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COMPTE RENDU DE L’EXPOSÉ DE JEAN-CLAUDE GUÉDON
« LE LIBRE ACCES AUX PUBLICATIONS SCIENTIFIQUES :
ELEMENTS D'UNE PROSPECTIVE PRUDENTE »
Centre d’Alembert, Université Paris-Sud Centre d'Orsay
Mercredi 14 décembre 2011, 13h30 – 15h30
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Le libre accès est un mouvement dans les années 90 qui a pris de lampleur en février 2002
avec le Budapest Open Access Initiative.
Aujourd’hui, on se trouve dans une transition numérique, où le document peut être remis dans une
triple logique sociologique :
1. une sociologie classique qui étudie les relations humaines ;
2. une sociologie des documents qui étudie les relations entre les documents à leur
publication ;
3. une sociologie des textes qui étudient les interactions entre les individus et le processus de
fabrication des textes.
Publication et recherche
La publication fait partie intégrante de la recherche car la recherche sans publication n’a pas de
sens.
La recherche scientifique nest pas une activité rentable. Toutefois, elle est subventione car elle
fournit des avantages politiques et militaires aux gouvernements. La quête de la connaissance
permet d’asseoir le pouvoir.
A contrario, on demande que les publications soient viables économiquement.
Le travail du chercheur est vu différemment selon la revue dans laquelle il publie, même si la
qualité du travail scientifique et la qualité de la publication sont deux choses différentes.
La publication est un instrument de gestion de la concurrence scientifique dans laquelle les
éditeurs jouent un rôle important.
La tyrannie du facteur d’impact
Un article publié dans une revue à fort facteur d’impact ne veut pas forcément dire que l’article est
de qualité ni qu’il a un impact dans la revue.
Le système de facteur d’impact alimente le jeu de la concurrence entre les scientifiques,
encouragé par les éditeurs et les administrateurs. On ne parle plus de valeur ni de qualité
scientifique.
Pour faire évoluer le facteur d’impact d’une revue, les auteurs sont incités à citer les articles
publiés dans les revues de l’éditeur.
Les systèmes de classement (ex : Shanghai) influencent les administrations universitaires dans
leurs prises decision. Ces mesures quantitatives ne sont pas représentatives de la quali de la
science. On confond qualité et excellence.
La qualité est ce qui permet de dire quon est capable de répondre à une certaine exigence. On
juge les qualités d’un travail ou d’une personne selon des seuils, comme les mentions d’un
diplôme.
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L’excellence concerne peu de personnes. Le Prix Nobel nest pas à la portée de tout un chacun.
Or aujourd’hui on veut mettre tout le monde en concurrence sur le plan de l’excellence. La
concurrence est un stimulant pour se surpasser et faire de nouvelles découvertes, mais ne peut
concerner que les meilleurs.
Lorsqu’on met en concurrence tout le monde, les résultats généraux sont médiocres, et ces
déviances amènent à la tricherie et à la manipulation.
Il faut donner sa vraie place à l’excellence qui est à la portée seulement d’un petit nombre.
Le facteur d’impact a aussi des effets négatifs sur les pays pauvres.
Le peu de scientifiques qui exercent dans les pays pauvres doivent étudier des sujets qui
intéressent les revues à fort facteur d’impact s’ils veulent être publiés. Ces sujets n’ont souvent
pas d’applications directes avec les préoccupations de leur pays. Il y a un décalage entre les choix
d’étude scientifique et les besoins de leur pays.
Le libre accès : vers une science assainie
Le libre accès permet de recourir à lintégralité de la production. Ainsi la valeur scientifique peut
être évaluée par la communauté scientifique sans barrière économique. Le libre accès ouvre « une
grande conversation scientifique ».
Le libre accès permet aussi de repenser le mode de dissémination des revues. Tous les sujets de
recherche peuvent être visibles sans filtre.
A contrario, les éditeurs sélectionnent les articles selon les sujets ou les institutions. Un même
scientifique peut voir ses articles acceptés ou refusés selon quil travaille dans un laboratoire de
renom ou non.
Enfin, le libre accès permet de restaurer l’importance de la qualité en science et de stimuler
l’excellence au bon endroit.
Aujourd’hui, le libre accès tient une place importante mais il est menacé.
Deux systèmes se sont développés :
" les archives ouvertes institutionnelles (Green Road)
" les revues savantes en accès libres (Gold Road)
La voie verte
Grâce aux bibliothécaires, de nombreuses archives ouvertes ont été mises en place.
Répertoires d’archives ouvertes :
o http://opendoar.org/
o http://roar.eprints.org/
Les archives ouvertes ont souvent été regardées par les chercheurs de manière bienveillante. Le
taux de remplissage est peu important sauf lorsque le dépôt est obligatoire.
Il existe quelques exemples, comme à Harvard, de dépôts institutionnels imposés par les
chercheurs eux-mêmes car ils y ont vu un impact favorable à leur carrière. Ce système force les
chercheurs à s’investir.
Cette voie verte se développe peu à peu. En France, ce mouvement est encore « frileux ».
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La voie dorée
Dans ce système, la publication scientifique est financée par ceux qui subventionnent la recherche
scientifique (les pouvoirs publics, les fondations).
Cf. http://www.doaj.org/ : Répertoire de revues scientifiques et universitaires en libre accès,
accessibles gratuitement
Exemples de répertoires de revues scientifiques latino-américaines :
o http://scielo.br/
o http://www.redalyc.com.mx/
La publication par la voie dorée peut être aussi payée par les auteurs eux-mêmes. Le problème se
pose pour les chercheurs des pays pauvres qui ne peuvent se le permettre. Cela entraine une
distinction entre les pays riches et les pays pauvres.
Conclusion
Dans le contexte numérique actuel, les documents numériques n’ont pas la même relation entre
eux et avec les êtres humains que les documents papiers. On assiste à un déplacement des
pouvoirs.
De plus, on peut se poser la question de la réutilisation des données. La publication permet un lien
dynamique entre le document numérique et les données scientifiques.
Remarques du public :
Une biologiste a souligné l’importance d’un bon moteur de recherche sur les archives. Elle
a donné l’exemple de HAL où il est difficile de retrouver un article.
Réponse de J.C. Guédon : Google et Google Scholar permettent de retrouver des articles
qui sont sur des archives ouvertes.
Cette biologiste a aussi observé que les chercheurs ont d’abord vu les archives ouvertes
d’un œil suspicieux. Lorsque certaines de ces archives ont eu un facteur dimpact, le
système des archives ouvertes a été détourné. Par exemple, il faut avoir publié dans PLOS
(Public Library Of Science) pour obtenir des ANR.
Réponse de J.C. Guédon : Les archives ouvertes entrainent néanmoins des changements
positifs dans les pouvoirs, mais cela prendra au moins une génération.
La recherche scientifique est plus dans les données que dans les publications. La mise en
ligne des données fait face aux publications. De plus, la transmission des données pose
parfois problème lorsque le volume des données est trop important.
Réponse de J.C. Guédon : D’une part, il faudrait harmoniser le recueil des données pour
faciliter la recherche interdisciplinaire. D’autre part, les éditeurs commencent à regarder les
données comme un moyen économique.
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