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PASCAL RAMBERT CLÔTURE DE L’AMOUR/RÉPÉTITION/AVIGNON À VIE
NOTE D’INTENTION
J’ai écrit Clôture de l’amour pour Stanislas Nordey et Audrey Bonnet. C’est Stanislas 
Nordey qui m’en a parlé en premier. Qui m’a dit : « J’aimerais un jour jouer dans tes 
pièces ». J’ai dit OK. J’ai dit j’ai une idée de séparation dure. Une séparation dure entre 
quelqu’un de ton âge et une jeune femme aussi de ton âge. J’ai dit je voudrais que ce soit 
Audrey Bonnet. Il a dit « J’aime beaucoup Audrey Bonnet ». Alors j’ai dit demandons à 
Audrey. Audrey a dit « oui ». J’écris pour Stanislas Nordey. J’écris pour sa manière de 
projeter les mots. Cette manière « articulée » de dire la langue française. Cette manière 
unique de faire du langage une respiration entière du corps. Le corps respire chez 
Stanislas Nordey. Chaque mot devient – de la première lettre à la dernière – un monde 
abouti et plein. Ce sont des couteaux. Des lames brillantes préparées. Enclenchées. 
Armées. Soigneusement rangées. Prêtes à être sorties en ordre. Des mots dans l’ordre : 
dans leur aspect premier, secondaire, tertiaire. En toute objectivité frontale et froide. Là, 
devant la bouche. Portés par la puissance nerveuse et sèche du corps. Le corps est sec. 
Précis. Méchant. La bouche est mobile, insatisfaite, aigre. Les yeux accompagnent une 
sorte de panique qu’on ne voit pas s’interrompre. Un étonnement. La main, puis les 
mains, prolongent l’idée. Les sortent du corps à la manière de phylactères rétifs, froids 
ou soudain incendiés. Le corps est le support. Il porte en son entier la diction. Il est 
diction à vrai dire. Rien n’est jamais satisfaisant dans l’élocution. Rien. On le voit bien : 
les mains, la bouche, les yeux, les jambes – ce ballet dur – cherchent, avancent, repartent, 
rentrent, sortent, re rentrent, re sortent (ne glissent jamais : jamais) vont devant, vont 
loin (sur le plateau là-bas), au sol – surtout au sol – en haut (majoritairement en haut 
mais plus à l’horizontal net du sol) tancent, exaspèrent, recommencent (ne battent pas 
en retraite : jamais) recommencent encore : ça y est le sens est là. Le sens est là. Devant. 
Devant nous. On a suivi le sens depuis l’intérieur du corps de Stanislas Nordey (il était 
dans la bouche, il était sur les mains, on l’avait vu dans les jambes, la poitrine) maintenant 
le sens est là depuis l’intérieur du corps jusque-là devant nous. Matériel. Pas rigolo. Brut. 
Comme ça tiens le sens il n’y a pas de problème il est là réel pas rigolo il est là tiens 
prends le sens. Cela est une masse. Du début à la fin. A fragmentation en plus. Pour 
causer de justes « dommages » à la tête. J’écris pour ça. Pour ça chez Stanislas.
J’écris pour Audrey Bonnet. Alors Audrey Bonnet (son personnage) qui est restée sans 
rien dire pendant une bonne demi-heure à écouter (tout ça au-dessus) les précisions de 
Stanislas Nordey (le personnage) qui lui explique avec les mains, la bouche, la poitrine 
pourquoi il la quitte (clôture de l’amour) alors Audrey Bonnet (son personnage) elle 
reprend sa salive et elle répond. J’écris pour Audrey. Alors là c’est pas pareil mais alors 
pas du tout pareil que chez Stanislas Nordey. J’écris pour Audrey. J’écris pour le corps 
d’Audrey. Pour cette courbe fine du haut en bas qui écoute. Audrey écoute. J’écris pour 
cette écoute puis pour ce corps courbe et fin qui s’est tu et puis parle. Alors quand ça 
parle ça parle droit dur et en tessiture medium-grave. Parfois ça grimpe des sortes de 
courbes inattendues dans le registre haut et puis ça oblique en piqué vers le bas hyper 
rapide. Et puis ça s’arrête. Et ça écoute à nouveau. Et c’est le silence. Le corps qui attend. 
Il respire. Il respire depuis le début ça c’est sûr. Mais il attend. Il sait comme personne 
le corps d’Audrey Bonnet le créer le silence. Dire eh alors ? D’avoir l’air soudain super 
actif dans l’immobilité totale. Presque débile. Façon idiot du village. Je suis là. J’emplis 
(par mon silence) ton espace. J’attends. Et je reprends. Les mots sont ronds. Plats. Les 
mots sont plats et épineux. Des fois totalement abandonnés devant elle parce que le 
doute est dans le sens. Le doute prend le sens. Le sens est remis en doute devant la 
bouche comme des poissons morts dont on regarde la fraîcheur dans l’œil. Tu es vivant 
sens ? C’est quoi ton verso ? Il est où ton recto ? Hello ??? Ca commence où il paraît ? Ca 
va à quel endroit ? Il y a ça dans le jeu d’Audrey Bonnet : une incrédulité. Un effarement. 
Une écoute qui écoute le brut, le direct, le matériel, le pas rigolo et qui dit : ah bon ? Ah 
bon ? Et ça recommence à la manière du combattant immobile Audrey Bonnet ça 
recommence ça rattrape les mots directs, bruts, matériels, métalliques, pas rigolos 
d’avant et ça les saisit et ça les regarde comme des poissons morts pour voir si la vie est 
encore dedans si l’amour (clôture de l’amour) est bien mort.
PASCAL RAMBERT, PARIS, AVRIL 2010
Stanislas Nordey et Audrey 
Bonnet dans 
Clôture de l’amour 
© Marc Domage
Stanislas Nordey et Audrey 
Bonnet dans 
Clôture de l’amour 
© Marc Domage
Stanislas Nordey et Audrey 
Bonnet dans 
Clôture de l’amour
 
© Marc Domage