AU QUOTIDIEN | MM31, 27.7.2015 | 81 Psychologie Santé psychique: les pairs praticiens offrent leur aide Déjà connue en Suisse alémanique, au Royaume-Uni ou en Amérique du Nord, cette nouvelle formation romande est réservée aux personnes qui ont elles-mêmes souffert dans leur santé mentale. Texte: Pierre Léderrey Pour aller plus loin Faut-il être guéri pour devenir pair praticien? «Le rétablissement en santé mentale ne signifie jamais tout à fait une guérison. On parle d’un cheminement dont on ne revient jamais comme avant», rappelle Esther Hartmann. Selon plusieurs études internationales, 30% Photos: Véronique Bottéron des patients n’éprouvent plus de symptômes et sont suivis avec ou sans médicaments. D éjà 90 dossiers déposés pour la seconde volée de cours pour devenir pair praticien. Elle devrait démarrer en 2016. Avec une exigence incontournable inédite: avoir soi-même déjà été hospitali- sé en psychiatrie. «Ce qui montre clairement que cette formation n’a pas pour but de concurrencer le personnel médical existant, mais bien d’apporter une aide supplémentaire aux personnes en souffrance psychique.» Psychologue FSP, Esther Hartmann a été chargée d’élaborer ce nouveau cursus par l’association romande Pro Mente Sana en collaboration avec la Coraasp (Coordination romande des associations d’action en santé 30% parviennent à vivre de manière plus ou moins épanouie avec leurs symptômes, avec un cadre autour de leur vulnérabilité et souvent une médication. Les 40% restants resteront en souffrance. AU QUOTIDIEN | MM31, 27.7.2015 | 83 psychiatrique). A l’école d’études sociales et pédagogiques (eesp) de Lausanne, la première volée, qui a terminé fin octobre 2014 les quelque 150 heures théoriques et 50 heures de stage demandées, avait déjà fait le plein, avec 35 dossiers déposés pour quinze places disponibles. «Nous avions naturellement sondé les différentes institutions concernées pour savoir si le projet les intéressait et nous étions arrivés à la conclusion qu’une quinzaine de diplômés constituait un bon début.» Des personnes de tout horizon professionnel, hommes et femmes jeunes ou moins jeunes avec des niveaux de formation très différents mais aussi avec différents profils de maladie. «Lorsque l’on évoque la maladie mentale, on parle de souffrance psychique et de la douleur qui l’accompagne. Il fallait que ce soit des gens chez qui cette souffrance avait disparu, ou qui s’accommodaient de vivre avec. Avec la capacité de parler de soi, de son propre cheminement pouvant éclairer celui de l’autre sans pour autant penser détenir la vérité absolue.» Des porteurs d’espoir pour les malades Les pairs praticiens sont aussi définis comme des experts par expérience. «Je les vois Le saviez-vous? Les gauchers, des génies? Des pauvres, oui! comme des porteurs d’espoir, explique Esther Hartmann. Face à des malades qui sont parfois hospitalisés à plusieurs reprises, ils montrent qu’il est possible d’affronter la souffrance et de s’en sortir. Par leur vécu, ils peuvent aussi changer ou renouveler le regard des soignants.» Selon Pro Mente Sana, s’engager dans cette expérience correspond à un chemin de découverte de soi où l’on finit par pouvoir expliquer «comment on a fait pour se sentir bien. Ce qui demande de solliciter chez l’autre ses ressources pour qu’il trouve ses propres solutions.» Comme toute personne qui travaille sur la base des relations humaines, le pair praticien doit également savoir se protéger et conserver une certaine distance relationnelle avec la personne aidée. Ce qui peut sembler plus difficile que pour un médecin, par exemple. D’ailleurs, quel est le statut administratif de ces pairs praticiens? S’agit-il d’une vraie activité professionnelle? L’expérience est encore trop récente, «mais tout le défi, confirme Esther Hartmann, consiste à donner à leur présence une vraie légitimité au sein de l’équipe de soins». D’après les premiers retours, notamment des HUG à Genève qui ont engagé deux diplômés de la première volée, les personnes hospitalisées apprécient leur présence. «Je suis convaincue que cela correspond à un vrai besoin. La santé psychique reste un tabou quand l’on sait que 20% à 30% de la population est concernée.» Témoignage «Ma maladie avait enfin un sens» Photos: Véronique Bottéron Iannis McCluskey «tournait en rond à l’Université» lorsqu’il apprit l’existence de la formation de pair praticien. Certificat en poche à 26 ans, ce Neuchâtelois en parle comme d’un moment «qui a inversé mon rapport à ma maladie qui devenait enfin positive et qui pouvait aussi aider les autres». Déjà actif comme pair praticien en prison, ayant fondé une association de pairs qu’il préside, il s’apprête à travailler dans deux structures «ailleurs en Suisse romande». Pour ne pas se retrouver là où il était lui-même le patient. «Je vois mon rôle comme une aide de quelqu’un qui est passé par là, qui s’en est servi pour développer des outils thérapeutiques sans pour autant posséder de recette miracle.» Pas plus que les médecins, ajoute Iannis McCluskey avec une pointe d’animosité. MM Mais qu’est-ce qu’on va faire de Rafael Nadal, Barack Obama, Bill Clinton, David Bowie, Ludwig van Beethoven, Léonard de Vinci ou du prince William? Ils sont tous gauchers, des célébrités qui n’ont pas de problèmes d’argent. Et pourtant, ils contredisent tous la dernière étude réalisée sur les gauchers selon laquelle ceux-ci seraient en général de 10 à 12% moins bien rémunérés que les droitiers. L’enquête a été menée sur des statistiques des années 1958 à 1970 au Royaume-Uni et de 1979 à 1997 aux Etats-Unis par Joshua Goodman, professeur à Harvard. Selon lui, on retrouve parmi les gauchers plus de déficits de l’intelligence ou de troubles du comportement que la moyenne. Des jobs plus physiques qu’intellectuels. Du coup, des postes moins bien payés. Une différence de salaire d’autant plus nette que la mère est droitière! Quant à savoir ce qui fait qu’on est gaucher ou droitier, le mystère reste presque entier: les scientifiques avancent notamment une hypothèse génétique, mais aussi du stress durant la grossesse, la santé et le poids du bébé à la naissance ou le fait d’échanger des poignées de mains plus avec son père qu’avec sa mère durant la petite enfance… On peut aussi fabriquer des gauchers par ultrasons: la plupart des fœtus sont positionnés sur leur côté gauche dans le ventre de leur mère et explorent avec le côté droit. Trop d’échographies et le bébé se retourne sur sa droite. Et paf: gaucher! Isabelle Kottelat