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NOTES SUR L'‘ACCUSATIF PRÉPOSITIONNEL’ EN SARDE1
RÉSUMÉ. — Cet article aborde la question de l’accusatif préposi-
tionnel en sarde (variété logoudorienne). Cette variété connaît,
comme bien d’autres langues, une stratégie de ‘marquage différen-
tiel’ qui repose sur le caractère plus ou moins individué du référent
auquel renvoie le SN en fonction d’objet. D’une manière plus spéci-
fique, l’article attire l’attention sur le rôle de l’opération de thémati-
sation et des phénomènes de cliticisation dans la genèse du mar-
quage de l’objet. Il montre en même temps que le choix du marquant
prépositionnel ‘a’ en sarde s’éclaire dès que l’on prend en compte sa
valeur spatiale originelle qui affleure également dans d’autres struc-
tures syntaxiques que connaît cette langue.
0. Le problème de la prédication recouvre un champ d’investiga-
tion immense qu’il n’est évidemment pas question d’étudier ici en
détail. L’objectif de cette contribution est d’une part de présenter les
données qu’offre le sarde au regard de problèmes qui mettent en jeu
l’actance, et surtout d’aborder certains aspects particuliers de cette
dernière. La question de l’accusatif prépositionnel est à cet égard
d’autant plus intéressante qu’en dépit d’une littérature abondante sur
la problématique générale du marquage de l’objet, elle n’a pas beau-
coup suscité l’intérêt des spécialistes du sarde. Rappelons qu’il s’agit
d’une construction qui, dans un certain nombre de contextes que nous
aurons l’occasion d’examiner, exige la présence de la préposition a
devant l’objet direct∞∞∞: d’où la désignation d’accusatif prépositionnel.
1. Certaines parties de cette étude ont fait l’objet de présentations orales aux Jour-
nées de Syntaxe organisées par l’ERSS (Bordeaux, 26-27 octobre 2001), et au Work-
shop Predicative Morphosyntax∞∞∞: parameters of Variation in Romance (Palerme, 23-
24 novembre 2001). Je tiens à remercier pour leurs commentaires et observations les
organisateurs et les participants de ces conférences, et en particulier Delia Bentley,
Ignazio Mirto, Claude Muller, Injoo Choi-Jonin et tout particulièrement Lucia
Molinu, que j’ai mis à contribution aussi bien comme linguiste que comme locuteur
natif∞∞∞; qu’elle soit ici remerciée, de même que mes informateurs du village de Bud-
dusò qui ont patiemment répondu à mes questions. Je dois enfin au Professeur Denis
Creissels des observations particulièrement éclairantes sur la problématique du mar-
quage différentiel∞∞∞; qu’il soit également assuré de ma plus vive reconnaissance.
Franck Floricic Bulletin de la Société de linguistique
de Paris, t. XCVIII (2003), fasc. 1, p. 247-303