La lutte anti-vectorielle et la prévention des maladies à transmission vectorielle Contribution de sciences humaines et sociales Jocelyn Raude Maître de conférences Sorbonne Paris Cité Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique Département des sciences humaines et sociales [email protected] L’équipe d’experts de l’EHESP Michèle Legeas : Micro-biologiste, professeur au Département Environnement-Santé-Travail. Bertrand Parent : Communication de crise, professeur à l’Institut du Management. Jocelyn Raude : Sociologie de la santé, Maître de conférences au Département des sciences humaines, sociales et des comportements de santé. Josselin Thuilliez : Economie de la santé, Chargé de recherche au CNRS. Bernard Tirel : Droit de la santé, professeur au Département des sciences humaines, sociales et des comportements de santé. Les principales approches en SHS On peut distinguer deux principales approches des questions de prévention/LAV en sciences sociales : Les approches politiques (ou « descendantes »): elles mettent l’accent sur les jeux d’acteurs institutionnels et sur les processus de négociation qui aboutissent à une définition des contenus des politiques publiques. Les approches populationnelles (ou « ascendantes ») : elles mettent l’accent sur les systèmes de pensées et de pratiques construits autour de la santé et la maladie, ainsi que leur variabilité socio-économique et socio-culturelle. La contribution des SHS au CNEV La faisabilité des programmes de prévention/LAV: Quels sont les droits et obligations des usagers et des opérateurs de la LAV ? Quelles sont les dispositions légales et réglementaires qui peuvent ou doivent être mises en œuvre dans le cadre de ces programmes. L’efficacité des programmes de prévention/LAV, notamment à travers l’évaluation socio-économique : quels ont été les coûts et les bénéfices de ces programmes de prévention/LAV ? L’acceptabilité sociale des programmes de prévention/LAV : Comment ces programmes sont-ils perçus par les populations ? Pourquoi les usagers/citoyens appliquent-ils (ou non) les recommandations des pouvoirs publics ? L’épidémiologie profane : une définition Pour Frankel et al (1991) et Davidson et al (1991), l’épidémiologie profane désigne respectivement : « les schémas d’intelligibilité par lesquels les individus interprètent les risques pour leur santé, à travers des observations de routine et/ou la discussion de cas de maladie ou de décès dans leur réseau personnel, mais aussi dans la sphère publique notamment via les médias.» « les processus sociocognitifs à travers lesquels les gens ordinaires donnent un sens, comprennent et interprètent les menaces pour leur santé ». Les grandes questions de recherche Quels sont les modèles d’explication profanes de ces maladies disponibles sur le « marché » cognitif ? Les représentations mentales de la maladie orientent-elles les stratégies de prévention profane ? Comment les campagnes d’information interagissent-elles avec les modèles d’explication profane ? Les systèmes de valeurs et les visions du monde affectentils la sélection des modèles d’explication de la maladie ? Les stratégies de prévention profane sont-elles sujettes aux mécanismes d’influence sociale ? Les modèles d’explication de la maladie En métropole, les modèles d’explication profanes des maladies vectorielles se situent généralement entre deux « grands » types d’explications idéal-typiques : Les approches en termes d’interactions entre des hôtes humains et des vecteurs « animaux » : ► Les insectes piquent des personnes infectées et s’infectent, piquent ensuite des personnes « saines » qu’ils infectent, et ainsi de suite... Les approches en termes de « génération spontanée » : ► Dans certaines conditions environnementales favorables, les insectes développent des maladies qu’ils transmettent ensuite à l’homme. Les représentations du Chikungunya La théorie vectorielle “concurrencée” par la théorie des miasmes ? Les grandes questions de recherche Quels sont les modèles d’explication profanes de ces maladies disponibles sur le marché cognitif ? Les représentations mentales de la maladie oriententelles les stratégies de prévention profane ? Comment les campagnes d’informations interagissent-elles avec les modèles d’explication profane ? Les systèmes de valeurs et les visions du monde affectentils la sélection des modèles d’explication de la maladie ? Les stratégies de prévention profane sont-elles sujettes aux mécanismes d’influence sociale ? Les dimensions des représentations de la maladie Les travaux précurseurs de Leventhal sur les représentations cognitives de la maladie montrent que ces dernières s’organisent autour de 5 dimensions structurantes : Une identité : un ensemble de symptômes ou signes cliniques qui caractérisent une maladie. Une étiologie : une ou plusieurs causes qui permettent d’expliquer les symptômes observés. Un ensemble de conséquences : sur le plan biologique mais aussi social (ex: perte d’autonomie ou stigmatisation). Une temporalité : l’affection est-elle chronique ou aigüe ? Une contrôlabilité : la maladie peut-elle traitée ou évitée ? Les déterminants cognitifs des infections à arbovirus dans l’Océan Indien Les grandes questions de recherche Quels sont les modèles d’explication profanes de ces maladies disponibles sur le marché cognitif ? Les représentations mentales de la maladie orientent-elles les stratégies de prévention profane ? Comment les campagnes d’informations interagissentelles avec les modèles d’explication profane ? Les systèmes de valeurs et les visions du monde affectentils la sélection des modèles d’explication de la maladie ? Les stratégies de prévention profane sont-elles sujettes aux mécanismes d’influence sociale ? Les « trajectoires » de l’information médicale Les travaux classiques en sociologie et en psychologie cognitive tendent à montrer que toute information interagit avec des systèmes de représentations pré-existantes : Assimilation : l’information est incorporée dans le système de représentations sans altération notable. Hybridation : une partie de l’information est incorporée avec un certain nombre de modification (notamment via des processus d’ancrage qui peuvent donner lieu à des « transferts de propriétés illégitimes »). Rejet : l’information n’est pas compatible avec le système de représentation (et sera considérée pour cela comme erronée, non-fiable ou non-représentative). Les grandes questions de recherche Quels sont les modèles d’explication profanes de ces maladies disponibles sur le marché cognitif ? Les représentations mentales de la maladie orientent-elles les stratégies de prévention profane ? Comment les campagnes d’informations interagissent-elles avec les modèles d’explication profane ? Les systèmes de valeurs et les visions du monde affectent-ils la sélection des modèles d’explication de la maladie ? Les stratégies de prévention profane sont-elles sujettes aux mécanismes d’influence sociale ? Les causes proximales et distales de l’infection Les grandes questions de recherche Quels sont les modèles d’explication profanes de ces maladies disponibles sur le marché cognitif ? Les représentations mentales de la maladie orientent-elles les stratégies de prévention profane ? Comment les campagnes d’informations interagissent-elles avec les modèles d’explication profane ? Les systèmes de valeurs et les visions du monde affectentils la sélection des modèles d’explication de la maladie ? Les stratégies de prévention profane sont-elles sensibles aux mécanismes d’influence sociale ? Les déterminants de la vaccination Résultats des analyses de régression logistique Les enjeux de la lutte communautaire Comment nos concitoyens (métropolitains) se représentent-ils et réagissent-ils face aux risques d’infection à arbovirus, ainsi qu’aux enjeux environnementaux et comportementaux qui leur sont associés ? Comment ces représentations et ces conduites collectives vontelles se construire, se diffuser, se structurer, se distribuer et se modifier dans les territoires exposés ? Quelles sont les actions qui peuvent être mises en œuvre pour favoriser le développement de comportement de prévention primaire et tertiaire ? Quel rôle les professionnels de la santé et de la LAV peuvent-ils jouer dans la promotion de la lutte communautaire ?