LES QUESTIONS SOCIALEMENT VIVES, UN DEFI POUR L

publicité
VII Jornades Internacionals de Recerca en Didàctica de
les Ciències Socials
“Les Qüestions Socialment Vives i l'ensenyament de les Ciències Socials,
la Geografia i la Història"
LES QUESTIONS SOCIALEMENT VIVES, UN DEFI POUR L'HISTOIRE ET LA
GEOGRAPHIE SCOLAIRES ?
Nicole Tutiaux Guillon
Professeure des universités, sciences de l'éducation, didactique de l'histoire-géographie
universités Lille Nord de France, IUFM, université d'Artois, laboratoire Théodile-CIREL EA
3543, université Lille 3
Par définition les questions socialement vives (QSV) ne sont pas exclusivement des
questions scolaires : elles sont débattues dans la société, elles provoquent
controverses et émotions, prises de positions vives – alors que l'Ecole est le lieu de la
prise de distance avec l'opinion et même selon les enseignants de la neutralité. Les
savoirs en jeu dans ces débats sociaux ne sont pas, ou pas exclusivement, des
références savantes. Et d'ailleurs la façon même de poser ces questions et d'y
répondre ne fait pas consensus dans la communauté savante. Les QSV ne sont pas
non plus des questions circonscrites dans les domaines disciplinaires : le
développement durable par exemple est travaillé au moins par les sciences
expérimentales (biologie végétale, animale, humaine, géologie appliquée, physique et
chimie...), par les sciences sociales (économie, sociologie, géographie, histoire,
sciences politiques, ethnologie...), par la philosophie (en particulier l'épistémologie et
l'éthique). Or certaines disciplines sont absentes de l'Ecole, d'autres sont reconfigurées
dans des ensembles disciplinaires différents, et enfin les programmes scolaires ne
correspondent pas nécessairement aux cadres théoriques permettant d'aborder
sérieusement cette thématique. Les QSV, comme questions sociales et comme
questions scientifiques conduisent à des transpositions didactiques spécifiques. Ainsi à
la demande de mémoire socialement vive, l'Ecole française répond par des thèmes
d'histoire mis au programme. A la question débattue du développement durable répond
une prescription générale mais aussi un nouveau contenu de programmes qui en
réduit singulièrement l'approche.
Plus profondément les QSV interrogent le statut des savoirs disciplinaires, les
modalités d'enseignement mises en oeuvre, l'identité et la citoyenneté qu'il s'agit de
construire à l'Ecole. Les savoirs en jeu dans les QSV ne sont pas uniquement
scientifiques – par exemple en matière de mémoire – ne sont pas scientifiquement
stabilisés – par exemple sur le développement durable – ne sont pas objectivés,
refroidis. Les pratiques conseillées sont souvent différentes de celles en usage
ordinairement : recours à l'émotion, débats, prise en compte de l'avenir dans le travail
demandé aux élèves, pédagogie différente en tous cas du cours dialogué étayé de
documents qui est classique en France. Enfin le citoyen ici est celui qui peut faire des
choix dans l'incertitude, participer raisonnablement aux débats politiques, se construire
une identité plurielle et multisclaire... ce qui n'est pas la tradition disciplinaire telle
qu'elle s'est construite sur le 20e siècle.
C'est ainsi la conception même des disciplines qui en est potentiellement affectée. Les
enseignants réagissent de façon très diverse : résistance et réticence, travail aux
marges des enseignements disciplinaires, transformation des QSV en questions
scolaires classiques – et apparemment rarement prise en charge de celles-ci dans leur
complexité. Des enquêtes permettent de nourrir ce constat de données empiriques sur
des exemples en histoire (shoah, histoire coloniale) et en géographie (développement
durable). Il est intéressant de noter que nous ne disposons actuellement que de très
peu d'indications sur les apprentissages qui résulteraient d'un travail sur les QSV en
histoire ou en géographie.
Téléchargement