
52 | La Lettre du Neurologue • Vol. XIV - n° 2 - Février 2010
Génériques des médicaments antiépileptiques:
doit-on se méfier des OGM ?
MISE AU POINT
la substitution coûtait finalement plus cher à la
société (7 902 dollars versus 6 419 dollars) [4, 8].
Ces dépenses supplémentaires sont liées à des
augmentations significatives des doses de médi-
caments antiépileptiques (de 20,4 à 24 boîtes), à
des augmentations du nombre de spécialités prises
après substitution (de 26,4 à 32,8 boîtes d’autres
traitements), au nombre de visites chez le médecin,
qui passe de 8,7 à 9,8 par an, et à des durées d’hos-
pitalisation passant de 3,29 à 4,86 jours par an.
Cette augmentation globale de la consommation
médicale était déjà soulignée, mais non chiffrée dans
les enquêtes allemandes et françaises.
Il existe donc une suspicion forte que la substitu-
tion des antiépileptiques dans l’indication épilepsie
soit une fausse bonne idée, qui fait courir un risque,
même minime, aux patients, pour des raisons ration-
nelles ou non, et qui coûte finalement, indirecte-
ment, plus cher à la société.
L’Afssaps a pris conscience du caractère particulier de
cette maladie et des antiépileptiques. En mars 2008,
elle a adressé aux pharmaciens et aux médecins fran-
çais une lettre dans laquelle il est clairement dit que
le médecin et le pharmacien doivent s’assurer que la
prescription de médicaments génériques ne suscite
pas, après une information approfondie, d’anxiété
particulière chez le patient. La mention manuscrite
“non substituable” apposée par le médecin ne peut
être contournée par le pharmacien, qui doit, en outre,
indiquer sur l’ordonnance ce qu’il a délivré.
Les laboratoires commercialisant des médicaments
princeps et ceux qui commercialisent des médica-
ments génériques font des bénéfices et ont des
actionnaires à rémunérer. Les premiers assument
le coût de la recherche et du développement de
nouveaux produits (16 à 25 % des bénéfices), et ce
coût augmente. Les laboratoires de médicaments
princeps assurent également la visite médicale, dont
le rôle est de promouvoir des médicaments, mais
aussi de proposer certaines missions de formation,
de faire remonter des effets indésirables, de rappeler
régulièrement aux prescripteurs certaines règles (par
exemple, les précautions d’instauration de la lamo-
trigine, ses possibles interactions avec le valproate),
ce que ne font pas les laboratoires des médicaments
génériques.
Conclusion
En épileptologie, la substitution des médicaments
antiépileptiques pourrait entraîner, dans de rares
cas, des récidives de crises, que ce soit du fait des
petites différences pharmacologiques, de l’anxiété
du patient ou de troubles du sommeil dus au traite-
ment. Les rares études médico-économiques à notre
disposition indiquent que le bilan est négatif dans
certains pays en termes de dépenses de santé. Toute-
fois, nous ne savons pas ce qu’il en est en France ;
or, la raison d’être des génériques est de permettre
de faire des économies. ◾
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Références bibliographiques