47
Correspondances en médecine - n° 2, vol. III - avril/mai/juin 2002
“Autre (remède), pour faire guérir l’anus quand il
est douloureux : moelle épinière de taureau : 1 ;
partie-soug de la graisse sèche : 1 ; lie de vin.
(Ce) sera mis sous la forme d’un suppositoire
pour l’homme et pour la femme.”
(Papyrus Ebers : Eb. 162 (33, 13-15).
In : Bardinet T. Les papyrus médicaux de l’Égypte
pharaonique. Paris : Fayard, 1995 : 272)
Structures anatomiques normales, les
hémorroïdes sont connues de longue date
et leur pathologie représente un motif fré-
quent de consultation. Pourtant, de nom-
breuses incertitudes demeurent concernant
leur physiopathologie, leur histoire natu-
relle et, de fait, leur traitement. Cela étant
dit, la littérature des quinze dernières
années a permis de préciser la place des
principales thérapeutiques.
La pathologie hémorroïdaire interne
Elle se manifeste par des saignements
et/ou un prolapsus déclenché(s) par les
selles. L’existence de douleurs doit faire
rechercher une fissure associée. La straté-
gie thérapeutique repose sur les traite-
ments médico-instrumentaux, le plus sou-
vent suspensifs, et le traitement chirurgical,
radical et définitif.
Le traitement médical
vise essentiellement à
régulariser le transit par un régime enrichi
en fibres alimentaires et des laxatifs.
L’efficacité des topiques (suppositoires,
pommades, crèmes), scientifiquement peu
documentée, est probablement liée à leur
effet lubrifiant facilitant l’évacuation des
selles. Les veinotoniques ont fait l’objet de
bien peu d’études rigoureuses et leur
apport est souvent modeste.
En pratique, le traitement médical est en
général envisagé en première intention. Il
est en effet bien toléré et suffit souvent à
faire cesser les saignements. Cependant, la
récidive est fréquente après l’arrêt.
Les traitements instrumentaux
sont réalisés
au cabinet médical, en ambulatoire, sans
préparation préalable. Ils détruisent le tissu
hémorroïdaire par un effet chimique (injec-
tion sclérosante), thermique (photocoagu-
lation infrarouge, congélation ou électro-
coagulation) ou mécanique (ligature
élastique) et laissent une cicatrice fibreuse,
adhérante au plan profond, qui fixe la
muqueuse à l’intérieur du canal anal. En
France, on utilise surtout la sclérose, les
infrarouges et la ligature. Une à quatre
séances, espacées de 7 à 28 jours selon la
technique, sont en général nécessaires.
En pratique, les traitements instrumentaux
sont en général proposés après échec du
traitement médical. Ils s’avèrent efficaces
chez 70 à 90 % des patients. Cependant,
leur effet bénéfique se détériorerait dans un
cas sur deux en cinq à dix ans, amenant à
les répéter ou à envisager la chirurgie. En
outre, les possibles complications (douleur,
malaise vagal, hémorragie, infection, etc.)
incitent à peser leur indication dans les
situations à risque (sujet immuno-déprimé,
troubles de l’hémostase et/ou de la coagu-
lation, etc.).
Le traitement chirurgical consiste en une
hémorroïdectomie tripédiculaire
dont les
diverses variantes ont des résultats équiva-
lents. Son but est de réséquer l’essentiel du
tissu hémorroïdaire et de réduire sa vascu-
larisation par la ligature des trois pédicules
artériels principaux. Le geste est réalisé au
bloc opératoire, sous anesthésie générale
ou locorégionale, avec une antibioprophy-
laxie systématique. Les suites sont difficiles
en raison des douleurs et des soins locaux
qui sont primordiaux pour assurer la cicatri-
sation. Ces contraintes impliquent en géné-
ral une hospitalisation de trois à cinq jours
et un arrêt de travail d’une à trois semaines.
En pratique, la chirurgie est envisagée en
dernier recours et serait nécessaire chez
10 % des patients. Les indications sont les
échecs ou les contre-indications du traite-
ment médico-instrumental, le prolapsus
Hémorroïdes : traitements,
complications, récidives...
primum non nocere
Questions de consultation
sur le vif