cours sur les polynômes

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Université de Paris-Sud
Math 204- Algèbre 2006–2007
Arithmétique des polynômes. Fractions rationnelles
Résumé du cours
Ce résumé est avant tout un aide-mémoire et/ou un ensemble de points de repère. Tel
quel, il est totalement indigeste et il serait illusoire de penser qu’il suffit de le connaı̂tre
pour pouvoir comprendre le cours. On a privilégié une exposition logique à une exposition
didactique et on n’a donc pas respecté l’ordre du cours.
1 – Anneaux.
Un anneau est un ensemble A muni de deux lois de composition
– une addition A × A → A, en général notée (a, b) 7→ a + b,
– une multiplication A × A → A, en général notée (a, b) 7→ a.b (ou (a × b) ou ab),
vérifiant :
i) (a + b) + c = a + (b + c), quelque soient a, b, c ∈ A,
ii) il existe 0 ∈ A tel que a + 0 = 0 + a = a, quelque soit a ∈ A,
iii) pour tout a ∈ A, il existe a0 ∈ A tel que a + a0 = a0 + a = 0,
iv) (ab)c = a(bc) quelque soient a, b, c ∈ A,
v) a(b + c) = ab + ac et (b + c)a = ba + ca, quelque soient a, b, c ∈ A,
vi) il existe un élément 1 ∈ A tel que 1a = a1 = a quelque soit a ∈ A.
Dans un anneau A, l’élément 0 est unique et s’appelle le zéro de l’anneau, l’élément 1
est unique et s’appelle l’élément-unité.
Les propriétés i), ii) et iii) siginifient que, pour l’addition, A est un groupe abélien.
L’ensemble A∗ des a ∈ A tels qu’il existe b ∈ A vérifiant ab = ba = 1 est un groupe, que
l’on appelle le groupe des unités ou le groupe multiplicatif des éléments inversibles de A.
Si dans un anneau A, on a 1 = 0, alors A a un seul élement : A = {0}.
On dit qu’un anneau A est commutatif si ab = ba, quelque soient a, b ∈ A.
Un homomorphisme d’anneaux f : A → B est une application de A dans B telle que
f (a + b) = f (a) + f (b) , f (ab) = f (a)f (b) quelque soient a, b ∈ A et f (1) = 1 .
Un sous-anneau d’un anneau B est un sous-ensemble B 0 de B contenant 1 tel que
si a, b ∈ B 0 , alors a + b ∈ B 0 et ab ∈ B 0 .
Munis de l’addition et de la multiplicatioin induites par celles de B, B 0 est un anneau
et l’inclusion de B 0 dans B est un homomorphisme injectif d’anneaux. Si f : A → B est
un homomorphisme d’anneaux, l’image de f
Im f = {b ∈ B | il existe a ∈ A tel que f (a) = b}
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est un sous-anneau de B.
Un idéal d’un anneau A est une partie non vide I telle que
a + b ∈ I quelque soient a, b ∈ I et xa, ax ∈ I quelque soient x ∈ A et a ∈ I .
Le noyau f : A → B d’un homomorphisme d’anneaux
Ker f = {a ∈ A | f (a) = 0}
est un idéal de A.
On a Ker f = {0} ⇐⇒ f est injectif. On a Ker f = A ⇐⇒ B = {0}.
On dit qu’un anneau commutatif A est intègre s’il n’est pas réduit à 0 (c’est-à-dire si
A 6= {0}) et si le produit de deux éléments non nuls de A est non nul.
Un corps est un anneau commutatif non réduit à 0 tel que tout élément non nul est
inversible. Autrement dit, c’est un anneau commutatif K tel que K ∗ est le complémentaire
de 0 dans K.
Construction du corps des fractions d’un anneau commutatif intègre : Soit A un anneau
commutatif intègre, soit S le complémentaire de 0 dans A. On munit l’ensemble A × S
d’une relation d’équivalence en posant
(a, s) ≡ (a0 , s0 ) ⇐⇒ as0 = a0 s .
Soit K l’ensemble quotient pour cette relation d’équivalence. Si (a, s) ∈ A×S, on note a/s
(ou ab ) la classe d’équivalence de (a, s) (ce qui fait que l’on a a/s = a0 /s0 ⇐⇒ as0 = a0 s).
On définit une addition et une multiplication dans K en posant
at + bs
a b
as
a b
+ =
et . =
s
t
st
s t
bt
(c’est indépendant du choix des représentants dans les classes d’équivalence). On obtient
ainsi un corps que l’on appelle le corps des fractions de A et que l’on note Frac A.
L’anneau A s’identifie à un sous anneau de K en posant a = a/1 pour tout a ∈ A.
Divisibilité : Soit A un anneau commutatif intègre et soit K son corps des fractions.
Soient a, b ∈ A. On dit que b divise a (dans A) s’il existe c ∈ A tel que a = bc. On dit
aussi que b est un diviseur de a ou que a est un multiple de b.
Remarquons que
– si b = 0, ce n’est jamais le cas sauf si a = 0, auquel cas, ce sera vrai pour tout c,
– si b 6= 0, b divise a dans A si et seulement si l’élément a/b de K est en fait dans A
et c est alors unique, égal à a/b.
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Soit A un anneau commutatif. Si b ∈ A, l’ensemble des multiples de b est un idéal de
A que l’on note (b) ou bA et que l’on appelle l’idéal de A engendré par b.
Si a, b ∈ A, on a
a ∈ (b) ⇐⇒ (a) ⊂ (b) ⇐⇒ b divise a .
On dit que a, b ∈ A sont associés si (a) = (b). Cela équivaut à dire qu’il existe ε ∈ A∗
tel que b = aε.
Anneaux principaux :
Un idéal I d’un anneau commutatif est dit principal s’il existe b ∈ A tel que I = (b)
(on dit alors que I est l’idéal de A engendré par b).
Un anneau principal est un anneau commutatif intègre dont tous les idéaux sont
principaux.
Dans toute la fin du paragraphe 1, A est un anneau principal. Soit A0 = {a ∈ A | a 6=
0 et a 6∈ A∗ }. On choisit un système complet U de représentants des classes d’équivalence,
pour l’association, des éléments de A0 . Par conséquent, si a ∈ A,
– ou bien (a) = (0), ce qui équivaut à dire que a = 0,
– ou bien (a) = A, ce qui équivaut à dire que a ∈ A∗ ,
– ou bien, il existe un et un seul u ∈ U tel que (a) = (u).
Dans ce cours, on dira que U est un bon système pour A.
Soient a, b deux éléments non nuls de A.
Le pgcd (plus grand commun diviseur) de a et b est l’unique élément d ∈ U tel que
(a) + (b) = (d). Alors d divise a et b. Un élément c de A divise a et b si et seulement s’il
divise d.
Le ppcm (plus grand commun mutiple) de a et b est l’unique élément m ∈ U tel que
(a) ∩ (b) = (m). Alors m est un mutiple de a et de b. Un élément c de A est un mutiple
de a et de b si et seulement si c’est un mutiple de m.
On dit que p ∈ A est irréductible sii p 6= 0, p 6∈ A∗ et si
(p = ab, avec a, b ∈ A) implique (a ∈ A∗ ou b ∈ A∗ ) .
Proposition. — Soit p un élément irréductible de A et soient a, b ∈ A. Si p divise ab,
alors p divise a ou p divise b.
On note P l’ensemble des éléments irréductibles de A qui sont dans U . On note R
l’ensemble des familles d’entiers (rp )p∈P tels que rp ∈ N pour tout p et que l’ensemble
des p tels que rp 6= 0 est fini. Si (rp )p∈P ∈ R, on pose
Πp
rp
= Πp∈P p
rp
=
1 si rp = 0 pour tout p,
Πp∈P tel que rp 6=0 prp sinon.
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Proposition. — i) Pour tout idéal non nul I de A, il existe un et un seul u ∈ U tel que
I = (u).
ii) Pour tout a ∈ A non nul, il existe (rp )p∈P ∈ R et ε ∈ A∗ , uniques tels que
a = εΠ prp (on a donc aussi a = εu, avec u = Πprp ∈ U ).
On dit alors que a = εΠ prp est la décomposition canonique de a. Pour tout p ∈ P,
l’entier rp s’appelle la multiplicité de p dans a.
Si I et J sont deux idéaux de A, I + J = {x + y | x ∈ I et y ∈ J} et I ∩ J sont des
idéaux de A. L’idéal I + J est aussi le plus petit idéal de A contenant I et J.
Proposition. — Soient a et b des éléments non nuls de A et
a = εΠ prp et b = ε0 Π psp
leurs décompositions canoniques. Soient d le pgcd de a et b et m leurs ppcm. Alors
d = Π pmin{rp ,sp } , m = Π pmax{rp ,sp } et ab = εε0 dm .
2 – L’anneau Z et ses quotients.
L’anneau Z est un anneau intègre. On a Z∗ = {1, −1}. Le corps des fractions de Z est
le corps Q des nombres rationnels.
Division euclidienne :
Théorème. — Soient a, b ∈ Z avec b 6= 0. Il existe q, r ∈ Z uniques vérifiant
a = bq + r et 0 ≤ r < b .
Soit N un entier ≥ 1. On considère un ensemble, noté Z/N Z qui a N éléments notés
0, 1, . . . , N − 1. Pour tout a ∈ Z, on pose a = r si r est le reste de la division euclidienne
de a par N . On définit une addition et une mutiplication sur Z/N Z en posant
a+b
a.b
= a+b
=
ab
Proposition. — Muni de ces deux lois, Z/N Z est un anneau commutatif. L’application
de Z dans Z/N Z qui envoie a sur a est un homomorphisme d’anneaux qui est surjectif
et dont le noyau est l’idéal engendré par N .
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Théorème. — L’anneau Z est un anneau principal.
L’ensemble U des entiers ≥ 2 est un bon système pour Z. L’znsemble P des nombres
premiers est l’ensemble des éléments irréductibles de Z qui sont dans U .
Algorithme de Bezout :
Théorème. — Soient a et b des entiers vérifiants 0 < a < b. On construit une suite finie
strictement décroissante a0 , a1 , a2 , . . . d’entiers ≥ 0 :
i) on pose a0 = a et a1 = b,
ii) si, ao , a1 , . . . , an sont déjà construits et si an 6= 0, on prend pour an+1 le reste de
la division euclidienne de an−1 par an .
Alors le pgcd de a et b est le dernier terme non nul de la suite des an .
3 – L’anneau des polynômes à coefficients dans un corps et ses quotients.
Si A est un anneau commutatif, un élément de l’anneau A[X] des polynômes en
l’indéterminée X à coefficients dans A s’écrit de manière unique sous la forme
n
P = Σ+∞
n=0 an X
où (an )n∈N est une suite d’éléments de A presque tous nuls (c’est-à-dire telle que
l’ensemble des entiers n pour lesquels an 6= 0 est fini). Si d est un entier tel que an = 0
pour tout n > d, on peut écrire P sous la forme a0 + a1 X + a2 X 2 . . . + ad X d . Si ad 6= 0,
on dit que P
P est de degré d. P
On convient que le degréP
du polynôme 0 est −∞. P
n
n
Si P =
an X et Q =
bn X , on a P + Q = (an + bn )X n et P Q =
cn X n
avec cn = a0 bn + a1 bn−1 + a2 bn−2 + . . . + an b0 .
L’anneau A[X] est un anneau commutatif contenant l’anneau A comme sous-annneau.
Soient A un sous anneau commutatif d’un anneau B. Pour tout x ∈ B tel que ax = xa
quelque soit a ∈ B, il existe un unique homomorphisme d’anneaux fx : A[X] → B
vérifiant fx (a) = a pour tout a ∈ A et fx (X) = x : si P = a0 + a1 X + a2 X 2 + . . . ad X d ,
on a fx (P ) = P (x) = a0 + a1 x + a2 x2 + . . . ad xd .
Remarque : Le fait de noter un polynôme P ou P (X) est affaire de goût ou de
circonstance. En revanche la valeur du polynôme P en x se note P (x) (et d’ailleurs
P (X) est bien la valeur du polynôme P en X ∈ A[X], anneau contenant X).
Si P, Q ∈ A, on a deg(P + Q) ≤ max{deg P, deg Q} (avec toujours l’égalité lorsque
deg P 6= deg Q). Si A est intègre, on a deg(P Q) = deg P + deg Q.
Si l’anneau A est intègre, l’anneau A[X] l’est aussi et A[X]∗ = A∗ . Si K est un corps,
l’anneau K[X] est donc intègre et son corps des fractions se note K(X) et s’appelle le
corps des fractions rationnelles en l’indéterminée X à coefficients dans K.
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Dans toute la fin du paragraphe 3, K est un corps.
Division euclidienne :
Théorème. — Soient A, B ∈ K[X] avec B 6= 0. Il existe Q, R ∈ K[X] uniques vérifiant
A = BQ + R et deg R < deg P .
Un polynôme unitaire est un polynôme non nul dont le terme de plus haut degré est
égal à 1.
Soit P ∈ K[X] un polynôme unitaire et soit d son degré. On considère l’ensemble,
noté K[X]/(P ) des éléments notés R, avec R ∈ K[X] un polynôme de degré < d. Pour
tout A ∈ K[X], on pose A = R si R est le reste de la division euclidienne de A par P .
On définit une addition et une mutiplication sur K[X]/(P ) en posant
A+B
A.B
= A+B
=
AB
Proposition. — Muni de ces deux lois, K[X]/(P ) est un anneau commutatif. L’application de K[X] dans K[X]/(P ) qui envoie A sur A est un homomorphisme d’anneaux qui
est surjectif et dont le noyau est l’idéal engendré par P .
Théorème. — L’anneau K[X] est un anneau principal.
L’ensemble U des polynômes unitaires non constants est un bon système pour K[X].
Algorithme de Bezout :
Théorème. — Soient A, B ∈ K[X] des polynômes non nuls vérifiant deg A < deg B. On
construit une suite finie Ao , A1 , A2 , . . . de polynômes de degré strictement décroissants :
i) on pose A0 = a et A1 = b,
ii) si, Ao , A1 , . . . , An sont déjà construits et si An 6= 0, on prend pour An+1 le reste
de la division euclidienne de An−1 par An .
Alors le pgcd de A et B est le polynôme unitaire associé au dernier polynôme non nul
de la suite des An .
Remarque : Soit D le pgcd de A, B ∈ K[X]. Il existe des polynômes U et V vérifiant
U A + V B = D. L’algorithme de Bezout fournit un procédé pour trouver de tels
polynômes : si les An sont comme dans le théorème et si An−1 = An Qn + An+1 , on
a An+1 = An−1 − Qn An , ce qui permet de fabriquer, de proche en proche, des polynômes
Un , Vn (pour n ≥ 2) tels que An = Un A + Vn B.
Soit P ∈ K[X]. On dit que a ∈ K est une racine de P si P (a) = 0. Ceci équivaut à
dire que X − a divise P . Soit r la multiplicité de X − a dans P (c’est donc le plus grand
entier tel que (X − a)r divise P ). L’entier r s’appelle la multiplicité de la racine a. On
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dit aussi que a est racine d’ordre m. Si r = 1, on dit que a est racine simple, sinon, on
dit que c’est une racine multiple.
Tout polynôme P ∈ K[X] de degré 1 est irréductible. On dit que K est algébriquement
clos si tout polynôme irréductible est de degré 1. Ceci se produit si et seulement si tout
polynôme non constant a une racine.
Si P est un polynôme de degré 2 ou 3, P est irréductible si et seulement s’il n’a pas
de racine.
Théorème. — i) Le corps C des nombres complexes est algébriquement clos.
ii) Dans R[X], les polynômes irréductibles sont
– d’une part les polynômes de degré 1,
– d’autre part les polynômes de degré 2
P = aX 2 + bX + c (avec a 6= 0) tels que b2 − 4ac < 0 .
Dérivée d’un polynôme :
Soit P = a0 + a1 X + . . . + ad X d ∈ K[X]. La dérivée de P est le polynôme
0
P = a1 + 2a2 X + . . . dad X d . La dérivation des polynômes est K-linéaire (autrement
dit, c’est un endomorphisme de K[X] vu comme espace vectoriel sur le corps K). Si
A, B ∈ K[X], on a (AB)0 = A0 B + BA0 .
Si le corps K contient Q et si P ∈ K[X] est non nul :
– on a P 0 = 0 si et seulement si P est une constante ( ⇐⇒ deg P = 0),
– si P est de degré d > 0, le degré de P 0 est d − 1.
– les racines mutliples de P sont les racines communes de P et P 0 ,
– si a est une racine de P d’ordre m ≥ 2, a est une racine de P 0 d’ordre m − 1,
– la multiplicité d’une racine a de P est le plus petit entier m tel que P (m) (a) 6= 0,
– Les polynômes P et P 0 sont premiers entre eux si et seulement si P n’a que des
racines simples.
4 – Décomposition d’une fraction rationnelle en éléments simples.
Dans ce paragraphe K est un corps et on travaille avec le corps des fractions
rationnelles K(X).
Tout élément non nul F de K(X) s’écrit d’une manière et d’une seule sous la forme
A/B avec A, B ∈ K[X] premiers entre eux et B unitaire. On appelle cette écriture la
forme irréductible de F .
Un élément simple de K(X) est une fraction rationnelle de la forme A/P r où r est un
entier ≥ 1, P est un polynôme irréductible unitaire et A un polynôme non nul vérifiant
deg A < deg P .
Théorème. — Toute fraction rationnelle F ∈ K(X) non nulle peut s’écrire comme la
somme d’un polynôme et d’un nombre fini d’élements simples distincts. Cette écriture
est unique à l’ordre près.
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De façon plus précise, si F = A/B est sous forme irréductible et si B =
rm
, avec les Pi des polynômes irréductibles unitaires distincts, on peut écrire
P1r1 P2r2 . . . Pm
ri
F = Q + Σm
i=1 (Σj=1
Ai,j
Pij
)
où Q est le quotient de la division euclidienne de A par B et les Ai,j sont des polynômes
vérifiant deg Ai,j < deg Pi .
Remarque : Si i est tel que deg Pi = 1, on a alors Pi = X−λi et les Ai,j sont des constantes.
Si l’on pose G = Piri F , on a Ai,ri = G(λi ) et, plus généralement, Ai,ri −k = (1/k!)G(k) (λi )
pour k = 0, 1, 2, . . . , ri − 1.
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