les acteurs de bonne foi

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COPRODUCTION DU TNS
Dossier d’accompagnement pédagogique
LES ACTEURS
DE BONNE FOI
De Marivaux
Mise en scène Jean-Pierre Vincent
Du jeudi 25 novembre au samedi 18 décembre 2010
Du mardi au samedi à 20h, les dimanches à 16h
Relâche les lundis
Salle Bernard-Marie Koltès
Contact Relations publiques : Lorédane Besnier • Tel : 03 88 24 88 47 • [email protected]
Site internet : www.tns.fr • Réservations : 03 88 24 88 47
Ah ! nous
verrons si on
me fera jouer
la comédie
malgré moi.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
COPRODUCTION DU TNS
LES ACTEURS DE BONNE FOI
De Marivaux
Mise en scène Jean-Pierre Vincent
Rencontres
• à l’issue de la représentation
Jeudi 2 décembre
• avec Jean-Pierre Vincent et
Bernard Chartreux
à la Librairie Kléber
Samedi 4 décembre à 15h
Dramaturgie Bernard Chartreux • Assistanat à la mise en scène et à la
dramaturgie Frédérique Plain • Décor Jean-Paul Chambas • Assistanat au
décor Carole Metzner • Costumes Patrice Cauchetier • Lumières Alain Poisson
• Son Alain Gravier • Mouvements physiques Bernard Chabin • Coiffures
Daniel Blanc • Maquillages Suzanne Pisteur • Régie générale Patrick
Bonnereau • Assistant tournée Benjamin Charlery
Avec
Madame Argante Annie Mercier
Madame Hamelin Laurence Roy
Araminte Anne Guégan
Lisette Claire Théodoly
Colette Pauline Méreuze
Angélique Julie Duclos
Merlin David Gouhier
Blaise Olivier Veillon
Éraste Matthieu Sampeur
Le Notaire Patrick Bonnereau
Séances spéciales
avec audio-description
• Jeudi 9 décembre
surtitrée en allemand
• Vendredi 10 décembre
surtitrée en français
• Samedi 11 décembre
Les Acteurs de bonne foi
est publié aux éditions
Hatier.
Coproduction
Studio Libre, Théâtre Nanterre-Amandiers, Théâtre National de Strasbourg
Avec la participation artistique du JTN et du FIJAD.
> Spectacle créé au Théâtre Nanterre-Amandiers le 17 septembre 2010
Du jeudi 25 novembre au samedi 18 décembre 2010
Du mardi au samedi à 20h, les dimanches à 16h
Relâche les lundis
Salle Bernard-Marie Koltès
Une riche dame de Paris vient marier son neveu à la campagne. Pour que la fête soit
complète, elle désire qu'on y fasse un peu de théâtre avec les paysans du cru. Mais la
maîtresse du lieu, mère de la mariée, s'oppose à ce projet...
Le théâtre a-t-il droit de cité ? N’est-il pas, au fond, un vertige séduisant mais
dangereux ?
Dans Les Acteurs de bonne foi, il est question du pouvoir de la représentation, de
l'écroulement des façades, de la relation du « jeu » au « soi ». C’est un nouveau
dialogue entre théâtre et société, sources de questionnements qui ont toujours été au
cœur du travail de Jean-Pierre Vincent, directeur du TNS de 1975 à 1983.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
SOMMAIRE
« Une petite histoire… » - Jean-Pierre Vincent………………………….…………………..…..p. 4
A lire avant : « Sur la dernière étagère, au fond de l’armoire ».………………………..p. 6
A lire après : texte de Bernard Chartreux………………………………………………………….p. 8
Notes de travail de Jean-Pierre Vincent
Le lieu… Et l’heure ? Et la saison ?……………………………………………………………………..p. 10
Les personnages et le jeu…………………………………………………………………………………..p. 11
Pour Patrice Cauchetier, les costumes……………………………………………………………….p. 13
Théâtre et peinture du XVIIIème siècle……………………………………………………………….p. 16
Théâtre et philosophie : un débat (intercalé) sur le théâtre
Pourquoi une version scénique ?……………………………………………………………………….p. 17
Les Acteurs de bonne foi scène 7 (extrait entre Hamelin et Argante)………………….p. 18
Article « Genève » de l’Encyclopédie / D’Alembert..………………………………………….p. 20
Rousseau Lettre à D’Alembert sur les spectacles (extraits)………………………………..p. 21
Entre « Théâtre » et « Réalité »
Note de Jean-Pierre Vincent……………………………………………………………………………….p. 23
Les Acteurs de bonne foi scène 4………………………………………………………………………..p. 24
N.B. : Les comédiens italiens………………………………….…………………………………………..p. 28
L’équipe de création
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Une petite histoire
Une dame de Paris, fort riche, vient marier son neveu à la campagne, en lui donnant
toute sa fortune. Pour que la fête soit complète, la dame désire qu’on y fasse un peu de
théâtre avec les paysans du cru. Un serviteur, parisien lui aussi, se charge d’inventer un
canevas amoureux et piquant, et de faire répéter la valetaille. Mais c’est trop compliqué
pour eux et la répétition s’achève en pugilat général. La maîtresse des lieux, mère de la
mariée, apprend ainsi qu’on veut faire du théâtre chez elle, avec ses paysans. Elle
s’oppose à ce projet, catégoriquement. La dame de Paris, offensée et frustrée du plaisir
qu’elle se promettait, jure de transformer la brave dame en actrice : elle feint de rompre
le mariage et de partir avec neveu et argent (et même de donner son neveu à sa
meilleure amie qui l’accompagne). Totalement affolée, la châtelaine se met dans des
états tragiques, poussant les hauts cris, exigeant même, pour maintenir ce mariage
inespéré, qu’on donne la comédie chez elle séance tenante. Mais les paysans refusent à
leur tour : drame, orage, affrontement qui tourne mal. Il faut bien alors que la dame de
Paris arrête la torture, afin que tout rentre dans l’ordre.
Toute une histoire
J’entretiens depuis (presque) toujours une relation de travail excitante et jubilatoire
avec ce texte tardif, pas si marginal que cela, de Marivaux. Cela a donné :
• En 1970, une adaptation du texte et une mise en scène éphémère, en compagnie de Jean
Jourheuil et de quelques acteurs (Catherine et Pierre Arditi, Agathe Alexis, Juliette Brac,
Jean Lescot, François Dunoyer, Jean Dautremay…), pour une unique représentation au
Festival de musique contemporaine de Royan (Claude Samuel). De cela, il ne reste que
les photos sublimes de Claude Bricage : comme un film du spectacle.
Même pas une brochure de répétition…
• De multiples usages de la « scène de répétition » (les scènes 2 à 5 de la pièce) lors des
e
stages de sélection, au 3 tour des concours de grandes écoles d’art dramatique que j’ai
pu fréquenter ou animer.
• Un rêve constant d’y revenir, de manifester l’évidence et l’urgence toujours neuve de ce
texte. Car c’est un chef-d’œuvre dont les perspectives historiques et la violence latente
n’ont d’égal que la transparence lumineuse.
Notre projet pour 2010 a été évidemment de redonner tout son corps à cette pièce, en
un moment où les relations entre théâtre et société sont de nouveau en question et en
ébullition, de tenter une autre intervention sur le texte, qui élargisse son écho à travers
le temps, sans sacrifier son éblouissante simplicité.
…/…
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Un peu d’histoire
L’apparition publique de ce texte fut étrange. On en trouve la première trace dans le salon –
fort bien fréquenté – de Mademoiselle Quinault, une « ex » de la Comédie-Française, dite
Quinault Cadette, en 1748. Sous quelle forme ? On ne sait : lecture par Marivaux, ou jeu de
salon ?
Puis Marivaux parvint, dit-on, à faire jouer la pièce par le Théâtre Français en 1755. Mais,
après vérification dans les registres, le Français était en relâche ce jour-là… Y aurait-il eu une
lecture interne à la Société ? Et ensuite, plus rien… Cet acte (lever de rideau pour l’époque)
était-il un peu trop conséquent, avec ses dix acteurs (dont six femmes ! rarissime !)…
Puis – et c’est le plus curieux – Marivaux fit publier son texte dans une revue amie en 1757,
en plein cœur de la querelle à propos du théâtre, entre Rousseau et d’Alembert – avec
Diderot en embuscade.
Dans son article « Genève » de l’Encyclopédie, d’Alembert proposait aux austères
protestants genevois d’introduire dans leur cité un peu de fantaisie en y fondant un théâtre.
Il y faisait tout son possible pour donner ses lettres de noblesse (ou plutôt de morale) à ce
divertissement. Rousseau, déjà échauffé contre la bande à Diderot, retrouva son patriotisme
genevois pour réfuter avec ampleur et ferveur les arguments du parisien dans sa longue
« Lettre à d’Alembert sur les spectacles », lettre à laquelle d’Alembert répondra à son tour
dans une « Lettre à Rousseau ». C’est aussi à ce moment que Diderot est en pleine activité
« dramaturgique », publiant ses « Entretiens » sur « Le Fils naturel » et « Le Père de
famille », mais aussi son « Discours sur la poésie dramatique » (1758).
Au milieu de ce grand bruit, Marivaux publie silencieusement ses Acteurs de bonne foi : une
façon d’ajouter un grain de sel tout à fait personnel à la grande querelle ? Ce n’est pas sûr,
mais pourquoi pas ? Personnel ? Oui, car on retrouve ici d’abord tous les éléments du
théâtre de Marivaux avec la densité, le naturel et la pureté que lui apportent la maturité,
l’absolue maîtrise de son art : troubles de l’identité devant l’amour, abîmes secrets du désir,
prégnance de l’argent dans les sentiments, art (déjoué) du calcul, culture contre innocence,
mensonge contre vérité, Paris contre Province, cruauté de « l’épreuve », effarements de la
« surprise »…
…/…
Marivaux et la lutte des classes
Dès que je me suis intéressé à Marivaux – d’abord avec Patrice Chéreau, pour L’Héritier de
village (1964), puis avec Jourdheuil pour ses Acteurs de bonne foi (1970), puis avec
Bernard Chartreux pour Le Jeu de l’amour et du hasard (1998) – il m’a semblé évident que
ce théâtre était absolument sensible aux craquements des temps, aux conflits et aux
e
mouvements profonds qui agitaient la société française du XVIII siècle, bien avant
Beaumarchais et la « Révolution ». Bien entendu, l’originalité profonde de Marivaux est
subtilement tissée de tous les thèmes susdits, mais si l’on oublie la tension constante
entre les classes sociales, la toile reste incomplète et le théâtre de Marivaux redevient
l’abstraction hors du temps qu’on a trop longtemps voulu y voir. Cet aspect « matérialiste
historique » s’affirme peu à peu, au fur et à mesure que l’œuvre de Marivaux avance :
c’est un observateur qui raconte concrètement ce qu’il a sous les yeux. Voir par exemple
l’extraordinaire Préjugé vaincu de 1746 : les thèmes amoureux y apparaissent tels qu’en
eux-mêmes, mais la problématique des rapports aristocratie/bourgeoisie/peuple s’y
déploie avec une clarté confondante.
Dans Les Acteurs de bonne foi, ce qui fait l’originalité de la pièce, c’est que ces frictions
parfois violentes entre bourgeoisie des villes et bourgeoisie des champs, entre petit
peuple agricole et petite bourgeoisie des gens de maison, paysans et propriétaires,
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
apparaissent à propos du théâtre et de l’usage qu’on en fait dans la société. Sans ce projet
de comédie à la campagne, rien n’éclaterait : le théâtre déclenche les hostilités. Le pouvoir
local (ici, la propriétaire, Madame Argante) est plus proche des réalités de l’ordre et de la
« morale » que ces lointaines parisiennes qui voient les choses de plus haut, et de façon
plus hédoniste…
Qu’il soit seulement « plaisant », ou « instructif », le théâtre finit par déborder,
éclabousser, chambouler… à condition d’écouter lui-même le réel.
Jean-Pierre Vincent
janvier 2010
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
A LIRE AVANT…
Sur la dernière étagère, au fond de l’armoire, il y a un petit livre, la dernière
miniature chef d’œuvre de Marivaux : Les Acteurs de bonne foi. Même pas jouée de son
vivant, longtemps oubliée ou ignorée, la pièce a connu de multiples réveils et mises en scène
depuis soixante ans. Moi, la première fois, c’était en 1970 pour une trop brève aventure. Elle
a toujours été accompagnée d’une autre pièce en un acte, souvent plus connue qu’elle. Ce
qui fait qu’elle est toujours dans un coin d’ombre. Nous avons choisi cette fois de la
présenter seule en l’étoffant un peu (merci Rousseau, merci D’Alembert et Marivaux soimême). Cela reste un spectacle court. Nous l’espérons aussi dense que possible. Car la
miniature, comme souvent, contient un nombre impressionnant de détails, points de vue,
retournements, de cruautés et de cocasseries, qu’il faut prendre le temps de jouer. Un
trésor est caché dedans, et nous avons cru bon d’ouvrir davantage certains thèmes,
implicites ou esquissés, grâce essentiellement à la querelle entre Rousseau et d’Alembert sur
la nécessité du théâtre dans notre société (ou non). Ce sujet-là nous a semblé être au cœur
de la comédie, davantage que les métaphysiques rapports entre « fiction et réalité », sujets
d’innombrables thèses.
Pour moi, revenir vers une œuvre du XVIIIème siècle, c’est un peu comme rentrer à la
maison… la maison des Lumières, de l’ébullition générale de l’intelligence, du solaire, de la
sensualité. J’ouvre la porte et je me sens bien. Je suis un homme d’aujourd’hui, enfoncé
comme tout un chacun dans les difficultés et les bêtises qui nous assaillent, mais je trouve
ici une sorte de consolation, d’énergie pour me battre. De toute façon, appartenir à une
époque, c’est avoir la garantie de ne rien y comprendre. Ces plongées dans les génies du
passé sont un des atouts pour y comprendre plus…
Les Acteurs de bonne foi, on peut les survoler très vite. Si l’on ralentit l’allure, chaque
réplique, chacune des phrases, chaque virgule recèle un monde humain toujours changeant.
Il se crée alors un espace/temps romanesque. Chaque phrase vaut une page de roman. La
fable fleurit dans plusieurs directions. Le vieux Marivaux est au sommet de son art :
simplicité, densité, économie, humour fou, méchanceté du diable. « Tout ceci n’est qu’un
rêve », dit Mme Argante, et il n’y a parfois qu’un bon vieux cauchemar pour vous remettre
les pieds sur terre.
Nous avons voulu donner à ce texte l’écrin le plus beau qui soit. Monter un classique,
c’est « allumer une bougie par les deux bouts », celui d’aujourd’hui et celui de son origine,
puis passer un accord au milieu de cette combustion. Nous avons donc fait le voyage et nous
avons appelé la pièce à nous. Nous sommes allés faire un tour au XVIIIème siècle pour
chercher de l’aide (merci Chambas, Cauchetier, Poisson, et merci Watteau, merci Fragonard,
Greuze, etc …). Ce n’est pas une histoire d’aujourd’hui, mais elle nous concerne, au milieu de
la bougie. Écoutez…
Un mot enfin, un sourire amical à Jean Jourdheuil avec qui j’avais fait cette
découverte en 1970, et aux actrices et acteurs qui nous accompagnaient alors dans la
périlleuse aventure ; et que ce sourire rebondisse sur les actrices et acteurs qui vont vous
montrer la chose à l’instant …
Jean-Pierre VINCENT
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
A LIRE APRES…
Madame Hamelin aime le théâtre. Madame Hamelin aime à rire. Madame Hamelin aime le théâtre qui la fait rire.
Lorsque finalement, la campagnarde madame Argante ayant été contrainte d’accepter la représentation de la comédie
chez elle, la citadine madame Hamelin flanquée de sa complice Araminte, assiste à un embryon de répétition de
l’impromptu concocté par Merlin, elle rit à gorge déployée.
Qu’est-ce qui met alors en joie les deux femmes ? Sans doute de voir madame Argante
s’efforcer – aussi vainement que maladroitement – de tenir, à la place du metteur en
scène débordé par ses acteurs en rébellion, le rôle de metteur en scène, mais aussi et
surtout le spectacle, comme au zoo, comme dans une exposition coloniale avant la
lettre, de cette peuplade étrange et irrésistiblement comique, la peuplade des
inférieurs, domestiques, chambrières, paysans et paysannes… Refusant de continuer
plus longtemps à jouer le jeu de l’impromptu, ils sont simplement là, dans leur
différence exotique et opaque, leur balourdise têtue et désarmée, leur hostilité
latente, et ils sont à se tordre.
Eux-mêmes, de leur côté sont au supplice, exposés à ces regards extérieurs et
moqueurs et protecteurs c’est-à-dire méprisants qui les transforment en bêtes de
foire. Et il y aurait fort à parier qu’à cet instant-là, ils sont, sans le savoir, et tout
comme madame Argante (mais qui elle a des lectures), des disciples de Jean-Jacques
Rousseau, le grand pourfendeur du théâtre ; et qu’ils préféreraient de beaucoup
participer à l’une de ces fêtes dont leur patronne vient de vanter les charmes surannés
et où ce sont les spectateurs eux-mêmes qui font le spectacle et où « chacun se voit et
s’aime dans les autres afin que tous en soient mieux unis ». Disciples du citoyen de
Genève ou pas, la conscience sur eux du regard-spectateur (qui s’identifie ici,
fâcheusement, au regard du maître) les dissuade de poursuivre la mascarade. Et ils
feraient sans doute passer un mauvais quart d’heure aux trop faciles rieuses, si le
notaire ne faisait, avec à propos, son entrée.
L’univers des Acteurs de bonne foi est un univers matriarcal. L’élément masculin y est
subalterne (domestiques) ou jeune (Éraste), ce qui revient au même. La puissance y
est aux mains des femmes (riches, il va sans dire). C’est-à-dire qu’elle s’exprime de
façon plus souple mais non moins redoutable. On pourrait même dire, d’autant plus
redoutable que plus souple. Bref, elle s’y manifeste dans toute son ondoyante et
implacable vérité (cruauté).
C’est en prenant en compte ce caractère féminin de la puissance que nous nous
sommes autorisés à lui adjoindre le souci de l’idéologie, que Marivaux, dans Les
Acteurs de bonne foi, ne fait qu’esquisser : nos trois dames n’ont pas simplement de la
sensibilité, elles ont aussi des pensées distinctement structurées du théâtre, de sa
fonction sociale. Et cette distinction (différence) complexifie encore les catégories et
oppositions dynamiques dont ce petit monde est constitué (maître/serviteur,
ville/campagne, jeune/vieux…)
Ce qui frappe, dans Les Acteurs de bonne foi, c’est que cette si courte pièce puisse
déployer un si vaste et si contradictoire panorama.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Expliquant à Éraste, au début des Acteurs, le canevas de son impromptu, Merlin
ajoute : « J’oublie encore à vous dire une finesse de ma pièce, c’est que Colette qui
doit faire mon amoureuse, et moi qui dois faire son amant, nous sommes convenus
tous deux de voir un peu la mine que feront Lisette et Blaise, à toutes les tendresses
naïves que nous prétendons nous dire, et le tout, pour éprouver s’ils n’en seront pas
un peu alarmés et jaloux ».
Autrement dit, contrairement à l’idée reçue, Merlin estime que l’artifice théâtral, bien
loin d’éloigner du réel, de le travestir, est, au contraire, ce qui permet d’y revenir, de
le rendre plus assuré : ainsi de l’attachement de Lisette à son endroit, ainsi de celui de
Blaise pour Colette qui n’en seront que de meilleur aloi après ce passage au feu de la
rampe.
Mêmement Mme Argante, outrée par la volte face soudaine de Mme Hamelin qui
prétend désormais donner son neveu à épouser à la riche veuve Araminte, a cette
formule étonnante : « Il n’y a qu’un rêve qui puisse rendre ceci pardonnable,
absolument qu’un rêve, que la représentation de votre misérable comédie va
dissiper », qui signifie là encore que c’est l’illusoire de la représentation qui doit
permettre de reprendre contact avec le réel.
Dans ce second cas, ce n’est pas, à strictement parler la représentation de la
« misérable comédie » qui va dissiper le rêve puisque cette représentation ne
parviendra pas à avoir lieu. N’en reste pas moins que cette tentative – même avortée
– suffit à annihiler le cauchemar de madame Argante (et du couple Éraste-Angélique) :
le mariage aura effectivement lieu.
La chose est beaucoup moins nette en ce qui concerne les serviteurs car le jeu de
théâtre, plutôt que de conforter le réel, semble l’avoir modifié en profondeur.
Si Colette, in fine, dit se satisfaire de l’acabit de la tendresse de Blaise, elle a tellement
surjoué, pendant la répétition, son désir de Merlin (et de la vie qui va avec) qu’on est
bien obligé de penser qu’il n’était pas totalement feint et qu’il va lui en rester
quelques traces.
Et pour ce qui est de Lisette, elle annonce à Merlin, en représailles, un report du
mariage, d’assez mauvais augure.
Comme souvent chez Marivaux, la fable d’apparence heureuse se termine en un
crépuscule aigre-doux, indécis, profondément déstabilisateur ...
Bernard Chartreux
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Notes de travail de Jean-Pierre Vincent
Printemps/Automne 2009 – Janvier 2010
Le lieu
« Grande légèreté, simplicité, ne pas compliquer » (Jean-Paul Chambas)
Extérieur ou intérieur ? La cause semble entendue, pour Marivaux, dès la première réplique : il faut « mettre la
salle en état ». Salle ? Grand salon ? Mais à côté de cela, la répétition peut avoir lieu n’importe où ailleurs…
Marivaux imaginait sans doute un grand salon (rez-de-chaussée de la demeure), dont on bouleverse
l’ordonnance pour les besoins du divertissement ; la scène y serait un tapis débarrassé de son mobilier
habituel. Préparation pour un impromptu de salon avec des chaises regroupées/rangées pour l’assistance ; par
les portes-fenêtres, ce salon donne sur la nature, le jardin d’abord, puis la campagne et le village (et le
clocher !) au loin… Salon réel, envahi par comédies et tragédies tout aussi réelles, par les paysans, etc…
Mon premier sentiment – il y a un an – était de partir de l’idée de grange, d’une écurie, d’une salle dans les
communs ; l’intérêt étant la beauté rustique du lieu, des lumières entrant par les portails et les lucarnes, la
paille et la terre battue du sol, le soleil qui change… Mais gare au naturalisme !
Puis est venue (16-04-09) l’idée de repartir de notre Jeu de l’amour et du hasard, qui se déroulait donc dans
une salle de bal de château, désertée depuis la mort de la mère, désaffectée. C’était l’endroit secret de Silvia,
son endroit des larmes solitaires, où tout le monde venait l’envahir.
À propos de détournement, on pourrait ainsi prolonger/renverser le jeu. La salle de bal (avec mur/miroir
piqueté, fresque, petit scène..) serait si désaffectée cette fois qu’on y aurait remisé des outils, récents ou vieux,
des bouts de charrue, voire des parts de récolte (pommes ? bottes ?...).
Nous servirions-nous de la petite scène qui existait dans le décor du JAH ? Si l’on s’en sert pour la scène de
répétition, elle risque d’être un peu éloignée… sauf si le décor est moins profond. Mais alors il sera moins fort.
De plus, durant la scène de répétition, cela dispose de dos les 2 qui assistent et ne sont pas sur la scène…
Solution possible : il y a une scène (encombrée) ; on ne s’en sert pas pour la répétition ; on ne s’en occupe pas,
sauf Mme Argante qui monte en scène pour revendiquer le théâtre (et bazarde tout ce qui y traîne…). Pour la
répétition on jouerait sur le tapis central : si tout est au même niveau, les moments de jeu et de hors-jeu, cela
peut renforcer les effets de confusion entre réel et fiction.
Si l’on revient à la simple grange – qu’il faudrait débarrasser de son naturalisme – j’ai repéré dans
L’Encyclopédie des gravures de granges ou ateliers dont un côté est ouvert, sans mur. Il faudrait aussi penser à
désaxer un tel décor : pas les trois murs bébêtes. Mais alors on tombe sur un problème de cyclorama (qu’est-ce
qu’on voit par cette béance ?). Et nous devons d’emblée penser à l’élasticité nécessaire de notre espace.
Et l’heure ? Et la saison ?
Le joli mois de Mai, ou Juin (déjà l’été), le mois des fiançailles…
On imagine assez aisément « du matin au soir », du soleil levant au crépuscule rasant…
Et si l’on examinait d’autres options ? En particulier :
- démarrage en fin d’après-midi
- fin de répétition au crépuscule.
- Débat des dames : parenthèse hors temps réaliste.
- Reprise et jeu de rôles final AUX BOUGIES, lune, lanternes… Petite rampe à la bougie sur la petite
scène…
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Notes sur les personnages et sur le jeu
Des VEUVES
Mme Hamelin et Araminte veuves de banquiers, mécènes culturelles, comme celles qui aujourd’hui auraient
« leur » festival…
Mme Argante, veuve de potentat agricole (céréalier de la Beauce) ?
Pourquoi viennent-elles marier le petit ici ? C’est qu’il y a aussi du pognon, non pas forcément à rafler, mais à
accumuler : jonction bien connue à l’époque entre bourgeoisie et grandes familles dans les mariages (ou même
ici, aristocratie d’argent : Mme Hamelin). Mais il y a aussi, qu’Angélique doit être fort jolie. Le jeune homme est
fondu d’amour : on lui fait un beau cadeau.
La « compagnie » et les ménétriers
Comment, avec nos moyens tout de même limités, rendre lisible (et pesant sur l’action) cette compagnie
d’invités pour la fête des accordailles ? Famille, notables du coin, notaire, curé…
De plus, Merlin a retenu deux musiciens qui doivent bien être dans les parages… (cf. notre Mariage de Figaro,
c’était important !).
Le Régisseur Général du spectacle (« Paulo » de Nanterre) peut et doit jouer le notaire. Le responsable plateau
(Salah ?) pourrait faire le curé (sic).
Ne peut-on pas imaginer un « prologue du prologue » ? Une pantomime avec musique, caquets de basse-cour
etc., où l’on verrait Mme Argante faire visiter le domaine et ses bâtiments le « tour du propriétaire ») à ces
dames de Paris et aux vieux invités (Merlin, Lisette, Blaise et Colette, masqués et vêtus en biscornus vieillards
de campagne, avec curé et notaire s’extasiant de ces merveilles…) ??? Lumière de petit matin par la vaste
porte… Gaîté d’un jour qui commence. Les des jeunes amoureux perdus au milieu de ces parents étranges…
Prologue des amoureux
On cherche par là à donner du poids et davantage d’enjeu vital à ce mariage qui, sinon, ne serait qu’une
péripétie codifiée (théâtralement et socialement : le mariage arrangé).
Mais la scène permet d’érotiser non seulement cette histoire de mariage, mais encore tous les enjeux
amoureux d’autres personnages (Colette, Blaise, Lisette et même Merlin – et pourquoi pas Araminte !). Si la
scène de répétition se détraque ainsi, c’est qu’il y des enjeux vitaux sous les jeux de paroles.
Cette scène doit faire l’objet de beaucoup de soins, car il n’est pas aisé de plonger ainsi subito presto les
spectateurs dans ce genre d’érotisme sous-entendu, muselé par les règles de vie, mais très présent. Sacré
Marivaux…
Merlin acteur
Merlin est un parigot qui ne se prend pas pour de la crotte, en tant que poète, qu’arrangeur d’affaires,
scénariste et… acteur.
On sent bien que toutes ses réparties (préparées) tombent déjà dans le panneau typique du médiocre théâtre
parisien : le mot d’esprit à propos de la situation, si possible face public. Il joue sans cesse en demi a parte, l’air
de dire « il est bien, hein, mon spectacle »… Dès le premier engagement avec Lisette, elle comprend qu’il faut
jouer au second degré en s’engageant, lui joue au troisième (ou xième) degré. Enfoiré…
Lisette sait bien utiliser son sentiment personnel (la jalousie) pour le transformer en demi-fiction. Mais son
improvisation est-elle facile pour autant ? Elle cherche tout le temps à bien faire. Tempo entrecoupé : pas
laisser filer.
Le triple jeu de Colette
-
-
Merlin nous dit qu’il a convenu avec elle de jouer double jeu, qu’elle fasse semblant d’être amoureuse
de lui.
Elle a envie de foutre le camp d’ici, d’échapper à ce village (cf. Charlotte dans Dom Juan de Molière).
C’est un thème récurrent dans la comédie française, mais il est assis sur une réalité simple : l’exode
rural aurait-il commencé par les filles ?
Elle accepte de « jouer à jouer » avec Merlin, elle essaie de s’y tenir, de contrefaire un « amour » pour
lui.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Mais elle l’éprouve ! – en tout cas, une attirance pour ce qu’il représente à ses yeux. Elle tente
réellement de profiter de ce théâtre pour se rapprocher de Merlin et de filer avec lui à Paris.
La désillusion sera grande. Cf. la Lisette du JAH à la fin de la pièce.
De la « coquette de village » décrite par Merlin (et peut-être voulue par Marivaux lui-Même ?), on en vient à un
cas historico-social : l’exode rural par amour, et raté en plus.
-
Scène X. Le signal du départ
Quand Mme Hamelin déclare qu’elle s’en va, il faut des signes concrets de ce départ. Autre chose que ramasser
ses gants, ombrelles, étoles légères ? Mais quoi ?... Araminte peut-elle aller chercher quelque chose, des
petites vestes d’été élégantes. Prendre ses cliques et ses claques… Prendre son sac et ses quilles, disait-on au
Moyen Âge, mais les quilles était les jambes, dit-on.
Les silences, le silence
Nous avons tout le temps ! La pièce, même rallongée, étant brève, c’est l’occasion ou jamais de marquer qu’au
commencement n’est pas le Verbe, mais le Silence ! On prend son temps : une chose après l’autre, encaisser
avant de renvoyer !
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Notes pour Patrice Cauchetier sur les personnages / Costumes (Février 2010)
(Patrice Cauchetier a également signé les costumes du spectacle de Alain Françon Du Mariage au divorce créé en
septembre au TNS
Bien sûr, tout cela au plus près de l’époque. Cette histoire nous intéresse et nous concerne
aujourd’hui en tant qu’historique : en tant qu’un morceau de l’Histoire qui nous constitue,
quoique nous en pensions.
ÉRASTE
Enfant gâté. Plutôt très clair, costume d’été. Campagne de luxe à deux pas du fumier. Du lin ou de la soie, du
satin ? Blanc cassé. Il peut se déshabiller et se rhabiller, se mettre à l’aise et se reprendre, rapidement. Y
compris une perruque « sans façon ». Le garnement est le chouchou de ces dames.
ANGÉLIQUE
On avait parlé de deux costumes, pour séparer dans le temps le prologue du reste, avec changement hyper
rapide. On peut se passer de l’écart de temps, mais l’écart d’ambiance est bien.
1) Une jeune fille riche de la campagne dans son ordinaire, mais lumineuse. Très simple. De la chair.
Fleurettes dans les cheveux…
2) Robe de fiançailles, i.e. très proche du mariage. Blanc, en tout cas. Dentelle blanche dans les cheveux ?
Et pourquoi pas d’abord une blouse de travail par dessus le second costume (comme si elle s’était occupée des
fleurs dans la serre).
MERLIN
Curieux personnage. Chansonnier à la noix, dragueur du trottoir parisien, s’est décrété « joli homme », ne se
prend pas pour de la crotte. « Intermittent et précaire » de l’époque, louvoyant d’un petit boulot à l’autre,
plutôt vers « l’artistique », mais il faut croûter. Il s’est fait un budget, un « projet » où il compte ramasser trois
sous… En fait, il a peut-être été engagé pour l’occasion ; ou encore il s’est casé chez la milliardaire comme
factotum (ou fainéant…) pour assurer le minimum vital.
Idée à partir de L’indifférent de Watteau, et son bras que Jean-Paul a inscrit dans le décor : et si (fictionnons…)
Merlin était un copain – de bistrot – de Watteau ? et s’il lui avait emprunté pour l’occasion un de ces vieux
costumes de théâtre dont le peintre affublait les gens de son quartier pour les immortaliser ? Et si, donc, Merlin
devenait L’indifférent ????!!! Grosse différence entre le « maître » et les autres, « joli homme », etc…
LISETTE
La jeune femme de chambre parisienne : son origine provinciale est lointaine – s’il y en a une. Pas la bonne XIX°
en noir en blanc, mais on doit y penser.
COLETTE ET BLAISE
Il faut clairement marquer la différence entre parisiens et ruraux : c’est important pour la fable.
Les pieds nus, je pense. Sabots qu’ils laissent à l’entrée (potin d’enfer à l’approche…), ou petites chaussures
plates.
Blaise
Gros tricot sur une vaste chemise. Culottes et bas qui ne descendent pas au dessous des chevilles.
Colette
Petite coiffe mignonne + chapeau de paille de travail qu’elle retire en entrant. « Coquette de village », dit
Merlin : ces filles qui vous draguent pour se chercher un fiancé et se tirer de leur patelin. Donc un peu
apprêtée, mais sans aucun luxe : elle veut se sortir de ce trou où elle moisit. De la couleur, du décolleté.
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Les Acteurs de bonne foi
MADAME ARGANTE
Veuve d’un gros propriétaire campagnard. Austère. Femme patron. Elle fait marcher l’exploitation : les
fermiers, les métayers… Robe (« tailleur d’époque ! »), sobre, pas salissante, brun foncé. Canne ou cravache.
Chignon. Montre en pendentif. Trousseau de clefs à la ceinture. Chapeau de soleil ?
Mais c’est jour de fête : ne pas aller jusqu’à paupériser la dame, on sait se tenir.
MADAME HAMELIN
Richissime veuve de financier. Elle donne tout à son neveu, mais elle en a de côté tout de même… Genre la
dame de dos dans L’enseigne de Watteau, version estivale, plus vaporeuse. Large chapeau de paille avec
moustiquaire de mousseline.
Prévoir, ainsi que pour Araminte, quelque chose pour matérialiser son (faux) départ pour Paris. Manteau antipoussière…
ARAMINTE
La « sœur » de l’autre, peut-être comme la dame de face dans L’enseigne : noir et claire. On voit plus qu’elle
est en demi-deuil. Les deux doivent respirer la légèreté estivale.
LE NOTAIRE
Comme un notaire…. Un ami de Mme Argante
Madame Hamelin
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Les Acteurs de bonne foi
Blaise
Lisette
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Les Acteurs de bonne foi
Théâtre et peinture…
Watteau
L’Indifférent (1717)
Crédit
Pascal Victor
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Les Acteurs de bonne foi
Théâtre et philosophie : Un débat (intercalé) sur le théâtre
Construire un scénario…
L’ajout de la scène « Rousseau/D’Alembert » comporte déjà une sorte « d’effet scénario ». Mais peut-être
n’est-il pas inutile de songer à un récit second/parallèle. Il permettrait peut-être de densifier le propos. Et à
moi, il permettrait de prendre un peu de recul par rapport à ce texte que je connais (ou crois connaître) sur le
bout des doigts, et qui peut me devenir trop familier.
Pourquoi une version scénique ?
D’ordinaire, notre équipe pratique plutôt le genre « tout le texte, rien que le texte », l’élucidation totale des
textes anciens ou récents dans le respect de la lettre. Ici, le caractère marginal, expérimental, polémique, du
texte de Marivaux nous conduits à imaginer un complément, à glisser à notre tour un grain de sel dans le débat
autour du théâtre.
Si nous introduisons ce débat entre Mme Argante et Mme Hamelin sur le théâtre, tiré de la correspondance
publique entre Rousseau et D’Alembert, ce sera sous la forme d’une digression. Cette discussion ne peut avoir
qu’un caractère volontariste, que nous ne chercherons pas dissimuler. Au contraire, dans le cours du
développement du dispositif marivaudien, il y a une pause, une sorte d’arrêt sur image qui nous fait passer à un
autre type de dramaturgie, pendant le temps qu’il faut et avec la richesse de développement qu’il faut : traiter
donc cela comme une pièce dans la pièce, un rêve dans le rêve, pour donner à entendre ce que les
personnages de Marivaux ne diront jamais : ce qui sous-tend tous leurs dires.
Nous avons aussi rajouté, venant cette fois de « L’épreuve » de Marivaux, une scène entre les jeunes fiancés
pour que ce mariage ne soit pas seulement un contrat, ou une phase obligée de la comédie, mais un vrai
moment de vie pour les principaux intéressés…
« Si Mme Argante se met à emprunter et incarner - plus ou moins - les idées de Jean-Jacques Rousseau, ses
raisons de refuser le théâtre prennent corps et du sérieux (pas même besoin de parler de «
protestantisation »). Elle n’est plus la ridicule de campagne, celle qui n’aurait qu’une lubie phobique. Elle est
une personne réellement agressée par la présence du théâtre dans son mode de vie (choix de vie). Elle exprime
alors une vraie résistance à la culture mondaine. Elle défend une vision de la société moderne telle qu’elle la
veut : morale et économique.
« Alors, aussi, le différend Paris/Province prend de la hauteur et s’élève au-dessus de la sphère privée. Et le
différend également entre deux fractions de la classe possédante : les bosseurs et les jouisseurs, les riches
arrivés et ceux qui font tout pour arriver. Ne sait-on pas que, dans la bourgeoisie française moderne, l’élu local
est plus soucieux de l’ordre au quotidien que le responsable central, surtout dans le domaine culturel ?
Rousseau, Lettre à D’Alembert : « Jamais dans une monarchie l’opulence d’un particulier ne peut le mettre audessus d’un prince ; mais dans une République elle peut le mettre au-dessus des lois. Alors le gouvernement n’a
plus de force et le riche est toujours le vrai « souverain ». Etc. (Garnier-Flammarion, page 171). « C’est bien
avant « les eaux glacées du calcul égoïste » de Karl Marx. Mais devant cette Mme Argante-là, on peut penser
qu’elle défend (encore…) la fameuse « idylle » dont Marx dit qu’elle a été brisée par l’avènement de la
bourgeoisie et la suprématie de l’argent. En tout cas, elle le vit ainsi, son paternalisme productiviste, à la fois
passéiste et réformateur… »
Jean-Pierre Vincent
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Les Acteurs de bonne foi
Les Acteurs de bonne foi
- scène 7 (extrait)
MADAME HAMELIN
Mais encore ? Quel est le fond de votre pensée là-dessus ?
MADAME ARGANTE
La vérité, Madame, est que le théâtre est un amusement.
MADAME HAMELIN
Sans doute, et des plus plaisants qui soient. C'est une honnête récréation.
MADAME ARGANTE
Mais s'il est vrai qu'il faille des amusements à l'homme, vous conviendrez au moins qu'ils ne sont permis
qu'autant qu'ils sont nécessaires, et que tout amusement inutile est un mal.
MADAME HAMELIN
Assurément.
MADAME ARGANTE
Je ne vous demande, Madame, qu'un moment d'attention. Contemplez, s'il vous plaît, notre belle campagne,
toute entière couverte d'habitations dont chacune fait le centre des terres qui en dépendent. Ces heureux
paysans, tout à leur aise, cultivent des biens pour lesquels ils reçoivent une équitable rétribution ; et ils
emploient le loisir que cette culture leur laisse à faire mille ouvrages de leurs mains. L'hiver surtout, chacun
renfermé bien chaudement, avec sa nombreuse famille, dans sa jolie et propre maison, s'occupe de mille
travaux amusants. Jamais menuisier, serrurier, vitrier, tourneur de profession n'entra dans le pays : tous le sont
pour eux-mêmes... Et il leur reste assez de loisir pour inventer mille instruments divers, d'acier, de bois, de
carton, dont certains même parviennent jusqu'à Paris. Ils font des siphons, des aimants, des lunettes, des
baromètres, des chambres noires. Eh bien, Madame, supposons qu'au milieu de ce paysage, au centre des
habitations, on établisse un spectacle fixe et peu coûteux, sous prétexte, comme vous dites, de leur offrir une
honnête récréation. Qu'adviendra-t-il ?
Je vois d'abord que, leurs travaux cessant d'être leurs amusements, aussitôt qu'ils en auront un autre, celui-ci
les dégoûtera des premiers. Il y aura chaque jour un temps réel de perdu pour ceux qui assisteront à votre
spectacle ; et l'on ne se remet pas à l'ouvrage, quand on a l'esprit rempli de ce qu'on vient de voir : on en parle,
ou Poil y songe. Par conséquent, relâchement du travail : premier préjudice.
Quelque peu qu'on paie à la porte, on paie enfin quelque chose, c'est toujours une dépense qu'on ne faisait
pas. Il en coûte pour soi, pour sa femme, pour ses enfants ; il faut prendre plus souvent ses habits de dimanche,
tout cela coûte du temps et de l'argent. Augmentation de dépense : deuxième préjudice.
Un travail moins assidu et une dépense plus forte exigent un dédommagement. On le trouvera sur le prix des
ouvrages qu'on sera forcé de renchérir. Plusieurs marchands, rebutés par cette augmentation, iront se pourvoir
ailleurs, là où il n'y a pas de spectacle. Diminution du débit troisième préjudice.
Dans les mauvais temps, les chemins ne sont pas praticables : il faudra que la troupe vive, elle n'interrompra
pas ses représentations ; l'hiver, il faudra faire des chemins dans la neige, peutêtre les paver. Voilà des
dépenses publiques : établissement d'impôts : quatrième préjudice. Les femmes des fermiers voudront être
parées pour être vues. Introduction du luxe cinquième préjudice...
ARAMINTE sortant de sa réserve
Chimères, Madame Argante, chimères l... Vous voyez le mal partout.
MADAME ARGANTE
Ne vous récriez point, Madame. Il n'y a point là de chimère.
ARAMINTE
Mais, Madame, les spectacles ne sauraient être mauvais en eux-mêmes, et en tous lieux !
MADAME HAMELIN
Je tiens qu'en certains lieux, ils sont utiles pour attirer les étrangers ; pour augmenter la circulation des
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
espèces ; pour exciter les artistes ; pour varier les modes ; pour occuper les gens trop riches, ou aspirant à
l'être ; pour les rendre moins malfaisants ; pour distraire le peuple de ses misères ; pour lui faire oublier ses
chefs en voyant ces baladins...
MADAME ARGANTE
En d'autres lieux, ils ne servent qu'à détruire l'amour du travail ; à décourager l'industrie ; à ruiner les
particuliers ; à leur inspirer le'goût de l'oisiveté ; à leur faire chercher les moyens de subsister sans rien faire ; à
rendre un peuple inactif et lâche ; à tourner la sagesse en ridicule ; à travestir les citoyens en beaux esprits, les
mères de famille en petites maîtresses, et les filles en amoureuses de comédie.
MADAME HAMELIN
Quoi, Madame, vous niez que le théâtre rende la vertu aimable. Les méchants ne sont-ils pas haïs sur la scène ?
MME ARGANTE
Sont-ils aimés dans la société, quand ils y sont connus pour tels ? Si tout l'art du théâtre consiste à nous
montrer des malfaiteurs pour nous les rendre odieux, je ne vois point ce que cet art a de si admirable.
MADAME HAMELIN
Au moins vous m'accorderez que le théâtre instruit en amusant. Sous l'apparence du plaisir ce sont des leçons
utiles qu'il nous donne. Nous entrons au théâtre pour rire ou pour pleurer : la tragédie nous offre les malheurs
produits par les vices des hommes, la comédie les ridicules attachés à leurs défauts ; l'une et l'autre nous
mettent sous les yeux ce que la morale nous montre de façon abstraite et dans un espèce de lointain. Elles
développent et fortifient par les mouvements qu'elles excitent en nous les sentiments dont la nature a mis le
germe dans nos âmes.
MADAME ARGANTE
Vous vous moquez, Madame. Plus une comédie est agréable et parfaite, plus son effet est funeste aux moeurs.
Le plaisir qu'on y prend est incompatible avec une vie morale. Avec quelle avidité la jeunesse ne s'y livre-t-elle
point à des idées auxquelles elle n'a déjà que trop de penchant ? Voilà le sujet de mes alarmes, voilà le mal que
je voudrais prévenir.
ARAMINTE
Quoi ! ne faut-il donc aucun spectacle dans une société ?
MADAME ARGANTE
Au contraire, Madame, il en faut beaucoup.
MADAME HAMELIN
Mais alors quels seront les objets de vos spectacles ? Qu'y montrera-t-on ?
ARAMINTE
Rien, peut-être...
MADAME ARGANTE
Rien, si l'on veut. Plantez au milieu d'une place un piquet couronné de fleurs, rassemblez-y le peuple, et vous
aurez une fête. Faites mieux encore: donnez les spectateurs en spectacle ; faites que chacun se voie et s'aime
dans les autres afin que tous en soient mieux unis. Pourquoi, sur le modèle des fêtes militaires, ne fonderionsnous pas d'autres prix de gymnastique, pour la lutte, pour la course, pour le disque, pour divers exercices du
corps ? Pour moi, loin de blâmer de si simples amusements, je voudrais au contraire qu'ils fussent
publiquement autorisés, et qu'on y prévint tout désordre particulier en les convertissant en bals solennels et
périodiques, ouverts indistinctement à toute la jeunesse. Je voudrais que les pères et mères y assistassent pour
veiller sur leurs enfants. Je voudrais qu'on formât dans la salle une enceinte commode et honorable destinée
aux gens âgés de l'un et l'autre sexe...
MADAME HAMELIN
Ma foi, Madame, vous pouvez arrêter là; me voilà convaincue tout à fait. On ne résiste pas à un piquet
couronné de fleurs. Ne vous alarmez donc point, Madame. C'en est fait de notre comédie, n'y pensons plus.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
D’Alembert - Article « Genève » de l’Encyclopédie (extrait)
On ne souffre point à Genève de comédie ; ce n'est pas qu'on y désapprouve les spectacles en
eux-mêmes, mais on craint, dit-on, le goût de parure, de dissipation et de libertinage que les
troupes de comédiens répandent parmi la jeunesse. Cependant ne serait-il pas possible de
remédier à cet inconvénient par des lois sévères et bien exécutées sur la conduite des
comédiens ? Par ce moyen Genève aurait des spectacles et des moeurs, et jouirait de l'avantage des uns et des autres : les représentations théâtrales formeraient le goût des citoyens et
leur donneraient une finesse de tact, une délicatesse de sentiment qu'il est très difficile
d'acquérir sans ce secours ; la littérature en profiterait, sans que le libertinage fît des progrès,
et Genève réunirait à la sagesse de Lacédémone la politesse d'Athènes. Une autre
considération digne d'une république si sage et si éclairée, devrait peut-être l'engager à permettre les spectacles. Le préjugé barbare contre la profession de comédien, l'espèce
d'avilissement où nous avons mis ces hommes si nécessaires au progrès et au soutien des Arts,
est certainement une des principales causes qui contribuent au dérèglement que nous leur
reprochons : ils cherchent à se dédommager, par les plaisirs, de l'estime que leur état ne peut
obtenir. Parmi nous, un comédien qui a des moeurs est doublement respectable ; mais à peine
lui en sait-on quelque gré. Le traitant qui insulte à l'indigence publique et qui s'en nourrit, le
courtisan qui rampe, et' qui ne paye point ses dettes, voilà l'espèce d'hommes que nous
honorons le plus. Si les comédiens étaient non seulement soufferts à Genève, mais contenus
d'abord par des règlements sages, protégés ensuite, et même considérés dès qu'ils en seraient
dignes, enfin absolument placés sur la même ligne que les autres citoyens, cette ville aurait
bientôt l'avantage de posséder ce qu'on croit si rare, et ce qui ne l'est que par notre faute, une
troupe de comédiens estimable. Ajoutons que cette troupe deviendrait bientôt la meilleure de
l'Europe ; plusieurs personnes pleines de goût et de disposition pour le théâtre, et qui
craignent de se déshonorer parmi nous en s'y livrant, accourraient à Genève, pour cultiver non
seulement sans honte, mais même avec estime, un talent si agréable et si peu commun. Le
séjour de cette ville, que bien des Français regardent comme triste par la privation des
spectacles, deviendrait alors le séjour des plaisirs honnêtes, comme il est celui de la
Philosophie et de la liberté ; et les étrangers ne seraient plus surpris de voir que dans une ville
où les spectacles décents et réguliers sont défendus, on permette des farces grossières et sans
esprit, aussi contraires au bon goût qu'aux bonnes moeurs. Ce n'est pas tout : peu à peu
l'exemple des comédiens de Genève, la régularité de leur conduite et la considération dont elle
les ferait jouir, serviraient de modèle aux comédiens des autres nations, et de leçon à ceux qui
les ont traités jusqu'ici avec tant de rigueur et même d'inconséquence. On ne les verrait pas
d'un côté pensionnés par le gouvernement, et de l'autre un objet d'anathème ; nos prêtres
perdraient l'habitude de les excommunier et nos bourgeois de les regarder avec mépris ; et
une petite république aurait la gloire d'avoir réformé l'Europe sur ce point., plus important
peut-être qu'on ne pense.
Rousseau, Lettre à d’Alembert
Ed. GF Flammarion, Paris, 2003
p. 208
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Les Acteurs de bonne foi
Rousseau – Lettre à d’Alembert (extraits)
La Lettre à d'Alembert sur les spectacles (1758) est une réponse à l'article « Genève », de
l'Encyclopédie. Rousseau y fustige les héros tragiques trop souvent criminels et les comédies
dont le propos est de ridiculiser la vertu. Dans son ensemble, le théâtre est considéré
comme un facteur d'immoralité.
Le théâtre, me dit-on, dirigé comme il peut et doit l'être, rend la vertu aimable et le vice odieux. Quoi donc ?
avant qu'il y eût des comédies n'aimait-on point les gens de bien, ne haïssait-on point les méchants, et ces
sentiments sont-ils plus faibles dans les lieux dépourvus de spectacles ? Le théâtre rend la vertu aimable... Il
opère un grand prodige de faire ce que la nature et la raison font avant lui ! Les méchants sont haïs sur la
scène... Sont-ils aimés dans la société, quand on les y connaît pour tels ? Est-il bien sûr que cette haine soit
plutôt l'ouvrage de l'auteur que des forfaits qu'il leur fait commettre ? Est-il bien sûr que le simple récit de ces
forfaits nous en donnerait moins d'horreur que toutes les couleurs dont il nous les peint ? Si tout son art
consiste à nous montrer des malfaiteurs pour nous les rendre odieux, je ne vois point ce que cet art a de si
admirable, et l'on ne prend là-dessus que trop d'autres leçons sans celle-là. Oserai-je ajouter un soupçon qui
me vient ? Je doute que tout homme à qui l'on exposera d'avance les crimes de Phèdre ou de Médée ne les
déteste plus encore au commencement qu'à la fin de la pièce ; et si ce doute est fondé, que faut-il penser de
cet effet si vanté du théâtre ?
Je voudrais bien qu'on me montrât clairement et sans verbiage par quels moyens il pourrait produire en nous
des sentiments que nous n'aurions pas, et nous faire juger des êtres moraux autrement que nous n'en jugeons
en nous-mêmes ? Que toutes ces vaines prétentions approfondies sont puériles et dépourvues de sens ! Ah si
la beauté de la vertu était l'ouvrage de l'art, il y a longtemps qu'il l'aurait défigurée ! Quant à moi, dût-on me
traiter de méchant encore pour oser soutenir que l'homme est né bon, je le pense et crois l'avoir prouvé ; la
source de l'intérêt qui nous attache à ce qui est honnête et nous inspire de l'aversion pour le mal est en nous et
non dans les pièces. Il n'y a point d'art pour produire cet intérêt, mais seulement pour s'en prévaloir. L'amour
du beau est un sentiment aussi naturel au coeur humain que l'amour de soimême ; il n'y naît point d'un
arrangement de scènes ; l'auteur ne l'y porte pas, il l'y trouve ; et de ce pur sentiment qu'il flatte naissent les
douces larmes qu'il fait couler.
Imaginez la comédie aussi parfaite qu'il vous plaira. Où est celui qui, s'y rendant pour la première fois, n'y va
pas déjà convaincu de ce qu'on y prouve, et déjà prévenu pour ceux qu'on y fait aimer ? Mais ce n'est pas de
cela qu'il est question ; c'est d'agir conséquemment à ses principes et d'imiter les gens qu'on estime. Le coeur
de l'homme est toujours droit sur tout ce qui ne se rapporte pas personnellement à lui. Dans les querelles, dont
nous sommes purement spectateurs, nous prenons à l'instant le parti de la justice, et il n'y a point d'acte de
méchanceté qui ne nous donne une vive indignation, tant que nous n'en tirons aucun profit : mais quand notre
intérêt s'y mêle, bientôt nos sentiments se corrompent ; et c'est alors seulement que nous préférons le mal qui
nous est utile, au bien que nous fait aimer la nature. N'est-ce pas un effet nécessaire de la constitution des
choses, que le méchant tire un double avantage, de son injustice, et de la probité d'autrui ? Quel traité plus
avantageux pourrait-il faire que d'obliger le monde entier d'être juste, excepté lui seul ; en sorte que chacun lui
rendît fidèlement ce qui lui est dû, et qu'il ne rendît ce qu'il doit à personne ? Il aime la vertu, sans doute, mais
il l'aime dans les autres, parce qu'il espère en profiter ; il n'en veut point pour lui, parce qu'elle lui serait
coûteuse. Que va-t-il donc voir au spectacle ? Précisément ce qu'il voudrait trouver partout ; des leçons de
vertu pour le public dont il s'excepte, et des gens immolant tout à leur devoir, tandis qu'on n'exige rien de lui.
J'entends dire que la tragédie mène à la pitié par la terreur ; soit, mais quelle est cette pitié ? Une émotion
passagère et vaine, qui ne dure pas plus que l'illusion qui l'a produite ; un reste de sentiment naturel étouffé
bientôt par les passions ; une pitié stérile qui se repaît de quelques larmes, et n'a jamais produit le moindre
acte d'humanité. Ainsi pleurait le sanguinaire Sylla au récit des maux qu'il n'avait pas faits lui-même. Ainsi se
cachait le tyran de Phères au spectacle, de peur qu'on ne le vît gémir avec Andromaque et Priam, tandis qu'il
écoutait sans émotion les cris de tant d'infortunés qu'on égorgeait tous les jours par ses ordres.
(…)
Qu'est-ce que le talent du comédien ? L'art de se contrefaire, de revêtir un autre caractère que le sien, de
paraître différent de ce qu'on est, de se passionner de sang-froid, de dire autre chose que ce qu'on pense aussi
naturellement que si on le pensait réellement, et d'oublier enfin sa propre place à force de prendre celle
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
d'autrui. Qu'est-ce que la profession du comédien ? Un métier par lequel il se donne en représentation pour de
l'argent, se soumet à l'ignominie et aux affronts qu'on achète le droit de lui faire, et met publiquement sa
personne en vente. J'adjure tout homme sincère de dire s'il ne sent pas au fond de son être qu'il y a dans ce
trafic de soi-même quelque chose de servile et de bas. Vous autres philosophes, qui vous prétendez si fort audessus des préjugés, ne mourriez-vous pas tous de honte si, lâchement travestis en rois, il vous fallait aller faire
aux yeux du public un rôle différent du vôtre, et exposer vos majestés aux huées de la populace ? Quel est
donc, au fond, l'esprit que le comédien reçoit de son état ? Un mélange de bassesse, de fausseté, de ridicule
orgueil, et d'indigne avilissement, qui le rend propre à toutes sortes de personnages, hors le plus noble de tous,
celui d'homme qu'il abandonne.
Je sais que le jeu du comédien n'est pas celui d'un fourbe qui veut en imposer, qu'il ne prétend pas qu'on le
prenne en effet pour la personne qu'il représente, ni qu'on le croie affecté des passions qu'il imite, et qu'en
donnant cette imitation pour ce qu'elle est, il la rend tout à fait innocente. Aussi ne l'accusé je pas d'être
précisément un trompeur, mais de cultiver pour tout métier le talent de tromper les hommes, et de s'exercer à
des habitudes qui ne pouvant être innocentes qu'au théâtre, ne servent partout ailleurs qu'à mal faire. Ces
hommes si bien parés, si bien, exercés au ton de la galanterie et aux accents de la passion, n'abuseront-ils
jamais de cet art pour séduire de jeunes personnes? Ces valets fildus, si subtils de la langue et de la main sur la
scène, dans les besoins d'un métier plus dispendieux que lucratif, n'auront-ils jamais de distractions utiles ? Ne
prendront-ils jamais la bourse d'un fils prodigue ou d'un père avare pour celle de Léandre ou d'Argan ? Partout
la tentation de faire mal augmente avec la facilité ; et il faut que les comédiens soient plus vertueux que les
autres hommes, s’ils ne sont plus corrompus.
Rousseau, Lettre à d’Alembert
Ed. GF Flammarion, Paris, 2003
pp. 70-72 et p. 132
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Entre « Théâtre » et « Réalité »
De quoi parle Les Acteurs de bonne foi ?
De la relation complexe, ambiguë entre la représentation (théâtrale) et le « réel ». Marivaux
entend montrer que, contrairement à l’idée reçue, l’artifice théâtral, bien loin d’éloigner du
réel, de le travestir, est, au contraire, ce qui permet d’y revenir, de le rendre plus assuré.
Ainsi, l’épreuve que Merlin impose à Lisette et à Blaise en faisant, sous leurs yeux, la cour à
Colette, n’est, en fin de compte, destinée qu’à renforcer leurs attachements respectifs : de
Lisette à lui-même et de Blaise à Colette. La chose est même encore plus fine, puisque
Colette, tout en jouant double jeu, tente tout de même réellement sa chance auprès de
Merlin.
Mêmement Madame Argante, outrée par la volte face soudaine de Madame Hamelin qui
prétend désormais donner son neveu à épouser à la riche veuve Araminte, a cette formule
étonnante : « Il n’y a qu’un rêve qui puisse rendre ceci pardonnable, absolument qu’un rêve,
que la représentation de votre misérable comédie va dissiper », qui signifie là encore que
c’est l’illusoire de la représentation qui doit permettre de reprendre contact avec le réel.
Cette « thèse » n’est évidemment pas développée explicitement et discursivement par
Marivaux ; elle est mise en œuvre par un dispositif dramaturgique ingénieux : une
représentation théâtrale où les acteurs jouent « leur personnage » sur un canevas de légère
fiction.
Jean-Pierre Vincent
Les Acteurs de bonne foi
- scène 4
MERLIN
Bonjour, ma belle enfant, je suis bien sûr que ce n'est pas moi que vous cherchez ?
COLETTE
Non, monsieur Merlin,
mais ça n'y fait rien, je suis bien aise de vous y trouver.
MERLIN
Et moi, je suis charmé de vous y trouver, Colette.
COLETTE
Ça est bien obligeant.
MERLIN
Ne vous êtes-vous pas aperçu du plaisir que j'ai à vous voir ?
COLETTE
Oui,
mais je n'ose pas bonnement m'apercevoir de ce plaisir-là, à cause que j'y en prenrais aussi.
MERLIN, interrompant.
Doucement Colette, il n'est pas décent de vous déclarer si vite.
COLETTE
Dame, comme il faut avoir de l"amiquié pour vous dans cette affaire-là, j'ai cru qu'il n'y avait pas de temps à
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
perdre.
MERLIN
Attendez que je me déclare tout à fait moi.
BLAISE, interrompant de son siège.
Voyez en effet comme aile se presse, an dirait qu'alle y va de bon jeu, je crois que ça m'annonce du guignon.
LISETTE, assise et interrompant.
Je n'aime pas trop cette saillie-là, non plus.
MERLIN
C'est qu'elle ne sait pas mieux faire.
COLETTE
Et bien velà ma pensée tout sans dessus dessous,
pisqu'ils me blâmont, je sis trop timide pour aller en avant, s'ils ne s'en vont pas.
MERLIN
Éloignez-vous donc pour lencourager.
BLAISE, se levant de son siège.
Non morguié je ne veux pas qu'elle ait du courage moi, je veux tout entendre.
LISETTE, assis et interrompant.
Il est vrai, ma mie, que vous êtes plaisante de vouloir que nous nous en allions.
COLETTE
Pourquoi aussi me chicanez-vous ?
BLAISE, interrompant, mais assis.
Pourquoi te hâtes-tu tant d'être amoureuse de monsieur Merlin ? est-ce que tu en sens de l"amour ?
COLETTE
Mais vrament je sis bien obligée d'en sentir, pisque je sis obligée d'en prendre dans la comédie, comment
voulez-vous que je fasse autrement ?
LISETTE, assise interrompant.
Comment, vous aimez réellement Merlin ?
MERLIN, à Lisette.
Blaise et toi, vous êtes de grands innocents tous deux, ne voyez-vous pas qu'elle s'explique mal,
ce n'est pas qu'elle m'aime tout de bon, elle veut dire seulement qu'elle doit faire semblant de m'aimer,
n'est-ce pas, Colette ?
COLETTE
Comme vous voudrez, monsieur Merlin.
MERLIN
Allons continuons,
et attendez que je me déclare tout à fait, pour vous montrer sensible à mon amour.
COLETTE
J'attendrai, monsieur Merlin, faites vite.
MERLIN, recommençant la scène.
Que vous êtes aimable, Colette, et que j'envie le sort de Blaise qui doit être votre mari !
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
COLETTE
Oh! oh!
est-ce que vous m'aimez, monsieur Merlin ?
MERLIN
Il y a plus de huit jours que je cherche à vous le dire.
COLETTE
Queu dommage, car je nous accorderions bien tous deux.
MERLIN
Et pourquoi, Colette ?
COLETTE
C'est que si vous m'aimez, dame... dirai-je ?
MERLIN
Sans doute.
COLETTE
C'est que si vous m'aimez c'est bian fait, car il n'y a rian de pardu.
MERLIN
Quoi, chère Colette, votre coeur vous dit quelque chose pour moi ?
COLETTE
Oh ! il ne me dit pas quelque chose, il me dit tout à fait.
MERLIN
Que vous me charmez, bel enfant, donnez-moi votre jolie main, que je vous en remercie.
LISETTE, interrompant.
Je défends les main.
COLETTE
Faut pourtant que j'en aye.
LISETTE
Oui, mais il n'est pas nécessaire qu'il les baise.
MERLIN
Entre amants les mains d'une maîtresse sont toujours de la conversation.
BLAISE
Ne permettez pas qu'elles en soyent, mademoiselle Lisette.
MERLIN
Ne vous fâchez pas, il n'y a qu'à supprimer cet endroit-là.
COLETTE
Ce n'est que des mains au bout du compte.
MERLIN
Je me contenterai de lui tenir la main de la mienne.
BLAISE
Ne faut pas magnier non plus, n'est-ce pas, mademoiselle Lisette ?
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
LISETTE
C'est le mieux.
MERLIN
Il n'y aura pas assez de vif dans cette scène-là.
COLETTE
Je sis de votre avis monsieur Merlin, et je n'empêche pas les mains, moi.
MERLIN
Puisqu'on les trouve de trop, laissons-les, et revenons.
Il recommence la scène.
Vous m'aimez donc Colette, et cependant vous allez épouser Blaise.
COLETTE
Vrament ça me fâche assez, car ce n'est pas moi qui le prends, c'est mon père et ma mère qui me le baillent.
BLAISE, interrompant et pleurant.
Me velà donc bien chanceux.
MERLIN
Tais-toi donc, tout ceci est de la scène, tu le sais bien.
BLAISE
C'est que je vais gager que ça est vrai.
MERLIN
Non, te dis-je,
il faut ou quitter notre projet, ou le suivre,
la récompense que madame Hamelin nous a promise vaut bien la peine que nous la gagnions, je suis fâché
d'avoir imaginé ce plan-là, mais je n'ai pas le temps d'en imaginer un autre, poursuivons.
COLETTE
Je le trouve bien joli, moi.
LISETTE
Je ne dis mot mais je n'en pense pas moins : quoiqu'il en soit, allons notre chemin pour ne point risquer notre
argent.
MERLIN, recommençant la scène.
Vous ne vous souciez donc pas de Blaise, Colette, puisqu'il n'y a que vos parents qui veulent que vous
l'épousiez.
COLETTE
Non il ne me revient point, et si je pouvais par queuque manigance m'empêcher de l'avoir pour mon homme, je
serais bientôt quitte de li, car il est si sot.
BLAISE, interrompant assis.
Morgué velà une vilaine comédie.
MERLIN, à Blaise.
Paix donc.
À Colette.
Vous n'avez qu'à dire à vos parents que vous ne l'aimez pas.
COLETTE
Bon je l'y ai bien dit à li-même, et tout ça n'y fait rien.
27
Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
BLAISE, se levant pour interrompre.
C'est la vérité qu'aile me l'a dit.
COLETTE, continuant.
Mais monsieur Merlin, si vous me demandiais en mariage, peut-être que vous m'auriais, seriais-vous fâché de
m'avoir pour femme ?
MERLIN
J'en serais ravi,
mais il faut s'y prendre adroitement à cause de Lisette, dont la méchanceté nous nuirait, et romprait nos
mesures.
COLETTE
Si aile n'était pas ici, je varrions comment nous y prenre, fallait pas permettre qu'elle nous écoutît.
LISETTE
Que signifie donc ce que j'entends là, car enfin voilà un discours qui ne peut entrer dans la représentation de
votre scène, puisque je ne serai pas présente quand vous la jouerez.
MERLIN
Tu n'y seras pas, il est vrai, mais tu es actuellement devant ses yeux, et par méprise elle se règle là-dessus,
n'as-tu jamais entendu parler d'un axiome qui dit que l'objet présent émeut la puissance, voilà pourquoi elle s'y
trompe,
si tu avais étudié, cela ne t'étonnerait pas.
À toi à présent, Blaise, c'est toi qui entres ici et qui viens nous interrompre, retire-toi à quatre pas, pour feindre
que tu arrives,
moi qui t'aperçois venir, je dis à Colette, voici Blaise qui arrive, ma chère Colette, remettons l'entretien à une
autre fois,
à Colette
et retirez-vous.
BLAISE, approchant pour entrer en scène.
Je suis tout parturbé, moi je ne sais que dire.
MERLIN
Tu rencontres Colette sur ton chemin, et tu lui demandes d'avec qui elle sort.
BLAISE, commençant la scène.
D'où viens-tu donc Colette ?
COLETTE
Eh ! je viens d'où j'étais.
BLAISE
Comme tu me rudoyes.
COLETTE
Oh dame, accommode-toi, prends ou laisse, adieu.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
NB : Les scènes entre Merlin et les comédiens peuvent être l’occasion de revenir avec les élèves
sur les Comédiens Italiens avec qui Marivaux a travaillé et plus largement sur la Commedia
dell’Arte.
Les Comédiens italiens (1720)
Watteau
Les Charlatans (1757)
Pietro Longhi
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Marivaux
(1688-1763)
Né à Paris, Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux étudie au Collège de l’Oratoire à Riom
avant de s’inscrire dès 1710 à la Faculté de droit de Paris.
Une première comédie jouée dans un cercle d'amateurs et publiée en 1712, Le Père
prudent et équitable ou Crispin l'heureux fourbe, puis des romans dans le genre picaresque
et quelques contributions journalistiques au Nouveau Mercure lui font une position
reconnue dans les milieux littéraires de Paris.
En 1720, il donne aux comédiens italiens une comédie, Arlequin poli par l'amour, et aux
comédiens français une tragédie, Annibal. La première réussit, l'autre échoue. Après avoir
décroché enfin sa licence de droit, Marivaux fonde un journal sur le modèle du Spectator
anglais, Le Spectateur français (qui paraît de 1721 à 1734).
Devenu l'intime des comédiens italiens, il leur écrit sur mesure, entre 1722 et 1740, dans
le langage « de la conversation », des comédies d'un ton nouveau dont la dramaturgie se
fonde sur les « mouvements » de la sensibilité : La Surprise de l'amour, La Double
inconstance, Le Prince travesti, La Fausse suivante, L'Ile des esclaves, L'Héritier de village,
La Colonie, Le Jeu de l'amour et du hasard, Le Triomphe de l'amour, L'École des mères,
L'Heureux stratagème, La Mère confidente, Les Fausses confidences, La Joie imprévue, Les
Sincères et l'Épreuve.
Le jeu vif et allègre des comédiens italiens lui plaît infiniment mieux que le jeu lent et
apprêté des comédiens français, à qui pourtant – car la reconnaissance officielle passe par
là – il confie neuf comédies dont trois seulement remportent un véritable succès : La
Seconde surprise de l'amour en 1727, Le Legs en 1736 et Le Préjugé vaincu en 1746.
Et tandis qu'il continue son œuvre de journaliste, il s'attelle à deux romans, La Vie de
Marianne, qu'il met dix ans à publier entre 1731 et 1741, et Le Paysan parvenu en 17341735, qui reflètent assez la philosophie de l'auteur, son goût de l'analyse psychologique et
son attitude de moraliste face à une société de classes qu'il conteste.
Élu à l'Académie française en 1741, il se consacre dès lors à une forme plus philosophique
de littérature, privilégiant l’essai. Ses dernières comédies, bien que publiées, ne sont pas
jouées.
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Les Acteurs de bonne foi
L’équipe de création
Jean-Pierre Vincent • mise en scène
En 1959, Jean-Pierre Vincent fait ses débuts comme comédien dans le groupe théâtral du lycée Louis-Le-Grand à Paris, avec
Jérôme Deschamps et Patrice Chéreau. Il y fait ses premiers essais de mise en scène et participe comme acteur et
collaborateur aux premiers spectacles de Patrice Chéreau, avant de s’installer avec lui au Théâtre de Sartrouville jusqu’en
1968, date à laquelle il crée avec Jean Jourdheuil la compagnie Vincent-Jourdheuil, Théâtre de l’Espérance. Après le succès
de La Noce chez les petits-bourgeois de Brecht, ils créeront une dizaine de spectacles mémorables avant de se lancer dans
l’expérience du Tex Pop (Théâtre Expérimental Populaire) dans les locaux du Palace à Paris. En 1975, la compagnie se
dissout et Jean-Pierre Vincent est nommé directeur du Théâtre national de Strasbourg, aventure collective avec une bande
d’acteurs, d’auteurs, de dramaturges, de metteurs en scène associés.
En 1983, il devient administrateur de la Comédie-Française qu’il quitte en 1986 pour redevenir metteur en scène
indépendant et professeur au Conservatoire national supérieur d’Art dramatique.
La période strasbourgeoise sera marquée par la création, entre autres, de Germinal, Vichy fictions, Le Misanthrope, Le
Palais de justice, la période de la Comédie-Française par l’entrée au répertoire de Jean Audureau, de Jean Genet et par la
venue en France de Klaus Michael Grüber et de Luca Ronconi.
En 1990, il prend la direction du Centre dramatique national de Nanterre-Théâtre des Amandiers où il alterne les créations
contemporaines et le répertoire classique jusqu’en 2001 où, une fois encore, il redevient metteur en scène indépendant et
recrée une compagnie, le Studio Libre.
Il marquera sa présence au Festival d’Avignon en participant à la naissance de “Théâtre Ouvert” en réalisant la mise en
espace du Camp du drap d’or de Serge Rezvani. Il y mettra en scène Dans la jungle des villes de Bertolt Brecht en 1972, En
r’venant d’l’expo de Jean-Claude Grumberg en 1973, Peines d’amour perdues de William Shakespeare en 1980, Dernières
nouvelles de la peste de Bernard Chartreux dans la Cour d’honneur en 1983, La Tragédie de Macbeth de William
Shakespeare dans la Cour d’honneur en 1985, Œdipe à Colone et Œdipe tyran de Sophocle en 1989, Les Fourberies de
Scapin de Molière dans la Cour d’honneur en 1990, Lorenzaccio de Alfred de Musset dans la Cour d’honneur en 2000 et Le
Fou et sa femme ce soir dans Pancomedia de Botho Strauss en 2002.
1958-64
Groupe Théâtral du Lycée Louis le Grand
Rencontre avec Patrice Chéreau, Jérôme Deschamps, Hélène Vincent, premières mises en scène de Chéreau.
Premiers essais personnels : La Cruche cassée de Kleist (1963), Scènes populaires de 1830 d’Henry Monnier (1964).
Sorbonne : Licence de Lettres Classiques + Études Théâtrales.
1965-68
Compagnie Patrice Chéreau
À Gennevilliers, puis à Sartrouville, tournées. Acteur et collaborateur à la mise en scène avec Chéreau. L’Affaire de
e
la rue de Lourcine de Labiche, L’Héritier de village de Marivaux, Les soldats de Lenz, Deux pièces chinoises du XIII
siècle… Animation dans le secteur scolaire pour le Théâtre de Sartrouville.
1968-71
Metteur en scène itinérant (en compagnie de Jean Jourdheuil, dramaturge)
Rencontre avec Jean Jourdheuil et première mise en scène en 1968 : La Noce chez les petits-bourgeois de Brecht au
Théâtre de Bourgogne. Puis Tambours et trompettes de Brecht (Théâtre de la ville), Le Marquis de Montefosco
d’après Goldoni (Grenier de Toulouse), La Cagnotte d’après Labiche (TNS), Capitaine Schelle Capitaine Eçço de
Rezvani (TNP Chaillot).
1971-74
Compagnie Vincent-Jourdheuil
Toujours itinérants, puis au Théâtre Le Palace («Théâtre Expérimental Populaire », en association avec Brigitte
Lefèvre, Jacques Garnier, Diego Masson). Dans la Jungle des villes de Brecht, Woyzeck de Büchner, La Tragédie
optimiste de Vichnevsky. En 1974, co-mise en scène de Timon d’Athènes avec Peter Brook (ouverture des Bouffes
du Nord). Et En r’venant d’l’expo de Jean-Claude Grumberg (JTN/Odéon).
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
1975-83
Directeur du Théâtre National et de l’École nationale supérieure d’Art dramatique de Strasbourg
Collectif artistique permanent (acteurs, auteurs, dramaturges, metteurs en scène).
Germinal d’après Zola (création collective), Le Misanthrope de Molière, Vichy-Fictions de Bernard Chartreux et
Michel Deutsch, Le Palais de Justice, Dernières nouvelles de la peste de Bernard Chartreux.
1976 et 1982 : deux mises en scène différentes du Don Giovanni de Mozart (Aix en Provence).
1978-81 : Président du SYNDEAC.
1983-86
Administrateur Général de la Comédie-Française
Félicité de Jean Audureau, Le suicidé de Nicolaï Erdmann, Le Misanthrope (bis), Macbeth de Shakespeare, Six
personnages en quête d’auteur de Pirandello (Théâtre de l’Europe).
1986-90
Metteur en scène itinérant
Avec Bernard Chartreux, dramaturge ; Jean-Paul Chambas, peintre ; Patrice Cauchetier, costumier ; Alain Poisson,
éclairagiste.
Le Mariage de Figaro de Beaumarchais (Chaillot, Grand prix de la Critique, deux Molières), On ne badine pas avec
l’amour de Musset (Sartrouville), Le Faiseur de théâtre de Thomas Bernhard (TNP Villeurbanne), Œdipe et les
Oiseaux de Sophocle et Aristophane/Bernard Chartreux (Nanterre-Amandiers/Chéreau).
Professeur au Conservatoire de Paris, CNSAD de 1986 à 1992.
1990-2001
Directeur du Théâtre des Amandiers, à Nanterre
Associations avec l’ATEM (Georges Aperghis), puis T&M (Antoine Gindt), Stanislas Nordey…
Les Fourberies de Scapin de Molière, Princesses de Fatima Gallaire (Prix de la meilleure création française), Enfants
du Siècle/Tétralogie Musset, Un homme pressé de Bernard Chartreux, Woyzeck de Büchner, Thyeste de Sénèque,
Karl Marx Théâtre inédit d’après Derrida/Shakespeare/Marx/Chartreux, Le Jeu de l’amour et du hasard de
Marivaux, Lorenzaccio de Musset, Homme pour homme de Brecht, Le Drame de la vie de Valère Novarina,
L’Échange de Paul Claudel.
1996 : Première collaboration avec l’ERAC : Pièces de Guerre d’Edward Bond.
Nombreux ateliers de formation de professeurs spécialisés « A3 Théâtre ».
1994-96 : Vice Président du SYNDEAC.
1992 : Rapport sur les Intermittents du spectacle commandé par Jack Lang.
Opéra : Les Noces de Figaro de Mozart (Opéra de Lyon, Nanterre, 1995-98). Mitridate re di Ponto de Mozart
(Théâtre du Châtelet, Paris).
Depuis 2001
Compagnie Studio Libre, avec Bernard Chartreux
Les Prétendants (Grand prix de la Critique) et Derniers remords avant l’oubli de J.-L. Lagarce (Théâtre de la Colline,
Théâtre de l’Odéon). 11 Débardeurs d’Edward Bond (spectacle pour jeune public, Maison du geste et de l’image,
Théâtre de la Colline, région PACA), Antilopes d’Henning Mankell (Théâtre du Rond-Point), L’Éclipse du 11 août de
Bruno Bayen (Théâtre de la Colline), Le Silence des communistes de Vittorio Foa/Miriam Mafaï/Alfredo Reichlin
(Festival d’Avignon 2007), L’École des femmes de Molière (Théâtre de l’Odéon, 2008). Ubu roi d’Alfred Jarry
(Comédie-Française, 2009), Meeting Massera d’après plusieurs textes de Jean-Charles Massera (Adami « paroles
d’acteurs », Festival d’automne, Théâtre de la Cité internationale).
Spectacles de sortie de plusieurs promotions à l’ERAC (École Régionale d’Acteurs de Cannes) : Pièces de guerre
d’Edward Bond (1996), Le Fou et sa femme, ce soir, dans « Pancomedia » de Botho Strauss (2002), La Mort de
Danton de Büchner (2005), Une Orestie d’Eschyle (2007). Récemment : spectacles de sortie d’une promotion de
l’ENSATT : Les Aventures de Zelinda et Lindoro de Goldoni – Trilogie (juin 2010), et à venir : spectacle de sortie du
groupe 39 de l’École du TNS : Fragments Woyzeck de Georg Büchner et Grand-peur et misère du IIIe Reich de
Bertolt Brecht (au TNS : du 9 au 16 juin 2011, et à Paris, au Théâtre de la Commune-CDN d’Aubervilliers : du 23 au
29 juin 2011).
Membre des Conseils d’Administration du Théâtre National de l’Odéon, du Festival d’Avignon, et du Jeune Théâtre
National.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Bernard Chartreux • dramaturgie
Auteur dramatique, dramaturge, traducteur, Bernard Chartreux inaugure son parcours théâtral au Théâtre universitaire de
Nancy où il rencontre Jack Lang puis Jean Jourdheuil. Depuis 1974, il travaille avec Jean-Pierre Vincent qu'il accompagne au
TNS (1975-1983), à la Comédie-Française(1983-1986), au Théâtre des Amandiers à Nanterre (1990-2001), et actuellement à la
compagnie Studio Libre. Auteur dramatique, il a écrit notamment Le Château dans les champs et Le Tombeau d’Atrée (d’après
Eschyle) montés par Robert Gironès, Cacodémon Roi et Le Tombeau de Richard G montés par Alain Milianti, Violences à
Vichy I et II, Dernières nouvelles de la peste, Un homme pressé, Cité des oiseaux, Hélène et Fred (tiré du spectacle Karl Marx
Théâtre Inédit), montés par Jean-Pierre Vincent. Ses pièces ont été traduites en portugais, en allemand et en anglais.
Pour le Théâtre Nanterre-Amandiers, il a traduit Œdipe tyran et Œdipe à Colone de Sophocle. Il s’est associé à Jean-Pierre
Vincent et à Eberhardt Spreng pour traduire Un homme est un homme de Bertolt Brecht, Woyzeck, La Mort de Danton, Léonce
et Léna de Georg Büchner, à Bernard Bloch pour les Portraits juifs de Herlinde Koelb, et à Eberhard Spreng pour La Femme
d’avant de Roland Schimmelpfennig et Cent jours de Lukas Bärfuss.
Dramaturge, il a donc collaboré à la plupart des spectacles de Jean-Pierre Vincent parmi lesquels Le Mariage de Figaro
(Beaumarchais), Le Faiseur de théâtre (Thomas Bernhard), Le Jeu de l’amour et du hasard (Marivaux), Les Prétendants (JeanLuc Lagarce), mais aussi Le Nozze di Figaro et Mitridate (Mozart) qui lui restent particulièrement chers. Toujours avec JeanPierre Vincent il participe à la formation des jeunes acteurs à l’école du TNS, à l’ERAC et à l’ENSATT.
Frédérique Plain • assistanat à la mise en scène et à la dramaturgie
Après l’agrégation d’Histoire et une formation de comédienne, Frédérique Plain choisit de se consacrer à la mise en scène.
Elle est l’assistante de Jean-Pierre Vincent depuis 2003, ayant avec lui collaboré à sept spectacles. Parallèlement, elle a aussi
travaillé avec Gildas Milin, Claire Lasne, Alain Françon, et enseigné en Arts du spectacle à l’université Paris-VIII de 2001 à
2005. Spécialiste de Musset, elle a participé à de nombreuses publications dans le domaine du théâtre, notamment à Europe,
le Journal des trois théâtres et aux Nouveaux Cahiers de la Comédie-Française. Elle a récemment créé sa compagnie et
prépare un spectacle qui se jouera cette saison autour de deux pièces en un acte de Musset : Il faut qu’une porte soit ouverte
ou fermée et On ne saurait penser à tout.
Jean-Paul Chambas • décor
Peintre, membre du groupe La Figuration Narrative, il expose au Salon de la Jeune Peinture de 1968 à 1971, puis au Musée
d’Art Moderne de la ville de Paris et au Centre Georges Pompidou. Depuis, son travail a été présenté dans de nombreuses
galeries, tant en France qu’à l’étranger (Italie, Espagne, Mexique, Autriche, Australie, Angleterre et États-Unis). L’année 2008
a connu quatre expositions de son travail : à Lille, Arles, Riberac et Paris. Parallèlement à ses activités de peintre, Jean-Paul
Chambas réalise des décors pour le théâtre et l’opéra depuis 1976 pour des pièces classiques ou contemporaines. Il collabore
avec Michel Deutsch, Claude Régy, Luca Ronconi, Wim Wenders, Jean-Claude Auvray, Philippe Sireuil, Blanca Li, Gabriella
Maïone et surtout Jean-Pierre Vincent avec lequel il a déjà travaillé sur une quarantaine de spectacles. On a pu voir des décors
de Jean-Paul Chambas à la Comédie-Française, à l’Opéra de Paris, au festival d’Avignon, aux Chorégies d’Orange, à l’Opéra
Bastille, à New York comme à Bruxelles, Rome, Salzbourg, Nanterre.
De nombreux ouvrages sont consacrés au travail de Jean-Paul Chambas, parmi lesquels nous retiendrons : Chambas,
monographie, entretien avec Michel Archimbaud, textes de Patrick Grainville, Archimbaud / Fabrice Galvani, 2003 ; Jean-Paul
Chambas, Théâtre et peinture, entretiens, Actes Sud / Archimbaud, 2004 ; Scènes de vie d’acteur, de Denis Podalydès,
illustrations de Jean-Paul Chambas, Le Seuil / Archimbaud, 2006 ; Manolete-Malcolm Lowry, textes et dessins Jean-Paul
Chambas, Actes Sud, 2008 ; Celle que j’aime, dessins de Jean-Paul Chambas, Le Renard Pâle, 2008 ; Ainsi soixante ans ont
passé-Manolete, dessins et original de Jean- Paul Chambas, texte d’Arrabal, Le Renard Pâle, 2008.
Carole Metzner • assistanat au décor
Depuis son premier décor pour Marly Barnabé, Un cœur simple de Gustave Flaubert au Théâtre du Gros-Caillou de Caen, elle a
exploré toutes les pistes du spectacle vivant. Parallèlement à son travail de peintre et sculpteur pour le cinéma, le théâtre et
l’opéra, elle collabore régulièrement depuis 1992 avec le peintre Jean-Paul Chambas (L’École des femmes au Théâtre de
l’Odéon en 2008) et avec l’artiste Paul Cox (Amovéo à l’opéra Garnier en 2006, Petrouchka au Grand Théâtre de Genève en
2007).
En 2009, elle signe un décor pour la compagnie de clowns « Les Cousins ».
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Patrice Cauchetier • costumes
Patrice Cauchetier débute sa carrière comme assistant de Jacques Schmidt sur les spectacles de Patrice Chéreau. Il travaille
ensuite comme costumier essentiellement pour le théâtre et l’opéra et a plus de 90 spectacles à son actif. Au théâtre, il
collabore depuis de nombreuses années, tant pour des pièces classiques que contemporaines, avec Jean-Pierre Vincent
(récemment pour L’École des femmes de Molière à l’Odéon), Alain Françon (La Cerisaie, de Anton Tchekhov), Jean-Marie
Villégier et, plus récemment, Yves Beaunesne (Le Canard sauvage d’Henrik Ibsen). Il a également travaillé avec Jacques
Lassalle, Joël Jouanneau, François Berreur, Pierre Strosser, Christian Colin, Denis Marleau, Marcel Bozonnet, Alain Milianti,
etc. Outre ses activités théâtrales, il a aussi créé de nombreux costumes pour l’opéra et le ballet : cette saison, par exemple,
pour Jephtha de Georg Friedrich Haendel à l’Opéra national du Rhin, mis en scène par Jonathan Duverger et Jean-Marie
Villégier et pour Cosi fan Tutte de Mozart mis en scène par Yves Beaunesne au théâtre de l’Athénée. Il a aussi collaboré avec
les chorégraphes Béatrice Massin, Odile Dubosc ou Francine Lancelot. Il a obtenu le prix du Syndicat de la critique en 1986
pour Atys de Jean-Baptiste Lully. Nominé aux Molières en 1987, 1991, 1992, et 2010 il a obtenu le Molière du meilleur
créateur de costumes en 1990 pour La Mère coupable de Beaumarchais, mise en scène de Jean-Pierre Vincent, à la Salle
Richelieu.
Alain Poisson • lumières
D’abord comédien, puis éclairagiste, Alain Poisson a commencé sa carrière avec Jérôme Savary. Depuis trente ans, il travaille
surtout comme éclairagiste avec de nombreux artistes, tant pour des concerts, de l’événementiel, que pour le théâtre et
l’opéra, en France et à l’étranger. À l’opéra, il a éclairé La Périchole, La Vie parisienne, La Belle Hélène, Don Giovanni, Die
Zauberflöte, Il Barbiere di Siviglia, Les Contes d’Hoffmann, Le Comte Ory, Carmen, Rigoletto, Le Nozze di Figaro, Tosca… parmi
d’autres. Pour les concerts, il a mis en lumière La Tournée des grands espaces d’Alain Bashung, le retour à la scène de
Christophe, Stéphan Eicher et Catherine Lara. Il a éclairé aussi des spectacles de comiques (Guy Bedos et Muriel Robin) et des
défilés de mode pour Thierry Mugler et Yves Saint-Laurent. Au théâtre, depuis 1973, il a éclairé presque tous les spectacles de
Jérôme Savary, et, depuis 1985 (Macbeth de William Shakespeare, Avignon-Comédie-Française), ceux de Jean-Pierre Vincent.
Il a également collaboré avec Bernard Sobel, Jacques Weber, Benno Besson, Jean-Louis Trintignant, Christine Murillo, JeanClaude Leguay et Grégoire Oestermann, et récemment avec Édouard Baer.
Alain Gravier • son
Formé au Théâtre National de Strasbourg où il a travaillé de 1985 à 2000, Alain Gravier a collaboré à la création sonore avec
des metteurs en scène comme Mathieu Bauer et la Compagnie Sentimental Bourreau (Rien ne va plus, Top Dogs, Tendre
jeudi...), Irène Bonnaud (Tracteur, Lenz, Music Hall 56...) et Jean-Louis Martinelli. Après Les Antilopes et L'éclipse du 11 août,
c'est sa troisième collaboration avec Jean-Pierre Vincent.
Bernard Chabin • mouvements physiques
Depuis 1998, Bernard Chabin est engagé comme maître d’armes sur de nombreuses productions théâtrales ou lyriques,
notamment à l’Opéra de Paris pour Capuleti e i Montecchi de Vincenzo Bellini, mise en scène de Robert Carsen, Macbeth de
Giuseppe Verdi, mise en scène de Phillida Lloyd et Don Quichotte de Jules Massenet, mise en scène de Gilbert Deflo ; mais
aussi pour Cyrano de Bergerac de Franco Alfano, mise en scène de David et Frederico Alagna avec Roberto Alagna à l’Opéra
de Montpellier. Il a déjà travaillé avec Jean-Pierre Vincent sur Lorenzaccio de Alfred de Musset en 2000 pour le festival
d’Avignon. Parallèlement à ses activités de maître d’armes, il est aussi comédien et cascadeur et a travaillé avec de nombreux
metteurs en scène tant au théâtre qu’au cinéma et à la télévision.
Suzanne Pisteur • maquillages
Après une formation d'esthéticienne, de maquilleuse et de coiffeuse, Suzanne Pisteur suit des cours à l'école des Arts
appliqués Duperré à Paris. Elle travaille ensuite pour le cinéma, la télévision et la mode, puis choisit de s’orienter vers le
spectacle vivant (théâtre et opéra). Elle collabore avec de grands metteurs en scène, notamment : Jean-Marie Simon, Alain
Françon, Daniel Mesguich, Stuart Seide, Alfredo Arias, Jean-Marie Villégier, Jean-Pierre Vincent, Antoine Vitez, Peter Brook,
Denis Marleau, Jean-Claude Berruti, Bob Wilson, Dominique Pitoiset, Marcel Bozonnet, Beno Besson, Coline Serreau, Éric
Lacascade, Stéphane Braunschweig, François Bereur, Philippe Van Kessel. Dernièrement, elle a travaillé avec Jean-Pierre
Vincent, Laurent Pelly, Arnaud Meunier, Jacques Kraemer, Laurent Terzieff... Au cours de son parcours, elle croise ainsi la
route de nombreux costumiers avec lesquels elle développe une relation de travail privilégiée, dont Patrice Cauchetier,
Françoise Tournafond, Chloé Obolensky, Renato Bianchi, Christian Gasc, Frida Parmeggiani, Colette Huchard, Sophie Schaal....
Elle a également réalisé des maquillages pour de nombreux ballets et spectacles de danse.
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Les Acteurs de bonne foi
Les comédiens
Patrick Bonnereau
Patrick Bonnereau est régisseur général au Théâtre Nanterre-Amandiers. Il débute au Palace et au Casino de Paris avant
d’être engagé aux Amandiers en 1977. Il travaille également pour le premier Sommet des pays industrialisés de Versailles en
1982, l’Orchestre national de Paris en 1984 et 1985, le Festival d’Avignon en 1994 et 1995 et le Festival Winston (JFD
Production) en 1991 et 1992.
Au Théâtre Nanterre-Amandiers, il collabore notamment avec Patrice Chéreau, Jean-Pierre Vincent, Matthias Langhoff,
Jacques Rebotier, Frédéric Fisbach, Georges Aperghis et Jean-Louis Martinelli.
Julie Duclos
Avant d’intégrer le Conservatoire national supérieur d’Art dramatique en 2007, elle a suivi les formations de l’École « Le
e
Cerisier » (direction Serge Noyelle) et du Conservatoire du 13 arrondissement de Paris (direction Christine Gagnieux et Gloria
Paris).
Elle joue sous la direction de Geneviève Schwoebel (32 chaises pour une variation) et de Serge Noyelle (Le Labyrinthe).
e
Au CNSAD elle travaille avec Dominique Valadié, Alain Françon et Philippe Garrel. Elle dirige l’atelier d’élève de 3 année en
mettant en scène Fragments d’un discours amoureux d’après Roland Barthes.
Au cinéma, on peut la voir dans les moyens métrages d’Hélier Cisterne (Les deux Vies du serpent, Les Paradis perdus – prix
Jean Vigo 2008), Justin Taurand (Derrière les volets) et Hans Petter Blad (Des larmes dans ses yeux).
À la télévision, elle joue notamment dans Dame de cœur de Charlotte Brändström.
Elle sera prochainement à l’affiche du film L’Épée et la rose de Joao Nicolau, et jouera Les Estivants de Gorki, mise en scène de
Gérard Desarthe au CNSAD.
David Gouhier
Il a été formé au Cours Florent (professeurs Patrick Bonnel et François-Xavier Hoffmann) puis à l’École nationale supérieure
d’Art dramatique du TNS.
Il a travaillé avec Robert Kimmich (Les Mains sales de Jean-Paul Sartre, Montserrat de Emmanuel Roblès, La Jalousie du
barbouillé de Molière), Philippe Berling (La Petite Catherine de Heilbronn de Heinrich von Kleist), François Rancillac (L’Aiglon
de Edmond Rostand), Bernard Sobel (Threepenny Lear de William Shakespeare), Enzo Cormann (Cabaret chaosmique), Adel
Hakim (Thyeste, Les Troyennes et Agamemnon de Sénèque), Jean-Claude Fall (Hercule Furieux et Hercule sur l’Œta de
Sénèque), Joël Jouanneau (Lève-toi et marche d’après Dostoïevski), Jean-Pierre Vincent (Karl Marx. Théâtre Inédit de William
Shakespeare, Jacques Derrida, Karl Marx et Bernard Chartreux, Le Tartuffe ou l’Imposteur de Molière, Le Jeu de l’amour et du
hasard de Marivaux, Homme pour homme de Bertolt Brecht, Lorenzaccio de Alfred de Musset, L’École des femmes de
Molière), Hubert Colas et Philippe Duclos (Dans la jungle des villes de Bertolt Brecht), Philip Boulay (Armor de Elsa Solal),
Claude Buchvald (Tête d’Or de Paul Claudel), Jean-Louis Benoit (La Trilogie de la villégiature de Carlo Goldoni), Elisabeth
Chailloux (Sallinger de Bernard-Marie Koltès, La Fausse suivante de Marivaux), Dominique Léandri (L’Ombre de la vallée de
John M. Synge), Claude Merlin (La Dernière Sirène de Pascal Mainard), Laurent Gutmann (Splendid’s de Jean Genet),
Guillaume Rannou (J’ai), Jacques Osinski (Le Conte d’hiver de William Shakespeare), et Gilles Bouillon (Peines d’amour perdues
de William Shakespeare).
Il tourne également pour la télévision et le cinéma.
Anne Guégan
Anne Guégan a joué au théâtre entre autres avec Jean Gillibert (Le Roi Lear de Shakespeare), Jean-Claude Penchenat (1, place
Garibaldi et Une des dernières soirées de carnaval de Carlo Goldoni), Claudia Morin (La Double inconstance de Marivaux),
Marie-Noëlle Peters (Histoires de marins) et Roger Planchon (Les Possédés de Dostoievski, La Dame de chez Maxim's de
Georges Feydeau, Le Cochon noir de Roger Planchon, Emmanuel Kant de Thomas Bernhardt). Plus récemment, elle a travaillé
sous la direction de Jean-Hervé Appéré dans Georges Dandin de Molière (version commedia dell’arte) et avec Laurent
Boulassier dans un spectacle sur Madame Du Chatelet, intitulé De la pluralité des mondes.
Au cinéma, elle a tourné avec Pascal Kané (Liberty Belle), Roger Planchon (Georges Dandin, Toulouse Lautrec), Alain Bévérini
(Total Kéops).
Elle a suivi des cours de chants avec Louis-Jacques Rondeleux et Francesca Solleville, et a parallèlement appris le langage
gestuel des sourds et muets.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Annie Mercier
Annie Mercier a joué au théâtre dans une soixantaine de pièces. Elle a notamment travaillé avec Stéphane Braunschweig
(Tartuffe de Molière, Rosmersholm et Une maison de poupée de Henrik Ibsen), Laurent Gutmann (Chants d'adieu et
Nouvelles du plateau S. de Oriza Hirata ; Terre Natale de Daniel Keene ; Légendes de la forêt viennoise de Ödön von
Horvath), Guillaume Vincent (Nous, les héros de Jean-Luc Lagarce), Christophe Rauck (Getting Attention de Martin Crimp),
Stéphane Fiévet (Laisse moi te dire une chose de Rémi de Vos), Claude Duparfait (Titanica de Sébastien Harrisson), Charles
Tordjman (Vie de Myriam C.), Roger Planchon, Philippe Adrien, Régis Santon, Jean Lacornerie, Christian Cheesa, Patrick
Collet, François Rancillac, Robert Cantarella et Philippe Minyana.
Au cinéma, Annie Mercier a travaillé avec des réalisateurs comme Claude Miller, Pierre Jolivet, François Dupeyron, Éric
Veniard, François Favrat, Marie-Pascale Osterrieth ou encore Marc Fitoussi.
Elle a également participé à une trentaine de réalisations télévisées.
Elle a écrit de nombreuses pièces et adaptations pour France Culture et Radio Lausanne, ainsi que des scénarii pour TF1. En
2006, elle reçoit le Prix d'interprétation féminine au festival de la radio Francophone.
Enfin, elle est elle-même metteuse en scène (Abîme aujourd'hui la ville de François Bon, 2002) et anime régulièrement des
stages de formation à l'École du TNS, dans des conservatoires ou au CDN de Thionville.
Pauline Méreuze
Formée à l’École régionale d’acteurs de Cannes de 2006 à 2009, elle a travaillé avec Simone Amouyal, Isabelle Lusignan,
Didier Galas, Alain Fourneau, Richard Dubelski, Christian Rojas (La Célestine de Fernando Rojas présenté au Théâtre de
l’Aquarium), Guillaume Vincent (ADN de Dennis Kelly présenté au festival actOral), Alain Terrat (Eux seuls le savent… et
autres textes de Tardieu présenté au Théâtre Alexandre III – Cannes), Richard Sammut (Phèdre(s) présenté au Théâtre des
Bernardines à Marseille).
En 2009 et 2010 on a pu la voir dans La Nuit des rois de Shakespeare mis en scène par Jean-Louis Benoit.
Laurence Roy
Laurence Roy a été formée au Conservatoire national d’Art dramatique de Paris dans la classe d’Antoine Vitez d’où elle est
sortie en 1976.
Parallèlement au Conservatoire, elle joue dans deux spectacles mis en scène par Stuart Seide : Troïlus et Cressida de William
Shakespeare et Dommage qu’elle soit une putain de John Ford.
Elle sort du Conservatoire avec Iphigénie Hôte, de Michel Vinaver mis en scène par Antoine Vitez. Elle continue sa
collaboration avec Stuart Seide dans plusieurs spectacles dont : Le Deuil sied à Electre de Eugène O’Neill, Le Songe d’une
nuit d’été de Shakespeare, Le Retour de Pinter, Le Fusil de chasse de Yasushi Inoué et Auprès de la mer intérieure de Bond.
Elle travaille également avec Alain Ollivier (L’Échange de Paul Claudel), Jacques Lassalle (Nina, c’est autre chose de Michel
Vinaver) et Jean-Claude Fall (Still life de Emily Man), Marcel Maréchal (Don Juan de Molière), Gilles Gleizes (Eté et Fumée de
Tennessee Williams, Médée de Sénèque), Claudia Stavisky (Munich Athènes de Lars Norén), Elisabeth Chailloux (La
Ménagerie de verre de Tennessee Williams), Philippe Adrien (Hamlet de William Shakespeare), Adel Hakim (Les Troyennes
et Agamemnon de Sénèque), Jean-Louis Martinelli (Emmanuel Kant Comédie d’après Thomas Bernhard), Frédéric Bélier
Garcia (La Ronde de Arthur Schnitzler), Emmanuel Demarcy-Mota (Marcia Hesse de Fabrice Melquiot), et Matthew Jocelyn
(L’Architecte de David Greig, Une petite douleur de Harold Pinter).
À l’image, elle a travaillé avec Jean-Pierre Darroussin pour Le Pressentiment, Ilan Duran Cohen pour Les Amants du Flore,
Philippe Leguay, Cédric Klapisch, Mario Camus, Alain Souter et Alain Resnais.
En parallèle, depuis 1991, elle dirige des ateliers d’élèves dans plusieurs écoles nationales : le Théâtre national de
Strasbourg, le Conservatoire national supérieur de Paris, Le Théâtre national de Bretagne, le Conservatoire de Montpellier
ainsi que la classe de Khâgne du lycée Lakanal.
Matthieu Sampeur
Avant d’intégrer le Conservatoire national supérieur d’Art dramatique en 2006, il a suivi les formations de l’École du Studio
d’Asnières et de l’École du Théâtre national de Chaillot. Il a travaillé avec Jean-Louis Martin Barbaz (Platonov de Anton
Tchekhov) et Delphine Lalizout (L’Hôtel du Libre-Échange de Georges Feydeau).
Au CNSAD il travaille notamment avec Dominique Valadié, Yann-Joël Collin, Sandy Ouvrier, Nada Strancar, Alfredo Arias,
Ludovic Lagarde et Philippe Garrel.
Dans le cadre de projets d’élèves, il joue à deux reprises sous la direction de Sara Llorca (Tambours dans la nuit de Brecht et
Les Deux Nobles Cousins de Shakespeare et John Fletcher) ainsi qu’avec Adama Diop (Homme pour homme de Brecht).
En 2010, il joue dans L’Éveil du printemps, mise en scène de Guillaume Vincent au Théâtre national de la Colline et en
tournée.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Claire Théodoly
Formée à l’École régionale d’acteurs de Cannes de 2003 à 2006, elle a travaillé avec Gilles Bouillon (Kachtanka de Anton
Tchekhov, Peines d’amour perdues de William Shakespeare, Atteintes à sa vie de Martin Crimp, Le Jeu de l’amour et du
hasard de Marivaux), Claire Lasne-Darcueil (La Deuxième ligne de Marie-France Marsot), Catherine Marnas (Sainte Jeanne
des Abattoirs de Bertlolt Brecht) et Nadia Vonderheyden (Nuage en Pantalon de Vladimir Maïakovski).
En danse, elle travaille avec Claude Brumachon dans L’Ombre des mots.
Elle joue également pour le cinéma.
Olivier Veillon
Il a été formé à l’École régionale d’acteurs de Cannes de 2004 à 2007.
Il a travaillé avec Emilie Rousset (La Reine C), Bertrand Bossard et Emilie Rousset (Auteurs en scène), Jean-Pierre Vincent
(Une orestie de Eschyle, Les Acteurs de bonne foi de Marivaux), Anne Alvaro et David Lescot (Troïlus et Cressida de William
Shakespeare), Baptiste Amann (Les Anthropophages de Baptiste Amann, Et pourtant c'est bien ça de Jan Zabrana), Brigitte
Zarza (Acte 1 de Jacques Rebotier), Renaud-Marie Leblanc (Ceux qui partent à l’aventure de Noëlle Renaude), Alexandra
Tobelaim (La Seconde surprise de l’amour de Marivaux), Bertrand Bossard (Mon œil le cyclope de Bertrand Bossard).
Il a aussi participé aux créations de l’IRMAR (Institut des Recherches Menant à Rien) dans des mises en scène et créations
collectives de Victor Lenoble (Conférence sur rien de John Cage, Du caractère relatif de la présence des choses, Un ensemble
de chose ; avec Mathieu Besset : Four6 et Le Discours sur rien de John Cage ; avec Johannes Schmidt, Anders Carlson :
Invisible Empire).
Il tourne également pour le cinéma.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
Dans le même temps
LA OMISIÓN DE LA FAMILIA COLEMAN (Le Cas de la famille Coleman)
Texte et mise en scène Claudio Tolcachir – Cie Timbre 4
> Spectacle en espagnol surtitré en français
ARGENTINE
Dates du mardi 23 au samedi 27 novembre 2010
Horaires du mardi au samedi à 20h,
deux représentations à 16h et 20h : samedi 27
Salle Hubert Gignoux
Autres activités du TNS
EXPOSITION
ANTOINE VITEZ PHOTOGRAPHE - EN COLLABORATION AVEC LE TJP
Le TNS et le Théâtre Jeune Public exposent plus de 80 photos prises par le metteur en scène.
Parallèlement à son activité de mise en scène, Antoine Vitez écrivait, dessinait et photographiait.
L’essentiel de son travail photographique, entre 1968 et 1990, est réalisé avec un appareil reflex
(24x36) et constitué d’une grande série de noir et blanc qui comprend des photos de théâtre et des
portraits.
• Du jeudi 25 novembre au samedi 18 décembre au TNS (hall Koltès) et au TJP (rue des Balayeurs
et rue du Pont-Saint-Martin), entrée libre.
Cette exposition sera présentée durant la période des représentations des Acteurs de bonne foi.
LE TNS ACCUEILLE…
SAVOIR(S) EN COMMUN : RENCONTRES UNIVERSITÉ - SOCIÉTÉ
9e édition - « Le(s) corps »
Autour du thème « Le(s) corps », le TNS s’associe à l’Université de Strasbourg dans la
programmation de la table ronde : « Le corps instrument ».
Une rencontre avec Caroline Marcadé (chorégraphe et metteure en scène), Nadia Foisil
(doctorante en Anthropologie sociale et culturelle) et d’autres spécialistes.
• Lundi 29 novembre à 18h30 au TNS, salle Gignoux - réservation au + 33 (0)3 88 24 88 00.
Savoir(s) en commun • + 33 (0)3 68 85 12 51 • Programmation et informations : http://savoirsencommun.unistra.fr
LECTURE PUBLIQUE
AVEC LES COMÉDIENS DE LA TROUPE DU TNS
• Samedi 4 décembre à 17h au TNS, salle Gignoux
Entrée libre, réservation recommandée au + 33 (0)3 88 24 88 00.
ÉCOLE DU TNS
LE CONCOURS 2011
Le concours pour le recrutement du groupe 41 (sections Jeu, Scénographie-Costumes, RégieTechniques du spectacle, Mise en scène, Dramaturgie) se déroulera de janvier à juin 2011.
Les dossiers d’inscription sont à déposer avant le 17 décembre 2010.
Dossier téléchargeable sur www.tns.fr
Renseignements : [email protected] • + 33 (0)3 88 24 88 59
Le programme complet des cours est également téléchargeable.
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Théâtre National de Strasbourg
Les Acteurs de bonne foi
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