
3
Pour Skevos Papaioannou, professeur de sociologie grec, l’ESS offre des outils pour affronter de nouvelles réalités : « On
parle de crise comme si, grâce aux solutions libérales qu’on nous promeut, nous allions revenir aux jours heureux d’avant.
C’est une illusion. Pour affronter cette crise devenue permanente, les solutions à trouver doivent être radicalement
différentes. L’économie sociale et solidaire offre des alternatives concrètes à explorer face à l’économie de marché qui nous
maintient dans cette situation. »
Le Mardi 2 Février 2016 – S. Guérard - http://www.humanite.fr
Annexe 4 - LDD solidaire : « Il faut que ce soit un choix délibéré de l’épargnant »
François Hollande a indiqué qu'une partie de l'épargne déposée sur les Livrets de développement durable
(LDD) serait prochainement affectée au financement d'entreprises solidaires. La directrice de l'association
Finansol Sophie des Mazery nous explique l'impact d'une telle annonce sur la finance solidaire.
Toutsurmesfinances.com : François Hollande a promis le 12 janvier « une affectation du Livret de
développement durable (LDD), notamment du côté des banques, au financement de l'économie sociale et
solidaire ». Cette annonce vous a-t-elle surprise à Finansol ?
Sophie des Mazery, directrice de l'association Finansol : Cela fait 3 ans que Finansol travaille à l'émergence d'un LDD
solidaire, nous avons porté ce projet auprès de tous les décideurs politiques jusqu'au ministère des Finances à Bercy. Ce
travail de plaidoyer, nous l'effectuons de façon soutenue depuis toutes ces années. Par ailleurs, un certain nombre de ces
décideurs s'étaient montrés intéressés par ce projet, nous savions que le sujet n'était pas enterré.
Pour vous, comment se traduira dans les faits cette annonce ?
Le discours du président de la République ne permet pas de savoir précisément en quoi consistera le projet. Celui que nous,
nous portons, c'est que l'épargnant ait la possibilité lorsqu'il va souscrire un LDD de choisir une option solidaire. A savoir,
qu'il peut soit prendre un LDD « classique » soit cocher une case qui implique que 5 à 10% des sommes déposées sur le
livret puissent financer des entreprises solidaires. On retrouve ce projet en filagrane dans ce qu'a dit François Hollande
puisqu'il parle de la partie décentralisée de l'épargne règlementée, en évoquant « du côté des banques ».
« L'épargne solidaire, c'est reprendre la responsabilité sur son argent »
Pouvez-vous expliquer ce que signifie l'expression « du côté des banques » ?
Je la comprends de la façon suivante : les dépôts effectués sur les livrets réglementés sont en partie (65%) centralisés à la
Caisses des dépôts et consignations (CDC), quand l'autre partie (35%) reste dans le bilan des banques, avec cet objectif de
financer du développement durable.
C'est donc avec la partie décentralisée des dépôts que les réseaux bancaires vont financer des entreprises de l'économie
sociale et solidaire (ESS). La démarche est vertueuse puisque concrètement, les épargnants vont déposer leurs économies
sur un LDD solidaire et la banque aura ensuite l'obligation d'affecter une partie de ces dépôts au financement d'entreprises
solidaires. C'était l'un de nos objectifs, que les entreprises solidaires bénéficient d'une ressource supplémentaire au travers
de financements en provenance des banques.
Comment à votre avis cela va-t-il se passer : le choix d'épargner solidaire sera-t-il laissé à l'épargnant ou une partie des
dépôts sera-t-elle directement affectée à l'économie sociale et solidaire ?
Nous militons pour cette première solution. Il faut que ce soit un choix délibéré de l'épargnant car l'épargne solidaire c'est
ça, c'est reprendre la responsabilité sur son argent en choisissant l'affectation qui va en être faite par l'établissement
financier qui gère les produits d'épargne que l'on a souscrits. Je pense qu'il est plus judicieux que ce produit solidaire soit
choisi en toute conscience plutôt que ce soit un fléchage qui échappe à l'épargnant. L'intérêt est moindre s'il s'agit
d'épargner solidaire sans le savoir.
Pour quoi le LDD et non le Livret A par exemple ?
Il me semble que le livret d'épargne qui est le plus légitime pour porter une option solidaire est le LDD, qui initialement
avait pour but de financer les investissements de développement durable des entreprises, un objectif plus ou moins rempli.
Redonner demain son véritable objectif à ce livret en faisant en sorte qu'une partie des dépôts réalisés par les épargnants
aillent financer des entreprises solidaires, il me semble que c'est une bonne chose.
« C'est une véritable vitrine pour démocratiser la finance solidaire »
Le fait que le LDD devienne solidaire, en quoi cela va-t-il aider la finance solidaire ?
François Hollande l'a rappelé, il y a 60 millions de livrets réglementés ouverts aujourd'hui ; on voit bien que c'est le produit
le plus facilement accessible et compréhensible à tout épargnant. Le fait qu'il y ait un LDD solidaire au guichet de toutes les
banques, c'est une grande promotion. Nous pensons à Finansol que si cette vitrine est effective dans les banques, elle va
mobiliser un certain nombre d'épargnants et permettre une démocratisation de l'épargne solidaire.
Pensez-vous qu'avec un tel geste, le 1% solidaire se rapproche ?
Incontestablement ! Aujourd'hui, 100 milliards d'euros sont en dépôt sur des LDD. A terme, on va évidemment faire un
bond d'encours d'épargne solidaire et donc se rapprocher du 1% solidaire.
Alors même que les taux de rendement des livrets bancaires sont au plus bas et que la décollecte augmente au fil des
mois ?
Je pense que la transformation du LDD en un produit solidaire est un projet de long terme. Effectivement, les taux bas ne
constituent pas les éléments les plus positifs pour booster la collecte. Ceci dit quand on regarde la collecte des livrets
d'épargne de partage, dont le taux est aligné sur celui des livrets réglementés, on voit que la collecte ne diminue pas. Au
contraire, 10.000 souscripteurs sont venus s'ajouter en 2014 alors que les taux étaient déjà très bas. Nous ne sommes pas
inquiets lorsque nous voyons l'évolution des livrets de partage, qui se portent très bien.