FCC 3 - Chirurgie

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SOMMAIRE
Organisateur :
J.-L. FAUCHERON (Grenoble)
Modérateurs :
J.-L. FAUCHERON (Grenoble)
L. SIPROUDHIS (Rennes)
1. L’HEMORROÏDECTOMIE PAR THERMOFUSION
B. VINSON BONNET (Poissy)
2. L’HEMORROÏDOPEXIE DE LONGO
J.-L. FAUCHERON (Grenoble)
3. LE HAL DOPPLER AVEC MUCOPEXIE
Y. GANGNER (Niort)
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
HEMORROIDECTOMIE PAR THERMOFUSION
B. Vinson Bonnet (Poissy)
Service de chirurgie viscérale, CHI Poissy-St Germain en Laye - [email protected]
L’hémorroïdectomie décrite par Milligan et Morgan est pratiquée depuis 1937 ; c’est
l’intervention validée pour le traitement de la maladie hémorroïdaire en termes d’efficacité
immédiate et à long terme. L’inconvénient majeur de cette intervention est l’inconfort per et
postopératoire. Le geste peut être techniquement difficile quand le prolapsus est volumineux,
les suites postopératoires sont douloureuses et la cicatrisation peut être longue.
L’hémorroïdectomie par thermofusion, mise au point depuis 2001 est une évolution
technique dont le but est d’améliorer ces problèmes.
La thermofusion (Ligasure™) utilise l’énergie de la radiofréquence pour obtenir la fusion du
collagène et de l’élastine des tissus et permet ainsi l’oblitération des lumières vasculaires. La
diffusion thermique sur les tissus adjacents est très faible, ce qui diminuerait l’œdème et la
douleur. Son efficacité hémostatique est équivalente à celle d’une ligature manuelle ou d’une
hémostase par clip.
L’instrumentation nécessite un générateur électrochirurgical et une pièce à main (pince
Ligasure hémorroïdes) qui permet la fusion et la section du tissu avec un seul instrument.
Comme dans l’hémorroïdectomie conventionnelle, la thermofusion a pour objectif l’excision
du pédicule hémorroïdaire interne et externe de façon triangulaire et de faire l’hémostase du
pédicule
artériel,
tout
en
respectant
des
ponts
cutanéo-muqueux
intermédiaires
suffisamment larges. Il ne faut pas utiliser le Ligasure pour la découpe cutanée car la
cicatrice cutanée devient fibreuse et comporte un risque de sténose secondaire. Il est
important d’utiliser l’extrémité mousse des mors de la pince pour disséquer le ligament de
Parks et exposer le sphincter interne avant d’appliquer la thermofusion. Il est également
conseillé de réaliser une double thermofusion au niveau du pédicule artériel hémorroïdaire.
La thermofusion permet une dissection exsangue avec un seul et même instrument ce qui
diminue la durée de l’intervention de façon significative dans toutes les études. La réduction
du saignement en peropératoire a pour implication une plus grande facilité du geste
opératoire, et elle n’a pas de conséquence générale.
Le confort postopératoire est amélioré dans la plupart des études qui comparent la
thermofusion à l’hémorroïdectomie conventionnelle. Ce résultat est étayé par 4 métaanalyses qui montrent que la douleur postopératoire des 24 premières heures est moindre.
En revanche, il n’y a pas de différence significative pour la douleur lors de la première selle.
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
Il n’y a pas de différence avec la technique classique concernant le risque de saignement
postopératoire et de rétention d’urines. En ce qui concerne la durée d’hospitalisation, les
méta-analyses ne montrent pas de différence mais la durée d’hospitalisation dépend souvent
de paramètres autres que la qualité du geste chirurgical et notamment de modalités
organisationnelles. Les résultats sont discordants en termes de délai de cicatrisation (deux
études positives et deux études négatives à l’heure actuelle). Le risque de sténose
cicatricielle a été décrit au début de la technique, du fait de son utilisation pour la dissection
du plan cutané, ce qui n’est pas recommandé.
Une seule étude a évalué les patients sur une période supérieure de deux ans : elle a
objectivé un risque de récidive de 3% chez 666 patients consécutifs, équivalent à celui de
l’hémorroïdectomie conventionnelle.
En conclusion, l’avantage de la thermofusion est la simplification du geste opératoire, ce qui
pourrait permettre d’augmenter les cohortes de patients opérés sur une même plage
opératoire. L’amélioration du confort postopératoire immédiat facilite la prise en charge
ambulatoire de l’hémorroïdectomie conventionnelle. Ces avantages sont à mettre en balance
avec le surcoût de l’instrumentation (> 300 euros pour la pince).
Références
1. Mastakov MY, Buettner PG, Ho YH. Updated meta-analysis of randomized controlled trials
comparing conventional excisional haemorrhoidectomy with LigaSure for haemorrhoids.
Tech Coloproctol 2008;12:229-39
2. Nienhuijs SW, de Hingh IH. Pain after conventional versus Ligasure haemorrhoidectomy.
A meta-analysis. Int J Surg 2010;8:269-73
3. Chen CW, Lai CW, Chang YJ, Chen CM, Hsiao KH. Results of 666 consecutive patients
treated with Ligasure hemorrhoidectomy for symptomatic prolapsed hemorrhoids with a
minimum follow-up of 2 years. Surgery 2013;153:211-8
4. Franceschilli L, Stolfi VM, D' Ugo S, Angelucci GP, Lazzaro S, Picone E, Gaspari A, Sileri
P. Radiofrequency versus conventional diathermy Milligan-Morgan hemorrhoidectomy: a
prospective, randomized study. Int J Colorectal Dis 2011;26:1345-50
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
HEMORROIDOPEXIE DE LONGO
J.-L. Faucheron (Grenoble)
Unité de Chirurgie Colorectale, CHU de Grenoble - [email protected]
L’hémorroïdopexie, décrite pour la première fois par Antonio Longo en 1998, fait maintenant
partie des techniques de traitement de la maladie hémorroïdaire de stade 2 et 3. Elle est
reconnue comme une alternative à l’hémorroïdectomie conventionnelle du fait d’une
réduction des douleurs et d’un retour plus précoce à une activité normale. La réalisation du
geste chirurgical doit cependant suivre une technique rigoureuse, car des complications
exceptionnelles mais parfois graves peuvent survenir à court ou long terme.
La méthode consiste à réséquer une collerette circulaire de muqueuse du bas rectum
immédiatement au-dessus de la ligne pectinée, c’est-à-dire au sommet des hémorroïdes
internes, avec une pince agrafeuse mécanique qui assure dans le même temps que la
résection une suture muqueuse par agrafage circulaire.
Pour nous, cette opération est toujours réalisée sous anesthésie générale et bloc pudendal
associé, le plus souvent en ambulatoire. L’intervention débute par une dilatation douce du
canal anal. L’écarteur cylindrique transparent du kit est introduit et fixé à la marge anale. Cet
écarteur permet de réaliser les gestes endoluminaux dans de bonnes conditions
d’exposition, et de protéger la ligne pectinée lors de l’agrafage. Une bourse de polypropylène
2/0 est réalisée à environ 3 cm au-dessus de la ligne pectinée, en veillant à bien rester
parallèle à elle, et à ne pas « mordre » trop profondément dans la paroi, au risque de réaliser
une véritable résection rectale totale. L’agrafeuse dont l’enclume est largement ouverte est
alors introduite dans le bas rectum et les deux chefs de la bourse sont passés dans les
orifices prévus à cet effet de manière à la serrer autour de l’axe de l’agrafeuse. La pince est
alors vissée à fond de manière à inclure le cylindre de muqueuse à réséquer dans sa
chambre. Chez la femme, un toucher vaginal systématique permet de s’assurer que la paroi
postérieure du vagin n’est pas incluse dans le mors de la pince. L’agrafage est alors réalisé.
A l’ablation de la pince, la rangée d’agrafes doit se trouver à environ un centimètre de la
ligne pectinée : l’exploration soigneuse de la ligne d’agrafage permet d’assurer une
hémostase parfaite à l’aide de fil de polypropylène 3/0. L’électrocoagulation doit être
découragée, au risque de voir survenir une chute d’escarre, ou des lésions d’ischémie. Si la
technique est conçue pour une résection muqueuse, les études montrent qu’il existe
pratiquement toujours quelques fibres musculaires dans la pièce opératoire.
Les suites opératoires sont marquées par une douleur post opératoire précoce moins
importante que pour l’hémorroïdectomie pédiculaire conventionnelle, ce qui en a d’ailleurs
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
fait rapidement son succès. La durée de séjour à l’hôpital et l’arrêt de travail sont également
plus courts qu’en cas de chirurgie d’exérèse pédiculaire classique.
Cette méthode a fait l’objet d’une évaluation scientifique rigoureuse et d’excellente qualité à
court, moyen et long terme. De nombreuses études prospectives randomisées entre
hémorroïdectomie et hémorroïdopexie vont pratiquement toutes dans le même sens d’une
meilleure tolérance et de l’innocuité de l’opération de Longo sur celle de Milligan et Morgan.
Un STIC multicentrique français de comparaison prospective entre l’hémorroïdopexie et le
HAL Doppler avec mucopexie vient de se terminer sous la coordination de Paul-Antoine
Lehur, dont nous ne disposons pas encore des résultats.
Si le taux de complications immédiates et tardives est globalement comparable à celui de
l’hémorroïdectomie, il existe des complications spécifiques exceptionnelles mais sévères
(perforations rectales, sténoses, douleurs, hématomes périrectaux). Le risque de séquelles à
long terme est comparable à l’hémorroïdectomie classique (impériosité et incontinence). Les
malades doivent être informés de ces risques avant le geste et il est fortement recommandé
de leur remettre une feuille d’information concernant cette méthode (www.snfcp.org).
Enfin, le risque de récidive du prolapsus hémorroïdaire après un an de suivi est environ 3
fois plus important qu’avec une méthode de résection hémorroïdaire pédiculaire classique,
mais près de 90% des patients sont globalement satisfaits de la prise en charge. Soulignons
que le diagnostic de récidive d’une maladie hémorroïdaire est toujours difficile à faire : à
partir de quelle fréquence de saignement résiduel, de quelle gêne anale, de quelle taille de
tuméfaction anale faut-il retenir le diagnostic de récidive ? Et comment considérer une
séquelle de traitement de la maladie hémorroïdaire donnant des signes tels que douleurs,
saignements à la selle, suintements, marisque ? Thaha et collaborateurs ont publié en 2009
dans Gut les résultats d’une série prospective randomisée de 182 patients opérés pour
maladie hémorroïdaire selon les techniques d’hémorroïdopexie ou d’hémorroïdectomie à
foyer fermé : les taux de symptômes résiduels à 1 an étaient respectivement de 79% et 77%,
malgré la grande satisfaction des patients !
En conclusion, l’hémorroïdopexie a une place dans le traitement chirurgical de la maladie
hémorroïdaire de stades 2 et 3 : elle donne des résultats précoces, notamment sur la
douleur, meilleurs que l’hémorroïdectomie conventionnelle, au prix d’un taux plus élevé de
récidives. La place de ces deux techniques face à la ligature des artères rectales basses
sous contrôle doppler avec mucopexie à la demande reste encore à définir, d’autant
qu’aucune complication grave n’a encore été décrite avec cette dernière technique.
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
Références
1. Tjandra JJ, Chan MKY. Systematic review on the procedure for prolapse and hemorrhoids
(stapled hemorrhoidopexy). Dis Colon Rectum 2007;50:878-892
2. Jayaraman S, Colquhoun PH, Malthaner RA. Stapled hemorrhoidopexy is associated with
a higher long-term recurrence rate of internal hemorrhoids compared with conventional
excisional hemorrhoidal surgery. Dis Colon Rectum 2007;50:1297-1305 (Cochrane Database
Syst Review)
3. Laughlan K, Jayne DG, Jackson D, Rupprecht F, Ribaric G. Stapled haemorrhoidopexy
compared to Milligan-Morgan and Ferguson haemorrhoidectomy: a systematic review. Int J
Colorectal Dis 2009;24:335-344
4. Shao WJ, Li GCH, Zhang ZHK, Yang BL, Sun GD, Chen YQ. Systematic review and
meta-analysis of randomized controlled trials comparing stapled haemorrhoidopexy with
conventional haemorrhoidectomy. Br J Surg 2008;95:147-160
5. Faucheron JL, Voirin D, Abba J. Rectal perforation with life-threatening peritonitis following
stapled haemorrhoidopexy. Br J Surg 2012;99:746-53
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
LE HAL DOPPLER AVEC MUCOPEXIE
Y. Gangner (Niort)
Service de chirurgie digestive, CHG Niort - [email protected]
Le traitement de la maladie hémorroïdaire comporte des techniques instrumentales et des
techniques chirurgicales (hémorroïdectomie et hémorroïdopexie). En 1995, un auteur
japonais a proposé une nouvelle technique de traitement de la maladie de stade 2
(prolapsus de réintégration spontanée) ou 3 (prolapsus de réintégration digitale), basée sur
l’identification par doppler des artères périrectales basses suivie de leur ligature, par
l’intermédiaire d’un rectoscope fenêtré spécifique. Plus tard est apparue une modification
supplémentaire, permettant de traiter les patients à des stades plus évolués, en ajoutant aux
ligatures une mucopexie verticale le long des principaux paquets.
La physiopathologie de la maladie hémorroïdaire repose sur une théorie vasculaire
(ouverture de shunts artérioveineux) et sur une théorie mécanique (distension du tissu de
soutien). L’hémorroïdectomie répond à la première, l’hémorroïdopexie à la deuxième. La
technique de HAL (Hemorrhoidal Artery Ligation) - RAR (Recto-Anal Repair) s’attache à
traiter les deux composantes vasculaire (par ligature des artères nourricières) et mécanique
(par mucopexie des paquets prolabés).
La technique s’est d’abord répandue au Japon, en Allemagne, en Autriche, en Russie, en
Italie, en Espagne, en Australie et en Angleterre, avant d’apparaître et se développer en
France.
Le patient est opéré en position d’abord périnéal, sous anesthésie générale ou sous
anesthésie locorégionale, voire locale. La plupart du temps, le geste est réalisé en
ambulatoire, après préparation rectale par simple lavement.
Le matériel (il en existe plusieurs types) pour HAL avec mucopexie comporte un rectoscope
transparent à usage unique muni près de son extrémité d’une fenêtre centimétrique à travers
laquelle seront réalisées les ligatures par points en x de fil lentement résorbable 2/0. Il
contient une source de lumière facilitant l’exposition de la face interne du rectum et un
transducteur doppler solidarisé au socle du rectoscope contenant le système doppler
proprement dit. L’ensemble est connecté à un générateur qui transmettra les bruits du
doppler au chirurgien. Une imprimante sur le générateur permet de cartographier les
ligatures et de noter la profondeur des artères liées. Le reste du matériel comporte un porteaiguille, un pousse nœuds, des ciseaux et une pince à disséquer pour tamponner le champ
opératoire
si besoin. L’intervention dure environ 30
minutes.
Deux explorations
circonférentielles sont réalisées au niveau du bas rectum, à environ 25 et 40 mm au dessus
de la ligne pectinée. Les patients sous traitement anticoagulant ou antiplaquettaire peuvent
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
être opérés selon cette technique, puisqu’il n’y a pas de plaie. Pour la mucopexie, il suffit de
réaliser un surjet vertical de même fil dans le bas rectum, au dessus du paquet que
l’opérateur se propose de traiter, en ancrant véritablement le point supérieur dans la
musculeuse, tandis que les passages sous-jacents se font dans la sous-muqueuse. Il est
ainsi possible de faire une ou plusieurs mucopexies en fonction des découvertes opératoires.
Le patient sort le jour même avec du paracétamol à la demande, sans soins particuliers à
domicile.
Dans la littérature, la technique de HAL doppler avec mucopexie est proposée dans le
traitement des maladies hémorroïdaires de stade 2 et 3. Certains stades 4 localisés peuvent
également être traités de la sorte. Le nombre moyen de ligatures par patient est aux
alentours de 8 (5–16). Le taux de morbidité varie de 5% à 15% selon les séries et les
complications publiées sont toujours minimes (douleurs le plus souvent estimées à moins de
4/10 sur EVA, saignements sans réintervention ni transfusion, thrombose hémorroïdaire,
fissure anale et dyschésie temporaire). L’arrêt de travail est nul ou de quelques jours.
Le taux de récidive à long terme représente la grande question pour l’instant sans réponse,
s’agissant d’une technique nouvelle. La littérature fait état de taux de récidive de 12 à 22% à
3 ans, selon les équipes.
En conclusion, la technique de HAL doppler avec mucopexie semble avoir une place dans le
traitement de la maladie hémorroïdaire, en raison d’une efficacité reconnue et d’une
innocuité largement démontrée. Plusieurs questions se posent encore : quel est le taux de
récidive à 10 ans ? Des ligatures aveugles sans contrôle doppler donnent-elles les mêmes
résultats ? Quelles sont les indications respectives des trois techniques disponibles dans la
prise en charge de la maladie hémorroïdaire ?
Références
1. Faucheron JL, Gangner Y. Point technique : ligature des artères hémorroïdales sous
contrôle doppler. J Chir 2007;144:532-5
2. Faucheron J-L, Gangner Y. Doppler-guided hemorrhoidal artery ligation for the treatment
of symptomatic hemorrhoids: early and three year follow-up results in 100 consecutive
patients. Dis Colon Rectum 2008;51:945-9
3. de Parades V, Faucheron JL. La ligature des artères hémorroïdaires sous contrôle doppler
: la nouvelle donne de la chirurgie hémorroïdaire. Gastroenterol Clin Biol 2008;32:660-3
4. Faucheron JL, Poncet G, Voirin D, Badic B, Gangner Y. Doppler-Guided Hemorrhoidal
Artery Ligation and Recto Anal Repair (HAL-RAR) for the treatment of fourth degree
hemorrhoids – Long term results in 100 consecutive patients. Dis Colon Rectum
2011;54:226-31
FCC 3 – Place des différentes techniques opératoires dans la maladie
hémorroïdaire
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