
Une autre étiologie d’anovulation est l’insuffisance
ovarienne prématurée (IOP) ou le stade plus précoce qui
est celui de la faible réserve ovarienne en follicules. L’IOP
se définit classiquement par une aménorrhée de plus de
six mois avec des gonadotrophines élevées, supérieures à
40 mUI/mL. Sa prévalence est de 2 à 3 % dans la popu-
lation générale. Cette pathologie n’est pas synonyme de
ménopause précoce, car il peut exister une fluctuation de
la fonction ovarienne chez ces femmes, avec des phases
d’IOP et des phases de fonction ovarienne normale. Cette
pathologie est le plus souvent la conséquence de traite-
ments de chimiothérapie ou de radiothérapie, mais peut
être aussi d’origine génétique. En cas d’IOP, il peut exister
des anomalies du nombre ou de la structure du chromo-
some X [6]. Le cas le plus connu est celui du syndrome de
Turner, dans sa forme classique de monosomie X ou dans
des formes mosaïques 45X, 46XX ou des délétions de l’X.
Dans le syndrome de Turner, l’IOP est la conséquence
d’une apoptose accélérée des ovocytes, le plus souvent
avant la puberté [7]. Les différents cas de translocations
entre le chromosome X et les autosomes, et de délétions
ont permis d’identifier deux régions majeures, localisées
sur le bras long du chromosome X appelées POF1 pour
premature ovarian failure 1 et POF2. Ces deux régions
sont nécessaires au maintien du fonctionnement ovarien.
De plus, ces dernières années, plusieurs étiologies géné-
tiques ont été identifiées dans des cas d’IOP [6], avec des
gènes localisés soit sur le chromosome X, soit sur les auto-
somes. Sur l’X, un gène candidat est le gène FMR1
impliqué dans le syndrome de l’X fragile. Ce syndrome
est l’étiologie la plus fréquente de retard mental chez le
garçon. Il est en rapport avec une anomalie des triplets
CGG situés en amont du gène, localisé sur le bras long
du chromosome X. Un sujet normal possède moins de
60 triplets, un sujet prémuté de 60 à 200 et un sujet atteint
plus de 200 triplets. Les femmes prémutées ont un risque
d’IOP dix fois plus élevé que la population générale.
La prémutation de FMR1 est présente dans 3 % des cas
sporadiques et dans 13 % des cas familiaux d’IOP [8].
Il n’existe pas une corrélation directe entre le nombre de
triplets et l’IOP, mais la zone la plus à risque se situe entre
80 et 100 triplets. Certaines pathologies, comme le syn-
drome de tremblement et d’ataxie lié au syndrome de l’X
fragile (FXTAS), commencent à être décrites chez les
patientes avec une prémutation. L’autre gène candidat
du chromosome X impliqué dans le fonctionnement ova-
rien est le gène BMP15 (bone morphogenic protein 15), il
a été identifié comme muté initialement dans une race de
brebis, les brebis Inverdale. Les brebis hétérozygotes pour
la mutation sont hyperfertiles, et les brebis homozyogotes
sont infertiles par anomalie de la folliculogenèse. Plu-
sieurs cas de mutation de BMP15 ont été identifiés dans
l’espèce humaine [9, 10]. Sur les autosomes, à ce jour,
une dizaine de gènes différents ont été identifiés avec
des mutations dans de rares cas. Les principaux sont le
gène du récepteur de la FSH, le gène FOXL2 en cas de
malformation palpébrale, NOBOX,AIRE en cas d’auto-
immunité et GALT1 en cas de galactosémie.
Le caryotype est utile dans le bilan d’une IOP, car il
peut identifier des délétions de l’X, des translocations
entre le chromosome X et un autosome et des anomalies
de nombre du chromosome X. La monosomie X ou syn-
drome de Turner se manifeste le plus souvent par un
tableau clinique associant une petite taille, des anomalies
d’implantation des cheveux et des oreilles, un thorax en
bouclier et des anomalies cardiaques et/ou rénales.
Cependant, les formes mosaïques peuvent donner des
tableaux cliniques plus modérés avec, cependant dans
la majorité des cas, une petite taille. L’identification d’un
syndrome de Turner implique un bilan cardiovasculaire,
avec une mesure du diamètre aortique, avant d’autoriser
une grossesse spontanée exceptionnelle mais surtout
avant d’envisager un don d’ovocytes. En effet, le risque
de dissection aortique est élevé chez certaines patientes,
faisant suite à une dilatation aortique. L’Agence de bio-
médecine et le Collège national de gynécologie obsté-
trique français viennent de publier des recommandations
pour la prise en charge de l’infertilité de ces patientes
[11]. En cas d’IOP avec un caryotype normal, une analyse
moléculaire est utile pour évaluer le nombre de triplets de
FMR1. En effet, dans cette étiologie il peut exister, en cas
de prémutation, des fluctuations du fonctionnement ova-
rien avec la possibilité, lors d’une phase de récupération,
de l’obtention d’une grossesse et d’un enfant atteint de
syndrome de l’X fragile. À ce jour, il n’existe pas d’indi-
cation à une analyse génétique chez une patiente ayant
une mauvaise réponse ovarienne lors de tentative de sti-
mulations ovariennes appelées mauvaises répondeuses.
En 2009, en dehors des étiologies d’origine iatrogènes,
la cause de l’IOP est identifiée dans moins de 10 % des
cas. Des analyses pangénomiques sont en cours dans des
cas sporadiques et dans les familles avec plusieurs cas
d’IOP [12, 13], afin d’identifier de nouvelles régions et
donc de nouveaux gènes impliqués dans l’IOP.
Si l’anovulation n’est pas d’origine surrénalienne ni
ovarienne, elle peut être d’origine hypothalamohypophy-
saire. Plusieurs étiologies génétiques ont été identifiées
ces dernières années dans des cas d’hypogonadisme
hypogonadotrophique d’origine hypothalamohypophy-
saire. Ce diagnostic doit être évoqué surtout s’il existe
des cas dans la famille d’hypogonadisme, se manifestant
le plus souvent par un retard pubertaire. L’hypogona-
disme hypogonadotrophique congénital est évoqué chez
la femme soit devant une aménorrhée primaire, primose-
condaire, soit plus rarement devant une aménorrhée
secondaire. Les gonadotrophines sont normales ou bas-
ses, avec un estradiol bas. L’IRM hypophysaire est nor-
male, elle élimine un processus tumoral de la région
hypothalamohypophysaire. Il était classique de distinguer
les hypogonadismes hypogonadotrophiques avec ou sans
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 12, n° 1, janvier-février-mars 2010
Mini-revue
14
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 05/06/2017.