuances très importantes de la littérature13 14, nous
croyons que oui15 pour plusieurs raisons :
• Tout d’abord, c’est un rôle essentiel des mutualités d’informer
le choix de leurs membres. Pour cela, ces membres ont droit
aux données de la meilleure qualité possible, présentées de
la façon la plus compréhensible possible. C’est clairement
aussi une des conclusions du congrès organisé par la MC
en juin 2015.
• Ensuite, il s’agit d’une évolution sociétale généralisée dans
d’autres domaines d’activité également16. On ne compte
plus les classements nationaux ou internationaux d’écoles,
d’universités, ou même de services de police. Les institutions
les mieux classées n’hésitent d’ailleurs pas à se prévaloir
de leurs bons résultats. Notre idée ici n’est toutefois pas de
publier de classement, mais de fournir l’information la plus
complète possible sur les différents éléments des soins dont
nous disposons.
• Dans le domaine de la santé aussi, les choses évoluent.
Le mouvement des consommateurs – dont le pilier le plus
visible est Test-Achats – demande depuis des années la
publication des résultats de soins. Plusieurs enquêtes
ont déjà été réalisées et publiées par Test-Achats et
d’autres17. Et la justice belge s’est prononcée il y a
quelques années en faveur de la diffusion et publication
de données sur l’hygiène des mains en milieu hospitalier.
Les associations de patients prennent un rôle de plus en
plus actif dans ce débat. En Flandre surtout, la Vlaams
Patiëntenplatform18 est devenue un partenaire préférentiel
des autorités, des institutions académiques et de certains
réseaux hospitaliers.
• Des projets concrets voient le jour pour encourager les
hôpitaux à diffuser publiquement leurs résultats. Le plus
visible de ces projets est le Vlaams Indicatorenproject voor
Patiënten en Professionals19 (VIP²) qui développe depuis
quelques années des indicateurs et des benchmarks
comparatifs. Le projet incite les hôpitaux à publier leurs
résultats sur leurs propres sites web et sur un site central.
MC-Informations 262 • décembre 2015
5
Province
C.H. INTERREGIONAL EDITH CAVELL
CLINIQUE STE. ANNE - ST. REMI
CLINIQUES UNIVERSITAIRES ST.-LUC
EUROPAZIEKENHUIZEN
IRIS ZIEKENHUIZEN ZUID
KLINIEK ST.-JAN
UNIVERSITAIR ZIEKENHUIS BRUSSEL
ZIEKENHUISNETWERK ANTWERPEN
IMELDA ZIEKENHUIS
SINT-JOZEFKLINIEK
AZ KLINA
A.Z. MONICA
UZ ANTWERPEN
AZ ST.-DIMPNA
AZ ST.-ELISABETH
HEILIG HART ZIEKENHUIS
AZ ST.-JOZEF
AZ ST.- MAARTEN
HEILIG HARTZIEKENHUIS
AZ HEILIGE FAMILIE
AZ TURNHOUT
GZA- ZIEKENHUIZEN
ZIEKENHUIS OOST - LIMBURG
JESSAZIEKENHUIS
ST. FRANCISKUSZIEKENHUIS
ZIEKENHUIS MAAS EN KEMPEN
MARIAZIEKENHUIS NOORD-LIMBURG
REGIONAAL ZIEKENHUIS ST.-TRUDO
AZ VESALIUS
ALGEMEEN STEDELIJK ZIEKENHUIS
ONZE LIEVE VROUWZIEKENHUIS
ST.-VINCENTIUSZIEKENHUIS
AZ ST. BLASIUS
AZ ALMA
AZ JAN PALFIJN
AZ MARIA MIDDELARES
AZ ST. LUCAS
UZ GENT
Tous les hôpitaux
Nom hôpital
Tableau 1 : Principaux résultats par hôpital.
Bruxelles
Anvers
Limbourg
MC-Informations 262 • décembre 2015
Flandre-Orientale
6
95
98
97
92
94
98
93
93
96
92
93
94
94
98
93
95
97
98
97
86
95
94
98
93
91
99
96
90
95
93
98
91
83
96
97
94
96
93
95
1.021
277
256
234
143
286
175
1.055
570
260
403
1.003
379
322
467
810
660
461
310
478
1.068
1.110
1.175
1.172
216
255
379
307
377
1.092
576
483
658
965
1.205
1.223
575
481
44.741
Localité
BRUXELLES
BRUXELLES
BRUXELLES
BRUXELLES
BRUXELLES
BRUXELLES
BRUXELLES
ANVERS
BONHEIDEN
BORNEM
BRASSCHAAT
DEURNE
EDEGEM
GEEL
HERENTALS
LIER
MALLE
MECHELEN
MOL
REET
TURNHOUT
WILRIJK
GENK
HASSELT
HEUSDEN
MAASEIK
OVERPELT
SINT-TRUIDEN
TONGEREN
ALOST
ALOST
DEINZE
DENDERMONDE
EEKLO
GAND
GAND
GAND
GAND
% survie
prothèse
2004-2013
Nombre de
patients
MC 20042013
1,03
0,74
0,60
1,89 **
1,35
0,63
1,26
1,69 **
0,82
0,88
1,15
0,95
1,27
0,27
1,28
1,37
0,61
0,40 **
0,77
1,50
0,56 **
1,40 **
0,54 **
1,05
1,45
0,35
1,12
1,32
1,41
1,22
0,43 **
1,84 **
1,15
1,07
0,44 **
1,07
0,95
1,23
1
Probabilité
de révision
2004-2013
133
204
86
66
44
71
59
260
165
94
120
280
57
91
189
201
163
87
72
119
240
284
293
299
86
71
91
102
88
230
133
87
201
266
195
333
147
108
11,281
Nombre de
patients
MC 20122013
7
6
7
9
9
6
8
8
5
7
6
8
7
8
5
6
8
8
7
8
5
8
6
8
8
8
8
8
8
5
8
5
7
6
5
7
7
6
7
Durée
médiane
du séjour
2012-2013
15
6
13
18
14
3
7
15
11
29
7
35
16
37
3
21
25
32
18
19
9
31
26
13
12
30
31
49
43
14
20
8
9
11
5
9
27
19
17
% de
patients
avec
transfusion
sanguine
2012-2013
3
1
5
3
7
0
3
3
3
10
1
3
11
2
1
4
12
24
4
3
1
32
2
5
3
13
10
4
7
1
20
9
3
2
1
2
5
48
8
% de
patients
avec prestations de
réanimation
2012-2013
6.722
6.357
7.156
6.030
5.047
4.697
3.903
4.295
2.966
2.787
2.544
4.018
4.134
2.696
2.520
2.477
2.752
3.496
2.901
3.071
2.720
3.321
2.454
3.000
2.345
2.455
2.601
2.644
2.328
2.752
3.158
2.541
2.598
3.027
2.895
2.761
2.526
4.049
3.021
Coûts
médians
totaux patients - ch
individuelle
2012-2013
2.699
928
936
918
1.224
1.009
591
938
805
918
904
1.298
903
839
843
850
983
1.117
965
1.055
841
969
898
1.003
976
984
960
963
1.171
902
953
862
954
968
1.276
1.001
879
1.079
954
Coûts médians
totaux patients
- ch à 2 lits ou
commune 20122013
Brabant
flamand
AZ LOKEREN
AZ OUDENAARDE
AZ GLORIEUX
AZ NIKOLAAS
AZ ST.-ELISABETH
AZ DIEST
REGIONAAL ZIEKENHUIS ST.-MARIA
REGIONAAL ZIEKENHUIS H. HART
UZ LEUVEN
REGIONAAL ZIEKENHUIS H. HART
AZ JAN PORTAELS
AZ ST. LUCAS
AZ ST.-JAN BRUGGE-OOSTENDE
JAN YPERMAN ZIEKENHUIS
ST.-JOZEFSKLINIEK
GEZONDHEIDSZORG OOSTKUST
AZ GROENINGE
AZ DAMIAAN
H.- HARTZIEKENHUIS
STEDELIJK ZIEKENHUIS
ST.-ANDRIESZIEKENHUIS
ST.-REMBERTZIEKENHUIS
AZ ST. AUGUSTINUS
O.L.V. VAN LOURDES ZIEKENHUIS
97
97
92
93
93
355
906
214
273
369
FAMENNE
BOUGE
MONT-GODINNE
NAMUR
NAMUR
CONDROZ (I.F.A.C.)
CLINIQUE ST.-LUC
CLINIQUES UNIVERSITAIRES (U.C.L.)
CH REGIONAL
CLINIQUE MATERNITE STE.-ELISABETH
0,89
2,90 **
1,07
0,97
0,95
0,83
1,20
0,85
1,54
1,57
1,63
0,60
0,54
1,90 **
1,23
1,21
0,43
1,90 **
1,73 **
1,24
0,34
0,76
0,46
1,44
0,96
0,79
0,66
0,64
0,74
0,37 **
0,90
1,35
0,67
1,01
0,92
1,09
0,89
1,72
1,22
1,07
0,84
0,91
0,33
1,28
0,60
0,36 **
256
61
62
78
105
146
100
84
99
80
35
115
57
90
34
36
117
86
60
81
76
55
39
51
66
298
82
42
54
119
383
59
38
205
188
186
113
72
323
162
199
489
67
49
141
128
5
8
8
8
6
8
8
7.5
8
8
9
17
7
7
8
24
6
9
9
6
6
7
6
7
7
7
6
8
6
7
7
6
8.5
7
6
5
6
9
9
6
8
5
8
11
5
7
** Significativement différent de la moyenne nationale (inférieur à 1 signifie moins de chances de révision ; supérieur à 1 signifie plus de chances de révision).
(1) L’information sur le campus de Braine L’Alleud de la Clinique Ste-Anne - St-Remi se trouve parmi les informations des hôpitaux de Bruxelles.
94
96
92
93
94
91
98
98
85
92
96
98
93
91
94
672
555
374
429
278
110
427
362
358
178
111
437
288
286
357
TOURNAI
GILLY
HAINE-SAINT-PAUL
MOUSCRON
EUPEN
HUY
LIEGE
LIEGE
LIEGE
ROCOURT
SANKT-VITH
SERAING
VERVIERS
ARLON
LIBRAMONT
MARCHE-EN-
94
97
99
81
96
97
96
98
97
99
93
96
97
94
96
93
96
91
95
90
97
94
99
93
98
98
349
314
182
199
221
1.359
321
152
273
464
1.542
201
181
839
753
633
465
255
1.194
581
717
1.901
358
210
281
570
MONS
OTTIGNIES
LOKEREN
AUDENARDE
RONSE
SINT-NIKLAAS
ZOTTEGEM
DIEST
HALLE
LOUVAIN
LOUVAIN
TIENEN
VILVOORDE
BRUGES
BRUGES
IEPER
IZEGEM
KNOKKE-HEIST
KORTRIJK
OOSTENDE
ROESELARE
ROESELARE
TIELT
TORHOUT
VEURNE
WAREGEM
WARQUIGNIES
CH DE WALLONIE PICARDE - Chwapi
GRAND HOPITAL DE CHARLEROI
CH DE JOLIMONT - LOBBES
CH DE MOUSCRON
ST.-NIKOLAUS HOSPITAL
CH REGIONAL DE HUY
CH CHRETIEN
CH REGIONAL DE LA CITADELLE
CH UNIVERSITAIRE DE LIEGE
CH CHRETIEN
KLINIK ST.-JOSEF
CH DU BOIS DE L’ABBAYE ET DE HESBAYE
CH PELTZER - LA TOURELLE
CLINIQUES DU SUD-LUXEMBOURG
CH DE L’ARDENNE
INTERCOM. HOSP. FAMENNE ARDENNE
C.H.R. CLINIQUE ST. JOSEPH - HOPITAL DE
Brabant wallon (1) CLINIQUE SAINT PIERRE
Flandre-Occidentale
Hainaut
Liège
Luxembourg
Namur
MC-Informations 262 • décembre 2015
7
7
23
15
10
10
8
24
12
11
9
3
25
4
9
12
44
11
28
32
7
5
2
26
14
56
12
21
17
33
8
23
15
26
15
20
16
26
43
23
12
11
12
43
18
7
15
27
5
2
1
3
1
1
1
3
3
11
4
2
42
0
3
3
6
5
5
1
2
8
24
58
5
1
2
7
5
15
2
3
2
3
2
11
1
23
2
2
4
34
6
82
4
2.646
3.366
2.903
3.120
3.498
3.031
4.936
3.163
2.785
3.946
4.075
5.424
4.250
3.698
5.324
3.499
3.950
4.735
1.274
3.772
3.847
4.488
2.761
2.414
3.004
2.890
2.782
3.282
3.907
2.714
3.512
2.363
4.238
2.833
2.750
3.010
2.451
3.271
2.884
2.907
2.279
2.879
2.507
1.929
2.468
2.880
813
854
967
1.044
861
1.021
882
1.045
1.134
1.021
1.004
1.352
922
731
984
1.055
873
1.034
1.176
1.057
881
833
813
1.161
1.033
1.067
1.069
1.004
1.111
731
884
766
980
958
967
1.092
1.009
1.067
986
868
900
860
956
999
835
917
En Flandre toujours, l’inspection de la santé publie, depuis
quelques années, sur son site web le contenu de tous ses
rapports d’inspection20.
L’accréditation des hôpitaux fait, depuis plusieurs années,
partie du paysage international et a fait son entrée en
Belgique par l’exercice exploratoire conduit par les
MC21 en 2002-2004. La déclaration de politique régionale
flamande de 200922 et la mise en place de la Plateforme
pour l’Amélioration de la Qualité des soins et de la Sécurité
des patients23 (PAQS) en 2013 pour la Wallonie et Bruxelles,
confirment que cette approche va avoir tendance à
s’étendre dans les années qui viennent.
• Dans les pays limitrophes et ailleurs, les mêmes évolutions
sont en cours. Ne citons comme exemples que le site « Scope
Santé » en France24 ou les publications de l’Inspection des
Soins de Santé aux Pays-Bas, au titre évocateur de : « Het
resultaat telt »25.
• Et enfin, nous sommes convaincus que si le secteur de la
santé veille à publier lui-même ses propres résultats, les
données seront plus fiables et mieux expliquées que si
d’autres acteurs s’en chargent26. Il y aura ainsi mieux moyen
de protéger l’objectif fondamental qui est l’amélioration de
la qualité des soins. C’est par exemple l’objectif affirmé du
projet VIP². C’est aussi celui de la MC.
5. Indicateurs sur les PTH
Nous avons laissé en septembre Nicolas, notre patient fictif,
devant la masse importante de données générées par notre
dernière étude et celles qui l’ont précédée. Pour lui permettre
de faire un choix approprié d’hôpital – et donc d’équipe de
soins – nous lui recommandions de poser des questions à son
futur chirurgien, de s’adresser à son médecin généraliste ou
au médecin conseil de sa mutualité. Un coup de pouce utile
dans sa démarche serait sans doute de lui donner les « noms
et prénoms » de chaque hôpital pour pouvoir mieux préciser
ses questions. Comme la proximité du domicile est un des
principaux facteurs de choix pour les patients, nous avons
classé dans le tableau 1 les institutions par ‘province’ et ’ordre
alphabétique du nom de l’hôpital’.
8
Mais ce n’est pas seulement le patient qui devrait profiter de
la transparence des données. Les hôpitaux et les prestataires
de soins devraient également y trouver plusieurs applications
utiles. En premier lieu vient le fait que beaucoup de données
ne sont pas encore suivies avec suffisamment d’attention
dans plusieurs institutions. Les visites réalisées en 2010-2011
par l’équipe des associations scientifiques et de la MC ont par
exemple permis à plusieurs reprises de clarifier la signification
de certains indicateurs. En deuxième lieu se situe la possibilité
d’identifier les lieux d’échanges d’expérience optimaux. Nous y
reviendrons plus bas.
Nous ne parlerons pas des autres acteurs du système de
santé (organismes assureurs, INAMI, SPF SPSCAE), tant il est
clair qu’ils peuvent, dans la situation actuelle, déjà disposer à
partir de leurs propres bases de données, de la majorité des
informations que nous allons présenter.
5.1. L’utilité pour les patients
Revenons à Nicolas. En quoi l’identification de l’hôpital peutelle l’aider à mieux organiser son parcours pour sa PTH ?
Durée de séjour
La durée de séjour générale et en service aigu a continué à
diminuer. Entre 2008-2009 et 2012-2013, la durée médiane de
séjour totale (service A + revalidation) est passée de 8 jours à
7. La durée de séjour médiane en service A a aussi diminué d’un
jour, également de 8 à 7.
Dix hôpitaux ont une durée médiane de séjour totale de 5 jours.
Dans trois de ces hôpitaux, 90% des séjours sont de 8 jours ou
moins, ce qui démontre leur capacité à harmoniser la durée des
séjours.
Imelda Ziekenhuis
Bonheiden
Algemeen Ziekenhuis
St. Augustinus
Veurne
Clinique St.-Luc
Bouge
5 jours
5 jours
5 jours
Trois hôpitaux ont des durées médianes de séjour supérieures
à 10 jours. On peut donc conclure que dans ces hôpitaux très
différents des autres, plus de 50% des PTH électives séjournent
au service de revalidation ou qu’il y a une gestion des sorties
peu uniforme.
Klinik St.-Josef
Sankt-Vith
24 jours
Centre Hospitalier
Chrétien
Liège
17 jours
St.-Rembertziekenhuis
V.Z.W.
Torhout
11 jours
MC-Informations 262 • décembre 2015
Rappelons toutefois que le Centre Hospitalier Chrétien sur son
site de Liège a réduit sa durée médiane de séjour dans le service
d’orthopédie de 13 jours en 2008-2009 à 8 jours en 2012-2013.
En quoi la durée de séjour est-elle un indicateur utile pour un
patient ? Dans notre article précédent, nous avons déjà évoqué
les conséquences pour l’organisation du séjour (avec ou sans
weekend, par exemple), la limitation des risques hospitaliers
et l’impact sur les coûts patient. Nous évoquions aussi la
perception ambivalente vis-à-vis d’un séjour (trop) court ou au
contraire (trop) long en revalidation.
Si nous regardons les données du tableau 1, nous pouvons voir,
par province, la variation des durées de séjour. Nicolas peut
ainsi mettre en balance un hôpital proche de chez lui avec un
séjour de 10 jours et un autre hôpital plus éloigné, mais avec
une durée de 7 jours.
Taux de transfusion
Alors que le taux de transfusion moyen belge se situait à 60%
au tournant du siècle, il est passé globalement à 25% en 20082009 et à 17% en 2012-2013, avec aujourd’hui une variation
totale entre hôpitaux de 2% à 56% des patients opérés.
23 hôpitaux ont en 2012-2013 un taux de transfusion de moins de
10 %. La Clinique St Pierre d’Ottignies a changé radicalement sa
politique de transfusion au début des années 2000 et a depuis
lors le taux de transfusion le plus bas du pays après une PTH
élective. Par contre, 6 hôpitaux ont un taux supérieur à 40%.
Algemeen Ziekenhuis
Glorieux
Ronse
Regionaal Ziekenhuis
St.-Trudo
Sint-Truiden
Klinik St.-Josef
Sankt-Vith
Gezondheidszorg
Oostkust
Knokke-Heist
56%
Mais, ce qui n’est pas connu du tout, est qu’une transfusion
nécessite en moyenne un jour d’hospitalisation supplémentaire.
Ce jour permet en pratique de prendre toutes les mesures
d’organisation et de sécurité qui entourent la transfusion.
Pour toutes ces raisons, Nicolas pourrait préférer un hôpital
avec un faible taux de transfusion, quitte, par exemple, à se
déplacer un peu plus loin ou à payer un peu plus cher.
Prestations de soins intensifs (SI)
En 2012-2013, il y a encore 17 hôpitaux qui ont un taux de
prestations de SI qui dépasse 10%. Le taux le plus élevé est de
82%, le plus bas de 0%. En 4 ans, le taux moyen belge a baissé
de 12% à 8%.
58 hôpitaux ont recours aux soins intensifs pour maximum 5%
de leurs patients après une PTH élective.
Six hôpitaux admettent plus de 30 % de leurs patients dans ce
service.
Algemeen Ziekenhuis
St. Augustinus
Veurne
82%
Algemeen Ziekenhuis
Glorieux
Ronse
58%
43%
Universitair
Ziekenhuis Gent
Gent
48%
Centre Hospitalier
Universitaire De Liège
Liège
42%
St.-Andriesziekenhuis
Tielt
34%
GZA- Ziekenhuizen
Wilrijk
32%
49%
44%
Algemeen Ziekenhuis
Vesalius
Tongeren
43%
St.-Andriesziekenhuis
Tielt
43%
Il est aussi préoccupant de constater que dans 17 hôpitaux, les
taux sont stables ou en augmentation, malgré la sensibilisation
autour de la transfusion, y compris celle de nos études, la mise
en place d’actions par le SPF SP ou parfois même la volonté
affirmée par l’hôpital d’améliorer la situation dans des plans
d’action écrits.
a
Qu’une transfusion représente pour le patient un cadeau
de grande valeur, est un fait bien connu de la plupart des
citoyens. Le sang en Belgique provient en effet toujours d’un
don volontaire. Qu’une transfusion représente aussi un (très
petit) risque est moins connu. Depuis le screening contre les
virus et autres agents infectieux transmis par le sang et depuis
la déleucocytationa systématique, le principal risque résiduel
est celui des erreurs transfusionnelles, qui sont heureusement
exceptionnelles.
L’hôpital de Veurne surtout, mais aussi celui de Ronse ont
un taux élevé d’admission aux SI depuis au moins 2008-2009.
Comme déjà signalé, l’hôpital GZA de Wilrijk a fortement
augmenté son taux de 8% à 28% entre 2007 et 2009 et se situe
actuellement à 32%. A Tielt, c’est la situation inverse avec des
Suppression des globules blancs et des plaquettes sanguines dans les transfusions de globules rouges pour prévenir l’immunisation contre un nombre beaucoup
plus important de gènes du donneur.
MC-Informations 262 • décembre 2015
9
taux historiques proches de 80% en forte baisse. Dans les deux
hôpitaux universitaires de Liège et Gent, les taux ont évolué de
moins de 5% en 2008-2009 aux niveaux actuels.
un programme intense, qu’il pilote lui-même. Il donnera sans
doute aussi plus de poids à cet indicateur qu’un autre patient
plus âgé et moins mobile.
L’avis de la toute grande majorité des chirurgiens et anesthésistes que nous avons rencontrés lors de nos visites de 20102011, était que Nicolas ne devrait pas passer par le service
des soins intensifs (monitoring) après le placement d’une PTH
élective. Sauf s’il soigne préférentiellement un groupe de patients à haut risque, le fait qu’un hôpital recoure peu à ce service, est un signe rassurant qui devrait donner confiance a priori.
Les coûts de l’assurance maladie
Etant donné que la facture patient représente moins de 20%
des coûts totaux, Nicolas pourrait être tenté de ne pas tenir
compte des coûts à charge de l’assurance maladie. En pratique
toutefois, beaucoup de patients sont surpris des montants
qu’ils trouvent sur la facture hospitalière a posteriori.
Les coûts médians des hôpitaux à charge de l’assurance
maladie se montent à 6.811 euros. Ils n’ont augmenté que de
2% en 4 ans. La variabilité entre hôpitaux a augmenté, puisque
la différence relative entre la médiane la plus basse et la plus
haute est passée de 185 % en 2008-2009 à 258% en 2012-2013.
Onze hôpitaux facturent moins de 6.000 euros à l’assurance
maladie pour une PTH élective.
Soins de physio- et kinésithérapie
Nous avons choisi un indicateur complexe pour décrire les
pratiques des hôpitaux en matière de kiné- et physiothérapie.
Nous reprenons en effet les coûts de ces prestations, depuis
un mois avant jusqu’à 6 mois après l’intervention de PTH.
L’indicateur reflète donc l’ensemble des soins hospitaliers et
ambulatoires dont le patient a bénéficié pendant cette période
de 7 mois. L’indicateur est influencé par les prescriptions des
orthopédistes et médecins physiciens hospitaliers, mais aussi
par celles des médecins généralistes. Il mesure l’utilisation
effective des soins prescrits.
Clinique St.-Luc
Bouge
5.493 €
Stedelijk Ziekenhuis
Roeselare
5.733 €
Algemeen Stedelijk
Ziekenhuis
Aalst
5.784 €
Algemeen Ziekenhuis
Klina V.Z.W.
Brasschaat
5.842 €
C.H.R. Clinique St.
Joseph - Hôpital de
Warquignies
Mons
5.844 €
Algemeen Ziekenhuis
St.-Elisabeth
Herentals
5.850 €
Algemeen Ziekenhuis
Alma
Eeklo
5.875 €
Heilig Hartziekenhuis
V.Z.W.
Mol
5.899 €
Algemeen Ziekenhuis
St. Augustinus
Veurne
5.907 €
542 €
Regionaal Ziekenhuis
Heilig Hart VZW
Tienen
5.917 €
St.-Vincentiusziekenhuis
Deinze
5.922 €
Si on se concentre ici sur la partie hospitalière, nous voyons
que le coût médian des prestations de physio- et kinésithérapie
facturés par l’hôpital à l’assurance maladie obligatoire, est resté
stable entre 2008-2009 et 2012-2013. La variabilité des pratiques
dans ce domaine reste très importante. Le montant médian
hospitalier à charge de l’assurance maladie varie de 13,0 fois
(45 euros à 580 euros) d’un hôpital à l’autre en 2008-2009 et de
11,1 fois (49 euros à 542 euros) en 2012-2013. Quatorze hôpitaux
facturent moins de 100 euros à l’assurance maladie pour les
soins qu’ils dispensent pendant le séjour du patient. L’hôpital le
moins cher dans ce cas-ci est le CH Interrégional Edith Cavell
de Bruxelles.
Trois hôpitaux facturent par contre plus de 300 euros.
Centre Hospitalier
Chrétien
Liège
Klinik St.-Josef
Sankt-Vith
505 €
St.-Rembertziekenhuis
V.Z.W.
Torhout
320 €
Deux hôpitaux facturent une somme médiane de plus de 10.000
euros.
Dans notre étude, le coût total est l’indicateur qui reflète
le mieux la manière dont les soignants (hospitaliers et
ambulatoires) privilégient l’autonomie la plus précoce possible
des patients. Si nous pensons à l’histoire de Nicolas, son
objectif était de pouvoir courir le plus rapidement possible.
Nicolas cherchera donc un hôpital qui lui permet de suivre
10
Centre Hospitalier
Chrétien
Liège
10.033 €
Klinik St.-Josef
Sankt-Vith
14.161 €
MC-Informations 262 • décembre 2015
Le CHC de Liège est depuis plusieurs années un des hôpitaux
les plus chers du pays. Mais ceci n’est pas le cas pour la Klinik
St Josef de Sankt-Vith, dont les coûts à charge de l’assurance
maladie ont doublé, à quelques euros près, depuis 2006-2007.
Les coûts patient
Cet indicateur-ci devrait en tout cas capter l’attention de
Nicolas, même s’il bénéficie d’une assurance hospitalisation
complémentaire. Comme les résultats l’indiquent, par exemple
à Bruxelles, les différences peuvent être élevées entre deux
hôpitaux (578%). C’est évidemment surtout pour les personnes
à revenus limités que payer une facture élevée sans couverture
par une assurance complémentaire, représente une situation
très délicate.
Les hôpitaux qui facturent une somme médiane à charge du
patient inférieure à 1.000 euros en cas de PTH élective, sont
les suivants.
Universitair
Ziekenhuis Brussel
Bruxelles
683 €
Algemeen Ziekenhuis
Turnhout
Turnhout
880 €
H.- Hartziekenhuis
Roeselare - Menen
Roeselare
921 €
Regionaal Ziekenhuis
Heilig Hart VZW
Tienen
946 €
Stedelijk Ziekenhuis
Roeselare
950 €
Clinique Saint Pierre
Ottignies
957 €
Cliniques
Universitaires (U.C.L.)
Mont-Godinne
959 €
St.-Andriesziekenhuis
Tielt
975 €
Algemeen Ziekenhuis
St.-Elisabeth
Herentals
978 €
Intercom. Hosp.
Famenne Ardenne
Condroz (I.F.A.C.)
Marche-enFamenne
979 €
Universitaire
Ziekenhuizen K.U.L.
Leuven
983 €
Quatre hôpitaux facturent une somme médiane de plus de 2.500
euros.
C.H. Interregional
Edith Cavell
Bruxelles
3.947 €
Centre Hospitalier
Chrétien
Liège
2.890 €
Centre Hospitalier
Chrétien
Roucourt
2.600 €
A.Z. Monica
Deurne
2.580 €
Ces quatre hôpitaux se positionnent ainsi depuis au moins 4
ans. Le coût patient médian a augmenté de plus de 1.000 euros
au CHIREC pendant ces 4 dernières années.
Les résultats : Le taux de survie des prothèses et le risque de
révision
Ces deux indicateurs mesurent à long terme la proportion
de prothèses primaires implantées dans un hôpital, qui sont
encore en place après une observation maximale de dix ans.
Les données de la MC permettent de lier un remplacement
de PTH (une révision, en jargon médical) à l’hôpital où a été
faite l’intervention primaire, même si ces deux hôpitaux sont
différents.
A priori, ces indicateurs sont simples : plus la survie est élevée
et plus le risque est bas, mieux cela vaut. Ce résultat clinique
est aussi l’indicateur le plus directement utile de notre étude,
celui qui peut montrer que tous les éléments des soins ont été
organisés et fournis de façon optimale.
Mais à y regarder de plus près, il n’est pas sûr que Nicolas
puisse cerner toutes les subtilités de ce type d’indicateur,
sans l’aide d’un professionnel bien informé. Il n’est en effet
pas garanti que des résultats qui couvrent une période de dix
ans, n’aient pas évolué entretemps, ne fût-ce qu’à cause d’un
changement d’équipe ou d’une fusion d’hôpitaux, ou encore
d’une courbe d’apprentissage liée à l’introduction d’un nouveau
type de prothèse. Ainsi, l’Algemeen Stedelijk Ziekenhuis
d’Aalst nous a signalé que les trois phénomènes se sont
produits dans l’institution pendant les dix dernières années.
A la demande des chirurgiens qui opèrent actuellement sur le
campus d’Aalst, nous avons isolé leurs données de celles des
autres campus du même hôpital. Pour les deux chirurgiens,
nous n’avons retrouvé aucune révision depuis leur entrée en
service (2009). Nous avons réalisé un exercice similaire à la
demande du campus Ste-Elisabeth des Cliniques de l’Europe,
parce que l’équipe qui place les prothèses totales de hanche
a été entièrement renouvelée depuis 2011. Pour ce campus,
nous ne trouvons également aucune révision dans nos bases
de données pour les patients MC depuis 2011. La situation est
identique pour le petit nombre de patients MC du campus StMichel des Cliniques de l’Europe.
MC-Informations 262 • décembre 2015
11
L’interprétation de cet indicateur demande donc une
connaissance affinée de la situation (à demander dans
l’hôpital) et des alternatives (à demander à son médecin
généraliste ou au médecin conseil). Enfin, ces deux indicateurs
sont très sensibles. Comme il n’y a normalement pas beaucoup
de révisions, quelques révisions en plus ou en moins sur une
période de dix ans, font varier l’indicateur, et ce d’autant plus
significativement que les révisions sont précoces.
Nous avons comparé ici deux périodes complètes de dix
années. La survie moyenne des prothèses était de 92% pour les
dix années avant 2004. Elle est de 94,58% pour les dix années
avant 2014. Cette amélioration de 2,5% en dix ans représente
évidemment un résultat important, puisqu’il s’agit d’améliorer
un indicateur déjà excellent au départ.
Par contre, se faire opérer dans un des 4 hôpitaux qui ont un
taux de survie supérieur à 99%, ne signifie sans doute pas la
même chose que de bénéficier d’une PTH élective dans un des
quatre hôpitaux où la survie moyenne n’atteint pas 90%.
Ziekenhuis Maas en
Kempen
Maaseik
Regionaal Ziekenhuis
Heilig Hart
Leuven
99%
St.-Andriesziekenhuis
Tielt
99%
Algemeen Ziekenhuis
Lokeren
Lokeren
99%
Algemeen Ziekenhuis
Oudenaarde
Oudenaarde
81%
Algemeen Ziekenhuis
St. Blasius
Dendermonde
83%
Centre Hospitalier
Universitaire De Liège
Liège
85%
Algemeen Ziekenhuis
Heilige Familie
Reet
86%
99%
Pour cette deuxième mesure, le résultat est automatiquement
comparé à la moyenne belge, ce qui fait qu’un hôpital qui
correspond exactement à cette moyenne à un ratio des risques
égal à 1. Un ratio plus petit que 1 signifie que le risque est
moindre, un ratio plus grand que 1 signifie que le risque est plus
élevé que la moyenne de référence. Sept hôpitaux ont un RRR
inférieur à 1 et significativement différent de la moyenne belge.
Ceci veut dire que le risque de subir une révision de sa prothèse
dans les dix années est plus faible que le risque moyen belge.
Nous venons de voir que la chance moyenne de survie d’une
prothèse est de 94,58% et donc le risque de révision peut être
estimé à environ 5,42%.
O.L.V. Van Lourdes
Ziekenhuis
Waregem
0,36
Regionaal Ziekenhuis
Heilig Hart
Leuven
0,37
Algemeen Ziekenhuis
St.- Maarten
Mechelen
0,40
Onze Lieve
Vrouwziekenhuis
Aalst
0,43
Algemeen Ziekenhuis
Jan Palfijn
Gent
0,44
Ziekenhuis Oost Limburg
Genk
0,54
Algemeen Ziekenhuis
Turnhout
0,56
Huit hôpitaux ont un RRR significativement supérieur à 1, ce
qui veut dire que le risque de subir une révision de sa prothèse
dans les dix années suivantes est plus grand que le risque
moyen belge.
Des tests statistiques plus poussés sont toutefois nécessaires
pour confirmer que ces résultats ne sont pas dus au hasard.
Nous savons aussi que ce premier calcul peut être influencé
par la nature des patients qui se présentent à l’hôpital. C’est
surtout l’âge et le sexe, qui peuvent influencer artificiellement
le résultat. C’est pourquoi nous avons utilisé une deuxième
mesure, le ratio des risques de révision (RRR), car il nous
permet de standardiser les données et de rendre les hôpitaux
plus comparables les uns aux autres.
12
MC-Informations 262 • décembre 2015
5.2. L’utilité pour les prestataires de soins
Cliniques
Universitaires (U.C.L.)
Mont-Godinne
2,90
Centre Hospitalier
Universitaire de Liege
Liege
1,90
Centre Hospitalier
Peltzer - La Tourelle
Verviers
1,90
Europaziekenhuizen Cliniques de l’Europe
Brussel
1,89
St.Vincentiusziekenhuis
Deinze
1,84
Cliniques Du SudLuxembourg
Arlon
1,73
Ziekenhuisnetwerk
Antwerpen
Antwerpen
1,69
GZA- Ziekenhuizen
Wilrijk
1,40
Il faut toutefois signaler que l’âge et le sexe ne sont pas les
seuls facteurs qui peuvent influencer le risque de révision. La
pathologie sous-jacente et l’état de santé du patient au moment
de l’intervention jouent évidemment aussi un rôle, ce qui
pourrait défavoriser, par exemple, les hôpitaux universitaires
ou ceux qui se sont spécialisés dans certaines indications
complexes.
En conclusion, est-ce que Nicolas est mieux à même de
choisir la meilleure solution par lui-même que sans toutes ces
informations ? Nous sommes convaincus que oui, même si
nous savons qu’il aura besoin d’aide pour trouver son chemin
malgré tout. Et son médecin généraliste et son médecin-conseil
seront eux aussi mieux informés pour l’orienter en fonction
des éléments importants pour lui. Par ailleurs, à partir de ces
données, Nicolas saura aussi mieux quelles questions il doit
poser et à qui.
Mais le tableau ne lui permet évidemment pas de choisir un
hôpital qui soit excellent pour tous les indicateurs. Et sans
doute y a-t-il encore d’autres informations dont il a besoin.
Nous y reviendrons.
Même s’ils ne le verront peut-être pas immédiatement comme
cela, nous sommes également convaincus que les chirurgiens
et plus largement les équipes multidisciplinaires qui vont
prendre en charge le patient avant, pendant et après son
séjour hospitalier, sont les autres grands bénéficiaires d’une
publication transparente des résultats. Le principal avantage
potentiel pour ces équipes est de mieux définir des objectifs
d’amélioration réalistes et d’identifier des lieux d’échange
d’expériences avec des institutions comparables en termes de
taille de l’hôpital et de volume de travail par exemple.
Durée de séjour
La durée de séjour sera sans doute la donnée à propos de
laquelle les équipes de soins sont déjà informées. Elle a des
conséquences financières trop importantes pour les hôpitaux
pour ne pas être communiquée aux soignants. L’avantage
principal d’un benchmark nominatif sera donc de voir quels
hôpitaux ont des durées de séjours qui correspondent à celles
que l’équipe cherche à atteindre, de façon à échanger à propos
des pratiques pertinentes. L’hôpital A peut ainsi prendre contact
avec un hôpital B, par exemple dans une autre province, pour
étudier ensemble comment réduire d’un ou deux jours la durée
de séjour en service aigu ou comment harmoniser certaines
pratiques qui augmentent sinon inutilement la variabilité des
séjours.
Taux de transfusion et de prestations de SI
Bien que la prise en compte de ces indicateurs repose
essentiellement sur du travail multidisciplinaire interne à
l’hôpital, l’échange d’expériences avec des hôpitaux qui
présentent des taux inférieurs de 5 à 15% est une des possibilités
pour entamer un cycle d’amélioration rapide de la qualité27, par
exemple selon la méthode promue par l’Institute for Healthcare
Improvement aux USA28.
Ces indicateurs évoluent parfois en dent de scie d’année
en année d’un hôpital à l’autre. Une analyse interne des
déterminants des pratiques tant dans le sens des réductions
que des augmentations, serait sans doute très instructive. Les
hôpitaux concernés ont toutes les informations nécessaires à
leur disposition pour monitorer de tels indicateurs.
Coûts de physio- et kinésithérapie
Pour les soignants, cet indicateur reflète une partie de la
collaboration multidisciplinaire au sein et en dehors des murs
de l’hôpital. Il pose aussi la question de l’efficacité relative de la
kinésithérapie par rapport à des alternatives comme l’éducation
et la motivation du patient, un sujet de débat dans le cas des
PTH électives. Il met l’accent sur la nécessité d’adapter les
soins aux objectifs et aux capacités de chaque patient. Ici aussi
donc, l’échange d’expériences avec un ou deux hôpitaux dont
les coûts sont inférieurs de par exemple 20% peut représenter
une première étape dans l’amélioration recherchée.
MC-Informations 262 • décembre 2015
13
Coûts des soins
Que ce soient les coûts remboursés par l’assurance maladie
ou ceux qui restent à charge du patient, le point de vue des
mutualités est évidemment, qu’à qualité égale, une facture
plus réduite est une bonne chose. Le point de vue des hôpitaux
et des prestataires pourrait être différent, mais une déviation
majeure par rapport aux pratiques les plus courantes devrait
néanmoins susciter analyse et réflexion.
Ici aussi, la comparaison avec les pratiques d’un hôpital avec
des coûts inférieurs de 10 à 20% est sans doute le scenario
optimal pour entamer des actions concrètes. La négociation
sera évidemment délicate, puisqu’une réduction éventuelle
ne pourra jamais provenir des efforts d’un seul membre de
l’équipe.
L’information du patient sur ce que coûtent ses soins et sur
ce qu’il devra payer de sa poche, est sans doute une des
responsabilités les plus difficiles à réaliser actuellement pour
les prestataires. La publication de nos informations peut sans
doute contribuer à une meilleure information. Le niveau de
détail optimal reste toutefois à déterminer.
Les résultats des soins
Tout en tenant compte des remarques formulées plus haut, ces
indicateurs-ci sont ceux qui interpellent le plus directement les
chirurgiens. Et pourtant, nos analyses ont montré depuis des
années que les résultats dépendent aussi des caractéristiques
du patient, du type de prothèse et de l’organisation des soins
à l’hôpital. Les équipes multidisciplinaires les analyseront
donc en fonction de ces différents facteurs de façon à pouvoir
comprendre et profiter de l’expérience des hôpitaux les plus
proches du benchmarkb.
Pour les prestataires et les institutions, il y a donc potentiellement de grands bénéfices à chercher dans la comparaison non
anonyme des résultats.
6. Pourquoi avons-nous dû alors attendre si
longtemps leur publication ?
C’est que les risques liés à une telle publication ne sont en fait
pas négligeables non plus et le choix des modalités est donc un
autre aspect important du débat actuel.
Le principal risque à nos yeux est la publication de données
fausses. La première précaution contre ce risque est la
vérification des données par les équipes de soins dans les
hôpitaux. Nous avons donc adressé les données complètes à
tous les hôpitaux et aux associations scientifiques d’orthopédie
et de traumatologie au mois d’août 2015. Nous avons intégré ici
les remarques pertinentes que les équipes hospitalières nous
ont signalées.
Dans un cadre scientifique et politique, un bénéfice important
en matière de qualité des soins peut justifier la publication
transparente de données, même imparfaites. Un exemple
clair est la diffusion par l’Agence Intermutualiste des
données de volumes de travail sur les oesophagectomies
et les pancréatectomies en Belgique29. Il s’agit évidemment
d’un indicateur indirect et donc imparfait, mais le lien
scientifiquement démontré avec le résultat des soins justifie
l’urgence de concentrer les patients dans des centres experts.
La société et les gestionnaires du système de santé sont
demandeurs de telles publications. La suppression des risques
et l’utilisation plus efficiente des ressources bénéficieront à
terme également aux équipes hospitalières.
Mais c’est surtout dans un cadre commercial, que le risque
est très important de voir publier des données fausses pour
favoriser les intérêts matériels et financiers d’un partenaire
ou l’autre du système. C’est pourquoi dans le cadre de l’étude
sur les PTH, une collaboration a été recherchée avec les
hôpitaux et les associations scientifiques. Cette collaboration
n’a toutefois pas permis encore, ni pour nos études, ni dans
le cadre du projet VIP², d’aboutir à un jeu d’indicateurs
consensuels. Nous espérons que la publication de nos données
permettra aux différents acteurs en place de faire le pas vers
une transparence plus rationnelle.
Le deuxième risque est la mauvaise interprétation d’un
résultat correct. Chaque acteur du système de soins interprète
évidemment les résultats présentés en fonction de ses propres
objectifs et attentes. La tension entre l’amélioration attendue de
la qualité et la rentabilité économique accrue des institutions
explique aisément les principales différences de point de vue.
La troisième difficulté est liée au sentiment aigu d’être jugé (ou
même « puni ») par la publication de résultats peu favorables.
Cette difficulté est encore augmentée par l’utilisation possible
des résultats pour attribuer une responsabilité civile ou
b
14
Rappelons que le benchmark correspond au meilleur résultat de la comparaison et donc pas à la moyenne.
MC-Informations 262 • décembre 2015
même pénale. Cette difficulté fait partie intégrante de notre
démarche. La MC en est consciente et est donc demandeuse
de collaborations et de négociations rationnelles pour définir
ensemble comment exploiter au mieux les données dont
disposent les mutuelles pour améliorer en même temps
l’information des patients et des prestataires, la gestion du
système de santé et la qualité des soins.
7.Discussion
Tout résultat de soins est l’aboutissement d’une conjonction
de facteurs. L’analyse statistique d’un nombre nécessairement
limité d’indicateurs, laissera toujours l’un ou l’autre acteur du
système sur sa faim ou frustré. L’argumentation éthique n’est
jamais loin, car les intérêts des patients, des soignants et des
organisateurs ou des financeurs du système sont parfois non
congruents. L’absence d’analyse et l’absence de transparence
mènent évidemment aux arguments éthiques inverses.
Nos études souffrent de plusieurs limitations, dont nous avons
déjà évoqué les principales dans ce qui précède.
• Nous travaillons sur des données de la MC. Nos membres
ne consultent pas suffisamment certains hôpitaux pour
que nous puissions décrire leur fonctionnement de façon
fiable. Des lecteurs attentifs auront remarqué l’absence par
exemple du CHU Erasme, du CHU de Charleroi ou de l’hôpital
de Tivoli dans nos analyses. Dans la partie francophone
du pays, ceci peut donc représenter un biais important. La
solution évidente est de recourir aux bases de données de
l’Agence Intermutualiste30 pour de futures études.
• Nos données sont plus récentes que d’autres, mais il y a
inévitablement un délai de production pour des analyses
aussi détaillées et complexes que celles-ci. Il se peut donc
que certains éléments aient changé entre la fourniture des
soins et la publication de nos chiffres. Nous avons déjà cité
les changements de prestataires ou de type de prothèse.
Ce défaut sera d’autant plus réduit que la production des
analyses pourra se faire en ‘temps réel’ et donc à la demande
et avec la participation des équipes hospitalières.
• Deux de nos indicateurs sont basés sur des cohortes
observées pendant dix ans. Les changements qui se
sont opérés entre le début et la fin de l’observation sont
nécessairement agrégés dans les résultats. Des analyses
à plus court terme de la survie des prothèses ont déjà été
faites en Belgique. Elles ne permettent pas de différencier
les pratiques.
• Nous travaillons à l’échelle des hôpitaux. Des analyses plus
fines pourraient se faire au niveau des sites, des équipes de
soins ou même de chirurgiens individuels. Ceci demandera
aussi, au minimum, de travailler sur les données de l’Agence
Intermutualiste. La protection de la vie privée devra être
mise en balance avec les bénéfices attendus en matière de
qualité des soins.
Nos études ne prétendent évidemment pas être un facteur de
changement en isolation de tout ce qui se fait par ailleurs pour
améliorer la qualité et optimiser les coûts des soins. Pendant
la période observée, bon nombre d’hôpitaux ont développé
d’autres modes d’organisation multidisciplinaire des soins, les
protocoles opératoires et les types de prothèses ont évolué, la
nomenclature de remboursement et certaines autres modalités
de financement (paiement du Budget des Moyens Financiers
des hôpitaux en douzième, forfaitarisation des médicaments ou
montants de référence par exemple) ont changé. Les contrats
qualité-sécurité du SPF SPSCAE, un soutien aux activités
transfusionnelles, la production d’autres indicateurs et la mise
en place de projets organisationnels influencent directement
ou indirectement les pratiques.
Malgré tous ces efforts, du travail reste apparemment à
accomplir pour garantir à tous les citoyens un accès à des
soins de qualité dans tous les hôpitaux du pays. La publication
d’études sur la qualité des soins ne représente qu’une petite
partie de ces efforts, petite mais essentielle.
On peut se demander si le travail fourni par la MC pendant
15 ans n’est pas du genre ‘Too little, too late’. De nouvelles
initiatives se mettent en place auxquelles il sera sans doute
plus efficient de contribuer dans le futur.
Aujourd’hui, la collaboration de l’AIM-IMA avec VIP², PAQS et
autres healthdata.be est déjà une réalité. Le remplissage du
registre Orthopride doit devenir une habitude et être géré en
commun par les professionnels et les gestionnaires de banques
de données. Des incidents comme ceux des prothèses à large
tête métal-métal31 peuvent être prévenus par une meilleure
politique d’autorisation des implants.
D’autres indicateurs que ceux que nous présentons ici
devraient compléter les analyses actuelles. L’organisation
ICHOM32 (International Consortium for Health Outcomes
Measurement) propose de calculer les résultats des soins
à partir de données fournies, entre autres, par les hôpitaux
eux-mêmes, au sein d’un benchmarking planétaire. Une de
ses principales sources de données correspond aux Patient
Reported Outcome Measurements (PROM), sans doute la
mesure la plus appropriée dont nous pouvons disposer pour
connaître les résultats réels des soins, ceux vécus par le patient.
MC-Informations 262 • décembre 2015
15
Ces PROM doivent être combinés à des enquêtes qui décrivent
le vécu des soins (Patient Reported Experience Measurment
ou PREM) et la satisfaction. Les mutualités sont extrêmement
bien placées pour adresser aux patients les questionnaires
correspondants et pour lier leurs réponses aux soins qui ont
été prestés. La figure 1 reprend le jeu d’indicateurs proposés
par ICHOM.
Les recommandations de pratique clinique prennent de plus en
plus de place dans la pratique des soins. Des incitants financiers
liés au respect de ces recommandations, ou mieux encore aux
résultats cliniques des soins, pourraient à terme compléter les
incitants plus classiques à la production de soins, comme le
paiement à l’acte actuel33.
Tous ces efforts doivent viser à fournir aux patients des soins
qui sont objectivement, pour tous les partenaires du secteur, de
la meilleure qualité possible. Rappelons, si besoin en était, que
l’Institute of Medicine américain34 définit de tels soins comme
des soins :
• centrés sur le patient, dont on connaît donc les attentes, les
perceptions et le vécu, mais aussi les risques individuels ;
• équitables et qui ne sont donc pas réservés à ceux qui ont
les moyens de se les payer ;
• sûrs et qui ne provoquent donc pas eux-mêmes de lésions
indépendantes de la pathologie initiale ;
• prestés au bon moment et donc non seulement dans la
bonne séquence, mais aussi au bon moment de la vie et de
la pathologie du patient.
Peu de personnes remettent en cause ces six critères.
Leur réalisation dépendra de la conjonction de beaucoup
d’initiatives. Le calcul, l’analyse et la publication d’indicateurs
de performance et de qualité transparents, au sein de projets
qui regroupent tous les acteurs du système de santé, en font
certainement partie. La MC à partir de ses études sur les PTH
et des collaborations créées dans ce contexte, cherche à
s’inscrire dans cette mouvance.
• efficaces et qui donc améliorent la santé des patients ;
• efficients et qui ne demandent donc pas de déploiement de
moyens disproportionnés ;
Figure 1 : Indicateurs Prothèses Totales de Hanche et de Genou
© ICHOM.
16
MC-Informations 262 • décembre 2015
Notes :
1
Diels J. (2000) Prothèse totale de hanche. Variations des pratiques médicales et résultats à long terme. Dossier thématique MC 2.
2
Kerleau M. (1998) L’hétérogénéité des pratiques médicales, enjeu des politiques de maîtrise des dépenses de santé. Sc Soc & santé, 16, 5-34.
3
Ackaert K., de Béthune X. & Mertens R. (2009) Prothèses totales de hanche en Belgique: analyse de suivi. Partie 1. Nombre de prothèses de hanche et coût d’une
prothèse totale de hanche. MC-Info 236, 24-32.
4
Ackaert K., de Béthune X. & Mertens R. (2009). Prothèses totales de hanche en Belgique : analyse de suivi. Partie 2. Variation des types de prothèses et durée de survie.
MC-Info 238, 3-18.
5
De Béthune X., Boly J., Van Dooren J., Gillet P. & Ackaert K. (2011) Prothèses totales de hanche en Belgique : Une analyse détaillée des pratiques et résultats sur les
prothèses totales de hanche: Et après ? MC-Info 245, 20-24.
6
de Béthune X., Ackaert K., Gillet P. & Van Dooren J. (2014) Total hip arthroplasty in Belgium: the contribution of a social health insurer to the debate. Acta Orthopaedica
Belgica, 80, 348-356.
7
https://docs.vlaamsparlement.be/docs/stukken/2009-2010/g191-1.pdf
8
http://www.google.be/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&frm=1&source=web&cd=3&cad=rja&uact=8&ved=0CCsQFjACahUKEwjt36v_4bTHAhULtBQKHR_ICDM&url=http%3A
%2F%2Fsocialsante.wallonie.be%2Fsites%2Fall%2Fmodules%2FDGO5_MoteurRecherche%2Fdownload.php%3Fdownload_file%3D2015_plan%2520wallon%2520qualite
%2520des%2520soins_hospitalierscirculaire.pdf&ei=TEPUVe2JMovoUp-Qo5gD&usg=AFQjCNGXdG8OWpI8o0oGXc4SHvSjuwJ-gQ
9
https://www.zorg-en-gezondheid.be/kwaliteitsindicatorenziekenhuizen/
10 www.paqs.be
11 http://www.deblock.belgium.be/fr/maggie-de-block-lance-la-r%C3%A9forme-du-financement-des-h%C3%B4pitaux
12 Ackaert K. & de Béthune X. (2015) Nicolas a une hanche qui flanche. MC-Info 261, 23-36.
13 Jacques J. & Kohl P. (2012) Les données de routine. Un instrument d’amélioration de la qualité des soins ? Hospitals.be 4, 15-17.
14 Smolders K., Den Ouden A., Nugteren W. & Van der Wal G. (2012) Does public disclosure of quality indicators influence hospitals’ inclination to enhance results ? Intl Jl
Qual Health Care, 24, 129-134.
15 Vanhaecht K. (2012) De pers en transparantie over de kwaliteit van de zorg. Avonddebat: 17/11/2012. Departement Maatschappelijke Gezondheidszorg, KU Leuven.
16 Voir par exemple : http://www.sudinfo.be/1229461/article/2015-03-05/toutes-les-ecoles-de-wallonie-et-bruxelles-ont-recu-un-indice-sur-20-qui-permet
http://worldtop20.org/global-universities?gclid=CNabgu_6r8cCFVMatAodPT4Ijg
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2008/06/03/01016-20080603ARTFIG00003-le-palmares-de-l-efficacite-de-la-police-ville-par-ville.php
http://landingieu.ie.edu/ie-university-nb?gclid=CO322LL6r8cCFYbItAodFysKWg
17 Brandhome (2010). De grote ziekenhuisenquête.
18 http://vlaamspatientenplatform.be/
19 http://www.zorg-en-gezondheid.be/kwaliteitsindicatorenziekenhuizen/
www.zorgkwaliteit.be
20 http://www4.vlaanderen.be/wvg/zorginspectie/inspectieverslagen/Paginas/ziekenhuizen_verslagen.aspx
21 de Béthune X., Segouin C., Mertens R. & Dusauchoit T. (2007) Premiers pas de l’accréditation hospitalière en Belgique : l’évaluation d’un exercice exploratoire. Journal
d’Economie Médicale 25, 239-249.
22 https://docs.vlaamsparlement.be/docs/stukken/2009-2010/g191-1.pdf
23 www.paqs.be
24 http://www.scopesante.fr/
25 http://www.igz.nl/actueel/nieuws/het_resultaat_telt_ziekenhuizen_2013.aspx
26 Voir par exemple le numéro récent du Point en France (20/8/2015) qui publie comme chaque année, le palmarès des hôpitaux français.
27 Maguerez G. (2005) L’amélioration rapide de la qualité. Presses de l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique, Rennes (http://www.presses.ehesp.fr/hopital/
management/hors-collection/Details/136/65/hopital/conduite-du-changement-et-gestion-des-ressources-humaines/hors-collection/lamelioration-rapide-de-la-qualitedans-les-etablissements-sanitaires-et-medico-sociaux.html).
28 Institute for Healthcare Improvement (2003). The Breakthrough Series. IHI’s Collaborative Model for Achieving Breakthrough Improvement. http://www.ihi.org/
resources/Pages/IHIWhitePapers/TheBreakthroughSeriesIHIsCollaborativeModelforAchievingBreakthroughImprovement.aspx
29 http://www.nic-ima.be/Communique-de-presse-Mutualites-et
30 www.ima-aim.be
31 https://www.depuysynthes.com/asrrecall
http://www.stryker.com/en-us/products/Orthopaedics/modularneckstems/index.htm
32 http://www.ichom.org/medical-conditions/hip-knee-osteoarthritis/
33 De Maeseneer J, Aertgeerts B, Remmen R & Devroey, D. (2014) Together we change. Eerstelijnsgezondheidszorg: nu meer dan ooit! Brussel. https://www.
uantwerpen.be/images/uantwerpen/container2146/files/together-we-change-2edruk.pdf
34 Kohn L., Corrigan J. & Donaldson M. (2000) To err is human. Building a safer health system. The National Academies Press. Washington. http://www.nap.edu/
catalog/9728/to-err-is-human-building-a-safer-health-system
MC-Informations 262 • décembre 2015
17
Consommation de soins de santé
Recours aux urgences hospitalières : exploration des
données de la MC
Hervé Avalosse, Agnès Chapelle, Fabienne van Sloten - département R&D
Résumé
En Belgique, le volume des passages aux urgences est en croissance d’environ 5% par an. A l’aide des
données de facturation de la MC, nous pouvons dresser le profil des usagers. Ce sont les jeunes enfants, les
personnes âgées, des populations plus précarisées ou ayant moins de revenus, comme les bénéficiaires de
l’intervention majorée, du revenu d’insertion sociale, les invalides qui ont davantage recours aux urgences
hospitalières.
Autres caractéristiques des passages aux urgences :
• dans deux tiers des cas, c’est à l’initiative de l’usager ;
• dans 44% des cas, le passage aux urgences a eu lieu la nuit, le week-end ou durant des jours fériés ;
•dans 40% des cas, les passage aux urgences est suivi d’une admission hospitalière ou de soins dans le
cadre d’une hospitalisation de jour.
Mentionnons encore l’existence de différences régionales significatives : les Wallons et les Bruxellois ont
une plus grande propension à recourir aux urgences hospitalières.
Mots-clés : recours aux urgences, profil, consommation de soins, soins hospitaliers
1.Introduction
Dans l’actualité, reviennent souvent des considérations et les
commentaires sur la fréquentation des urgences. Beaucoup
pointent que cette fréquentation est en augmentation
constante et s’interrogent à ce sujet. Le but du présent article
est de donner, à l’aide des données de la MC, une idée du profil
des usagers des urgence : qui sont-ils ? Quel est leur profil
18
socio-démographique ? Nous abordons également quelques
caractéristiques du passage aux urgences : quand y va-t-on ?
Sur initiative de qui ? Enfin, dans la mesure du possible, nous
présenterons une mise en perspective avec quelques données
d’autres pays européens.
MC-Informations 262 • décembre 2015
2. Volume global de passages aux urgences
Nous détectons1, dans les données de facturation, ces
passages aux urgences hospitalières via les honoraires pour la
prise en charge urgente dans une fonction reconnue de soins
urgents spécialisés2 (application à partir du 1er juillet 2007).
Globalement, en Belgique, le volume de passages3 aux
urgences se situe à un peu plus de 2,56 millions de passages
en 2014. Ce volume est en croissance soutenue, à raison de 5%
par année (pour la période 2008 à 2014). En comparaison4, le
volume d’admissions hospitalières, tout type confondu, a cru,
sur une période de 10 ans (de 2003 à 2013), à raison de 2,9% par
an. Si on singularise les hospitalisations de jour (chirurgicales
et non chirurgicales), leur rythme de croissance est de 5,2%
par an, tandis qu’il est d’environ 1% du côté des admissions
classiques.
Est-ce beaucoup ? Ces tendances sont-elles observées dans
d’autres pays ? Au Tableau 1 figurent quelques informations
relatives à nos pays voisins.
Si on exprime le volume de passage par an et par 10.000
habitants, la Belgique se situe à 2.240, la France à 2.275,
l’Allemagne à 2.470, la Grande-Bretagne à 3.300. Le volume
de passage aux urgences observé dans notre pays est donc
comparable à nos voisins. A noter que les Pays-Bas ont un
volume de passages aux urgences nettement plus faible (de
l’ordre de 1.130 à 1.300 par 10.000 habitants).
3. Profil socio-démographique des personnes qui
ont fréquenté les urgences hospitalières
Pour donner ce profil, concentrons-nous sur les données
relatives aux membres de la MC. Globalement, au cours de
l’année 2013, près de 14% de nos membres ont eu recours
aux urgences hospitalières (au moins une fois sur l’année).
Comment varie cette fréquence en fonction de l’âge, du sexe,
du statut social ?
Figure 1 : Volume de passages aux urgences par année de facturation – données INAMI
3.000.000
2.500.000
2.000.000
1.921.569
2.144.030
2.193.351
2009
2010
2.376.572
2.484.726
2012
2013
2.560.518
2.295.994
1.500.000
1.000.000
500.000
0
2008
2011
2014
Source : Période 2010-2014 : INAMI. Rapport standardisé concernant les dépenses comptables de l’année 2014. Note CSS 2015/74 Période 2008-2009 :
INAMI. Rapport standardisé. Secteur 1.4. HONORAIRES MEDICAUX – CONSULTATIONS, VISITES ET AVIS, dates de publication : mai 2010, mai 2011
1 Attention, les données de facturation détenues par les mutualités ne couvrent pas l’entièreté de l’activité des services d’urgences des hôpitaux. Comme le
souligne AlterEchos : « 11% des personnes hospitalisées en 2012 dans le réseau des hôpitaux publics bruxellois (Iris) n’étaient pas en ordre de mutuelle.
C’est aussi la situation de 10% de personnes qui arrivent aux urgences de la clinique Saint-Jean, structure privée située entre Rogier et Botanique, dans le
centre de Bruxelles. Également au cœur de la capitale, dans le quartier populaire et de plus en plus trendy des Marolles, l’Hôpital Saint-Pierre. En 2013, on
y a mené 13.000 enquêtes sociales (enquêtes administratives ayant pour but l’octroi de l’aide médicale urgente aux personnes sans droit de séjour) et 2.500
interventions sociales concernant des sans-abri ont été réalisées. Sans-abri, sans-papiers… les patients précaires ont des profils divers et cumulent les problématiques (problèmes de logement, de santé mentale, d’alcoolisme…). Pour beaucoup, la salle d’urgence est la seule porte d’entrée au système de soins. »
http://www.alterechos.be/fil-infos/pourquoi-hopitaux-et-premiere-ligne-veulent-et-doivent-se-parler-davantage
2
Prestations de l’article 25 de la nomenclature, section 12, §3bis.
3
Nombre de passages = nombre de cas pour les codes suivants : 590516, 590531, 590553, 590575, 590634, 590656, 590671, 590693, 590752, 590774, 590796, 590811.
4
D’après le graphique 1, provenant de : Crommelynck A, Wantier M. 2015. 10ème Baromètre MC de la facture hospitalière – Chambre individuelle : toujours plus
chère. MC-Informations 259 : 17-38.
MC-Informations 262 • décembre 2015
19
Tableau 1 : Volume de passage aux urgences dans quelques pays européens
PAYS
(population)
Nombre de passages aux
urgences (million/an)
Nombre de passages aux
urgences par 10.000 habitants
Progression du nombre
de passages aux urgences
BELGIQUE 5
(11,15 millions)
2,56 (2014)
2.300
5% / an
FRANCE6
(66,3 millions)
18,4
(10,6 millions de personnes dont
¼ font plusieurs passages/an)
2.275
30% en 10 ans
21
2.275
ALLEMAGNE7
(80,9 millions)
>20
12 (2007)
2.470
8% en 2007
PAYS-BAS
(16,8 millions)
Estimation de 1,9 à 2,2 (2011)
de l’ordre de 1.130 à 1.300
2% à 4% / an
GRANDE-BRETAGNE
(63,7 millions)
3.1. Par âge et sexe (Figure 2)
La proportion de membres MC qui ont eu recours aux
urgences au cours de l’année 2013 ne varie pas beaucoup en
fonction du sexe : 14,4% pour les hommes, 13,3% pour les femmes.
Le profil par âge est également très comparable tant pour les
hommes que les femmes : on voit poindre les jeunes enfants de
1 à 4 ans et, surtout, les personnes plus âgées, à partir de 75 ans.
Par contre, si on se concentre sur les jeunes chômeurs, on voit
que la proportion d’entre eux qui ont été aux urgences est de
26% lorsqu’ils ont 20 à 24 ans, 21,5% lorsqu’ils ont 25 à 29 ans.
Ces proportions sont plus élevées que celles observées pour
tous les 20-24 ans, 25-29 ans, indépendamment du fait qu’ils
travaillent ou pas.
3.2. Critères sociaux (Figure 3)
3.3. Selon le lieu de résidence (Figure 4)
Le pourcentage de passages aux urgences est plus élevé pour
certaines catégories de personnes comme les bénéficiaires
de l’intervention majorée (21%), les bénéficiaires du revenu
d’insertion sociale (28%), les bénéficiaires de la garantie
de revenus aux personnes âgées (19,5%), les familles
monoparentales8 (19%).
La proportion de membres MC qui ont eu recours aux urgences
au cours de l’année 2013 varie beaucoup en fonction du lieu
de résidence des membres. Dans l’arrondissement de Roulers,
la proportion de membres des MC ayant été aux urgences est
la plus faible : 9%. Par contre, pour les membres de la MC qui
résident dans l’arrondissement de Soignies, cette proportion
est la plus élevée : 21%. D’une façon générale, par Région,
la proportion est plus faible en Flandre (13%), qu’en Wallonie
(18%) et qu’à Bruxelles (19%).
Pour les personnes sous statut d’invalide ou de personne
handicapée (d’après leur code de titulaire), ce même
pourcentage s’élève à, respectivement, 20% et 21,4%.
Lorsqu’on considère ces chômeurs dans leur globalité,
indépendamment de leur âge, la proportion d’entre eux à aller
aux urgences n’est pas plus élevée9 que celle observée pour
l’ensemble de la MC (elle est même un peu plus faible : 12,6%).
5 INAMI. Rapport standardisé concernant les dépenses comptables de l’année 2014. Note CSS 2015/74.
20
6
Cour des comptes, Sécurité sociale 2014, Chapitre XII – Les urgences hospitalières : une fréquentation croissante, une articulation avec la médecine de ville
à repenser, septembre 2014 (www.ccomptes.fr).
7
Academic Emergency Medicine, December 2011, Vol. 18, N°12, p.1363.
8
Il s’agit des familles composées d’un adulte et d’un ou plusieurs enfants (moins de 18 ans), d’après la composition familiale au sens du Maximum A Facturer
(MAF).
9
Une étude des mutualités socialiste faisait déjà les mêmes observations sur base de leurs données de 2008 : « Les chômeurs de longue durée font figure
d’exception avec un taux de recours [aux urgences] inférieur à la moyenne. ».
In : De Wolf F, Van Overloop J. 2011. Analyse de profil des patients recourant aux urgences hospitalières. UNMS. Direction Etudes. p.7.
MC-Informations 262 • décembre 2015
Figure 2 : Proportion de membres de la MC qui ont eu recours aux urgences hospitalières au moins une
fois au cours de l’année 2013 – par classe d’âge et sexe
35%
HOMMES
32,0%
30%
27,4%
25%
22,3%
21,8%
20%
17,6%
15%
16,1%
14,4% 15,0%
16,7%
16,7%
15,1% 13,6%
14,1%
13,9%
12,8%
12,1%
11,4%
10,9% 10,9% 11,0%
11,8%
10%
5%
90+
85-89
80-84
75-79
70-74
65-69
60-64
55-59
50-54
45-49
40-44
35-39
30-34
25-29
20-24
15-19
10-14
05-09
01-04
0
HOMMES
0%
35%
FEMMES
30%
28,6%
26,4%
25%
21,0%
20%
15%
18,8%
15,0% 14,4%
13,3% 12,9%
13,2%
15,8%
13,7%
12,7%
12,8%
11,6%
11,7%
10,7%
10%
10,2% 10,0% 10,1% 9,8% 10,6%
5%
MC-Informations 262 • décembre 2015
90+
85-89
80-84
75-79
70-74
65-69
60-64
55-59
50-54
45-49
40-44
35-39
30-34
25-29
20-24
15-19
10-14
05-09
01-04
0
FEMMES
0%
21
Figure 3 : Proportion de membres de la MC qui ont eu recours aux urgences hospitalières au moins une
fois au cours de l’année 2013 – quelques critères sociaux
30%
ensemble des membres MC
27,9%
26,0%
25%
21,5%
21,4%
21,1%
20%
20,0%
18,7%
15%
13,8%
12,6%
10%
5%
0%
Ensemble des Bénéficiaires
membres MC de l'intervention
majorée
Bénéficiaires
du revenu
d'insertion
sociale
Handicapés
Invalides
Familles
chômeurs de
monoparentales longue durée
chômeurs de
longue durée
20-24 ans
chômeurs de
longue durée
25-29 ans
Figure 4 : Proportion de membres de la MC qui ont eu recours aux urgences hospitalières au moins une
fois au cours de l’année 2013 – par arrondissement (lieu de résidence du patient)
22%
ensemble des membres MC : 13,8%
20%
18%
18,8%
17,7%
16%
14%
12,6%
12%
10%
8%
6%
4%
0%
ENSEMBLE
VLAANDEREN
WALLONIE
BRUXELLES-BRUSSEL
ROESELARE
DIKSMUIDE
TIELT
KORTRIJK
IEPER
DENDERMONDE
MECHELEN
TONGEREN
GENT
MAASEIK
VEURNE
LEUVEN
TURNHOUT
ST-NIKLAAS
HASSELT
EEKLO
HALLE VILVOORDE
AALST
OUDENAARDE
VIRTON
BRUGGE
NEUFCHATEAU
VERVIERS
ANTWERPEN
OOSTENDE
MARCHE-FAMENNE
HUY
BASTOGNE
NIVELLES
PHILIPPEVILLE
ARLON
DINANT
WAREMME
NAMUR
MONS
MOUSCRON
LIEGE
TOURNAI
BRUXELLES-BRUSSEL
ATH
THUIN
CHARLEROI
SOIGNIES
2%
Région
22
Arrondissement
MC-Informations 262 • décembre 2015
4. Quelques caractéristiques des passages aux
urgences (Figure 5)
4.1. Quand va-t-on aux urgences ?
Grâce aux détails des codes de nomenclature attestés, aux
dates de prestations, on peut donner des précisions quant
au moment où on va aux urgences. Pour les membres de la
MC, au cours de l’année 2013, près de 44,3% des passages
aux urgences ont eu lieu la nuit, durant un week-end ou des
jours fériés. Ce dernier pourcentage varie peu en fonction de
l’arrondissement de résidence des patients.
Par contre, lorsque les patients sont des nouveaux nés, cette
proportion grimpe à 57%. On observe également une proportion
plus élevée que la moyenne générale pour les enfants de 1 à 4
ans (51%), les jeunes adultes de 20 à 24 ans (54%), de 25 à 29
ans (52%).
4.2. Qui prend l’initiative d’aller aux urgences ?
Cette question n’est pas neutre d’un point de vue financier. En
effet, comme l’indique le Tableau 2, la nomenclature prévoit des
tickets modérateurs différenciés selon celui qui prend l’initiative
d’aller aux urgences. Si le patient vient de sa propre initiative, le
ticket modérateur sera plus élevé que s’il est référencé par son
médecin (on parle alors de ‘lettre de renvoi’). Si le patient a été
adressé directement aux urgences hospitalières via le service
100/112 (ou le SMUR), on considère cette situation comme
assimilée à une ‘lettre d’envoi’.
Dans près de 34,4% des cas : le patient est arrivé aux urgences
hospitalières avec une lettre de renvoi de son médecin traitant.
à 78% pour les 90 ans et +. Comme le montre aussi la Figure
6, ce pourcentage varie également selon l’arrondissement où
résident les patients. Il est le plus faible dans l’arrondissement
de Mons (14,6%), dans la Région de Bruxelles-Capitale (21,7%) .
Il est le plus élevé dans les arrondissements d’Arlon (62,8%) et
de Virton (62,9%).
Par ailleurs, remarquons le fait d’avoir un dossier médical
global (DMG) ne semble pas avoir d’influence : la proportion
observée de membres MC avec un DMG et qui ont eu recours
aux urgences hospitalières est quasi identique à celle des
membres sans DMG10.
4.3.Le passage aux urgences est-il suivi d’une admission
hospitalière ?
Dans près de 31% des cas, le passage aux urgences a mené
à une admission hospitalière classique (donc, le patient a
séjourné au moins une nuit à l’hôpital). Si on tient compte des
hospitalisations de jour qui ont eu lieu le même jour que le
passage aux urgences, alors ce pourcentage monte à 40%.
La proportion de passages aux urgences suivis d’une admission
hospitalière et/ou de soins d’hospitalisation de jour varie en
fonction de l’âge : plus élevée pour les nouveaux nés (36%), puis
en diminution jusqu’à 10-14 ans (12%), ensuite en augmentation
croissante avec l’âge (à 60-64 ans, on atteint les 50%, à 90 ans
et + : 80%).
Cette même proportion varie selon la Région où résident les
patients : pour les wallons (36%) et bruxellois (29%), le passage
aux urgences est moins fréquemment suivi d’une hospitalisation
(classique ou de jour) que pour les patients flamands (43%).
Ce pourcentage global varie beaucoup et linéairement en
fonction de l’âge du patient. De 13% pour les nouveaux nés
Tableau 2 : Ticket modérateur à charge du patient suite à un passage aux urgences et/ou contact avec
un médecin généraliste
2015
Bénéficiaire de l’intervention majorée
Assuré ordinaire
• Sans ‘lettre de renvoi’
11,23 €
20,21 €
• Avec ‘lettre de renvoi’
1,67 €
4,5 €
Consultation d’un médecin généraliste
1,5 €
6€
Consultation d’un médecin généraliste, puis
renvoi aux urgence
3,17 €
10,5 €
Passage aux urgences
10 Déjà constaté également par l’étude des mutualités socialistes.
MC-Informations 262 • décembre 2015
23
proportion d'urgences
proportion d'urgences
proportion d'urgences
Figure 5 : Part des passages aux urgences selon quelques caractéristiques – données MC 2013
suivies d'une admission ou d'une hospitalisation de jour
39,9%
autres situations
60,1%
sans renvoi
65,6%
via renvoi du médecin généraliste, via service 100
34,4%
la nuit, le week-end, les jours fériés
44,3%
55,7%
en journée (du lu au ve)
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
Figure 6 : Proportion d’urgences via renvoi du médecin (service 100/112) ou non, par arrondissement
(lieu de résidence du patient) – données MC 2013
SANS lettre d'envoi
AVEC lettre d'envoi
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
MONS
BRUXELLES-BRUSSEL
CHARLEROI
TOURNAI
ATH
SOIGNIES
NIVELLES
LIEGE
ANTWERPEN
MOUSCRON
WAREMME
MARCHE-FAMENNE
BASTOGNE
PHILIPPEVILLE
THUIN
NAMUR
VERVIERS
MECHELEN
ST-NIKLAAS
DINANT
ROESELARE
HALLE VILVOORDE
OUDENAARDE
MAASEIK
EEKLO
HASSELT
BRUGGE
KORTRIJK
VEURNE
OOSTENDE
HUY
IEPER
TONGEREN
AALST
TURNHOUT
TIELT
LEUVEN
GENT
DIKSMUIDE
NEUFCHATEAU
DENDERMONDE
ARLON
VIRTON
ALL
0%
24
MC-Informations 262 • décembre 2015
5. Quelques réponses proposées à l’étranger
Suite à des constats similaires, d’autres pays européens ont
tenté de mettre en place des réponses pour éviter que le patient
ne s’adresse directement aux urgences hospitalières quand ce
n’est pas nécessaire médicalement.
Pour répondre à la problématique de la disponibilité des
prestataires aux heures tardives, les week-ends et jours fériés
le Royaume-Uni a mis en place deux types de structures :
•Les WICs (Walk in Centres), des centres médicaux sans rendez-vous qui offrent une prise en charge par une infirmière
7 jours sur 7 jours de 7h00 à 22h00. A l’origine, ces WICs
étaient implantés près des lieux de travail, dans des gares.
Ils sont maintenant intégrés dans les départements des urgences des hôpitaux.
•Les MIUs (Minor injuries units) sont des unités de prise en
charge des petits traumatismes souvent intégrés dans des
WICs ou d’autres structures de soins primaires. Elles offrent
un accès à un médecin généraliste 7 jours sur 7 jours sans
rendez-vous.
Aux Pays-Bas, les coopératives de médecins généralistes
accueillent les patients en dehors des heures ouvrables (de
17h00 à 8h00) et le week-end. Certaines sont intégrés aux
services des urgences des hôpitaux.
En France, les maisons médicales de garde se mettent peu
à peu en place. Elles sont un lieu d’accueil physique des
patients, ouvert à la population sans discrimination, sans
prise de rendez-vous, aux heures de fermeture des cabinets
médicaux. Les soins médicaux y sont dispensés sous forme de
consultation. La plupart sont établies dans un établissement de
santé ou d’hébergement et accessibles en semaine de 20h00 à
24h00 et le dimanche de 8h00 à 20h00 ou 24h00 selon les cas.
Le patient s’y présente directement ou sur conseil du numéro
d’appel d’urgence 15 (112).
Une application similaire existe aux Pays-Bas avec
moetiknaardedokter.nl qui fonctionne sur base d’une série de
questions. Il donne aussi un lien vers le site thuisarts.nl où le
patient peut trouver des informations de santé.
Un système de régulation médicale par téléphone existe
aussi en France dans certains départements. Il s’agit d’une
plate-forme téléphonique ou des médecins libéraux et des
permanenciers orientent le patient.
Face à ces dispositifs, il s’agit d’être prudent et d’évaluer leur
impact sur la fréquentation du service des urgences.
6.Conclusion
Si dans notre pays, le volume de passages aux urgences est
en augmentation, il soutient toutefois la comparaison avec
d’autres pays voisins. Du côté des utilisateurs des urgences,
l’exploration des données de la MC nous permet de dresser
un profil de ceux et celles qui recourent davantage aux
urgences : ce sont les jeunes enfants, les personnes âgées,
des populations plus précarisées ou ayant moins de revenus,
comme les bénéficiaires de l’intervention majorée, du revenu
d’insertion sociale, les invalides … Dans deux tiers des cas, ceux qui se rendent aux urgences
l’ont fait de leur propre initiative, alors que le ticket modérateur
est plus élevé. Dans 44% des cas, le passage aux urgences a
eu lieu la nuit, le week-end ou durant des jours fériés. Dans
40% des cas, il est suivi d’une admission hospitalière ou de
soins dans le cadre d’une hospitalisation de jour. Mentionnons
encore des différences régionales significatives : les Wallons
et les Bruxellois ont une plus grande propension à recourir
aux urgences hospitalières. Et c’est bien plus souvent dans
les arrondissements wallons et à Bruxelles que ce passage
aux urgences se fait à l’initiative du patient lui-même et non du
médecin.
Pour encourager les patients à d’abord consulter un médecin
généraliste ou prendre un avis médical avant de se rendre aux
urgences, différents outils sont développés. Au Royaume-Uni, le
NHS propose un numéro de téléphone gratuit de conseils. Une
infirmière spécialisée répond aux appels, donne des conseils
et si la situation le requiert transfert l’appel à un département
paramédical qui envoie une ambulance.
Le service de santé public anglais a également développé
une application pour « smartphone » aussi accessible sur
Internet nommée « symptom checker ». Cet outil donne des
informations pour selon la situation, se soigner soi-même, gérer
les symptômes avant de consulter un médecin ou prendre la
décision de contacter les urgences11.
11https://www.nhs.uk/symptom-checker/
MC-Informations 262 • décembre 2015
25
Les inégalités en santé
Les inégalités en santé chez les membres des MC :
ne pas avancer, c’est reculer.
Hervé Avalosse, Sigrid Vancorenland et Rebekka Verniest
Département R&D
Avec nos remerciements à
Annemie De Ranter (CM Oostende – KAAP)
Paul Raymakers (CM Leuven)
Sylvain Duhayon (MC Hainaut Picardie)
Anne-Laure Mignot (MC Verviers-Eupen)
Résumé
Diverses études se sont déjà penchées sur le phénomène de l’inégalité en santé ou le fait qu’il existe des
différences en matière de santé selon la position que l’on occupe sur l’échelle sociale. Les MC l’ont elles aussi
mis en lumière explicitement en 2008. Dans une étude, elles ont démontré l’inégalité en santé à partir d’une
analyse des données de leurs membres. Depuis, de nombreuses initiatives ont été prises, notamment dans le
cadre de l’assurance maladie obligatoire, en vue de rendre les soins de santé plus accessibles et abordables.
D’autre part, il y a eu la crise économique mondiale, dont on sait qu’elle exerce également un impact
sur l’inégalité. La question est donc de savoir comment la situation a évolué ces dernières années. C’est
pourquoi, cet article examinera, pour un certain nombre d’indicateurs, dans quelle mesure l’inégalité sociale
est encore d’actualité en 2012 et comment celle-ci a évolué depuis la première étude basée sur les données
de 2006. Pouvons-nous espérer un effet positif de ces mesures ? Ou cette mise à jour confirmera-t-elle
les conclusions d’autres études, selon lesquelles l’inégalité continue obstinément d’exister, voire même
augmente dans certains domaines ?
Nos analyses récentes ne sont malheureusement pas toujours très encourageantes. Pour de nombreux
indicateurs, l’inégalité n’a pas baissé. Dans le meilleur des cas, nous observons une stagnation, mais il est
même parfois question d’une hausse de l’inégalité. Cet article vise néanmoins à attirer l’attention sur quelques
mesures positives prises par les autorités tant fédérales que régionales. Car nous sommes convaincus
de la valeur de ces mesures, qui ont eu un impact positif indéniable. Par conséquent, l’inégalité constitue
une conjonction de nombreux facteurs, qui font des mesures en matière de soins de santé des conditions
d’amélioration indispensables mais souvent insuffisantes.
À titre d'exemple, nous attirerons l'attention sur quelques projets concrets des mutualités chrétiennes
régionales. En effet, la lutte contre l'inégalité en général, et donc aussi l'inégalité en santé, relève d'une
responsabilité partagée de nombreux acteurs, dont les mutualités font également partie. Nous espérons
qu'ils feront des émules.
Nous nous pencherons également sur un certain nombre de problèmes qui contribuent à maintenir l’inégalité
sociale. D’une manière générale, nous indiquerons les améliorations possibles.
Les MC sont fermement résolues à poursuivre la lutte contre l’inégalité en santé !
Mots-clés : inégalités sociales, état de santé, taux de mortalité, taux de morbidité, soins de santé, secteurs
statistiques, revenu imposable
26
MC-Informations 262 • décembre 2015
1.Introduction
C’est avec des slogans tels que « La pauvreté engendre la
maladie, la maladie engendre la pauvreté » (1998) et « La
pauvreté nuit à la santé » (2008) que Welzijnszorg a par deux
fois attiré explicitement l’attention sur l’impact qu’exerce le
statut socioéconomique sur la santé. De nombreuses études
ont étudié en détail ce phénomène ces dernières années. Tel
est notamment le cas d’une étude réalisée par les MC en 2008,
axée sur l’analyse des données objectives de leurs membres
pour 2006. Cette analyse a elle aussi démontré clairement
l’existence d’inégalités en santé1.
Il est heureux de constater que le thème de l’« inégalité en
santé » a été régulièrement mis en évidence au cours de
la dernière décennie. Tout comme auparavant, des études
ont confirmé le phénomène et diverses solutions ont été
proposées. Des projets concrets sur le terrain, souvent
d’envergure modeste, n’ont eu de cesse de tenter de réduire
le fossé. Mais ce n’est pas tout. Ces dernières années, le
thème a été également relayé – plus fréquemment qu’avant –
par les responsables politiques. Cette « reconnaissance »
politique n’est pas sans importance. Elle permet en effet de
prendre des engagements dans des notes de politique afin
de remédier à ces inégalités. Elle donne également lieu à
des mesures concrètes visant à réduire les inégalités, par
exemple, en améliorant l’accessibilité des soins de santé
pour les groupes vulnérables. Il y a donc un espoir de voir
l’inégalité diminuer.
D’autre part, la profonde crise économique à laquelle les
pays du monde entier ont été confrontés ces dernières
années a entraîné des conséquences aux niveaux macro
(société, pouvoirs publics), méso (entreprises, dispositifs, ...)
et micro (individus). Des mesures positives sont différées, des
restrictions sont appliquées, il y a restructurations assorties de
pertes d’emploi, ... De plus en plus de familles ont du mal à joindre
les deux bouts à cause de la baisse du pouvoir d’achat, de la
hausse des prix, des conséquences des mesures d’austérité,
de la baisse des opportunités d’emploi... Ces conséquences
sont ressenties de manière plus aiguë par les plus vulnérables.
Ceci concerne les différents domaines et donc également la
santé et les soins de santé. Des études antérieures avaient déjà
montré l’impact négatif d’une crise économique sur l’inégalité.
Nous nous sommes donc demandé comment l’inégalité en
santé avait évolué dans l’intervalle chez les membres des MC.
Des évolutions positives sont-elles perceptibles, notamment
à la suite de mesures stratégiques concrètes ? Les inégalités
continuent-elles invariablement d’exister ? Voire, ont-elles
augmenté ? Vu que les MC disposent de données portant sur
plusieurs années, il est possible de vérifier la manière dont ces
différences évoluent dans le temps et de connaître l’impact de
mesures spécifiques et de faits sociaux particuliers. Les MC ont
donc décidé d’actualiser l’étude précédente, dont les résultats
sont résumés et commentés ci-après.
2.Méthode
2.1.Une méthode systématique pour mesurer les gradients
sociaux
Quand on parle d’inégalités sociales de santé, on fait référence
au fait que la santé suit un gradient social : à position socioéconomique décroissante, la santé tend à se détériorer et
l’espérance de vie à diminuer. Cette tendance a été mise en
évidence dans de nombreuses études. Pour la Belgique, les
résultats2 des différentes enquêtes de santé par interview
(1997, 2001, 2004, 2008 et 2013) vont clairement dans ce sens.
Comme la plupart des études en la matière, ces enquêtes de
santé ont recours aux déclarations et informations recueillies
auprès d’échantillons de la population.
La présente démarche a pour but de mettre en évidence et de
mesurer ces inégalités au sein de la population de nos affiliés
mutualistes en exploitant au mieux les données détenues
par la Mutualité chrétienne (MC). Pour y arriver, deux types
d’indicateur doivent être mis en relation :
• un indicateur relatif à la santé : ici, nous utilisons les
informations administratives et de consommation de soins
de santé ;
• une échelle de stratification sociale : via les statistiques
fiscales relatives aux secteurs statistiques où résident nos
affiliés.
Du fait de l’utilisation des bases de données de la MC, la
méthode suivie est systématique (couvre l’ensemble des
membres de la MC, des données administratives et de
consommation de soins de santé), porte sur des données
réelles enregistrées et contrôlées dans le cadre d’un système
de gestion et peut se répéter chaque année. Dès lors, on peut
suivre et évaluer au plus près les initiatives et mesures prises
en vue de réduire ces inégalités. Ce sont des avantages
réels par rapport aux enquêtes de santé menées sur base
d’échantillons (de l’ordre de 10.000 personnes), tous les trois
à quatre ans et portant sur les déclarations des répondants.
1
Avalosse, H. e.a. Inégalités sociales en santé : observations à l’aide de données mutualistes. MC-Informations 233, septembre 2008
2
Disponibles sur : https://his.wiv-isp.be/fr/SitePages/Rapports.aspx
MC-Informations 262 • décembre 2015
27
La méthode doit combiner une échelle sociale et des
indicateurs de santé. Nous décrivons plus tard ces notions
ainsi que la manière dont nous avons procédé pour construire
une échelle sociale en cinq classes de valeur croissante.
Ensuite nous indiquons quel type d’indicateur de santé nous
avons choisi.
On a donc bien, pour chaque secteur statistique, une indication
de la ‘richesse’ de ceux qui y habitent, dans la mesure du moins
où ils remplissent une déclaration fiscale. Sur base de l’adresse
du domicile de nos membres, on peut retrouver le secteur
statistique où ils résident. Enfin, via le secteur statistique, on
attribue un niveau de revenu (moyen ou médian).
2.2.2. Échelle sociale en cinq classes
2.2. Construction d’une échelle sociale
Généralement, la stratification sociale doit refléter le niveau de
revenus et/ou d’études de la population. Etant donné que les
mutualités ne disposent pas de données exhaustives sur les
revenus de leurs membres et ni en rapport avec les diplômes,
il nous faut donc procéder autrement. Nous construisons une
échelle sociale à l’aide de statistiques fiscales existantes au
niveau des secteurs statistiques.
2.2.1. Secteurs statistiques et revenus fiscaux
Un secteur statistique est une petite unité géographique de la
taille d’un quartier. L’ensemble du territoire belge est découpé
en 20.000 secteurs statistiques (qui se répartissent au sein des
589 communes du Royaume). Le SPF Economie dispose de
séries statistiques sur les revenus fiscaux au niveau de ces
secteurs statistiques. La notion fiscale utilisée est le revenu
total net imposable3.
Les séries statistiques disponibles comprennent :
1° le revenu moyen (= somme des revenus totaux nets
imposables divisée par le nombre de déclarations fiscales
prises en compte) ;
2° le revenu médian (= montant de la déclaration fiscale qui
partage la série en deux, les déclarations étant classées
par ordre croissant de valeur).
Pour la présente étude, nous privilégions le revenu médian
des secteurs statistiques comme indicateur de richesse (la
médiane d’une série n’étant pas sensible aux valeurs extrêmes).
Les statistiques du SPF Economie utilisées correspondent à
l’exercice fiscal de 2013 (portant donc sur les revenus de 2012)4.
Nous synthétisons ces informations en construisant cinq
classes de secteurs statistiques par ordre de valeur croissante
des revenus fiscaux médians.
Les limites des classes sont établies de façon à ce que chacune
regroupe 20% des déclarations fiscales au niveau du pays.
La 1ère classe correspond aux secteurs statistiques où les
revenus médians sont les plus faibles (notre interprétation : les
quartiers où se concentre la population la moins favorisée), la
5ème regroupe les secteurs statistique où les revenus médians
sont les plus élevés (notre interprétation : les quartiers où se
concentre la population la plus favorisée).
La population des membres de la MC (pour l’année 2012) est
ensuite répartie en fonction de leur lieu de domicile, dans les
cinq classes (Tableau 1). Environ 1,2% des membres ne peuvent
être répartis dans cette échelle. Deux raisons : l’adresse ne
permet pas de retrouver le secteur statistique, il n’y a pas de
revenu médian calculé pour le secteur statistique en cause5.
Dans la recension des résultats, la 1ère et la 5ème classe sont
dénommées, respectivement, « la classe la plus faible, la plus
basse » et « la classe la plus élevée ».
Tableau 1 : Répartition des membres MC dans les cinq classes de secteurs statistiques
Membres MC
3
28
Pas de répartition
54.746
1,2%
1. inférieurs
547.076
12,1%
2. bas
773.267
17,0%
3. moyens
956.941
21,1%
4. hauts
1.074.244
23,7%
5. supérieurs
1.133.491
25,0%
ENSEMBLE =
4.539.765
100%
« Le revenu total net imposable est constitué de tous les revenus nets, moins les dépenses déductibles. L’ensemble des revenus nets est la somme de tous les revenus
nets appartenant aux catégories revenus des biens immobiliers, revenus et recettes de capitaux et biens mobiliers, revenus professionnels et revenus divers ».
Disponible sur : http://statbel.fgov.be/fr/statistiques/chiffres/travailvie/fisc/
4
Dernières données disponibles fin 2014.
5
Lorsque le nombre de déclarations fiscales est trop faible, il n’y a pas de calcul des revenus médians. La limite est fixée à 20 déclarations fiscales.
MC-Informations 262 • décembre 2015
L’inconvénient majeur est que l’on ne dispose pas d’une échelle
sociale construite sur les revenus individuels mais bien d’une
approximation via la ‘valeur’ des secteurs statistiques de
résidence. Or, au sein d’un même secteur statistique, il peut y
avoir de grandes variations de richesse entre les familles qui y
résident.
2.3. Indicateurs de santé : indice standardisé
En tant qu’organe de gestion de l’assurance maladie, une
mutualité ne dispose pas de données diagnostics à propos de
ses membres. Toutefois, les données en notre possession nous
permettent de mettre en évidence divers événements liés à la
santé. Ces derniers sont :
1.déduits directement des données administratives (p.ex. :
décès, incapacité primaire, statut d’invalidité, admission à
l’hôpital, Dossier Médical Global, etc.) ;
2.construits sur base de codes de prestations de soins de
santé faisant l’objet d’un remboursement de la part de l’assurance maladie (p.ex. : avoir bénéficié de soins dentaires,
avoir eu un contact avec un médecin généraliste, avoir
consommé une certaine catégorie de médicaments, …).
Disposant de cette échelle sociale en cinq classes, nous
pouvons voir dans quelle mesure ces événements liés à la
santé suivent un gradient social. En guise d’indicateur, nous
utilisons la notion d’indice standardisé. Par exemple, pour un
événement comme ‘décès au cours de l’année 2012’, on calcule
l’indice standardisé de mortalité (Standardized Mortality Ratio
– SMR) pour les cinq classes décrites ci-dessus. L’indice
standardisé s’obtient grâce à une standardisation indirecte
afin de tenir compte du ‘profil’, de la structure particulière de
la population au sein de chacune des classes. Sauf mention
contraire, les paramètres pour la standardisation sont l’âge, le
sexe et la région (Wallonie, Flandre, Bruxelles) où se situe le
secteur statistique de domicile.
L’indice standardisé est calculé pour chaque classe de notre
échelle sociale. Il exprime alors le rapport entre le nombre
observés et attendus d’événements (d’après l’effectif, le
profil spécifique de la population de la classe concernée et
en appliquant les taux correspondants de la population de
référence). La population de référence étant indicée à la
valeur 100, si la valeur de l’indice standardisé est de 130 pour
un certain évènement et pour une certaine classe, alors cela
signifie que la fréquence de cet événement est 30% supérieure
dans cette classe par rapport à la population de référence.
3. Quelques résultats
Nos principaux résultats d’analyses sont présentés
graphiquement aux Figures 1 à 8. Nous n’avons pas cherché
à reproduire systématiquement tous les résultats présentés en
2008. Nous nous limitons, ici, aux résultats les plus pertinents
que nous comparons à ceux publiés en 2008. Attention,
l’échelle de l’indice standardisé change d’une figure à l’autre,
la population de référence peut varier d’une courbe à l’autre.
Dans la mesure où ils sont visibles, nous donnons également
l’intervalle de confiance (à 95%) autour de la valeur de l’indice
standardisé.
3.1.Mortalité
Concernant la mortalité, le gradient est particulièrement fort :
nous observons que les individus appartenant à la classe la
plus faible présentent, en 2012, un risque de mortalité de 25%
supérieur à la population de référence (ensemble des affiliés).
Comparé à la classe la plus élevée, le risque de mortalité est de
51% supérieur (=124,6/82,6). Ce qui veut dire, en d’autres mots :
les personnes vivant dans les quartiers les plus pauvres du
Royaume ont un risque accru de 51% de décéder dans l’année
par rapport à ceux qui vivent dans les quartiers les plus riches.
Ce gradient était déjà bien présent dans le passé, ce n’est
pas un phénomène transitoire mais bien stable. En effet, en
2006 (en appliquant aux données disponibles exactement la
même méthode que celle décrite ci-dessus), la surmortalité
observée auprès de la population la moins favorisée était de
45% (=121/83,4) par rapport à la population la plus favorisée.
3.2.Morbidité
Le gradient social de la santé peut être déduit en premier lieu
des différences en termes de morbidité ou de la mesure dans
laquelle les différentes classes sociales sont confrontées à la
maladie. Les MC ne disposent pas d’informations concernant les
maladies de leurs membres. Sur la base de certaines données,
il est néanmoins possible de déduire indirectement dans quelle
mesure les membres sont confrontés à la maladie. Cette étude
se concentrait sur l’incapacité de travail pour cause de maladie
(incapacité de travail primaire et invalidité), l’admission en
néonatalogie ou pédiatrie, la maladie pulmonaire obstructive
chronique et plusieurs paramètres de santé mentale.
MC-Informations 262 • décembre 2015
29
3.2.1. Incapacité de travail primaire et invalidité6
Les résultats de 2006 faisaient déjà apparaître que les
personnes (de 20 à 64 ans) issues de la classe sociale
inférieure présentaient un risque plus élevé d’être affectées
par une incapacité de travail et de passer en invalidité après
un an de maladie que les personnes issues de la classe
sociale supérieure (respectivement 55 et 66% de risques
en plus). En 2012, le gradient social de l’incapacité de travail
primaire est resté stable, mais il a considérablement augmenté
pour l’invalidité. En 2012, les personnes de la classe sociale
inférieure présentaient non moins de 98% de risques en plus de
passer en invalidité après un an de maladie que les personnes
de la classe sociale supérieure (=143,2/72,6).
Concrètement, cela signifie qu’une personne issue d’un quartier
plus pauvre aura deux fois plus de risques d’être encore malade
après un an qu’une personne d’un quartier plus nanti. Il s’agit là
d’une constatation inquiétante. Nos données ne permettent pas
d’emblée d’expliquer ce phénomène. Il se peut qu’une partie de
l’explication réside dans le nombre croissant de personnes en
incapacité de travail de longue durée à la suite de problèmes
psychiques. Nous verrons par ailleurs que les personnes en
situation précaire sont davantage confrontées à des problèmes
psychiques. Parallèlement, elles ont moins de chances de sortir
de cette situation.
3.2.2. Admission en pédiatrie ou néonatalogie
Le clivage social s’est également agrandi pour les admissions
en pédiatrie ou néonatalogie (soins des nourrissons malades
ou prématurés). En 2012, un enfant ou un jeune de moins
de 15 ans issu de la classe sociale inférieure avait 29% de
risques en plus d’être admis dans un service de pédiatrie ou
de néonatalogie qu’un enfant ou un jeune de la classe sociale
supérieure (= 116/89,6). En 2006, cet écart s’élevait à 19%.
La hausse constatée pourrait être due au nombre croissant
d’enfants nés dans une famille défavorisée7. L’écart se creuse
uniquement pour les admissions en pédiatrie ou néonatalogie
et non pour les admissions dans un hôpital général.
de la classe sociale inférieure ont 31% de risques en plus d’être
atteintes de MPOC que celles de la classe sociale supérieure
(=116/88,8).
3.2.4. Santé mentale
En 2006 déjà, les chiffres montraient une corrélation entre, d’une
part, la situation socioéconomique et, d’autre part, l’utilisation
d’antidépresseurs et l’admission en hôpital psychiatrique, deux
indicateurs de la santé mentale des membres. Les chiffres de
2012 indiquent que cet écart ne s’est pas réduit. Dans la première
étude, le risque que les personnes de la classe sociale inférieure
utilisent des antidépresseurs était 14% plus élevé que pour les
personnes de la classe supérieure. En 2012, ce pourcentage
atteint 17%. En ce qui concerne les antipsychotiques, ce risque
est par ailleurs nettement supérieur (53%). La détérioration de
la santé mentale se traduit également par un risque nettement
plus élevé d'admission dans un hôpital psychiatrique9. Ici aussi,
on observe une légère hausse de 60% en 2006 à 62% en 2012.
Ces écarts importants n’ont sans doute rien d’étonnant.
Différentes études établissent le lien entre les problèmes de
santé mentale et l’obligation de vivre ou de survivre durant
des années dans des conditions très précaires10. Ceci génère
des tensions et un stress permanents auxquels on ne voit
pas beaucoup d’issue. L’augmentation de l’inégalité peut
probablement être attribuée pour une partie (importante) au
contexte social des dernières années, notamment à la crise
économique que les groupes vulnérables subissent de plein
fouet. Par ailleurs, on constate également une tendance
généralisée à l’individualisation, à la responsabilisation
individuelle et à la culpabilisation. Les gens sont dès lors –
plus qu’avant – réputés personnellement responsables de leur
situation et sont supposés prendre eux-mêmes des initiatives
pour y apporter une amélioration. En l’occurrence, l’importance
du contexte général, d’une part, et l’absence de compétences
individuelles pour apporter des améliorations, ne sont pas
prises en compte.
3.2.3. Maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC)
La maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) est une
maladie pulmonaire chronique8. Les résultats de 2006 montraient
déjà l’existence d’un gradient social évident en matière de
MPOC. En 2012, cet écart est resté stable. Les personnes issues
6
Incapacité de travail primaire = les 12 premiers mois d’incapacité de travail ; invalidité = après 1 an d’incapacité de travail.
7
http://www.decenniumdoelen.be/ – baromètre de la pauvreté – tableaux généraux 2015
8
Les membres des MC confrontés à la MPOC ont été identifiés sur la base de leur consommation de médicaments (axée sur le volume estimé en DDD de médicaments
liés à certains codes ATC). Pour la MPOC, les codes ATC suivants ont été sélectionnés : R03A (adrénergiques pour inhalation), R03BA (glucocorticoïdes), R03BB (anticholinergiques), R03DA04 (théophylline et théophylline glycinate de sodium).
9
Tant l'admission dans un hôpital psychiatrique que dans une section psychiatrique d'un hôpital général (SPHG)
10 Samenlevingsopbouw Vlaanderen. Recht op gezondheid. Aanpak van de Gezondheidskloof. Resultaten van een verkenning. Septembre 2012
30
MC-Informations 262 • décembre 2015
Figure 1 : Mortalité
Figure 2 : Devenir invalide
135
150
mortalité (SMR) - Belgique 2012
130
120
121,0
124,6
mortalité (SMR) - Belgique 2006
population de référence
115
110
109,0
106,9
105
99,1
100
97,6
95
90,9
90
90,3
85
80
75
83,4
population de référence (indice =100) :
tous les affiliés MC
1. inférieurs
2. bas
3. moyens
4. hauts
82,6
population de référence
120
117,7
113,2
110
105,4
100
80
92,0
80,0
population de référence (indice =100) :
titulaires MC entre 20 et 64 ans
1. inférieurs
2. bas
72,6
3. moyens
4. hauts
5. supérieurs
Figure 4 : Santé mentale – 2012
190
120
être admis en service pédiatrique ou de soins
néonatals - Belgique 2012
116,0
115
180
être admis en service pédiatrique ou de soins
néonatals - Belgique 2006
110,5
population de référence
104,9
105
104,6
102,8
102,5
100
97,3
97,5
95
92,5
90
89,6
population de référence (indice =100) :
affiliés MC jusque 15 ans
2. bas
3. moyens
4. hauts
5. supérieurs
classes de secteurs statistiques de résidence
admission en hop. psy. ou service (neuro)psy.
d'un hop. général (2)
160
150
151,5
antipsychotiques (min 30 DDD) (3)
140
130
120
110
109,4
100
90,8
90
80
70
1. inférieurs
anti-dépresseurs (min 90 DDD) (1)
179,0
170
Indice standardisé (pour l'âge, le sexe et la région)
Indice standardisé (pour l'âge, le sexe et la région)
91,7
classes de secteurs statistiques de résidence
Figure 3 : Admission en pédiatrie ou néonatalogie
85
104,7
90
classes de secteurs statistiques de résidence
110
devenir invalide - Belgique 2006
132,8
130
70
5. supérieurs
devenir invalide - Belgique 2012
143,2
140
Indice standardisé (pour l'âge, le sexe et la région)
Indice standardisé (pour l'âge, le sexe et la région)
125
60
population de référence (indice =100) :
(1) , (2) et (3) tous les affiliés MC
1. inférieurs
2. bas
70,8
68,3
3. moyens
4. hauts
5. supérieurs
classes de secteurs statistiques de résidence
3.3.Prévention
3.3.1. Soins dentaires préventifs
Les soins dentaires préventifs (p. ex. détartrage, examen
buccal, soin des caries...) est un aspect classique des inégalités
sociales. En 2012, les jeunes de moins de 18 ans issus de la
classe sociale inférieure avaient 34% de chances en moins
de recourir aux soins dentaires préventifs que les jeunes de
la classe sociale supérieure (=73,6/112,2). Ce gradient social
est resté stable par rapport à 2006 (36 % de chances en moins
=72,4/113,6).
tranche des jeunes qui recourt aux soins dentaires préventifs.
Néanmoins, vu que cette proportion a augmenté pour toutes
les catégories sociales, le gradient social reste identique.
Entre 2006 et 2014, le nombre de jeunes qui utilisent les soins
dentaires préventifs a progressé de 27,8% à 36,6% pour les
personnes qui ne bénéficient pas de l’intervention majorée
et de 17% à 22,8% pour celles qui ont droit à l’intervention
majorée.
Pourtant, entre 2006 et 2012, des efforts ont été consentis
pour rendre les soins dentaires préventifs financièrement plus
accessibles aux jeunes. En 2006, les soins dentaires étaient
gratuits pour les enfants de moins de 12 ans. À partir du
1er juillet 2008, cette mesure a été étendue aux jeunes jusqu’à
leur 15e anniversaire et à partir de mai 2009 aux jeunes jusque
18 ans. La figure 5 montre que cette mesure a eu un effet sur la
Il est de notoriété publique que les personnes issues de
la classe sociale inférieure sont moins touchées par la
prévention. Ceci s’explique de différentes manières : vu
leur situation quotidienne difficile, la prévention n’est pas la
première priorité. Elles redoutent les frais supplémentaires
après un examen préventif. Les achats préventifs sont souvent
difficilement accessibles à ce groupe-cible.
MC-Informations 262 • décembre 2015
31
3.3.2. Dépistage du cancer du sein
Depuis 2001 en Flandre et 2002 en Wallonie et à Bruxelles, le
programme national de dépistage du cancer du sein propose
tous les deux ans une mammographie de dépistage gratuite
aux femmes de 50 ans à 69 ans qui sont affiliées à une mutualité.
Les femmes de la classe sociale inférieure ont 17% de chances
en moins de procéder à un dépistage du cancer du sein que
les femmes de la classe sociale supérieure (= 89,1/106,7). Ce
gradient reste lui aussi stable dans le temps (17% en 2006).
Nous constatons la même évolution pour d’autres mesures
de prévention plus récentes, comme la vaccination contre le
cancer du col de l’utérus (virus HPV) et le rotavirus.
Figure 5 : Soins dentaires préventifs – 2012
Figure 7 : Dépistage du cancer du sein – 2012
120
Indice standardisé (pour l'âge, le sexe et la région)
110
104
105,6
105
100
98,5
population de référence (indice
=100) : toutes les affiliés MC jusque
18 ans
95
90
88,0
85
80
75
70
73,6
102
101,6
100
2. bas
3. moyens
4. hauts
96
95,7
94
92
90
86
5. supérieurs
population de référence (indice
=100) : toutes les affiliées MC
entre 50 et 69 ans
98,6
98
89,1
88
1. inférieurs
106,7
dépistage du cancer du sein - Belgique
2012
106
112,2
Indice standardisé (pour l'âge et la région)
115
108
soins dentaires préventifs - Belgique 2012
classes de secteurs statistiques de résidence
1. inférieurs
2. bas
3. moyens
4. hauts
classes de secteurs statistiques de résidence
Figure 6 : Évolution des soins dentaires préventifs (enfants<=18 ans)
40%
BIM
36,5%
non-BIM
35%
32,9%
33,7%
36,6%
35,3%
34,4%
30,6%
30%
29,1%
27,8%
25%
21,0%
20%
18,6%
21,4%
21,6%
22,1%
22,7%
22,8%
19,5%
17,0%
15%
10%
5%
0%
32
2006
2007
2008
2009
2010
2011
MC-Informations 262 • décembre 2015
2012
2013
2014
5. supérieurs
3.4. Utilisation du système de soins
Différentes mesures susceptibles de contribuer à un usage
plus optimal des soins de santé et à une meilleure accessibilité
ont été prises dans le cadre de l’assurance maladie obligatoire.
Il s’agit notamment de l’introduction du Dossier médical global
(DMG), de l’incitation à utiliser des médicaments moins chers,
de l’entrée en vigueur et de la consolidation du régime du
tiers payant social et du renforcement des soins des santé de
première ligne chez le médecin généraliste et dans les centres
de santé de quartier.
3.4.1. Le Dossier médical global (DMG)
Un DMG réunit les données de santé d’un patient (maladies,
examens, traitements, prévention). Grâce au DMG, le médecin
généraliste dispose d’une image globale de la santé d’une
personne et des changements intervenus. Il est également
mieux à même d’évaluer les examens et les traitements
recommandés. L’avantage pour le patient consiste en une
réduction du ticket modérateur de 30 % pour les consultations
chez le médecin généraliste. Le DMG est sans aucun doute
utile pour tout le monde. Mais il l’est encore davantage pour
les groupes les plus vulnérables, tant en raison du risque accru
d’être en moins bonne santé qu’en raison de la réduction du
ticket modérateur.
En 2006, nous avions déjà constaté que les membres de la classe
sociale inférieure étaient 8% moins nombreux à disposer d’un
DMG que la population globale des membres. Il est heureux de
constater qu’en 2012 le risque de ne pas avoir de DMG a baissé à
3%. Il est également étonnant de noter que la probabilité d’avoir
un DMG a légèrement baissé dans les autres classes et que les
personnes de la classe supérieure sont moins nombreuses à
disposer d’un DMG comparé à la population totale. L’inégalité
est donc globalement moins élevée à ce niveau. Ceci va de pair
avec le nombre croissant de personnes pour qui le DMG est
géré par le médecin généraliste. Entre 2004 et 2013, le nombre
de Belges disposant d’un DMG a augmenté de 37,2% à 57,7%
(Source : IMA-atlas).
3.4.2. Le tiers payant social
Le fait que, dans le régime du tiers payant, les personnes en
situation précaire ne paient au prestataire de soins que le
ticket modérateur pour un certain nombre de prestations est
une mesure importante afin d’augmenter l’accessibilité des
soins. En 2011, cette mesure a été stimulée par l’accord conclu
entre les médecins et les mutualités (voir infra). Nos analyses
révèlent que cette mesure a eu l’effet escompté. La figure 8
montre clairement que la quote-part du tiers payant social a
augmenté dans le groupe des bénéficiaires de l’intervention
majorée (de 16% en 2010 à 48% en 2014), mais que celle-ci est
encore très éloignée des 100%.
Figure 8 : Pour les bénéficiaires de l’intervention majorée - proportion de contacts avec un médecin
généraliste tarifés en tiers-payant
60%
consultations
visites
Proportion de contacts tarifés en tiers-payant
50%
47,7%
41,6%
39,8%
40%
35,5%
33,0%
30%
27,5%
23,0%
19,6%
20%
16,3%
15,8%
10%
0%
2010
2011
2012
MC-Informations 262 • décembre 2015
2013
2014
33
3.4.3. Des médicaments moins chers
Pendant de nombreuses années, la Belgique est restée
à la traîne en termes d’utilisation de médicaments moins
chers11. Pourtant, ils génèrent des économies sensibles, tant
pour l’État que pour les patients. Ces dernières années, le
gouvernement a pris plusieurs mesures pour encourager
l’utilisation de médicaments moins chers (voir infra). Cellesci sont accompagnées de campagnes de sensibilisation de
la population qui soulignaient notamment l’équivalence entre
les médicaments chers et moins chers. Ces mesures ont
sans aucun doute eu un impact positif. Au premier trimestre
2002, la quote-part de médicaments meilleurs marché dans
la consommation totale de médicaments était encore limitée
à 11%. Au premier trimestre 2007, cette quote-part avait déjà
augmenté jusqu’à 40% pour atteindre en moyenne presque 52%
en 2012 et 55% en 201412. Tout comme en 2006, on ne distingue
guère de différences entre les classes sociales en 2012.
3.4.4. Les soins de première ligne chez le médecin généraliste
ou dans un centre de soins de quartier
Les cahiers de revendications dans le domaine de la lutte contre
l’inégalité en santé insistent fortement sur le renforcement de
la première ligne. Leur facilité d’accès font des acteurs de
première ligne, et des médecins généralistes en particulier, des
interlocuteurs importants en cas de problèmes de santé. Vu
la moins bonne santé des personnes en situation précaire, on
s’attendrait à ce qu’ils aient en moyenne (plus que les classes
sociales supérieures) au moins 1 contact par an avec le
médecin généraliste. Mais déjà en 2006, nous avions constaté
que ce n’était pas le cas. En 2012, la différence avec les
classes sociales supérieures a même légèrement augmenté.
La probabilité qu’un médecin généraliste vienne consulter à
domicile diminue fortement à mesure que l’on descend dans
l’échelle sociale (une différence de 23% entre les classes
supérieure et inférieure).
Le fait que les plus vulnérables semblent faire moins appel au
médecin généraliste doit être analysé en partie conjointement
avec les chiffres des centres de santé de quartier. Un centre
de santé de quartier (CSQ) propose en effet des consultations
et des visites à domicile très accessibles, et dispose d’une
équipe multidisciplinaire (médecin généraliste, infirmier,
kinésithérapeute). L’accent repose sur la prévention et les
soins coordonnés. Dans le cas d’un CSQ, les patients doivent
s’inscrire et s’engager à s’adresser au CSQ pour tous les
soins de première ligne proposés. Notre analyse nous
apprend l’existence d’un gradient social important pour le
paramètre « être inscrit dans un CSQ » et en particulier pour
la classe sociale inférieure. La probabilité d’une inscription est
supérieure au double de celle de la population de référence (=
tous les membres des MC) et cinq fois supérieure aux membres
MC de la classe sociale supérieure. Par souci d’exhaustivité,
nous tenons en l’occurrence à souligner que cet aspect
n’influera que partiellement, vu que l’offre de centres de santé
de quartier est répartie de manière inégale et se concentre
essentiellement dans les grandes villes.
Nous devons néanmoins aussi tenir compte du fait qu’il subsiste
toujours un risque de sous-consommation des soins dispensés
par le médecin généraliste par les plus vulnérables. Pour
certains d’entre eux, le ticket modérateur – aussi limité soit-il –
constitue déjà un obstacle. La crainte de frais supplémentaires
pour les examens et les traitements les retient également. Enfin,
vu le soutien financier limité, soigner les « petits » problèmes ne
constitue généralement pas la première priorité.
En ce qui concerne les soins ambulatoires dispensés par
des spécialistes, nous constatons à nouveau un gradient
social (pour certains spécialistes, comme l’ophtalmologue, le
dermatologue, le gradient est plus élevé que pour les autres).
Vu le moins bon état de santé, il serait logique que les plus
vulnérables les consultent plus fréquemment. Les chiffrent
prouvent le contraire. Le coût constitue assurément un
obstacle important. D’une manière générale, les prestations
de soins des spécialistes sont plus chères. En outre, le taux de
conventionnement des spécialistes est globalement inférieur,
ce qui augmente le risque que les patients doivent payer un
supplément en plus du ticket modérateur. Enfin, la crainte de
frais supplémentaires pour les examens et les traitements et le
report au profit d’autres priorités influent également.
L’analyse confirme que les gens issus d’une classe sociale
inférieure font plus souvent appel aux services d’urgence des
hôpitaux13. Il s’agit sans aucun doute d’une substitution partielle
des soins ambulatoires dispensés par le médecin (généraliste).
Le report constitue toutefois aussi un facteur explicatif. Les
personnes précarisées reportent souvent longtemps des
soins pour des raisons financières, de sorte que les problèmes
de santé perdurent et finissent par s’aggraver. À un moment
donné, les problèmes deviennent tellement aigus qu’elles sont
contraintes de s’adresser au service d’urgence d’un hôpital.
11 Bon marché = génériques + médicaments moins chers (= médicament en remboursement de référence sans surcoût pour le patient)
12 Calculs des MC sur la base des données de Pharmanet.
13 Voir également : Henin, E., Bénéficiaires du revenu d'intégration sociale : Les bénéficiaires du revenu d'intégration social s'y retrouvent-ils dans le système de
soins de santé ? MC Informations 253, septembre 2013 et l'article consacré aux services d'urgence dans ce numéro de MC-Informations.
34
MC-Informations 262 • décembre 2015
4. La lutte contre l’inégalité en santé
4.1.Les mesures structurelles dans le cadre de l’assurance
maladie obligatoire
L’inégalité en santé résulte d’une conjonction de facteurs et
n’est pas définie uniquement par des soins financièrement
inaccessibles. Néanmoins, il reste important de prendre
des mesures positives dans le domaine des soins de santé
également. Voici quelques mesures structurelles qui ont été
prises ces dernières années dans le cadre de l’assurance
maladie obligatoire.
• Un des leviers pour une meilleure accessibilité financière
des soins de santé pour les personnes à bas revenus
est l’intervention majorée (IM). Ces dernières années,
de nombreuses mesures ont été prises pour permettre
à davantage de personnes d’ouvrir leur droit à l’IM, afin
qu’elles puissent bénéficier d’un remboursement plus élevé
de leurs frais de santé. Jusque 2007, il n’existait que le
statut IM attribué aux personnes d’une certaine catégorie
(p. ex. les invalides, les pensionnés...) disposant de faibles
revenus. En 2007, la création du statut OMNIO a ouvert la
possibilité d’accorder à toutes les personnes à bas revenus
(quel que soit leur statut) une intervention majorée dans
les soins de santé. Vu que l’IM n’est pas un droit octroyé
automatiquement, il n’est pas toujours évident d’inciter les
personnes qui ont droit à l’IM à faire effectivement valoir leur
droit, et il en va de même pour le statut OMNIO. En outre,
les deux systèmes interprètent certaines notions de manière
différente (p. ex. : la notion de famille), ce qui a généré de
la confusion. Les catégories auxquelles l’IM s’appliquaient
se sont systématiquement étendues (p. ex. : les chômeurs
de longue durée et les familles monoparentales en 2010 et
les personnes ayant droit à une subvention du fonds social
chauffage en 2011.) En 2014, les statuts IM et OMNIO ont
été refondus en 1 statut d’intervention majorée (IM), afin
de simplifier le système et de le rendre plus efficace14. La
philosophie de base du nouveau système veut que toutes les
familles à bas revenus aient accès à l’intervention majorée.
Cette même réforme prévoit à partir de 2015 un échange
entre les mutualités et l’Administration de l’impôt des
personnes physiques permettant aux mutualités d’obtenir
une liste des personnes pour lesquelles le fisc connaît
de faibles revenus. Les mutualités ont ainsi la possibilité
d’approcher proactivement les personnes sur la base du
signalement de bas revenus. L’examen des revenus effectué
par la mutualité doit ensuite encore prouver que la personne
entre effectivement en ligne de compte pour l’IM. Une prise
de contact ciblée avec les personnes à bas revenu devrait,
espérons-le, permettre de convaincre les membres de
demander l’intervention majorée. Les effets de cet échange
seront évalués après 2015.
•Le tiers payant social constitue un deuxième levier en
faveur de l’accessibilité financière. Ne plus devoir avancer
le montant intégral chez le médecin, mais uniquement le
ticket modérateur améliore l’accessibilité. Par le biais de
l’accord médico-mutualiste du 1er janvier 2011, les médecins
conventionnés se sont engagés à appliquer le régime social
du tiers payant d’une manière générale aux bénéficiaires de
l’IM notamment. Par conséquent, un médecin généraliste ne
pouvait en principe refuser le tiers payant social si le patient
IM le demandait, à moins que le médecin ne suspecte un
usage abusif. Pour rendre l’application plus attrayante pour
le médecin, les tickets modérateurs des consultations ont
été simplifiés, une garantie de paiement a été instaurée et
une procédure rapide et simplifiée15 (paiement dans les
30 jours) a été mise en place. Nous avons déjà constaté
l’efficacité de cette mesure. À partir du 1er octobre 2015,
une étape supplémentaire a été franchie. Tous les médecins
généralistes sont obligés d’appliquer le régime du tiers payant
aux personnes bénéficiant de l’IM (pour les consultations et
les prestations techniques durant les consultations).
•Comme mentionné plus haut, le DMG constitue un
instrument utile pour une utilisation correcte des soins
de santé et la prévention. Cet instrument, introduit en
1999, a encore été renforcé ces dernières années. Depuis
le 1er avril 2011, chaque DMG doit comporter un module de
prévention. Depuis le 1er avril 2013, le suivi et l'examen d'une
check-list dans le cadre de ce module sont rémunérés une
fois par an pour les patients âgés entre 45 et 75 ans. En mars
2010, le Conseil national de promotion de la qualité de l’INAMI
a formulé des recommandations pour une bonne utilisation
du DMG par les médecins généralistes.
• En ce qui concerne le coût d’une hospitalisation, quelques
modifications importantes ont été apportées au cours des
10 dernières années, en vue d’alléger la facture d’hôpital
(pour les chambres à deux lits ou communes).
-Les suppléments de chambre pour les chambres à
deux personnes ou communes ont été interdits pour les
« patients protégés » (notamment intervention majorée et
OMNIO) en 2006 et supprimés pour tout le monde en 2010.
- Depuis le 1er janvier 2013, les suppléments d’honoraires
pour les chambres à deux lits ou communes dans le cadre
d’hospitalisations classiques (avec nuitée) sont interdits.
- Depuis le 1er juillet 2015, les suppléments d’honoraires sont
également interdits pour les chambre à 2 lits ou communes
en hôpital de jour.
14 De Spiegeleer Tom et al., Intervention majorée à partir de 2014, Infofiche 2013, décembre 2013, annexe au MC-Informations n° 254
15 Plus de répartition par mutualité MC, mais une seule adresse de contact pour tous les membres des MC.
MC-Informations 262 • décembre 2015
35
•En 2001, une politique structurelle concernant les
« médicaments moins chers » a été initiée avec le lancement
du remboursement de référence. Depuis, différentes mesures
ayant pour principe d’encourager la prescription ou la
délivrance de médicaments moins chers se sont succédées16.
Il en a résulté une baisse des prix de nombreux médicaments.
Tant les médicaments génériques que les médicaments de
marque originaux, qui ont baissé considérablement leur
prix pour éviter que le patient doive payer le supplément de
référence, tombent sous le dénominateur de « médicaments
moins chers ». Nous avions déjà indiqué que ces mesures
avaient permis d’augmenter considérablement la quotepart des médicaments moins chers depuis 2002. L’utilisation
de médicaments moins chers est d’ailleurs l’un des rares
indicateurs pour lesquels il n’existe aucune différence en
fonction de la classe sociale à laquelle on appartient (quotepart de 52% dans les 5 classes sociales).
• Au point 3.3, nous avions déjà expliqué que les soins dentaires
préventifs étaient devenus financièrement plus accessibles
pour les jeunes. En 2008, les soins dentaires étaient gratuits
pour les enfants jusque 12 ans, une mesure qui a été étendue
aux jeunes jusque 18 ans en 2009.
4.2. Des SSM plus accessibles
D’autres mesures en dehors de l’assurance maladie obligatoire
ont également été prises pour améliorer l’accessibilité
(financière) des soins. Tel est notamment le cas des soins de
santé mentale (SSM). Au niveau fédéral, les premiers pas ont
été faits vers une reconnaissance des psychologues et de la
psychothérapie, ce qui devrait mettre fin à la situation actuelle
d’absence de garantie de qualité pour les utilisateurs. Après
la publication de la loi, il faudra cependant encore attendre
les arrêtés d’exécution requis. Dans une étape suivante, il se
peut que des initiatives soient prises pour garantir également
l’accessibilité financière et la sécurité tarifaire. Ces dernières
années, les mutualités ont déjà formulé des propositions à cet
effet.
La Flandre a récemment encore pris l’initiative de fixer dans
une réglementation la contribution dans les centres de santé
mentale et de créer ainsi une sécurité tarifaire. Par ailleurs, elle
a investi également dans l'accessibilité des soins par le biais
de projets pilotes en matière d'aide psychologique de première
ligne.
Enfin, des efforts en faveur de la socialisation des soins de
santé mentale ont été consentis dans le cadre du financement
des hôpitaux. En l’occurrence, le but est de rapprocher les
soins proposés des gens dans leur environnement familier et
de diminuer le nombre d’hospitalisations notamment par la
création d’équipes mobiles. Ceci peut contribuer à améliorer
l’accessibilité et à dispenser des soins plus adéquats. Il
convient toutefois de rester vigilant afin d’éviter les pièges
éventuels. L’intensification des soins et de l’aide à domicile
peut entraîner des frais supplémentaires à charge des patients
personnellement et donc représenter un nouveau frein à
l’accessibilité17.
4.3. Les MC luttent également contre l’inégalité en santé.
Au niveau local, les MC ont développé plusieurs initiatives afin
de lutter contre les inégalités en santé.
4.3.1. CM Oostende – KAAP
Le 1er septembre 2007, CM Oostende a lancé KAAP (KAnsen
Armoede Prioriteit18). KAAP a vu le jour suite à la constatation
que les personnes qui ne sont pas en ordre d’assurance maladie
restent privées de leur droit à l’intervention de l’assurance
maladie. L’objectif est d’améliorer l’accessibilité des soins de
santé (pour ces personnes). KAAP est devenu un organisme de
lutte contre la pauvreté qui vise à améliorer les connaissances
des MC en matière de pauvreté et, à partir de ces connaissances,
à examiner les dossiers et les questions en suspens. La mission
de la collaboratrice de KAAP consiste à servir de trait d’union
entre la personne en question et les services internes (et
externes) des MC. Lorsqu’une personne est difficile à joindre
et donc ne répond pas à la demande de contacter les MC afin
de mettre en ordre le dossier d’assurance maladie/indemnités,
KAAP prend le relais. D’autre part, la collaboratrice de KAAP
transmet également les questions et les signaux de l’intéressé
au service concerné. Une collaboration avec des organisations
externes, telles que « Beweging van mensen met laag inkomen
en kinderen19 », est organisée à Ostende. Pour mettre les
dossiers en ordre, une approche d’outreaching insistante,
visant à faciliter l’accès, est préconisée.
16 Cornelis K., 50 ans AMI, La politique en matière de médicaments moins chers en Belgique, Septembre 2013, MC-Informations numéro 253
17 Voir également : Henin E., Verniest R. et Crommelynck A., Quels obstacles doit-on surmonter quand on vit un problème de santé mentale ? MC-Informations 260,
juin 2015
18 Priorité aux défavorisés
19 Mouvement de personnes avec un revenu faible et des enfants
36
MC-Informations 262 • décembre 2015
Concrètement, cela implique :
• d’aller vers les gens, d’amener le droit jusqu’à eux (approche
d’outreaching)
• d’essayer de contacter les membres difficiles à joindre en
se rendant chez eux, en leur téléphonant, en cherchant une
possibilité de contact et en continuant d’essayer d’établir
un contact jusqu’à ce que le droit en matière d’assurance
maladie soit en ordre (approche persistante)
• de se concerter avec les personnes précarisées sur les
différents obstacles qu’elles rencontrent (p. ex. : lisibilité des
courriers, longueur du temps d’attente au guichet) (approche
visant à faciliter l’accès)
Exemple de fonctionnement concret :
Une mère célibataire qui a un fils doit renvoyer
d’urgence les documents d’indemnité nécessaires, de
même qu’une attestation des allocations familiales.
Le dossier est en attente depuis plusieurs mois et le
service indemnités ne peut pas payer. La dame ne réagit
pas. Après plusieurs tentatives de visite à domicile
infructueuses au terme desquelles la collaboratrice
de KAAP a laissé une carte demandant de pouvoir lui
rendre visite, elle laisse finalement les documents sur
place en expliquant qu’elle reviendra les chercher. Lors
de la visite à domicile suivante, une enveloppe adressée
à la collaboratrice de KAAP est accrochée à la boîte aux
lettres accompagnée d’une carte expliquant qu’il lui est
impossible de quitter la maison ou de rencontrer des
gens mais qu’elle remercie la collaboratrice pour son
aide. Dans l’intervalle, cette dame a été vue et a fourni
brièvement quelques explications.
Après 8 années d’existence de KAAP, la problématique de la
vie en situation précaire recueille une plus grande attention
et une meilleure compréhension de la part de CM Oostende.
Constatant que les droits sont méconnus, KAAP a publié
quelques flyers (p. ex. : payez le médecin avec un autocollant
et un peu de monnaie) et des formations ont été dispensées
dans des organisations connues par les membres (« comment
limiter mes frais médicaux ? »). Enfin, des courriels contenant
notamment ces flyers ou d’autres informations intéressantes
sont régulièrement échangés avec le réseau de services
d’aide, afin d’amener le droit jusqu’aux personnes par leur
intermédiaire. Ce travail prend toutefois beaucoup de temps.
Il est assuré actuellement par une personne travaillant à mitemps.
4.3.2. CM Leuven – recrutement d’un conseiller en pauvreté
(Collaborateur)
CM Leuven suit actuellement l’exemple de CM Oostende et a
embauché un conseiller en pauvreté (collaborateur) depuis le
1er septembre 2015. Il trouve sa raison d’être dans la constatation
qu’une partie du public membre n’est pas atteinte par le modèle
de prestation de services existant. Après une visite réciproque
de KAAP Ostende, la fonction du collaborateur de Louvain a
été définie. L’objectif initial consistera ici aussi à contacter les
personnes qui ne sont pas en règle actuellement et à mettre
leurs dossiers en ordre.
Les principales missions du collaborateur sont :
• Veiller à l’accessibilité des soins de santé pour chacun.
• Briser le cercle vicieux de la pauvreté/précarité dans
laquelle certaines personnes se trouvent.
•Signaler certains problèmes structurels dans le
fonctionnement et les procédures de notre organisation et
trouver/proposer une solution pour y remédier.
• Communiquer avec les groupes cibles via la formation,
la collaboration avec d’autres organisations, groupes
linguistiques et organisations culturelles ou religieuses.
• Faciliter l’accès.
• Développer un réseau avec d’autres organisations.
4.3.3. MC Hainaut-Picardie – le chaînon manquant entre
la demande et l’offre de soins pour les familles
vulnérables
Sur la base d’une étude des besoins médico-sociaux qui sont
insuffisamment pris en charge dans la région de Mouscron,
les MC Hainaut-Picardie ont fait de la promotion de la santé
auprès des groupes socialement vulnérables une priorité. Le
projet « Connexion Santé » en est le fruit.
L’objectif est de veiller à ce que les enfants recourent
davantage aux soins de santé en supprimant les éventuels
obstacles financiers, culturels et/ou organisationnels que ces
familles peuvent rencontrer. Au niveau individuel, un travailleur
social contacte les familles et établit avec elles une relation
de confiance. Il les informe et les aide tout en respectant leur
autonomie et tente même de les encourager. Il leur donne
les informations correctes au moment approprié et les aide
également pour l’aspect financier lié aux soins médicaux et
les produits. Le réseau de partenaires s’est ensuite étendu à
d’autres établissements de la région de Mouscron (hôpital,
médecins généralistes, service d’aide en milieu ouvert, centre
de planning familial, l’Office national de l’Enfance, l’aide à la
jeunesse...).
Au niveau de la communauté, le travailleur social a pour
but d’apprendre à connaître les différents intermédiaires et
leur offre spécifique, d’apporter un soutien, de développer
des collaborations durables et de promouvoir des pratiques
professionnelles en faveur des groupes-cibles plus vulnérables.
MC-Informations 262 • décembre 2015
37
4.3.4. MC Verviers-Eupen – informations aux prestataires de
soins sur la réforme de l’IM
Suite à la réforme de l’intervention majorée entrée en vigueur
le 1er janvier 2014, les MC Verviers-Eupen ont invité leurs
partenaires externes à assister à une session d’information
gratuite en décembre 2013. Ces sessions avaient pour but
d’aider le CPAS, les hôpitaux, les services de soins à domicile,
la Croix jaune et blanche et d’autres établissements à appliquer
les nouveautés mises en place par cette réforme.
Quatre demi-jours de formation ont été proposés dans les
quatre régions de la zone d’action. Avec 120 inscriptions,
l’initiative a manifestement connu un grand succès. Parmi les
participants, on compte de nombreux travailleurs sociaux, mais
aussi des comptables, psychiatres, psychologues et infirmiers...
autant de personnes qui sont en contact avec les bénéficiaires
de l’intervention majorée. Vu le succès retentissant, les MC
Verviers-Eupen se sont également rendues dans un hôpital
pour informer les assistants sociaux sur place
L’équipe d’experts se composait d’un conseiller mutualiste,
d’un travailleur social et d’un expert du service Gestion des
membres.
4.4. Problèmes et recommandations générales pour l’avenir
Les données de 2012 confirment elles aussi l’existence
d’inégalités en santé, malgré les nombreuses mesures et
initiatives positives. Le manque de coordination et d’intégration
politique constitue sans aucun doute un facteur important à cet
égard.
L’inégalité en santé est la conséquence de facteurs multiples.
Elle est liée non seulement au système des soins de santé,
mais aussi aux domaines de la mobilité, de l’hébergement,
de la formation, de l’emploi... Les mesures en matière de
soins de santé sont donc indispensables, mais insuffisantes.
Il reste indispensable de prendre des mesures structurelles
dans d’autres domaines également. En l’occurrence, il est
essentiel de procéder de manière coordonnée et donc de
prévoir une concertation suffisante entre les intervenants. En
effet, les mesures prises dans tel domaine spécifique doivent
tenir compte des obstacles éventuels dans tel autre domaine.
Il convient également de développer davantage d’initiatives
parallèles, afin que les mesures prises dans différents
domaines puissent se consolider mutuellement. L’importance
de la coordination vaut d’ailleurs aussi au sein de la politique de
santé et de bien-être en tant que telle, dont plusieurs pouvoirs
publics se partagent la compétence. Les différentes autorités
prennent de nombreuses mesures, mais elles sont souvent mal
coordonnées. Depuis la sixième réforme de l’État, le portefeuille
de compétences des autorités régionales en matière de bienêtre et de santé s’est fortement étendu, augmentant encore
l’importance d’une concertation structurelle permanente.
38
Au niveau individuel également, les soins et l’aide sont encore
insuffisamment coordonnés. Il y a trop peu de coordination
mutuelle entre les prestataires de soins. L’information circule
toujours de manière lacunaire.
Un second problème est la constatation que les groupes les
plus vulnérables sont ceux qui font le moins appel aux mesures
positives, alors qu’ils en ont le plus besoin. Ceci est illustré
entre autres par plusieurs formes de prévention. Comme nous
l’avons dit, ce phénomène est dû au fait que les campagnes
ne sont pas suffisamment adaptées au groupe-cible. D’une
manière générale, la politique accorde trop peu d’importance
aux mesures et à une communication adaptée au groupe-cible.
Il est possible d’y remédier en optant pour une approche plus
participative. Tant pour l’élaboration de la politique que pour
l’exécution concrète sur le terrain, il est important d’impliquer
activement les (représentants des) groupes-cibles. Cela
nécessite d’abord d’écouter la manière dont ils perçoivent les
problèmes et les priorités en la matière, d’écouter les solutions
qu’ils mettent en avant et d’évaluer les propositions de solution
concrètes.
La mise en œuvre des mesures sur le terrain pourrait néanmoins
aussi gagner en efficacité et en efficience en travaillant avec
des organisations de terrain, des intermédiaires, des experts du
vécu qui bénéficient de la confiance des groupes-cibles. Ceci
peut notamment contribuer à mieux faire connaître les mesures
positives aux groupes-cibles.
D’où la nécessité de privilégier encore plus qu’aujourd’hui le
niveau local, proche des gens et de partir des réseaux locaux
et des points de rattachement (centres de quartier, centres de
soins de quartier, comités de quartier....).
Le contexte social actuel constitue un dernier problème plus
général. On assiste ces dernières années à une individualisation poussée à l’extrême. Dans cette perspective, l’accent
repose de plus en plus sur la responsabilité individuelle, sur
l’activation. Les gens sont réputés – plus qu’avant – responsables de leur situation (« il y a toujours du travail pour celui qui
le veut », « l’État n’a pas à supporter des coûts engendrés par
un mode de vie malsain »). On attend aussi de plus en plus des
gens, qu’ils prennent eux-mêmes des initiatives pour améliorer
leur situation.
En l’occurrence, on oublie que le comportement individuel
est défini dans une large mesure par le contexte social. En
effet, les gens sont trop facilement réputés individuellement
responsables d’une moins bonne santé due à des habitudes
de vie malsaines (tabagisme, sédentarité, alimentation
saine insuffisante). Il serait donc erroné de les sanctionner
individuellement à cet effet. Il est plus important d’investir
davantage dans la promotion de la santé et la prévention.
MC-Informations 262 • décembre 2015
Par ailleurs, les discussions méconnaissent également la
différence en termes de santé mentale et de capacités à
influencer la situation personnelle. En l’occurrence, une
étude récente de l’UCL et des MC a démontré le lien entre un
faible niveau d’éducation et des connaissances lacunaires en
matière de santé20. Concrètement, 4 Belges sur 10 disposent
de connaissances insuffisantes en matière de santé. Ceci a
des conséquences pour la recherche, la compréhension et
l’application d’informations en matière de santé.
En tant que fonds de la santé, nous pouvons également
apporter notre pierre à l’édifice dans le futur en proposant des
initiatives concrètes. Celles-ci peuvent porter notamment sur
la prévention, l’amélioration des connaissances en matière de
santé et l’information des prestataires de soins et les groupes
cibles. La collaboration avec les autres acteurs de terrain
constituera dans ce cadre un facteur de succès critique.
La lutte contre les inégalités en santé constitue un grand défi.
Les MC sont prêtes à le relever !
5.Conclusion
Dans cette étude, nous avons analysé les données de 2012 des
membres des MC, afin de vérifier l’importance des inégalités
en santé et leur évolution éventuelle par rapport à 2006.
L’étude de 2012 confirme les conclusions des autres études :
d’une manière générale, l’inégalité en santé ne diminue pas.
Pour un certain nombre d’indicateurs, nous constatons en
outre une augmentation entre 2006 et 2012. Tel est le cas par
exemple des hospitalisations psychiatriques, du recours
aux antidépresseurs et du risque de devenir invalide. Cette
augmentation est intervenue malgré l’intérêt politique accru
pour cette problématique et le train de mesures positives pour
réduire les inégalités en matière de santé. Cela signifie-t-il que
la stratégie a échoué ? La conclusion doit probablement être
plus nuancée. Pour de nombreux autres indicateurs, le niveau
d’inégalité est effectivement resté stable ou une (légère)
amélioration est effectivement perceptible. Nous sommes
convaincus que le mérite en revient aux mesures et initiatives
qui ont été prises.
Là s’arrêtent toutefois les bonnes nouvelles. Il n’en demeure
pas moins que l’on constate globalement peu d’amélioration.
Nous ne pouvons donc en aucun cas nous reposer sur nos
lauriers. Les conclusions tirées de cette étude et bien d’autres
doivent encourager à redoubler d’efforts, en l’occurrence
en continuant d’attirer l’attention des décideurs politiques,
des prestataires de soins et de l’opinion publique sur cette
problématique dans les années qui viennent. Continuer
d’informer et de sensibiliser permettra à la problématique de
rester une priorité à l’ordre du jour politique et de créer une
assise politique et sociale plus large en faveur de mesures
supplémentaires. En tant que mutualité, nous devons en outre
continuer de militer pour une forte protection sociale et de
développer des mesures qui améliorent l’accessibilité aux
soins de santé.
20 Vancorenland S., Avalosse H., Verniest R., Callens M. e.a. Bilan des connaissances des Belges en matière de santé. MC-Informations 258, décembre 2014
MC-Informations 262 • décembre 2015
39
Promotion de la santé
L’activité physique et sportive des + de 50 ans en
Fédération Wallonie-Bruxelles
Enquête électronique auprès des affiliés MC
Philippe Godin – Professeur à l’UCL et Président de la SBFPS, Société Belge Francophone de Psychologie du Sport
Aurore Devos - Coordinatrice fédérale - énéoSport ASBL
Résumé
L’activité physique et sportive des seniors reste très peu évoquée et étudiée alors que la société « vieillissante »
et ses enjeux majeurs en matière de prévention de santé nécessiteraient de s’y intéresser davantage.
La mise en mouvement des aînés représente un des facteurs de protection important permettant d’avancer
en âge tout en maintenant une qualité de vie optimale. Très peu de recherches s’attèlent au public des + de
50 ans ou encore, celles qui existent, datent de plusieurs années et ne sont pas actualisées. Selon l’asbl
énéoSport, association sportive de loisirs pour les + de 50 ans en Fédération Wallonie-Bruxelles, reconnue
par l’Adeps, il est essentiel de développer le champ d’investigation en ce domaine. Afin d’ouvrir des pistes et
le champ des perspectives, un premier pas a été fait cette année 2015 au moyen d’un sondage opéré auprès
des affiliés MC de + de 50 ans.
Mots-clés : Activité physique, Sport, Seniors, Santé, énéoSport
1. Introduction
Chacun de nous est bien conscient de l’accroissement du
nombre d’aînés dans nos sociétés actuelles. Ils représentent
une couche importante et croissante de la population et
l’augmentation de l’espérance de vie offre davantage de
perspectives dans le cadre d’une promotion globale de santé.
Il va sans dire que le sport est essentiel à tout âge pour garder
forme et santé ! Pour les aînés, les bienfaits physiques sautent
encore plus aux yeux : leur influence positive sur le système
cardio-vasculaire, ostéo-articulaire et musculaire permet de
freiner l’inévitable vieillissement des fonctions physiologiques
humaines et de procurer aux sportifs la capacité d’aborder
leurs activités quotidiennes avec davantage de confort et de
sécurité.
40
La pratique du sport chez les aînés a aussi un rôle social : elle
permet de garder son autonomie, de conserver une image
positive de soi et une disponibilité pour les autres. C’est donc se
donner les chances de maintenir ou de reconstituer, à l’heure
de la retraite, un réseau de relations sociales indispensables à
l’équilibre personnel !
Au regard de ce qui a été mentionné plus haut, le rôle et les
enjeux en termes de santé publique de l’association sportive
énéoSport, unique en son genre en Fédération WallonieBruxelles, sont plus qu’évidents. C’est pourquoi sa volonté est
de se positionner comme acteur incontournable sur la scène
politico-sportive et d’être le partenaire de premier choix pour
MC-Informations 262 • décembre 2015
une politique de large promotion du sport aîné. Toutefois,
afin d’optimiser considérablement les actions de promotion à
mener, il est essentiel de mieux connaître/définir le public visé.
Nous constatons avec étonnement qu’il n’existe pratiquement
aucune étude belge qui se concentre plus particulièrement sur
le sport chez les seniors. Le champ de la recherche scientifique
en ce domaine est très pauvre, sans compter que les études
existantes datent pour la majorité de plusieurs années ou
encore, ne présentent que très peu de résultats spécifiques à
ce public.
Face à ce constat, l’asbl énéoSport a souhaité se positionner.
En effet, énéoSport est la seule association sportive multisports
de loisirs spécifiquement dédiée aux + de 50 ans reconnue par
l’Adeps (depuis 1978). Cette association sportive, partenaire
d’Énéo asbl et des Mutualités Chrétiennes regroupe près
de 17.000 affiliés répartis dans plus de 500 clubs sportifs
en Fédération Wallonie-Bruxelles. Cette dernière a ainsi,
souhaité se lancer dans une première enquête et a réalisé,
en collaboration avec le département de psychologie de l’UCL
en la personne du Professeur Philippe Godin (Service de
Psychologie du Sport), une enquête sur les motivations et freins
à la pratique physique et sportive d’individus francophones de
50 et plus. Ce sondage a été communiqué le 03/11/14 par email
à plus de 70.000 affiliés à la Mutualité Chrétienne (entre 50 et
90 ans). Le questionnaire s’est voulu relativement court (21
questions) afin d’éviter de rebuter plusieurs individus et ainsi,
augmenter la probabilité de réponses.
2. Objectifs
Les objectifs de ce sondage étaient de dégager une première
vue d’ensemble des pratiques des 50 - 90 ans (en l’occurrence
spécifiquement des affiliés MC interrogés), de mettre en
évidence un certain nombre de motivations et freins à la
pratique d’activités physiques et sportives et enfin, nous
permettre autant que possible, de définir des pistes d’actions
et de réflexion.
3. Echantillonnage & méthodologie
3.1. L’e-mail envoyé aux membres MC
Le message a été préparé par énéoSport en collaboration avec
le département Recherche & Développement de la Mutualité
Chrétienne et relu par le service de communication de l’Alliance.
Chaque e-mail reprenait de façon succincte l’objet de l’enquête
et le lien permettant d’accéder au questionnaire on-line.
3.2. Le volume de personnes contactées
• 72.609 personnes ont reçu l’email. Les adresses e-mail retenues proviennent du stock d’adresses e-mail ‘confirmées’
de la part des personnes qui ont opté pour les « services et
avantages ».
Tableau 1 : Volume de personnes contactées – structure par âge et sexe
structure
hommes
femmes
H&F
50-59
15.765
16.911
32.676
60-69
14.031
12.795
26.826
70-79
5.902
4.253
10.155
80-90
1.612
1.340
2.952
TOTAL =
37.310
35.299
72.609
MC-Informations 262 • décembre 2015
41
• Ci-après, le volume de personnes contactées par âge, par
sexe et par mutualité d'affiliation:
Tableau 2 : Volume de personnes contactée par
MC d’affiliation
Brabant wallon
8.335
Hainaut Oriental
9.279
Hainaut Picardie
9.638
Liège
10.400
Luxembourg
6.194
Namur
15.156
Bruxelles
8.882
Verviers-Eupen
4.725
TOTAL =
72.609
4. Remarques préliminaires et précautions de
validité
Les résultats présentés ne peuvent être généralisés à la
population belge ni même à la population belge francophone.
Ils ne sont indicatifs que pour les personnes qui ont répondu.
En effet, les chiffres ne fournissent des informations qui ne
concernent que l’échantillon de l’enquête (uniquement les
répondants).
Cependant et de plus, il y a, pour de nombreuses questions
une « légère » variation des chiffres due à une absence de
réponses de la part des participants. En effet, la totalité des
répondants n’a pas répondu chaque fois à toutes les questions.
Ceci expliquera une « petite » discordance dans les chiffres. Il
a donc fallu, pour le calcul de pourcentages, à chaque fois tenir
compte non pas du nombre de réponses totales initiales mais
du nombre de réponses pour la question spécifique.
• La langue de contact a été déduite de la mutualité d’affiliation. Pour la MC Verviers-Eupen, seuls les membres ayant un
code linguistique francophone ont été contactés.
Si d’un point de vue purement théorique il pourrait être
intéressant de croiser les données sur plusieurs variables (par
exemple, est-ce que les femmes actives membres d’énéoSport
de la province de Luxembourg ont moins de baisse de motivation
que … ?), cela ne peut se faire pour d’évidentes raisons
statistiques (diminution drastique de l’échantillon). De ce fait,
nous avons préféré nous limiter à des données plus générales.
• Divers contrôles ont été effectués pour minimiser le risque
d’envoyer l’e-mail à une personne décédée ou séjournant en
maison de repos ou de soins psychiatriques.
5. Résultats
Sur les 72.609 questionnaires envoyés, nous avons reçu 15.020
retours de questionnaires dont 14.574 étaient exploitables, ce
qui correspond à 20% de l’échantillon global (très bon retour).
3.3. Le questionnaire on-line
• Le questionnaire a été développé par énéoSport et l’UCL et
fut validé également par le département R&D (Recherche
& Développement). A aucun moment il n’a été demandé au
répondant de s’identifier. Le questionnaire était donc entièrement anonyme.
• Bien sûr, comme dans tout questionnaire, il y a des questions
de type sociodémographique : catégorie d’âge, sexe, région,
profession. Ce ne sont pas des questions d’identification, ce
sont justes des questions qui nous permettent de nous faire
une idée du profil social des répondants.
• Le questionnaire on-line a été hébergé sur le serveur de
l’UCL. La collecte des résultats ainsi que l’exportation des
données s’est faite à partir de ce compte. C’est l’UCL qui a
géré ce compte et ces opérations.
Parmi ces 14.574 individus d’une moyenne d’âge située
entre 55 et 70 ans, nous recensons 52% d’hommes et 48% de
femmes ainsi que 56% de personnes retraitées et 44% de personnes encore en activité professionnelle.
L’échantillon est composé en grande majorité de sujets n’étant
pas affiliés à l’ASBL énéoSport à savoir, 1.018 affiliés énéoSport, 13.545 non-membres énéoSport (11 non-précisés).
En outre, le public ayant répondu à l’enquête est composé en
majorité d’employés et de professions intermédiaires. Très peu
de personnes sont sans emploi ou ouvriers (Figure 1).
Comme le montre le graphique ci-après (Figure 2), les répondants
sont issus de 6 zones géographiques, dont essentiellement la
province du Hainaut, Liège et Namur.
Par ailleurs, le sondage démontre que la grande majorité des
sujets (74%) ont d’une perception positive de leur santé globale.
Les personnes percevant négativement leur état de santé sont
tout à fait minoritaires (2%) comme le montre la Figure 3.
42
MC-Informations 262 • décembre 2015
Le questionnaire s’intéressait notamment au volume de pratique physique (hors sport), à savoir les activités du quotidien
comme descendre les escaliers, jardiner, faire les courses, le
ménage, etc.
La majeure partie de l’échantillon se révèle active à très active
en matière d’activités physiques (hors sport), la moyenne de
temps de pratique se situant pour 60% des répondants entre
7h à plus de 10h de pratique par semaine (figure 4). D’après
les réponses, ces activités se répartissent pour 82% sur 3 jours
semaine ou plus.
Le seul frein à pratiquer ces activités physiques du quotidien
mis en évidence est, de façon assez logique, les douleurs
physiques.
En matière d’activités sportives, 57% des sujets pratiquent de
3 à 9h par semaine comme le présente la Figure 5. A nouveau,
l’échantillon se révèle fort actif d’autant plus que le sport
s’ajoute à l’activité physique.
En comparaison avec la Figure 4, la tendance à la pratique
sportive se réduit tout de même légèrement (davantage de
sport de 3h à 6h que de 7 à 9h). Le « 1 à 2h par semaine » double
quasiment.
Ainsi, en règle générale, les sujets pratiquent davantage
d’activités physiques (hors sport) plutôt que des activités
sportives mais globalement, notre échantillon reste composé
de sujets bien actifs sur le plan sportif.
Ceci est assez étonnant dans la mesure où cela s’ajoute aux
activités physiques du quotidien pour beaucoup. Ces résultats
contrecarrent d’ailleurs certaines données indiquant qu’en
Belgique 62% d’hommes de plus de 55 ans et 72 % de femmes
de plus de 55 ans ne pratique jamais ou rarement de l’activité
physique et / ou sportive (Eurobaromètre 2014).
Les sujets ont aussi été interrogés sur les buts à pratiquer une
activité sportive. D’après la Figure 6, nous constatons que le
bien-être et la santé prédominent véritablement dans les réponses. Près d’1/5 de l’échantillon met en avant le volet relationnel (ce qui n’est pas négligeable).
Le souci esthétique est faible tout comme la pratique « sous
prescription médicale » (autrement dit « sur conseil d’un
médecin »). Ce dernier résultat est assez interpellant.
Deux hypothèses pourraient être formulées face à ce très
faible taux de réponses reçues en matière de « prescription
médicale » : soit peu de sujets sensibilisés passent à l’acte et
concrétisent la prescription médicale soit les médecins généralistes restent peu sensibilisés et ne jouent pas suffisamment
ce rôle de relais et de promoteur de l’activité physique. Il est
néanmoins possible aussi que le terme « prescription » en ait
refroidi certains ou ait été mal interprété. Ce volet mériterait
donc d’être creusé plus particulièrement.
Remarquons que lorsqu’on cible le groupe des répondants affiliés à énéoSport (tableau 3), le bien-être arrive en tête avec
80% des réponses. La santé (sans prescription) et la création
de relations récoltent une proportion très importante des réponses. L’aspect relationnel est donc presqu’aussi essentiel
que l’aspect « santé » (sans prescription) pour les répondants
membres d’énéoSport.
Une autre question du sondage portait sur les bénéfices précis
à pratiquer une activité sportive (question qui vient compléter
et affiner celle relative aux « buts »). A ce propos, les sujets
mettent davantage en évidence (par ordre décroissant) la
forme, la santé, l’amusement et la recherche de dynamisme
comme étant les principales motivations à pratiquer une
activité sportive. Les aspects esthétiques (mincir, le souci de la
silhouette) ne prédominent pas du tout dans les réponses des
sujets - tendance tout à fait dégressive - tout comme cela s’est
révélé dans les « buts à pratiquer ».
Tableau 3 : Proportion de réponses des répondants affiliés à énéoSport, en fonction des buts à pratiquer une activité
sportive (plusieurs réponses étaient
possibles)
Bien-être : 80%
Esthétique : 8%
Santé (sans prescription) : 68%
Santé (avec prescription) : 5%
Créer relations : 53%
Figure 1 : Type de métier actuel ou dernièrement
exercé par les répondants
5%
24%
42%
10%
19%
Employés
Cadres
Intermédiaires (agriculteurs,
artisans, commerçants,..)
Ouvrier
Sans
MC-Informations 262 • décembre 2015
43
Figure 2 : Nombre de répondants par zone
géographique
26%
22%
21%
12%
11%
8%
47%
Figure 3 : Etat de santé perçu par les répondants
(proportion de l'échantillon global)
Mauvais et très
mauvais
Moyen
2%
24%
Très bon
21%
Bon
53%
6%
Moins de 1h
De 7 à 9h
De 1 à 2h
Plus de 10h
De 3 à 6h
Figure 6 : Raisons pour lesquelles les répondants
pratiquent une activité sportive
(Pourcentage sur l'échantillon global,
plusieurs réponses possibles)
Relations
17%
Figure 4 : Pourcentage de l’échantillon global
pratiquant des activités physiques
(hors sport) sur une semaine par volume
horaire
25%
5% 6%
32%
Prov.Luxembourg
Bruxelles
Brabant wallon
Prov.Liège
Prov.Namur
10%
Hainaut
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Figure 5 : Répartition de la pratique d'une
activité sportive en fonction du nombre
d'heures par semaine (Pourcentage sur
l'échantillon global)
Prescription
médicale
2%
Bien-être
41%
17%
Santé
34%
17%
Esthétique
6%
35%
Moins de 1h
De 7 à 9h
De 1 à 2h
Plus de 10h
De 3 à 6h
44
MC-Informations 262 • décembre 2015
Tableau 4 : Quels sont les bénéfices retirés de la pratique sportive (motivations) ? Répartition des répondants
pas important
(1)
un peu important
(2)
moyennement
important
(3)
important
(4)
très important
(5)
Mincir
34,9%
20,7%
23,6%
12,5%
8,2%
Santé
6,9%
5,2%
15,4%
33,3%
39,2%
Contre-âge
16,3%
12,6%
23,5%
25,4%
22,2%
Anti-stress
16,6%
14,7%
20,8%
24,4%
23,5%
Fatigue
15,6%
12,6%
24,1%
27,1%
20,6%
S'amuser
12,6%
9,0%
18,9%
26,8%
32,7%
Silhouette
34,4%
20,7%
21,8%
14,4%
8,8%
Rencontres
25,5%
16,4%
23,4%
19,3%
15,4%
Forme
6,7%
4,2%
12,5%
33,1%
43,5%
Performance
24,8%
17,7%
25,6%
19,0%
12,9%
Contacts
25,3%
17,9%
24,1%
19,3%
13,4%
Dynamisme
9,8%
10,0%
23,8%
32,6%
23,8%
Masse graisseuse
27,1%
17,7%
22,3%
19,1%
13,8%
Gagner du
muscle
37,3%
19,6%
20,9%
13,1%
9,2%
Motivation ?
Tableau 5 : Quels sont les freins à la pratique sportive ? Répartition des répondants
Frein ?
pas du tout un
obstacle (1)
obstacle un
peu contraignant (2)
obstacle
moyennement
contraignant
(3)
obstacle très
contraignant
(4)
obstacle
extrêmement
contraignant
(5)
c'est une
cause
d'abandon
(6)
Trajet
70,9%
13,7%
8,2%
3,2%
2,3%
1,7%
Vestiaire
89,1%
0,8%
4,9%
1,8%
1,5%
1,9%
Regard des autres
84,9%
7,9%
3,9%
1,4%
1,1%
0,9%
Equipement
73,9%
13,7%
7,1%
2,4%
1,7%
1,2%
Difficultés physiques
44,0%
25,4%
16,6%
6,9%
4,1%
3,0%
Le peu d'intérêt à pratiquer
71,9%
11,8%
8,6%
3,3%
2,3%
2,1%
Volonté de bouger de chez
soi
66,5%
23,8%
1,5%
4,7%
2,4%
1,1%
Personnel de l'infrastructure
80,5%
9,5%
5,4%
1,6%
1,2%
1,8%
Ambiance
70,6%
13,2%
9,2%
3,2%
2,1%
1,7%
Prix
54,8%
14,3%
13,4%
6,8%
6,1%
4,6%
Difficultés techniques
67,2%
17,2%
8,9%
3,2%
1,8%
1,6%
Temps
45,7%
19,7%
17,6%
8,4%
5,7%
2,9%
Connaissance de l'offre
60,5%
13,6%
12,5%
6,5%
4,4%
2,6%
Etat des sanitaires
67,4%
13,5%
9,4%
4,0%
2,9%
2,8%
MC-Informations 262 • décembre 2015
45
Gagner du muscle et recherche de la performance sont peu
tranchés mais la tendance semble se situer entre le « peu à
moyennement important ». En ce qui concerne, la « lutte »
contre le vieillissement, la diminution du stress, de la fatigue,
rien n’est clairement tranché et les avis sont mitigés mais il
semble que la tendance s’oriente vers le plutôt « important »
Enfin, ce constat est identique en ce qui concerne « faire des
rencontres » et « établir des contacts ». Les résultats restent
contrastés.
Ces résultats pourraient laisser supposer que les 55-70 ans ont
une vision bien spécifique de la pratique sportive et auraient
globalement des motivations assez similaires à s’y engager.
Ces résultats mériteraient donc encore d’être approfondis.
Par ailleurs, ils dénotent sur la scène sportive classique telle
qu’on la connaît dans la mesure où ce sont souvent (trop ?)
les aspects physiques ou de performance liés au sport qui
sont mis en évidence. L’angle de vue « santé par l’activité physique et sportive » ou encore le volet « sport pour tous » reste
malheureusement peu évoqué et développé, surtout en ce qui
concerne le public qui nous concerne.
Des seniors recherchant la performance existent bien évidemment mais il s’agit en réalité d’une minorité. En outre, il est fort
probable également que nous calquons le sport « jeune » sur le
sport pratiqué lorsqu’on est plus âgé. Le modèle d’identification
classique à des élites est certainement difficilement accessible
pour la majorité des aînés.
Enfin, en regard de l’item « créer des relations » : nous savons
que l’intégration au sein d’un groupe et d’un tissu social (de
qualité) œuvre au bien-être et dès lors, à la santé au sens
large. Ceci est d’autant plus intéressant que l’on sait que le
vieillissement est associé à une tendance à l’isolement. Si l’on
veut lutter contre cette isolement et aussi indirectement aux
problèmes que cela peut poser à divers niveaux (accidents,
chutes, sentiment de solitude, dépressions, syndrome de glissement, etc.), l’intégration au sein d’un tissu associatif à travers
notamment les clubs sportifs loisirs conviviaux et de proximité
est à promouvoir. Rejoindre une structure comme énéoSport
pourrait également, l’air de rien, jouer un rôle aussi dans la prévention de certaines problématiques sociales que l’avancée en
âge peut engendrer.
L’enquête met en exergue un autre élément relativement
déroutant à savoir qu’aucun obstacle ne se profile véritablement
chez les sujets pratiquants du sport. Sur base des retours
reçus, se profile un haut niveau d’adhésion. En somme, il en
46
faut beaucoup pour démotiver les sujets ayant répondu, une
fois lancé dans une pratique sportive.
Ce résultat pourrait éventuellement s’expliquer par le rôle
porteur du relationnel, de l’importance accordée de la part du
sujet concerné au réseau et au lien social créé. Cette absence
d’obstacles reste très étonnante dans la mesure où nous
mettons souvent en exergue notamment le frein que le tarif
peut représenter.
6. Limites de l’enquête
Cette enquête a été mise en place dans le but d’opérer un « coup
de sonde ». Il est évident qu’elle n’est donc pas comparable
à des études plus approfondies. Dès lors, plusieurs limites
principales sont à mettre en évidence.
Tout d’abord, l’échantillon a été sélectionné de manière tout
à fait aléatoire et n’a pas, volontairement, été constitué de
manière « représentative » par rapport à la population belge.
Ensuite, il est tout à fait possible que l’échantillon touché
soit déjà particulièrement sensibilisé au thème de la santé et
conscient de l’importance de l’activité physique et sportive.
Il est possible que plusieurs des sujets aient été enclins à
répondre au questionnaire tout simplement parce que ce thème
leur parlait déjà tout particulièrement.
En outre, l’absence de mise en évidence claire de freins à la
pratique sportive peut être liée au niveau de vie des sujets. Il
est en effet possible que les répondants à notre enquête aient
plutôt un niveau de vie correct ou confortable. Il est à noter
en effet que l’échantillon est d’ailleurs composé d’assez bien
d’employés, de cadres (ou ex-employés/ex-cadres) et de personnes encore en activité.
La connaissance de l’offre est également un élément majeur,
pouvant être un frein, comme l’avait mis en évidence notamment l’Eurobaromètre de 2014. A nouveau, les résultats peuvent
être biaisés dans la mesure où la majorité des sujets de l’échantillon, de par leur niveau socio-économique, ont davantage accès à internet ou encore, sont amenés à « surfer » davantage
de par leur activité professionnelle (puisqu’une tranche importante des répondants travaille encore). Ceci peut ainsi laisser
supposer que ces personnes sont dès lors, plus à même ou habituées à chercher d’elles-mêmes les informations.
C’est ainsi que les résultats obtenus ne peuvent bien
évidemment pas être généralisés à l’ensemble de 50 ans et +
mais sont valables uniquement pour les sujets ayant répondu.
Ils permettent toutefois de soulever des hypothèses et
questionnements au vu du nombre important de retours reçus.
MC-Informations 262 • décembre 2015
7. Conclusion & perspectives
De par le fait qu’elle a été réalisée sous forme de sondage,
cette enquête - une première pour l’asbl énéoSport - ouvre bien
évidemment plus de portes qu’elle n’en referme.
Elle a l’intérêt de susciter quelques questionnements, réflexions
mais aussi, d’ouvrir des perspectives d’investigation ultérieure.
Les éléments principaux à retenir sont :
• l’importance de la pratique sportive « forme/santé/
bien-être » de façon générale
• l’importance du volet relationnel dans le cadre d’une
pratique sportive (et ce, plus particulièrement pour les
membres énéoSport)
•la faible recherche de performance ou encore
d’intérêt pour les aspects esthétiques
• le haut niveau d’adhésion des sujets une fois inscrits
dans une pratique sportive
•le faible taux de pratique sportive suite à une
prescription médicale
Sur base de ces principaux éléments, quelques pistes peuvent
être dégagées. En effet, il pourrait être intéressant d’orienter
les campagnes de sensibilisation à la pratique sportive à
destination des seniors sur les aspects de santé, forme et bienêtre et également sur le volet social.
Dans cette logique, des partenariats, notamment avec des
organismes de santé, doivent évidemment se mettre en place
afin que les messages soient diffusés et assimilés de façon
optimale.
En outre, il serait pertinent d’entamer une réflexion en lien avec
le rôle des médecins généralistes en matière de promotion de
la pratique physique et sportive des aînés en procédant tout
d’abord, à une enquête de terrain et peut-être ensuite, en
développant une campagne d’information des acteurs de 1ère
ligne tels que les médecins.
Plus globalement, il est indispensable de procéder à d’autres
études et enquêtes dans le but d’approfondir une série
d’éléments. Outre le fait de creuser certains volets du présent
sondage et de questionner un public différent de la MC, il serait
notamment intéressant d’analyser les données et perceptions
en fonction de tranches d’âge, les aspirations et pratiques
des 50-60 étant en théorie bien différentes de personnes de
80-90 ans. Inutile de souligner qu’une foule d’orientations sont
possibles.
Pour conclure, nous tenons à indiquer qu’il demeure bien entendu essentiel de pérenniser des actions de sensibilisation à
la pratique physique et sportive à destination des seniors, à de
multiples niveaux dans une optique de prévention santé, sans
omettre pour autant de procéder à des enquêtes et études de
terrain qui vont venir alimenter les actions à mener et messages à passer.
Ce travail ne peut s’opérer qu’en créant davantage de synergies
entre acteurs ayant pour intérêt le bien-être/santé, le développement du sport pour tous et de loisirs mais encore, avec des
universités ou organismes de recherche. La mise en réseau est
primordiale et le champ de l’investigation en matière de « sport
seniors » ne fait donc que commencer …
MC-Informations 262 • décembre 2015
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Table des matières
MC-Informations
Éditorial2
paraît quatre fois par an (mars, juin,
septembre, décembre) en français
Etude MC prothèse totale de hanche 3
et en néerlandais, et est consultable
24 ans d’analyses : l'étape suivante d’une
collaboration transparente et équilibrée entre
soignants et soignés et entre hôpitaux
et mutualités
MC-Informations.
gratuitement sur : http://www.mc.be/
A cette adresse, vous pouvez vous
inscrire sur un « mail-alert » et serez
ainsi averti lors de la parution d’un
nouveau numéro.
Consommation de soins de santé18
Recours aux urgences hospitalières :
exploration des données de la MC
Les inégalités en santé 26
Les inégalités en santé chez les membres
des MC : ne pas avancer, c’est reculer.
Promotion de la santé
40
L’activité physique et sportive des + de 50 ans en
Fédération Wallonie-Bruxelles
Enquête électronique auprès des affiliés MC
Colophon
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