dynamiques de sauvegarde et de transmission de l`occitan

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Pré­rapport d'allocation de formation et de recherche du ministère de la culture
Organisme support de la recherche : Fédération Régionale des Calandretas de Midi­Pyrénées
La langue comme patrimoine : dynamiques de sauvegarde et de transmission de l'occitan
Maria Vernières­Busson
Doctorante au LISST ­ Centre d'Anthropologie Sociale
Université Toulouse 2 Le Mirail
Février 2014 1
Sommaire
Avant propos.........................................................................................................................................3
Introduction..........................................................................................................................................4
La (non) transmission intergénérationnelle de l'occitan.......................................................................9
Un projet intergénérationnel dans le Tarn......................................................................................10
« Occitaniser » les maisons de retraite......................................................................................12
La fête intergénérationnelle de Monestiés................................................................................16
Une pluralité de rapports à la langue minorisée........................................................................17
Rencontres intergénérationnelles entre Calandrons et résident-e-s de maisons de retraite...........19
La langue au cœur d'un autrefois mis en spectacle...................................................................19
Du patois à l'occitan .................................................................................................................21
Conclusion .........................................................................................................................................24
Bibliographie......................................................................................................................................25
Travaux..........................................................................................................................................25
Sources...........................................................................................................................................29
Annexes..............................................................................................................................................30
Annexe 1 : Carte de l'Occitanie.....................................................................................................30
Annexe 2 : Carte des écoles Calandretas.......................................................................................31
Annexe 3 : Légende créée pour le spectacle intergénérationnel de Monestiés..............................32
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Avant propos
Ce pré­rapport présente une étape de mon travail de recherche sur la patrimonialisation des langues minorisées, qui a pu être mené grâce à une allocation de formation et de recherche de la direction générale des patrimoines du ministère de la culture et de la communication. Cette recherche s'intègre dans un travail de thèse sur les usages volontaires de l'occitan et les dynamiques de transmission des langues minorisées.
Je tiens à remercier vivement la direction générale des patrimoines pour son soutien financier, qui représente une aide considérable pour mener à bien ce projet de recherche et mon parcours de doctorat.
Ma recherche, s'inscrivant dans une démarche de recherche­action, s'ancre dans une collaboration étroite avec la Fédération Régionale des Calandretas de Midi­Pyrénées, et notamment avec Myriam Bras, coprésidente de la Fédération, que je remercie ici chaleureusement.
Enfin, je tiens à remercier Yvon Hamon, conseiller à l'ethnologie à la DRAC Midi­Pyrénées pour ses conseils et ses encouragements ; ainsi que ma directrice de thèse Galia Valtchinova et mon tuteur Dominique Blanc pour leur précieux accompagnement.
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Introduction
Cette étude, menée dans le cadre de l'allocation de formation et de recherche du Ministère de la culture et de la communication, s'intéresse aux modalités de sauvegarde et de transmission du patrimoine culturel immatériel à partir de l'exemple de la langue occitane1. Il s'agira de questionner le fonctionnement de ses usages actuels à travers les politiques publiques valorisant les dimensions patrimoniale et intergénérationnelle de cette langue et les projets visant à faire se rencontrer locuteurs occitanophones et néo­apprenants.
La langue occitane est marquée par une rupture de sa transmission au sein des cellules familiales ­ engendrant un affaiblissement de sa fonction communicationnelle ­ et par un regain d'attrait ces dernières années au titre de la préservation et de la valorisation d'un patrimoine régional. D'une part, on observe l'émergence et le développement de la signalétique bilingue français/occitan dans l'espace public, comme dans le métro toulousain, l'usage de mots occitans dans le marketing, telles que la « tchatche toulousaine » par un centre commercial2 et la valorisation de produits et services par la création du label Òc per l'occitan3. D'autre part, on assiste au foisonnement des écoles bilingues français/occitan et à l'expansion des Calandretas4. Si les actions de sauvegarde et de promotion de la langue occitane ont longtemps été menées par des acteurs militants du milieu associatif, ces actions sont aujourd'hui encadrées par des politiques linguistiques locales. L'usage de l'occitan, longtemps exclu de l'école, cantonné à l'espace domestique, voit son usage encouragé aujourd'hui au sein d'institutions et de réseaux du domaine de la vie publique. Les représentations sociales de la langue occitane sont passées d'un ''patois'', majoritaire dans l'usage populaire, mais perçu comme obstacle à l'unité de la Nation et à son 1
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L'Occitan, ou langue(s) d'oc, dont la dénomination fait encore débat, appartient à la famille des langues romanes. Le territoire tel qu'il est défini sous le nom d'Occitanie s'étend sur 32 départements du Sud de la France, 12 vallées des Alpes Piémontaises en Italie, et le Val d’Aran en Espagne. Voir en annexe 1 la carte de l'Occitanie. L'atlas des langues en danger de l'UNESCO classe les dialectes gascon et vivaro­alpin comme étant en danger (« les enfants n'apprennent plus la langue comme langue maternelle à la maison ») et les dialectes auvergnat, languedocien, limousin et provençal comme sérieusement en danger (« la langue est parlée par les grands­parents ; alors que la génération des parents peut la comprendre, ils ne la parlent pas entre eux ou avec les enfants »). Source : site de l'UNESCO
http://www.unesco.org/new/fr/culture/themes/endangered­languages/atlas­of­languages­in­danger/. Consulté le 14 février 2014.
Comment tchatcher toulousain ? Dictionnaire du {parler toulousain}, 2010, Centre commercial Labège 2.
Lancé en 2007, le label se décline en 8 domaines d'usages de l'occitan : commerce, producteurs et éleveurs, culture, enseignement privé, services, tourisme et hébergement, politique et collectivités, et en 3 niveaux : « ici on aime l'occitan », « ici on parle occitan » et « ici l'occitan est partout ».
Écoles associatives occitanes. La première Calandreta a été créée à Pau en 1979 ; aujourd'hui, 58 écoles et 3 collèges s’étendent sur 18 départements du territoire occitan.
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émancipation, à une langue transmise hors du cadre familial, valorisée au titre d'une promotion européenne des « langues régionales »5.
Plus largement, un regain d'attrait pour les langues minorisées se trouve pris au sein d'une pluralité de discours : sauvegarde de la biodiversité6, valorisation du patrimoine immatériel, de la mixité culturelle ou encore, revendications identitaires. Le 22 mai 2008, l'adoption de l'Article 75­1 dans la Constitution française : « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » marque une reconnaissance par l'Assemblée Nationale des langues dites régionales7.
Un article de Christian Bomberger et Mireille Meyer8 fait état du débat français sur la « culture régionale » : « Tantôt celle­ci se réfère à des habitudes singulières, qui effleurent à peine la conscience et ne font l'objet d'aucune revendication [...] tantôt [elle] désigne un ensemble de pratiques territorialisées promues volontairement au rang d'emblèmes [...] Il s'agit là d'une culture choisie, représentée, exposée. ». Les auteurs ajoutent que l'emblème majeur de la revendication régionale est la langue, sa sauvegarde et sa promotion. La fonction de la langue n'est pas alors d'assurer la communication mais « d'exprimer une adhésion affective ou un souci patrimonial ». L'apprentissage volontaire de l'idiome local est significatif de cette promotion de la langue « en moyen de reconnaissance » et c'est paradoxalement au moment où ces identités s'affaiblissent qu'elles s'affirment le plus éloquemment. La question de la transmission de ces langues entre les générations est au centre des mobilisations et actions collectives militantes. Un numéro de la revue Terrain a été consacré à la question de la transmission en anthropologie. David Berliner 9 définit cette notion comme le « processus consistant à ''faire passer quelque chose à quelqu'un'' 10 qui contribue à la persistance, TERRAL H., 2005, La langue d'oc devant l'école (1789­1951), entre lutte et répression, la place accordée à l'occitan dans l'enseignement (textes choisis), Puylaurens, Institut d'estudis occitans, 347p.
6 Pour exemple, un article de presse qui croise la rhétorique de la perte culturelle avec celle de la biodiversité : « Il n'y a pas que le tigre et l'outarde canepetière qui sont menacées d'extinction. 8,4 % des langues encore entendues sur la planète sont vouées à la disparition, 17 % sont en danger et près de 9 % sont jugées "vulnérables", selon le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE).[...]. "Les secrets de la nature, contenus dans les chansons, les contes, l'art et l'artisanat des peuples indigènes, peuvent se perdre à jamais, à cause de la mondialisation croissante dans tous les domaines", expliquait alors un groupe d'experts mandatés par le PNUE. »
BARROUX R., « La planète perd ses langues », Le Monde, 7 juin 2012. Consulté en ligne sur le site Le Monde.fr : http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/06/07/la­planete­perd­ses­langues
7 DELAHOUSSE Bernard, HAMEZ Marie­Pascale, « Éditorial », Revue Langues Modernes de l'APVL, n°4/2010, « Enseigner une langue régionale ».
8 BROMBERGER C., MEYER M., 2003, « Cultures régionales en débat », Ethnologie française, n°33, 2003/3, pp.357­361.
9 BERLINER D., 2010, « Anthropologie et transmission », Terrain n°55, septembre 2010, pp.4­19.
10 TREPS, 2000, cité in BERLINER D., 2010, « Anthropologie et transmission », Terrain n°55, septembre 2010, pp.4­
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souvent transformées, de représentations, de pratiques, d'émotions et d'institutions dans le présent »11. Il constate le développement d'un discours de « crise de la transmission », et pointe les valeurs tant individuelles que politiques de la transmission, dont l'intention serait une affirmation identitaire « dans un contexte perçu comme mondialisé et déracinant ». Des écoles associatives occitanes sont nées d'une volonté de pallier à l’absence de transmission linguistique au sein des familles. C'est en 1979 que la première association Calandreta voit le jour, à Pau ; suivie de celles de Toulouse et de Béziers en 1980 et 1981. Elles sont créées à l'initiative de militant­e­s de la langue occitane, d'enseignant­e­s et de parents défendant la pédagogie Freinet. C'est autour de l'objectif de revitalisation de la langue et de la culture occitanes que ces acteurs se réunissent. Le nom « Calandreta », mot occitan, désigne une alouette, mais aussi un apprenti12 ; symbolisant le renouveau de la langue. Ces écoles mettent en œuvre une pédagogie immersive qui vise, par la création dès la maternelle d'un bain linguistique, à un bilinguisme précoce français­occitan : tous les enseignements, hormis celui du français, se font en occitan. Elles s'étendent aujourd'hui sur tout le territoire occitan, de la Gironde aux Hautes­Alpes, en passant par l'Ariège et la Haute­Vienne.13 Depuis 1994, elles ont un statut d'écoles associatives sous contrat d'association avec l'État ; les programmes sont ainsi identiques à ceux définis par l'Éducation Nationale. Du fait de la situation de forte minorisation de l'occitan, ces écoles s'adressent très majoritairement à des familles ne parlant pas occitan et aux provenances géoculturelles plurielles, ne détenant pas elles­mêmes les savoirs culturels transmis au sein de l'école. La langue maternelle des Calandrons14 est donc le français, ils apprennent l'occitan au cours de leur scolarité, qui tend à devenir la langue de l'école et de la relation aux enseignant­e­s15. Dans ce contexte de transmission volontaire, hors de toute transmission ''naturelle'' au sein des familles, le recours aux ''rencontres intergénérationnelles'' entre locuteurs vieillissants dont l'occitan est la langue maternelle et Calandrons devient un enjeux central et est présenté comme un ''remède'' aux dysfonctionnements du projet de revitalisation16.
11 OLÜK et ROBBINS, 1998, cité in BERLINER D., 2010, « Anthropologie et transmission », Terrain n°55, septembre 2010, pp.4­19.
12 Source : site officiel de la Confédération occitane des écoles laïques Calandretas http://www.calandreta.org
13 Voir en annexe 1 la carte de l'Occitanie et en annexe 2 celle des écoles Calandretas.
14 Les Calandrons sont les élèves des écoles Calandretas
15 VERNIERES M., 2012, Lenga de l'ostal o lenga de l'escòla. Les usages volontaires de l'occitan dans les écoles bilingues et maisons de retraite, mémoire de master d'anthropologie sociale et historique, sous la direction de Jean­
Pierre Albert, EHESS, Toulouse, 128p.
16 Au sujet des effets de l'enseignement immersif en terme de resocialisation de la langue, voir DOMPMARTIN­
NORMAND C., 2002, « Collégiens issus de Calandreta : quelles représentations de l'Occitan », Langage et société, 6
Ainsi ce rapport sera centré sur l'étude du fonctionnement de projets intergénérationnels. Car ces projets intergénérationnels impulsés par des politiques publiques et des actions militantes nécessitent d'être éclairés par des travaux scientifiques. Le recours à la « rencontre intergénérationnelle » comme solution à tous les problèmes posés par la non­transmission « naturelle » de la langue mérite d'être analysé. C'est pourquoi cette recherche s'inscrit dans une démarche de recherche­action, en collaboration avec la Fédération Régionale des Calandretas de Midi­Pyrénées. En effet, la situation de minorisation linguistique entraîne des rapports complexes à la langue chez les différents locuteurs, et les projets faisant se rencontrer Calandrons et résident­e­s occitanophones des maisons de retraite demandent l'instauration de dispositifs prenant en compte les spécificités de cette situation linguistique. Les changements de statut de l'occitan et sa valorisation récente sous un abord patrimonial donnent lieu à des modalités nouvelles de transmission. Ils s'agira ici d'étudier comment ces nouvelles modalités de transmission et ces rapports complexes à la langue se traduisent dans les projets mis en place. Que nous apprennent­ils des usages de cette langue minorisée ? Je me suis appuyée au cours de cette recherche sur des méthodes qualitatives : observations directes et entretiens, ainsi que sur l'analyse de sources documentaires. L'utilisation de la bourse m'a permis, à l'étape actuelle de cette recherche, de mener des enquêtes de terrain dans le département du Tarn afin de suivre de bout en bout l'évolution de projets d'introduction volontaire de l'occitan en maisons de retraite. Elle a donné lieu à un travail de terrain approfondi dans la commune de Monestiés, où j'ai pu réaliser des observations de groupes de parole en occitan et de différentes fêtes et rencontres autour du projet, des entretiens avec les personnels des EHPAD et les professionnels militants d'associations occitanes. D'autre part un autre terrain, toujours dans le Tarn, consiste en un suivi, sur une année scolaire, de rencontres intergénérationnelles entre Calandrons et résident­e­s de maisons de retraite dans la ville de Castres. Ce pré­rapport de recherche représente une première étape du travail engagé grâce au financement alloué en 2013 par le Ministère de la Culture et de la Communication. Durant les neuf mois imparti, j'ai centré ma recherche sur la question de la transmission intergénérationnelle au cœur des préoccupations des Calandretas. L'objectif était la production d'un travail qui puisse réellement présenter une utilité pour le partenaire, demandeur d'éclairages scientifiques concernant 2002/3, n°101, pp.35­54, et BOYER H. (dir.), 2006, De l'école occitane à l'enseignement public : vécu et représentations sociolinguistiques, une enquête auprès d'un groupe d'ex­Calandrons, Paris, L'harmattan, 162p.
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les effets des projets qu'il met en place. Mes investigations de terrain vont se poursuivre, l'année scolaire n'étant pas terminée, le but étant d'observer de bout à bout une année scolaire complète. Ces nouvelles observations vont nourrir ma réflexion et enrichiront le rapport final.
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La (non) transmission intergénérationnelle de l'occitan
Les usages de la notion « d'intergénération » dans les discours portés par les politiques linguistiques posent question : réunion autour d'un patrimoine et d'une histoire commune, création de lien social, solution à la rupture de transmission, bienfaits du bilinguisme, les projets intergénérationnels tels qu'ils sont définis par les politiques linguistiques oscillent entre plusieurs discours. Quelles représentations de la langue et de ces locuteurs sont véhiculées à travers ces discours ? À quels enjeux renvoie cette notion ''d'intergénérationnel'' et comment s'impose t­elle dans ce contexte de minorisation linguistique ?
Le Conseil Général du Tarn mène activement une politique de valorisation de la langue et de la culture occitanes, qui recouvre aujourd'hui les domaines de l'enseignement et du bilinguisme, du développement économique et du tourisme culturel, de la création artistique et de la solidarité intergénérationnelle. Ce dernier axe encourage l'utilisation de l'occitan en tant qu'atout thérapeutique et relationnel auprès des personnes âgées, ainsi que la transmission linguistique et culturelle entre les générations. Il fait écho à une opération, nommée « Lenga de casa17 » initiée en 2008 par le Département des Hautes­Pyrénées, qui a consisté en une expérimentation de l'utilisation de l'occitan en EHPAD18. D'une durée de six mois, cette opération comportait deux volets : l'animation de ''groupes de parole'' auprès des résident­e­s occitanophones, menés par des animatrices de l'association Parlem ! ; et une formation linguistique à destination du personnel des EHPAD. À l'issue de la formation des personnels, un livret, lo Catalòg de situacions de comunicacion dab los residents 19, a été réalisé par le Centre d'Étude des Langues. Le Département des Hautes­Pyrénées, soutenu par la Région Midi­Pyrénées, a commandé au LISST ­ Centre d'Anthropologie Sociale de l'Université Toulouse 2 Le Mirail une enquête évaluative20 qui s'est déroulée en 2012 et à laquelle j'ai participé.
Suite à l'enquête évaluative des Hautes­Pyrénées, dont la valorisation des résultats se poursuit, j'observe le développement et l'évolution des projets d'utilisation de l'occitan auprès des personnes âgées dans le Département du Tarn, et tout particulièrement dans la commune de Monestiés, où un projet intergénérationnel pilote est mené.
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Langue de la maison
Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes.
Catalogue de situations de communication avec les résidents.
Dirigée par Dominique Blanc, l'enquête a donné lieu à la parution d'un rapport : BLANC D., VERNIERES­
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Un projet intergénérationnel dans le Tarn
Le village de Monestiés est situé sur un chemin secondaire de Saint Jacques de Compostelle. Ancien pôle attractif, l'activité économique du village est en déclin. Il subit les conséquences de l'exode rural, amplifiées par la fermeture des mines de charbon de Carmaux, de l'après­guerre au début des années 1990. Depuis peu, le village se reconvertit en développant des activités touristiques : valorisation de la chapelle St Jacques ornée de statues du XVème siècle, de l'architecture du village, promenades en âne rappelant le commerce de jadis, sentiers botaniques sur les bords du Cérou... les ressources historiques du village sont valorisées et deviennent les atouts de sa reconversion. Une association « Monestiés Village Qualité », liée à la Commune, mène ainsi des projets visant tant à valoriser le village et son activité touristique qu'à améliorer la vie des habitants : ouverture d'une médiathèque, expositions, organisation de concerts à la chapelle abritant les statues.... En 2001, le village est classé parmi les « Plus beaux villages de France » . Une des premières sections bilingue français­occitan du département est ouverte à l'école publique. L'association s'attache à créer des projets où les liens entre passé et avenir sont le dénominateur commun. L'occitan est le fil rouge de ces différents projets, axe rappelant au village sa continuité au­delà des changements traversés. C'est dans ce contexte que l'association M.V.Q.21, en partenariat avec le Département se saisit des échos de l'opération « lenga de casa » des Hautes­Pyrénées et initie un projet se voulant intergénérationnel. Dans le Tarn, ce projet fait suite à un projet précédent à destination des enfants de l'école bilingue autour de la musique et de la langue occitanes. Se construit ainsi une collaboration entre la Commune de Monestiés, l'Inspection Académique, l'A.D.D.A.22 et l'I.E.O.23 du Tarn, dans un contexte favorable au niveau départemental, avec une « politique qui s'installe et grandit, politique de visibilité de la langue occitane, à tout niveau et à tous endroits »24. En effet, le « Schéma Départemental de Développement de l'Occitan 2012­2018 » vise à « rendre accessible à tous les Tarnais le riche patrimoine culturel occitan qui est le leur. Il invite chaque citoyen à découvrir les atouts cognitifs, culturels, thérapeutiques et économiques qui résident dans la langue occitane. Il donne également du sens au territoire tarnais en réhabilitant 21
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Monestiés Village Qualité.
Association Départementale pour le Développement des Arts.
Institut d'Études Occitanes
Employée de l'IEO du Tarn chargée du projet, entretien.
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son histoire et sa culture singulières »25. Le premier chapitre de la partie 3 est intitulé « L’Occitan, une passerelle intergénérationnelle source d'atouts cognitifs et thérapeutiques ». On retrouve là la dimension intergénérationnelle de l'occitan, comme média permettant d'assurer un lien entre les aînés et les nouvelles générations.
« Les apports thérapeutiques de l’occitan chez les personnes âgées : 33 % des tarnais ont plus de 60 ans et 10% dépassent les 75 ans : le Département doit faire face aux défis causés par le vieillissement de sa population. Or, la majorité des personnes âgées tarnaises entretient une relation affective particulière avec la langue occitane. Leur offrir la possibilité de dialoguer et bénéficier d’animations en occitan contribue à l’amélioration de leur qualité de vie. En outre, les récentes études médicales ont révélé que l’utilisation de la langue régionale avait des vertus thérapeutiques dans la prise en charge des aînés : •
Aide à la prise de contact et crée une proximité facilitant les soins et les échanges ; •
Perçu comme un élément relevant de l’intime, l’occitan instaure une complicité entre le soignant et le soigné qui se voient différemment. •
Dédramatise les situations délicates et contribue à dénouer des situations difficiles telles que les crises d’agitation ou l’isolement. •
Donne un sentiment d’utilité à la personne âgée qui se retrouve en position «d’enseignant» de la langue et non plus uniquement en situation de patient. L’aîné reprend son rôle naturel de transmetteur de savoir aux plus jeunes. »26
Est ici énoncée une appréhension de la personne vieillissante comme détentrice de savoir plutôt que comme dépendante, avec une fonction de transmission conçue comme « naturelle ». Comment fonctionne l'introduction volontariste de l'occitan en maison de retraite ? Cette initiative s'enracine dans des pratiques informelles de soignants, et prennent sens et sont valorisées par les politiques publiques et l'action militante d'élus, d'associatifs et de professionnels. Et c'est bien sur une certaine représentation du locuteur occitanophone vieillissant et de son rôle dans une chaîne de transmission pensée comme naturelle que les projets se construisent.
Conseil Général du Tarn, « Schéma Départemental de Développement de l'Occitan 2012­2018 », adopté le 21 juin 2012, p.4. Mis en ligne sur le site du Conseil Général du Tarn http://www.tarn.fr/Fr/culture-sport-loisirs/langueculture-occitanes/Documents/Schema_Departemental_Occitan.pdf
26 Ibid. pp.15­16.
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« Occitaniser » les maisons de retraite
Le projet mené à Monestiés a été initié par l'association Monestiés Village Qualité et construit en concertation avec l'équipe de direction et d'animation des maisons de retraite du canton, le chargé de mission à la langue occitane du Département, le chargé de mission à la musique de l'A.D.D.A. du Tarn, une formatrice en technique vocale et art­thérapeuthe par la voix et l'expression scénique et l’enseignante en langue et chant de l'IEO 81. Se voulant intergénérationnel, « c'est à dire [faisant] se rencontrer, travailler ensemble et produire un résultat visible : un spectacle intergénérationnel »27, il a consisté, tout au long de l'année, en diverses interventions et formations auprès des publics et animateurs du centre de loisirs « Les copains du Cérou » et des trois maisons de retraite du canton. L'occitan a été désigné « comme fil rouge de notre projet »28. Ces interventions ont consisté d'une part en une formation en technique vocale et art­
thérapie. « Ensuite est intervenue [une] conteuse, qui a écrit avec les enfants du centre de loisirs [...] une légende [sur l'histoire de Monestiés]. Et ce travail là a été aussi la base et la trame du spectacle intergénérationnel […]. Le départ du projet était : en quoi la langue occitane aujourd'hui peut aider dans un village comme sont les nôtres ici, peut aider à vivre ensemble entre générations. Quelles valeurs porte cette culture, que devons­nous en faire éclore aujourd'hui pour vivre ici ? […] cette voie se doublait encore d'une autre, celle de la voie thérapeutique, de la remise en circulation de cette langue. […] Il leur a semblé tous souhaitable de développer [l'occitan dans les maisons de retraite] à des fins... évidemment les fins thérapeutiques miroitaient un petit peu pour tout le monde, mais plus simplement déjà, et plus sûrement nous semblait­il à tous, à des fins simplement de bien­
traitance. »29 On a donc autour de l'occitan tout un tissage d'éléments qui articulent la bien­traitance des personnes vieillissantes (qualité de leur vie dans la maison de retraite et des liens aux soignant­e­s) à la façon dont on construit le passé, l'histoire de la localité (création d'une légende sur l'histoire de Monestiés) et le vivre ensemble aujourd'hui entre les générations autour de référents culturels. Culture que l'on reconnaît comme commune, sur laquelle on décide de construire un discours et donc un travail. Durant les réunions de construction du projet circulent, par le biais des chargés de mission du Département, des documents et informations sur l'utilisation de l'occitan avec les anciens : 27
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Employée de l'IEO du Tarn chargée du projet, entretien.
Responsable de l'animation des EHPAD de Monestiés, entretien. Employée de l'IEO du Tarn chargée du projet, entretien.
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notamment l'opération « lenga de casa » et le livret de communication édité par le Département des Hautes­Pyrénées. Il est alors décidé d'adapter ce livret aux parlers languedociens. Le Département voit dans ce travail un projet­pilote, et décide d'éditer et de diffuser le livret dans toutes les maisons de retraite du Tarn. L'IEO 81 est alors chargé de l'élaboration de son contenu ; les animatrices et résident­e­s des trois sites sont mis­e­s à contribution au cours de séances d' « ateliers des langues ». De nouvelles concertations avec les différents partenaires décident d'une formule de formation à destination des personnels des maisons de retraite, demandeur­se­s d'un accompagnement à l'utilisation du livret. Le livret a été diffusé dans toutes les maisons de retraite du département, et plusieurs établissements ont commencé à former leur personnel et à mettre en place des groupes de parole en occitan.
Comment fonctionne et en quoi consiste cette démarche d'occitanisation ? À travers ce mot d'ordre de « bien­traitance » sont mobilisés des dispositifs visant à atténuer le décalage entre la vie « chez soi », « a l'ostal », et la vie en institution « a la maison de retrèta ». Il ressort des témoignages des résident­e­s, lors des « ateliers des langues » de Monestiés, une distinction opérée entre « l'ostal », foyer familial et la « maison », demeure du maître. La maison de retraite est appelée « maison de retrèta » et non « ostal de retirats », ce qui révèle bien une certaine façon d'habiter le lieu, distincte de la façon dont on habite le « chez soi ». Une directrice d'EHPAD des Hautes­Pyrénées avait témoigné de cette rupture dans l'enquête précédente, en racontant comment des messieurs « qu'on a toujours connu avec le béret dans les villages », abandonnent leur béret une fois entrés en maison de retraite ; symptôme pour elle de cette impression de ne pas être chez soi. Elle évoque « l'arsenal de normes » (hygiène, sécurité) auquel sont tenus les établissements. Les résident­e­s ne peuvent plus continuer à faire des choses qui faisaient partie de leur quotidien (comme entrer en cuisine et peler des légumes par exemple) ; « alors si nous on peut conserver certaines choses qu'ils ont connues, alors que ce soit dans le parler, dans certaines traditions, dans certains objets... des coins de vie quoi hein, ça permet l'intégration beaucoup plus facile ».
Ainsi cette continuité est évoquée, représentée et réitérée à multiples endroits et espaces. Il s'agit d'une continuité imaginée, faisant appel à des éléments qui sont captés en fonction de leur adéquation à une idée de ce qu'était « leur vie de tous les jours » ; une représentation du quotidien de la vie dans la localité autrefois : le pastoralisme, le travail de la mine, les travaux des champs, les contes et chants, soit la vie rurale, les façons de faire, de vivre et donc de dire. Il s'agit de « créer 13
une atmosphère où les résidents se sentent bien, avec un lien qui demeure, dans la suite de la vie ».30
Ainsi, des éléments désignés comme faisant partie de ''leur vie d'avant'' sont intégrés à la vie de la maison de retraite au titre d’événements programmés et annoncés dans le calendrier des animations. Dans une des maisons de retraite de Monestiés, sont organisés régulièrement des « petits déjeuners campagnards » : « les résidents prennent leur petit­déjeuner en bas – d'habitude ils le prennent en chambre et là c'est en bas – et on leur propose la charcuterie ». À l’occasion des anniversaires, « on fait venir une animation musicale : en général soit c'est de la musique, soit des danses occitanes – ou folkloriques. […] après on a un groupe folklorique qui est du canton, qui tourne sur les trois sites, chaque trimestre ». 31 L'imaginaire se projette sur leurs pratiques anciennes du chant, et justifie la chorale comme une activité centrale, à laquelle viennent se joindre des gens du village aimant chanter. Des chansons en occitan, perçues comme anciennes par l'animateur, sont de grands classiques, tel le « se canta » que l'on retrouve sous diverses formes : « Al fons de la prada » dans le Tarn, « Aqueras montanhas » dans les Hautes­Pyrénées. Les paroles sont transmises en écriture phonétique32, distribuées aux résident­e­s, souvent avec une phonologie qui n'est pas celle du lieu. C'est ainsi qu'elles viennent parfois s'entrechoquer avec la connaissance orale préalable qu'en ont les chanteur­se­s ; dans tout les cas « le papier » fait loi33. Ces chants : « los esclòps », « lo cocut », « tout le monde les connaît, même ceux qui parlent pas patois », témoigne un animateur34. Les résident­e­s demandent tout autant sinon plus à chanter « le petit vin blanc », ou « froufrou », qu'ils qualifient de chansons anciennes et « l’Internationale » dans le Carmausin, pays de mines et de luttes ouvrières.
Ce décalage entre culture de l'écrit et de l'oral se retrouve dans la diffusion, au sein des sites, 30
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Une directrice d'EHPAD, entretien.
Responsable de l'animation, entretien.
Relevées sur internet ou dans des chansonniers. Ce phénomène a été l'objet de discussions avec l'enseignante en langue et chant de l'IEO 81. Dans un compte­rendu exposant l'avancée du projet de Monestiés, elle explique : « Se canta est la chanson qui revient dans tous les cas, que l'on soit locuteur de l'occitan ou non, enfermé dans le mutisme, ou délirant. Elle parvient sous une forme écartée du parler des gens. Imprimée dans des chansonniers, chantée par les chorales ou trouvée sur Internet, elle colporte systématiquement une faute de conjugaison qu'aucun locuteur, jamais, ne commettrait (se canta que canta pour se canta que cante). A Monestiés elle est donnée sur papier en graphie phonétique dans une forme mâtinée de Béarnais. Étant écrite, nul ne doute de ce qu'elle soit "la vraie chanson", et tous ont cru devoir corriger le parler naturel. Ainsi le papier travaille­t­il à effacer la mémoire. En même temps qu'elle continue envers et contre tout à faire sens pour les gens, cette chanson illustre la situation de diglossie dans toute sa complexité. »
34 Animateur d'un site de Monestiés, responsable de la chorale.
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de façons de dire par le biais de l'écrit. Dans un des sites, des dictons en occitan accompagnent le programme de la semaine : «De temps en temps, sur le planning de l'animation, je leur mets une devinette, une phrase en patois, ou un dicton.[...] Des fois je le traduis, et des fois je le traduis pas. Je fais un peu les deux, parce que quand je traduis pas c'est les résidents qui le traduisent à ceux qui le connaissent pas » […] Et après, on avait un projet aussi d'occitaniser un peu les EHPAD avec la signalétique […] après si on occitanise un peu tout ce qui est signalétique, si par exemple le menu on met le jour en patois [...], on peut éveiller tout le monde, qui se dira ah oui c'est vrai qu'il y a le patois. »35
Cette captation passe par la mise en écrit de façons de dire ; ce qui n'est pas sans contradictions, les publics en question étant dans une logique d'oralité de la langue :
« Lire, ils l'ont jamais lue. Voilà. Ils essayent des fois, parce que sur le Tarn libre36, il y a toujours une histoire en patois. Il y en a certains qui essayent, même là les petites phrases ils y arrivent, mais ils disent qu'ils ont jamais appris à le lire et voilà, c'est pas évident pour eux quand même aussi. Ils disent on sait le parler, mais après... Bon l'écrit, ils savent pas du tout l'écrire hein, ils l'écriraient comme ils le parlent ! » 37
L'occitan est utilisé comme un « fil rouge » tissant les liens entre la vie du village, son passé, sa culture et la vie en institution aujourd'hui. Intégré aux exigences de « bien traitance », il sert à composer de la continuité là où il y a rupture. Dans cette composition, toute une dialectique entre la maison de retraite et le village environnant apparaît. Le site internet présentant l'EHPAD du canton de Monestiés s’appuie sur la profondeur historique, le caractère ''occitan'' du village pour valoriser le standing des établissements. De plus, devant l'obligation de fournir de l'animation, la ''richesse patrimoniale'' des lieux sert de ressource aux animatrices, encouragées par l'intérêt qu'il suscite auprès des publics.
L'occitan devient alors un support pour l'animation et pour la valorisation de l'établissement. Une directrice d'EHPAD des Hautes­Pyrénées expliquait : « Et dans ce projet là on va aussi inclure le site en occitan ! Pourquoi l'occitan ? C'est pas pour faire uniquement original, ça l'est aussi quand même, on va pas le nier, mais c'est pas que ça, […] Ça a du sens en fait, pour tous ces gens­
là. » La maison de retraite devient pour la commune le socle représentant une continuité entre son passé et son futur ; elle assure l'ancrage de l'histoire de la localité (au sens de ce qui est advenu mais 35 Responsable de l'animation des sites de Monestiés, entretien. 36 Journal hebdomadaire du Tarn
37 Responsable de l'animation, Monestiés, entretien.
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aussi du récit compréhensif que l'on en donne38) par la mise en représentation de patrimoines vivants. Wanda Diebolt dans la préface de l'ouvrage Une histoire à soi, met en relief ce recours à l'histoire, par des acteurs locaux, « pour rétablir la continuité du tissu social en forgeant une sorte de légende identitaire »39.
La fête intergénérationnelle de Monestiés
Lors du « spectacle intergénérationnel » donné à la salle des fêtes de Monestiés, présenté comme une valorisation du projet mené entre enfants du centre de loisirs et résident­e­s, une « histoire de Monestiés » est lue par une résidente, puis une légende racontée par les enfants40. Les résident­e­s sont en scène, accompagné­e­s des enfants du centre de loisirs, assis en tailleur à leurs pieds, au centre de la salle. La légende est introduite par une résidente : « Vos vau contar la legenda de la tortorèla potingaire de la misteriosa carrièra Bombacuòl41 ». A tour de rôle, les enfants se lèvent et content en français ; le récit est ponctué d'un refrain (Tortorèla) chanté en ronde et accompagné aux percussions par les résident­e­s, suivi d'une comptine en occitan (Pluma d'aucèla). La légende nous plonge dans le passé médiéval du village, le héros, Pierrou, est un pèlerin suivant la route de St Jacques de Compostelle ; elle met en intrigue la construction du Pont de Candèze et de la Chapelle St Jacques, les deux trésors architecturaux du village. En fond de scène, une aquarelle sur tissu, réalisée par les résident­e­s avec leur animatrice, représente l'entrée du village par le pont de Candèze ; au premier plan figure le héros de la légende. L'histoire s'achève par l'évocation des traces de cette histoire, de ce passé, dans le Monestiés d'aujourd'hui, de la restauration de la chapelle et de la création de la nouvelle bibliothèque. Enfin c'est une formule en occitan, dite par une résidente, qui conclut le récit : « E corocon, passi per un pont finissi la cançon, passi per un prat mon conte es acabat »42.
Autant que le travail réalisé dans ce projet, c'est le village et son histoire qui est célébré ce jour­là. Réunissant les résident­e­s et leur famille, le personnel des EHPAD, les élus locaux, les membres de l'association MVQ, les enfants du centre de loisirs et leurs parents, cet événement rassemble et met en scène le lien entre les générations, le passé du village et son avenir. Dans cette 38
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Tel que Daniel Fabre définit la notion d'histoire dans « L'histoire a changé de lieu », in BENSA A., FABRE D. (dir.), 2001, Une histoire à soi, figurations du passé et localités, Paris, Maison des Sciences de l'Homme, p.33.
DIEBOLT Wanda, « Préface » in BENSA A., FABRE D. (dir.), 2001, Une histoire à soi, figurations du passé et localités, Paris, Maison des Sciences de l'Homme, 288p.
« La légende de la tourterelle guérisseuse de la mystérieuse rue Bonbecul », rue de Monestiés. Voir le texte en annexe 3.
« Je vais vous raconter la légende de la tourterelle guérisseuse de la mystérieuse rue Bombecul... »
« Et couroucou, je passe par un pont je finis la chanson, je passe par un pré mon conte est achevé »
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mise en scène de soi et pour soi, l'occitan est l'axe organisateur des éléments culturels, historiques et patrimoniaux. C'est au moment où justement ces éléments ne sont plus vécus qu'émerge la nécessité de les imaginer et de les mettre en scène. Dans un contexte de reconversion économique des villages, l'occitan devient une ressource considérable dans la construction d'un « vivre ensemble » et d'une continuité imaginée dans l'histoire du village et entre les générations. Une pluralité de rapports à la langue minorisée
« On était jeune, on était content à ce moment là ; et maintenant qu'on est vieux, on parle français !»43 Bien que l'occitan soit la langue maternelle d'une majorité de personnes vieillissantes que l'on peut rencontrer en maison de retraite, la situation de minorisation linguistique, de changement de statut de la langue que ces personnes ont vécue durant leur vie, donne lieu à une situation complexe d'emploi et de représentations de l'occitan. Durant les groupes de parole en occitan de Monestiés, appelés ''ateliers des langues'', auxquels j'ai pu participer, l'on rencontre différents type de locuteurs :
◦ « Ceux d'ici »
▪ Les primo­locuteurs épanouis
Leur plaisir à parler du/en ''patois'' est manifeste. Ils deviennent des personnes­ressources qui jouent bien souvent un rôle de leader, de moteur du groupe lors des animations. Les animatrices et résident­e­s leurs reconnaissent des qualités particulières ; ainsi une dame s'exclame : « Elle parle bien le patois Madame C., et Madame G. aussi hein! ». L'ancien boulanger à Monestiés a cette place là : étant du village, et utilisant le patois dans son métier, ses compétences linguistiques sont reconnues par le groupe, ainsi que son talent de conteur. ▪ Les locuteurs malgré­eux : Ils ne se définissent pas eux mêmes comme « parlant patois ». Locuteurs passifs44, ils ne reconnaissent pas ce savoir comme une compétence. Juliette répète que le patois « c'est moche comme tout ! » ; toutefois, ajoute t­elle, elle sait le parler et révèle des connaissances pointues des 43 Une résidente de Monestiés.
44 Par locuteur passif j'entends, au sens linguistique, des locuteurs ayant une connaissance de la langue mais ne la parlant pas. Voir à ce propos COYOS J.­B., « Écart entre connaissance et usage d'une langue minoritaire : essai de typologie des facteurs. Le cas de la langue basque », in SAUZET P., PIC F. (dirs.), 2009, Politique linguistique et enseignement des ''Langues de France'', Paris, L’Harmattan, pp.103­119.
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parlers rouergat et marseillais. « Mon fils m'a demandé si je l'avais oublié […] c'est dans la tête, ça reste. Ça dort, ça se parle pas le patois aujourd'hui, je parle le français comme ça on me comprend ». Ils doutent d'être légitimes dans cette langue : « Moi je le comprends mais je le parle pas » , « Je l'escarraunhe moi le patois » répètent­ils.
◦ Ceux d'ailleurs :
▪ Les migrants plurilingues :
Ils disent ne pas parler patois, de par leurs origines. Dans le bassin minier, ils sont issus des différentes vagues de migrations : italiens, polonais et espagnols. Un couple de frère et sœur enfants d'italiens, viennent à chaque ''atelier patois''. Ils soutiennent qu'ils ne le parlent pas, mais se révèlent connaisseurs d'un large vocabulaire lors d'une séance sur les noms de champignons. Ces personnes invitent, durant les échanges, à étendre la question du ''patois'' vers celle des langues de la maison.
▪ Les curieux :
Ils viennent d'autres régions de France, souvent dans le cadre de regroupements familiaux, et sont assidus aux ''groupes patois''. Ainsi une dame, durant une séance, s'exclame : « Ah je parle pas patois moi, je suis parisienne ». Les autres participant­e­s et l'animatrice lui traduisent ce qu'il se dit, et lui apprennent le nom des animaux de la ferme. Une résidente dit venir aux ateliers car son arrière petite­fille apprend « l'occitan » à la Calandreta de Mèze. Ces personnes viennent aux séances par curiosité envers le ''patois'', ''l'occitan'', ou les langues de façon générale. D'autres viennent attirées par un moment de conversation proposé dans le cadre du calendrier d'animations de la maison de retraite.
◦ D'ici ou d'ailleurs : Les réfractaires.
Ils et elles sont connu­e­s comme étant « allergiques » au ''patois''. Une animatrice explique que certain­e­s, bien que parlant ''patois'', refusent de participer aux séances : « il y en a qui nous disent qu'ils savent déjà parler patois, ou que c'est pas le même patois que le leur ». Une infirmière d'un EHPAD témoigne : « il y en a d'autres ben non, ils pensent que c'est une...il y en a une elle m'a dit : ''Je comprends pas pourquoi vous essayez de parler cette langue de berger ! On est dans un pays civilisé, c'est le français la langue !'' ».
Cette typologie met en lumière les décalages entre compétences et usages linguistiques. Ainsi, il ne suffit pas de solliciter des locuteurs sur la base de leurs compétences pour donner lieu spontanément à un échange en occitan. De la même façon lors des ''ateliers patois'', dans le Tarn, ce 18
sont principalement en français que se font les échanges, on y parle de la langue et de ses variations. La langue est alors objet de la conversation plutôt qu'outil de communication.
Rencontres intergénérationnelles entre Calandrons et résident­e­s de maisons de retraite
Comment se concrétisent les projets de rencontre entre néolocuteurs et résident­e­s des maisons de retraite ? J'ai eu l'occasion de mener des observation directes de rencontres entre Calandrons, élèves des écoles Calandretas, et résident­e­s de maisons de retraite de Castres, dans le département du Tarn. Ces données ethnographiques mettent en lumière les situations réelles d’interaction entre locuteurs naturels et néo­locuteurs dans le cadre de projets « intergénérationnels ». Intégrées au calendrier d'animation des maisons de retraite, ces rencontres se déroulent tout au long de l'année scolaire et ont pour thèmes récurrents les métiers d'autrefois, les saisons et fêtes calendaires. Les Calandrons apprennent l'occitan à l'école, et pour la grande majorité d'entre eux, l'occitan n'est pas parlé au sein de leur famille ; familles majoritairement non­
occitanophones et aux provenances géoculturelles plurielles45.
La langue au cœur d'un autrefois mis en spectacle
Des élèves de cycle 2 d'une Calandreta du Tarn entrent dans une vaste salle d'animation d'une maison de retraite du centre ville. Une intervenante en théâtre a préparé, avec un petit groupe de résident­e­s, une pièce sur les métiers et la vie d'autrefois. « Bonjorn ! » dit l’enseignante, suivie en chœur par les enfants. « Bonjour les enfants ! », répondent résident­e­s et animatrices. Sept résident­e­s se tiennent sur une scène composée d'objets et décors représentant des métiers et évoquant un intérieur ancien. Ils portent des costumes : châles, jupons, chapeaux et tabliers en dentelle pour les dames, blouses et bérets pour les messieurs. Les enfants sont invités à s'asseoir en demi­cercle face à la scène. Une vingtaine de résident­e­s arrivent peu à peu et sont installé­e­s derrière eux. La pièce commence. Sur un air de cornemuse, les acteurs et actrices exécutent tour à tour les gestes du métier qu'ils représentent : vannier, couturière, nourrice, cuisinière, lavandière, sabotier et tricoteuse. À l'issue du spectacle, un goûter ''à l'ancienne'' est servi : pain­perdu, gâteaux à l'anis et mesturet (gâteau à la citrouille). Les enfants rejoignent les résident­e­s sur scène, manipulent les objets et outils, et s'essaient aux gestes des métiers présentés. La rencontre se 45 VERNIERES M., 2012, Lenga de l'ostal o lenga de l'escòla. Les usages volontaires de l'occitan dans les écoles bilingues et maisons de retraite, mémoire de master d'anthropologie sociale et historique, sous la direction de Jean­
Pierre Albert, EHESS, Toulouse, 128p.
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termine par un « Se canta » chanté en chœur. Ce qui est mis en scène ici dans cette rencontre, ce sont différents éléments que la langue réunit autour d'elle et lie entre eux : la musique traditionnelle, les modes vestimentaires d'autrefois, les gestes et savoir­faire de métiers anciens, le chant en occitan, les spécialités culinaires locales, auxquels ont reconnaît une valeur et que l'on considère comme digne de mémoire et donc de transmission. On voit qu'à travers cet échange autour de l'occitan, c'est la question de la transmission d'éléments patrimoniaux qui est centrale et que l'on met en scène. Les résident­e­s y incarnent les figures d'un ''autrefois'', tels des patrimoines vivants, que l'on met en position de transmetteurs au sein d'un dispositif, d'une mise en scène. Car les échanges se font en français, l'occitan n'est pas ici outil de communication, il est l'objet de la rencontre autour duquel se tissent un ensemble d'éléments évoquant un ''autrefois'' non défini.
Lors d'une rencontre ultérieure c'est un petit groupe de résidentes accompagné de deux animatrices et soignantes qui est invité à la Calandreta. Les enfants ont apporté à l'école des objets anciens de chez eux. Les objets ont été réunis et exposés dans la classe.
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Les échanges se font dans un espace de la classe de cycle 2 appelé le canton, autour des objets exposés. Le canton est l'espace privilégié des échanges en occitan entre enfants dans la classe, puisque s'y déroulent chaque semaine deux institutions qui sont lo conselh (le conseil), et le Qué de nòu ? (Quoi de neuf?) 46. Car en dehors des dispositifs pédagogiques, c'est en français que se font spontanément les échanges entre enfants au sein de l'école. À tour de rôle, les enfants sont invités par l'enseignante à montrer les objets qu'ils ont apporté et à demander aux personnes âgées si elles les reconnaissent et les souvenirs qu'ils évoquent : photos de classe, portraits en costume traditionnel, moulin à café, livre de recettes occitanes, sabots, broderies, outils, lampe à huile... Là encore, ce sont des objets anciens, évoquant un passé non défini, qui servent de support à l'échange. L'occitan, bien que peu présent en tant qu'outil de communication dans les échanges, sert de média pour accéder à la mémoire des personnes, par l'évocation de pratiques et savoir­faire d'autrefois. Un autrefois où l'occitan, alors nommé ''patois'' par ses locuteurs, était la langue de communication courante dans les familles ainsi que dans la vie sociale. Du patois à l'occitan « Tot lo monde parlava patoès autrescòps47 ; maintenant les jeunes le reparlent, mais c'est plus le même ! »48
Une autre rencontre observée s'est tenue cette fois­ci dans une autre maison de retraite de Castres, entre personnes âgées en Accueil de Jour et Calandrons de cycle 3. Avant le départ vers la maison de retraite, une discussion collective se tient en classe au sujet de la rencontre à venir :
­ Une élève : « Mas i a pas que nosautres que parlam occitan ?49 L'enseignante explique que les aînés l'ont longtemps parlé.
­ Un garçon : Van parlar coma sul DVD de las paurs qu'avèm vist ? Èra pas aisit ! De qué fasèm se òm compren pas ?50 (Il s'agit de collectages filmés de Christian­Pierre Bedel, auprès de locuteurs occitanophones, sur les mémoires orales autour des peurs d'autrefois, que les enfants ont visionnés et travaillés en classe). ­ Une élève : E ben lor podèm demandar de o tornar dire o de parlar mai lentament !51
46 Temps de régulation et d'échange entre enfants, ce sont deux dispositifs issus des outils de la pédagogie institutionnelle, pratiqués chaque semaine dans toutes les Calandretas.
47 Autrefois, tout le monde parlait patois
48 Un résident lors d'un atelier des langues
49 Mais il y a que nous qui parlons occitan ?
50 Ils vont parler comme sur le DVD sur les peurs qu'on a vu ? C'était dur ! Qu'est­ce qu'on fait si on comprend pas ?
51 Et bien on peut leur demander de répéter ou de parler plus lentement !
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­ Un autre élève : E lor cal dire tu o vos ? 52
­ L'enseignante : Vos, plan segur ! òm ditz : ''Bonjorn madama, bonjorn mossur'', que son pas los vòstres papets e mametas ! »53
On voit à travers cet échange que l'utilisation de l'occitan en­dehors de l'école ne va pas de soi, et que les enfants perçoivent une distance entre la langue qu'ils utilisent à l'école, et celle qui est parlée par les aînés, à laquelle ils ont notamment ici été sensibilisés par le biais de collectages vidéos.
Arrivés à la maison de retraite, nous sommes accueillis par les animateurs et personnels soignants de l'établissement, ainsi que par trois animateurs bénévoles du Centre Occitan du Pays Castrais, qui vont animer les rencontres. Une des bénévoles, d'une soixantaine d'années, explique la difficulté de s'adresser à un public de personnes âgées dont l'occitan est la langue maternelle, contrairement aux écoles ou cours pour adultes, car dans ce contexte ce sont les publics qui connaissent mieux la langue qu'eux. Eux qui l'ont entendu parler par leurs parents sans qu'elle leur soit transmise et se sont réappropriés la langue volontairement à l'âge adulte.
Dans la salle commune sont diffusés des chants occitans, une cinquantaine de personnes âgées sont installées sur plusieurs rangs face aux animateurs du Centre Occitan. L'institutrice réunit les enfants et leur demande en occitan de se mêler aux personnes âgées, de s'asseoir près d'eux et de leur parler en occitan. Un monsieur âgé de l'accueil de jour l'entend parler : « Elle parle bien le patois pour son âge ! » s'exclame t­il. Au micro, une animatrice introduit la rencontre :
« Tout d'abord nous sommes très heureux d'être parmi vous pour parler notre langue d'oc, que nous sommes nombreux à parler ici, parce qu'il y a les enfants de la Calandreta, qui l'aiment et qui la parlent, et qui la parlent très bien, ainsi que leur institutrice. Et je sais qu'il y a des personnes ici qui l'aiment et qui la parlent très très bien. Et dans le personnel, il y a une dame qui nous a dit qu'elle faisait des ateliers avec certains groupes autour de l'occitan. Nous, nous venons du Centre Occitan du Pays Castrais, une association qui essaie de maintenir et de diffuser et de mettre à l'honneur toute la culture occitane et la langue en particulier, avec des cours, mais aussi la culture, la musique, la danse etc. Nous sommes à Castres et nous viendrons vous voir de temps en temps, ensajarèm de venir vos véser per parlar un còp per mes. E coma sabèm que lo parlatz plan milhor que nautres, e ben sèm segur qu'aprendrem quicòm. Que totes tres avèm entenduts parlar la lenga 52 Et on doit les tutoyer ou les vouvoyer ?
53 Les vouvoyer bien sûr ! On dit ''Bonjour madame, bonjour monsieur'', parce que ce ne sont pas vos papis et mamies !
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quand èrem pichons. E aprèp la retirada, nos sèm ditz : ''Quand mèsme caldriá s'i interessar e ensajar de salvar aquela lenga''. Alara fasèm çò que podèm ! Ensajam de parlar, ensajam de legir, ensajam d'escriure tanben. Alara, anam parlar ! 54».
Ce discours traduit un rapport particulier à la langue, un rapport affectif lié au sentiment de perte de la langue et des éléments culturels qui lui sont associés. C'est bien dans une logique de conservation que se situe cette bénévole militante. Et l'on voit que la dénomination de la langue pose question, qualifiée de ''patois'' par les personnes âgées auxquelles ce discours s'adresse, ''d'occitan'' par les Calandrons, l'animatrice oscille entre ''langue d'oc'' et ''occitan''. Transparaît dans ce discours le caractère volontaire des locuteurs, car il ne suffit pas de connaître la langue, de savoir la parler, mais aussi de l'aimer. Cet élément renvoie me semble t­il à une conscience des décalages chez les locuteurs dits naturels, entre compétences et usages linguistiques.
L'animation qui suit porte sur les savoirs horticoles : noms de plantes aromatiques, devinettes, dictons et histoires conduisent à des échanges sur les différentes façons de dire, les variantes linguistiques, les différents savoir­faire et usages des plantes. Une dame âgée s'exclame : « Ah ça c'est du patois ça oui ! ». Enfants et personnes âgées chantent en occitan « Se canta », « Los esclòps » et « Carnaval es arribat », chants que tous connaissent.
Il est midi, nous saluons les personnes âgées avant de partir. Une dame dit à l'institutrice : « Revenez avant Noël quand même, je vous chanterai des chants de Noël que je connaissais ». Je salue un monsieur : « Adiussiatz mossur! », « Cossi dissètz ?55 , me répond t­il, Et bien au­revoir, c'est comme ça qu'on dit aujourd'hui ! » ajoute t­il.
Ces différentes rencontres sont médiatisées par enseignants, professionnels des EHPAD et associatifs militants, qui impulsent volontairement les échanges. Les référents sur lesquels ils s'appuient sont des éléments qui renvoient à un ''autrefois'' et qui, comme la langue, deviennent des objets érigés au rang d'emblèmes, évoqués dans un ensemble de ce qui était et n'est plus.
54 « Nous allons essayer de venir vous voir une fois par mois pour parler. Et comme nous savons que vous le parlez bien mieux que nous, nous sommes sûrs que nous apprendrons des choses. Parce que nous avons tous les trois entendus parler la langue quand nous étions petits. Et après la retraite, nous nous sommes dits '' il faudrait quand même s'y intéresser et essayer de sauver cette langue''. Alors nous faisons ce que nous pouvons ! Nous essayons de parler, nous essayons de lire, nous essayons d'écrire aussi. Alors, nous allons parler ! »
55 « Au revoir monsieur ! », « Comment dites­vous ? »
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Conclusion L'observation des rencontres intergénérationnelles fait apparaître des rapports très différents à la langue entre les personnes dont le ''patois'' est la langue maternelle et les jeunes néolocuteurs qui en apprennent une version sans références dans les pratiques sociales hors de l'école. Deux générations sont donc en présence, dont le vécu linguistique et les représentations de la langue sont si éloignés que l'intercompréhension et l'échange sont dans tous les cas problématiques. La rencontre intergénérationnelle comme remède miracle à la non­transmission de la langue par la génération intermédiaire a donc toutes les chances de ne pas répondre dans les pratiques réelles aux objectifs que lui assignent ses promoteurs. Plutôt qu'à une réelle revitalisation linguistique c'est à l'élaboration d'une continuité imaginée dans la culture que l'on assiste, un processus dans lequel la langue n'est plus vraiment un moyen de communication mais un élément perçu comme essentiel de la revalorisation d'un patrimoine.
Ces réflexions concernant le cas spécifique de l'occitan amènent à un questionnement plus large sur les rapports entre revitalisation linguistique et patrimonialisation des langues identitaires. Dans le contexte actuel de la mondialisation qui tend à revaloriser les identités locales, la revitalisation des langues minorisées ne peut sans doute pas se concevoir hors d'un processus de patrimonialisation dont il faudra décrire et analyser toutes les modalités.
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Site de la Confédération Occitane des écoles laïques Calandretas : http://calandreta.org
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Annexes
Annexe 1 : Carte de l'Occitanie56
56 Source : « mapa occitania » en ligne sur le site de l'Ostal d'Occitania, http://www.ostaldoccitania.net/
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Annexe 2 : Carte des écoles Calandretas57
57 Source : site de la Confédération Occitane des écoles laïques Calandretas
http://calandreta.org/IMG/jpg/mapa_sept_2013­2.jpg
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Annexe 3 : Légende créée pour le spectacle intergénérationnel de Monestiés
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