2 LE DOSSIER DU JOUR Dimanche 5 Septembre 2010 www.laprovence.com Lapub misemoins surlefoot etsecherche denouveaux héros AprèsunMondialcatastrophique en terme d’image,la pub délaisse les footballeurs au profit d’autres starsdusport B eaux, grands, musclés, ils incarnent à merveille l’image de l’homme ou de la femme moderne, bien dans sa peau, bien dans sa tête. La publicité a compris depuis longtemps l’intérêt d’utiliser l’impact que peuvent avoir sur les consommateurs ces "esprits sains dans des corps sains". Les sportifs sont ainsi devenus, en quelques années, de véritables supports de communication, icônes médiatiques porteuses de messages divers et variés. Et même lorsque ces symboles volent en éclats comme ce fut le cas lors du Mondial de football en Afrique du Sud, avec des Bleus au comportement méprisable, l’univers de la pub s’adapte. Contournant volontiers l’indignation générale pour mettre en scène de nouveaux héros issus d’autres horizons. Montrés du doigt, stigmatisés pour leurs fautes répétées, les footballeurs cèdent aujourd’hui leur mainmise aux symboles d’un certain renouveau sportif. Ils sont nageurs à la silhouette impeccable, sprinter au visage angélique, pilote au sourire charmeur ou encore skipper au mo- Mondialistes : et maintenant ? Les bijoux du sport français se nomment Lacourt ou Lemaitre. ral d’acier... Tous vont apporter une dose de fraîcheur, d’originalité, dans un domaine où la suprématie du foot et ses dérives ont fini par plomber le moral des annonceurs. Le ballon rond amoindri, le sport reste néanmoins un excellent filon pour le développement des campagnes de publicité. Il en est ainsi depuis plus de trente ans, au moment où les ath- Ici, Drogba dans une pub pour Kaporal, immense affiche qui surplombe le bd de Plombière, à Marseille. Le foot fait toujours recette. lètes de haut niveau ont débarqué dans l’environnement de la publicité, pour s’associer aux marques et à leurs produits. Rapidement, ils en sont devenus des atouts en terme de communication. Derrière les Cerdan, Bobet et Anquetil, véritables pionniers en la matière, les premiers grands bénéficiaires du phénomène seront les footballeurs qui profi- LE COMMENTAIRE tent pleinement alors de l’exposition médiatique de leur discipline. Michel Platini, stratège de l’équipe de France vainqueur de l’Euro 1984, et Éric Cantona, premier footballeur français à tenter l’aventure outre-Manche, vont enchaîner les contrats. En 1998, l’équipe de France est championne du monde. L’impact est immense. Les héros investissent les écrans de télévi- sion, les pages des magazines et les murs des grandes villes. Zidane, Lizarazu, Desailly, Barthez, Henry... Les publicitaires se bousculent pour mettre en scène ces as du ballon rond, représentant une France qui gagne, une France "black, blanc, beur". Douze ans plus tard, les Bleus n’ont plus la cote et les publicitaire se tournent vers d’autres terrains pour y dégoter les person- de François GUYOT directeur général de l’agence-conseil "Sport Market" "Un sportif n’a des contrats publicitaires qu’au sommet de sa carrière" François Guyot est directeur général de "Sport Market", une agence parisienne qui conseille de gros annonceurs en matière de marketing sportif. Parmi ses clients, McDonald's, Renault ou Groupama, partenaire de l'OM. ❚ La Coupe du monde ratée des Bleus a-t-elle entraîné un désamour des annonceurs ? Il y a beaucoup d’interrogations autour de ce sport mais il reste numéro un en termes de visibilité et de capacité à toucher un public le plus large possible. Aucun partenaire important n’a annoncé son retrait. Les investissements se font sur plusieurs années et toute décision se réfléchit mûrement. Il y a maintenant un gros travail à mener en terme d’image, associant la fédération, les clubs et les spectateurs, pour que le foot conserve tous ses sponsors et en gagne d’autres. ❚ Le nombre de contrats d’un sportif est-il lié aux résultats sur le terrain ? Il est d'abord lié à la notoriété, donc souvent aux résultats qui génèrent cette notoriété. Mais il faut aussi compter avec le physique du sportif, son aisance devant les médias et son attitude hors des terrains. Yannick Noah a arrêté la compétition depuis longtemps, mais sa reconversion dans la musique plaît aux Français et en font un "sportif" très populaire. En natation, Alain Bernard n'est pas le seul à obtenir de bons résultats mais son charisme naturel renforce son attrait auprès des annonceurs. Fabien Barthez, avec lequel j'ai beaucoup travaillé, n'est pas particulièrement extraverti. Pourtant, la campagne réali- de la pub ? C’est souvent une question de disponibilité : ils doivent être libres un à deux jours pour tourner une publicité et faire des photos. La plupart des marques veulent exploiter l’athlète en le faisant rencontrer leurs meilleurs clients ou en l’invitant à leur siège pour récompenser leurs salariés, sans oublier les séances de dédicace et les présences dans les points de vente. Pour un sportif qui n’a que 4 semaines de vacances dans l’année, ce n’est pas toujours possible. Les plus demandés essaient de réduire le nombre de contrats à 4 ou 5. Pour ce spécialiste, "le foot reste numéro un en terme de visibilité". / PHOTO DR sée il y a quelques années pour McDo avait très bien marché, parce qu'il avait été utilisé dans son rôle et non à contre-emploi : son côté naïf et insouciant se combinait très bien avec les valeurs de la marque. ❚ Combien dure une carrière publicitaire ? Rarement très longtemps. Si l’on excepte Thierry Henry et surtout Zinedine Zidane, un sportif n’a des contrats qu’au sommet de sa carrière : Tony Parker ou Laure Manaudou ont mis 3 ou 4 ans avant de figurer parmi les dix sportifs les mieux cotés en France. Même en réalisant de grosses performances, un jeune champion doit souvent attendre tout ce temps pour attirer les annonceurs. ❚ Certains champions refusent-ils de faire ❚ Certains sports sont-ils invendables auprès des annonceurs ? Tous ceux dont la notoriété est extrêmement faible mais aussi ceux qui posent un problème de valeurs comme les sports de combat, à l’exception du judo, toujours apprécié. L’athlétisme est moins médiatisé que le foot mais Christophe Lemaître a un potentiel publicitaire énorme, s’il confirme ses performances. ❚ La pub rapporte-t-elle beaucoup d’argent aux sportifs ? Une dizaine d'entre eux peuvent prétendre à des contrats annuels atteignant le million d'euros, pour des campagnes internationales. Trois Français font partie de ce club très privé : Zidane, Henry et Manaudou, aux côtés de Roger Federer, Tiger Woods ou David Beckham. Ces sportifs les mieux payés peuvent accepter des sommes plus légères si l'annonceur est une marque de jeu vidéo : être sur la jaquette du prochain "Electronic Arts" va augmenter la notoriété et générer d'autres contrats. P.Mg. / M. ZIZZO nalités "positives" dont raffolent les annonceurs. Aujourd’hui, les bijoux du sport français se nomment Camille Lacourt ou Christophe Lemaitre. Et si, à terme, le football devrait retrouver une place dorée, porté notamment par l’intemporel Zinedine Zidane, c’est une véritable aubaine pour ces nouvelles stars... La scène surréaliste des 23 footballeurs français dans le bus de Knysna, en Afrique du Sud, refusant de s’entraîner, dépasse le cadre purement sportif. Si, à court terme, cette mutinerie a précipité l’élimination de l’équipe de France du Mondial, elle a aussi causé des torts importants en terme d’image. Le premier fusible à avoir sauté n’est autre que Nicolas Anelka. Adulé en Angleterre, où il fait les beaux jours de Chelsea, l’attaquant a directement subi le contrecoup en France de son dérapage verbal envers Raymond Domenech. Les nouveaux annonceurs ne se précipiteront pas à leur porte L’un de ses partenaires, Quick, n’a pas hésité à stopper net sa campagne publicitaire mettant en scène l’ex-idôle du PSG. Si les autres grévistes, et notamment ceux reconnus comme responsables du mouvement (Ribéry, Gallas, Evra, Toulalan), n’ont pas encore subi les conséquences sur leurs contrats publicitaires actuels, nul doute que de nouveaux annonceurs ne se précipiteront pas à leur porte pour en faire l’égérie de leur marque. Être Zidane n’est pas à la portée de tous. Adopter son humilité d’après tort, non plus. Sa présence à Clairefontaine, cette semaine, pour sensibiliser les nouveaux aux devoirs de l’équipe de France pourrait être profitable à tous. A.V. Arnaud VITALIS Zinedine Zidane, l’icône française intemporelle Generali Assurances, Volvic, Adidas, Danone, Dior, Pétrolane, Grand Optical, Ford, Dior, Leader Price... N’en jetez plus, la coupe est pleine ! Annuellement, Zinedine Zidane perçoit près de 7 millions d’euros en contrats publicitaires. Lorsqu’il jouait encore, ce pactole représentait près de 45 % de ses revenus globaux. Rendu célèbre par son doublé de ble, proche de leurs problèmes. Sa retraite sportive ou son coup de tête sur l’Italien Marco Materazzi, en finale de la Coupe du monde 2006, auraient pu changer la donne. Sûrement pas. Zidane est un sportif intemporel, une véritable marque qui traverse le temps et garde son aura bien au-delà des contours figés d’une carrière sportive. Pour / GUILLAUME RUOPPOLO la tête en finale de la coupe du monde 1998, "Zizou", icône planétaire, amasse les contrats publicitaires comme il a accumulé les passes décisives sur un terrain. À ce jour, le Marseillais est le footballeur français de tous les temps qui a le plus gagné d’argent en revenus dérivés. Technicien hors du commun, teinté d’une modestie légendaire, il représente le modèle absolu du sportif "positif". Un profil très prisé par les annonceurs français. Son discours parle aux consommateurs, qui voient en lui un homme simple, accessi- preuve, quatre ans après son retrait des terrains, il se place en deuxième position dans le classement 2010 des personnalités préférées des Français. Le Marseillais arrive en terme de popularité juste derrière Yannick Noah, autre modèle de belle réussite post-sportive. Si, aujourd’hui, la dérive du football français menace les stars contemporaines, ZZ, pour sa part, ne connaît aucun problème. Mieux, il continue à séduire les grandes marques prêtes à investir des fortunes pour être associées à son image... A.V.