Un travail de fonds pour l’éternité
Anthropologie comparée des pratiques archivistiques, 2010, 152p.
Rapport de recherche pour le Département du pilotage de la recherche et des politiques scientifiques,
Direction générale des patrimoines - Ministère de la Culture et de la Communication
Anne Both, ethnologue IIAC (EHESS- UMR CNRS 8177, équipe du Lahic
CONTEXTE
Cette recherche fait suite à une précédente enquête ethnographique, qui avait bénéficié, en 2009,
du soutien de la mission Ethnologie du ministère de la Culture et de la Communication (« Ce qui
est fait n’est plus à faire ». Ethnographie d’un service d’archives municipales, 104p.). Ce premier
travail avait permis de dévoiler les processus d’engagement des personnels dans le projet
archivistique, qui consiste à conserver des fonds pour l’éternité. L’enquête a été poursuivie en
2010, à partir de deux autres terrains ethnographiques, l’un dans un service d’archives
départementales, l’autre au sein des archives du ministère des Affaires étrangères (site francilien).
Cette recherche, située à la jonction de l’anthropologie du travail et des pratiques patrimoniales, se
présente comme une analyse comparée des pratiques archivistiques.
SUR LE TERRAIN DES ARCHIVES
Saisir le point de vue de l’autre et comprendre sa vison dans son monde, pour paraphraser
Malinowski, telle est la posture méthodologique retenue pour ces enquêtes de terrain dans la
tradition de la discipline anthropologique. Concrètement appliquée à des services d’archives, la
démarche, qui permet de collecter des matériaux (propos, prise de sons, de photos), recouvre
trois volets. Le premier consiste à observer le travail – en situation ordinaire comme de
représentation – et les lieux (bureaux, dépôts et salle de lecture), le deuxième à participer dans
une logique d’intégration, d’expérimentation et de réciprocité et le troisième à interroger les
personnels, les évidences et les hypothèses. L’incongruité de la situation expérimentale peut
susciter auprès des enquêtés réticence et méfiance légitimes, liées à la fois à la méconnaissance
de l’anthropologie, de ses méthodes, au statut inclassable du chercheur et à l’usage qui peut être
fait des résultats. En outre, cette expérience n’est pas sans effets au sein d’un service : elle a
ouvert des espaces de discussion jusque-là inconnus, une valorisation du travail des agents, une
réflexivité, et leur a aussi permis quelquefois de faire des découvertes au sein de leur propre
service.