Projet Campus Spatial
TERRE-LUNE
Formation du couple Terre-Lune : Accrétion, échanges chimiques/isotopiques
lors de l’accrétion et structure initiale et actuelle
Sébastien Charnoz (AIM) & Chloé Michaut (IPGP)
L’impact qui a donné naissance à la Lune pourrait être le dernier impact majeur sur la proto-Terre (Raymond et al., 2005). Il aurait
eu lieu à la fin de la phase d’accrétion des embryons planétaires, quelques centaines de millions d’années après la naissance du
Système Solaire. Malgré le succès de ce modèle, en particulier concernant le moment cinétique du système Terre-Lune, de
nombreuses questions demeurent, en particulier en ce qui concerne l’abondance des
éléments et leurs répartitions dans le système Terre-Lune.
L’extraordinaire similarité isotopique entre la Terre et la Lune, qui reste inexpliquée, et la
quasi absence de volatils sur la Lune, semblent en contradiction avec ce modèle. Les
analyses minéralogiques de matériaux lunaires ont montré qu’un océan de magma
primordial a existé sur la lune, qui a pu favoriser grandement la fuite des volatils. Or, les
propriétés physico-chimiques du couple Terre-Lune ont été grandement déterminées juste
après l’impact, à l’époque où la proto-Terre et la proto-Lune étaient encore connectées par
un disque de débris. C’est en particulier cette phase que nous proposons de modéliser dans
ce projet.
La connaissance de la structure profonde actuelle de la Lune par la sismologie pourrait
apporter des indices essentiels à cette étude. En effet, l’existence d’un océan de magma
primordial a pu entraîner une stratification particulière de la croûte et du manteau lunaire.
C’est pourquoi nous proposons en parallèle une étude du bourdonnement sismique de la Lune lié aux impacts météoritiques
actuels qui permettrait de contraindre un peu mieux la structure interne de la Lune.
Ce travail est décomposé en 3 axes :
Volet 1 : ACCRETION : Nous souhaitons modéliser numériquement le transport des espèces chimique/isotopique et calculer
l’évolution thermodynamique du disque protolunaire lors la phase d’accrétion de la lune, ainsi qu’estimer le taux d’accrétion
primordial de la Lune. Pour cela nous utiliserons un code qui a été développé récemment (Charnoz et al., Nature 2010) pour
étudier la formation de satellites à partir de disques dissipatifs. L’accrétion de la proto-Lune a déjà été modélisée avec succès et
nous comptons rajouter de la thermodynamique pour suivre l’évolution de ce système.
Volet 2 : MAGMA : lors de l’accrétion, l’énergie apportée par les impacts a pour effet de réchauffer
les corps telluriques. Selon l’intensité et la taille des impacts, la fusion de ces corps a pu se produire.
En couplant des modèles d’accrétion à des modèles d’évolution thermique pour la protolune, nous
souhaitons apporter des contraintes sur l’état thermique initial et les caractéristiques (profondeur en
particulier) de l’océan de magma lunaire. Cette étude pourra être étendue aux protoplanètes.
Volet 3 : STRUCTURE : En quantifiant la fréquence des impacts actuels sur la Lune, il sera
possible de préciser l’amplitude des signaux sismiques générés par le bombardement météoritique,
et ainsi d’utiliser ces derniers pour contraindre la structure interne de la Lune. Pour cela nous allons
faire appel à l’Uranoscope d’Ile de France, qui mènera une campagne d’observations de la lune pour
quantifier le taux de flash dû au bombardement météoritique actuel à l’aide d’une caméra infrarouge.
C’est donc un projet interdisciplinaire qui fait le lien entre mécanique céleste et astrophysique pour les impacts, géophysique et
géodynamique pour l’évolution des corps solides, et observation spatiale et sismologie embarquée, afin de fournir des contraintes
nouvelles sur la formation de la Lune et son évolution.
Flash d’impact sur la Lune
(Ortiz et al, 2006)