tyrannie. Mais les chefs d’accusation lancés contre Socrate sont moraux et
religieux. L’accusation de corruption de la jeunesse vise directement l’influence,
jugée pernicieuse, du philosophe auprès d’un certain nombre de jeunes gens de
riches familles. Quant aux deux chefs d’accusation à contenu religieux, ils font
allusion au « démon » que Socrate disait entendre.
Mes accusateurs ont le pouvoir de me tuer, ils n’ont pas celui de me nuire. Je ferai taire les médisants en continuant de bien
vivre, voilà le meilleur usage que nous puissions faire de la médisance …… SOCRATE;
LE DEMON DE SOCRATE
Socrate disait entendre en lui la voix d’ un démon, c’est-à-dire d’une puissance
supérieure « le mot en Grèce n’a aucune dimension diabolique) lorsqu’il était tenté
de commettre une action mauvaise. La psychologie classique traduirait par «
conscience morale » le démon de Socrate., la psychanalyse parlerait de « surmoi ».
Cela étant, il convient de ne pas « psychologiser » à l’extrême ce démon. La
notion de conscience morale qui n’apparaîtra véritablement qu’avec le
christianisme, était étrangère aux Grecs qui ignoraient , l’intériorité du sujet, les
profondeurs et l’intimité du « moi ». Les mouvements internes de la pensée et de
la volonté étaient alors systématiquement rapportés à des forces extérieures,
personnifiés sous la forme ou figure de dieux.
LA MORT DE SOCRATE
L’émouvant récit que Pla&ton fit des derniers instants de son maître dans «
Phédon », prouve que l’on put, dans l’Antiquité, être un génie et un héros sans
cesser d’être un sage. Plus tard, le christianisme verra en Socrate une espèce de
saint païen ou laïc et le parallèle avec Jésus sera souvent établi: voilà deux hommes
sans œuvre écrite, qui ont bouleversé l’histoire grâce à leurs paroles et à leur
enseignement, deux modèles parfaits qu’une mort injuste a grandi aux yeux de
tous . Avec Socrate, la philosophie a son martyr: vingt cinq siècles plus tard, la
projection imaginaire fonctionne avec une certaine efficacité. Combien
d’intellectuels pourtant assez choyés par l’état, ont revêtu les oripeaux des
marginaux pourchassés, combien de professeurs chahutés de classe de terminales
de lycée pensent à l’injustice suprême subie par Socrate pour se réconforter.
Comme à propos de Jésus, c’est peu de dire que Socrate n’a rien fait pour échapper
à la mort : son orgueilleuse attitude devant les juges est même pour beaucoup dans
la sentence finale. Alors que , jugé coupable à une faible majorité, il lui est
demandé de fixer lui-même la peine, il répond crânement qu’il désirerait être nourri